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Elisabeth Monteiro Rodrigues (Traducteur)
EAN : 9782915540765
173 pages
Editions Chandeigne (25/09/2010)
3.65/5   10 notes
Résumé :

De vibrants portraits de femmes aux prises avec leurs désirs, leurs amours déçues et leurs blessures assassines, des êtres qui réinventent le réel, des enfants qui revisitent leurs rêves : telles sont les perles de verre (missangas) qui composent cette œuvre où Mia Couto invente un univers singulier et un langage unique, africain et universel. Mêlant harmonieusement registres littéraires et populaires... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
La missanga, toutes la voient.
Nul ne remarque le fil qui,

en un collier voyant, assemble les missangas.
Ainsi est la voix du poète :
un fil de silence recousant le temps. (Epigraphe)

Mia Couto saisit une à une, pour les ramener à la lumière, les perles ternies, cachées que sont devenues la plupart des êtres et plus particulièrement les femmes de ses 29 petits textes. «La vie est un collier. Je donne le fil, les femmes donnent les missangas. Elles sont toujours nombreuses les missangas» p76
En retrouvant leurs couleurs sous le regard, l'attention qu'il leur porte, elles redeviennent passagèrement irisées pour former le plus chatoyant des colliers.
Comme «l'accordeur de silence» de son dernier roman fait remonter les voix qui l'habitent, Mia Couto rend pour un temps à ces êtres blessés, leur vrai visage, leur beau visage perdu, celui d'avant, celui de l'enfance, celui qui n'est plus regardé. Il le fait monter au jour et leur tend un miroir. Mais alors, elles ou ils ne pourront plus être comme «avant» et la chute de chacun de ces micro-textes, très imagés et colorés comme les missangas, est souvent surprenante et rocambolesque et retourne carrément les situations.
L'obéissance au père, au mari, font disparaître les filles et les mères derrière un homme. Elles espèrent toujours que la vie va revenir les chercher car leur coeur reste enfantin plein de rêves, il «s'obstine encore» mais l'enveloppe est fanée, le temps a passé.
Ainsi en est-il dans «La jupe coeurchiffonnée» : Dans mon village, le seul village du monde, les femmes rêvaient de robes neuves pour sortir. Pour être embrassées par le bonheur. (...) Je suis née pour la cuisine, le chiffon et les larmes. On m'a enseigné tellement de honte à éprouver du plaisir que j'ai fini par éprouver du plaisir à avoir honte.
«La tisseuse infinie», elle, est une araignée mais pas n'importe quelle araignée, une araignée artiste qui ne fait pas remplir à ses toiles les «fatales fonctions : drap de noces, piège de chasseur.» «Et jour et nuit, de ses palpes triomphaient des oeuvres, beautés de bruine ruisselante, broderies et dentelles. le tout sans fin ni finalité.» Sa famille en est toute désappointée et là encore la chute ne se laisse pas prévoir.
«Le mendiant Vendredi jouant au mondial», vieux et seul reconnaît devant son docteur qu'il invente ses maladies parce que «Etre malade est ma seule façon de prouver que je suis vivant». Et il a cette réflexion inoubliable «Ce que j'envie, docteur, c'est le moment où le joueur tombe par terre, se met en boule et roule en étalant bien haut ses douleurs. Sa douleur arrête le monde. Un monde rempli de véritables douleurs s'arrête devant la fausse douleur d'un footballeur»
Tous les textes de ce petit volume ont la même saveur et le monde créé par Mia Couto, s'il est poignant, n'est pourtant pas complètement désespérant.
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Si un jour le Mozambique adoptait l'anglais comme langue officielle à la place du portugais comme il en est question en ce moment, je ne crois pas que l'écrivain Mia Couto ferait partie de ceux qui adopteraient celle-ci au détriment de sa langue maternelle qu'il a réinventée de si belle façon qu'il a créé une langue bien à lui faite de mots inventés à partir du portugais. Cela s'ajoute à ses talents de conteur que j'ai eu un bonheur fou à découvrir au fil de Chronique des jours de cendre, de Tombe, tombe, au fond de l'eau, de Terre somnambule et des Baleines de Quissico.

Le fil des missangas, son plus récent titre paru en français, réunit des nouvelles qui mettent en scène des personnages qui tentent tous de s'échapper du réel à leur manière, parce que vivre est trop difficile, vivre fait trop mal. Souvent. Surtout pour les femmes, les miséreux, les mal partis. Parfois, rêver (leur) suffit. Mais pas toujours. Pour ceux-là, il faudra agir, poser parfois le geste irréparable pour voir enfin la lumière.

Le fil des missangas, c'est une galerie de personnages avec lesquels nous faisons connaissance le temps d'un épisode déterminant, le temps d'une nouvelle brève. Notamment, L'enfant qui écrivait des vers, un des plus beaux personnages de ce recueil inoubliable, qu'on veut faire soigner parce qu'il n'est pas normal d'écrire des vers quand on est issu d'un milieu non intellectuel.

Le fil des missangas, un recueil tel un collier fait de ces perles de verre appelées missangas qu'on enfile patiemment, et dont vous pouvez lire les premières pages ici.
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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29 nouvelles pour tisser la toile serrée du plus grand écrivain mozambicain contemporain...

Recommandé par nos amies libraires de la Belle Lurette, offert par une amie inspirée, ce recueil de nouvelles de Mia Couto, souvent considéré comme le plus grand écrivain mozambicain contemporain, a été publié en 2004. On y retrouve la langue bien particulière, un portugais très spécifique et inventif, traduite par Elisabeth Monteiro Rodrigues, langue qui fit la réputation de Couto dès son premier roman, « Terrre somnambule » (1992).

« Lorsqu'on vint m'appeler, je n'y crus même pas : « C'est Zuzézinho ! Il tombe de l'immeuble ». Et les gens, autour, se promptifiaient vers l'événement. Je me joignis aux ruées, la question titubante : l'homme était tombant ? Ce gérondif désobéissait aux graves lois de la gravité : qui tombe est déjà tombé. Tandis que je courais, mon coeur se serrait. J'entrevoyais mon vieil ami étalé sur le trottoir. Qu'était-il arrivé pour qu'il se suicidât, désabîmé ? Ça pouvait être tout : les temps d'aujourd'hui sont de la javel délavant les merveilles. » (« L'homme filant »).

Vingt-neuf nouvelles, tranches de vie ancrées dans le quotidien basculant brutalement dans l'extraordinaire, fables fantastiques, contes oniriques, pour chanter la dureté des temps, l'inépuisable ressource de l'humour et de l'adaptation, et souvent, la nécessité de la révolte, aussi distanciée soit-elle. Un écrivain à retrouver rapidement. Et il est exact que cette langue est magique...
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Des portraits de personnages souvent forts, telles ces femmes qui parfois disjonctent et finissent par tuer leur mari ivrogne et/ou violent (dans Faute avouée à demi pardonnée ou les yeux des morts), la télévision rêvée (le mendiant vendredi jouant au football, qui regarde le match depuis la rue dans la vitrine d'un magasin et est matraqué à mort par la police, ou enterrement télévisé, où la veuve a fait mettre la télévision en morceaux dans le cercueil et l'antenne sur la tombe), la colonisation et ses séquelles (à travers notamment le club des chemins de fer qui revient dans plusieurs nouvelles ou le nouveau prêtre), la différence (l'enfant qui écrivait des vers) ou encore la mère qui met au monde un enfant pour sa fille qui n'arrive pas à en avoir (Maria Pedra à la croisée des chemins).

De petites nouvelles à enfiler comme les missangas (les perles de verre), des nouvelles très courtes, quelques pages chacune, dans un style fleuri, certainement ben rendu par la traductrice. À lire si vous le trouvez!
Lien : http://vdujardin.over-blog.c..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
"Les mâles larmoyants"
Aujourd'hui celui qui passe par le bar de Matakuane peut le certifier : pleurer c'est ouvrir son coeur. Les pleurs sont la concrétisation de deux voyages : de la larme vers la lumière et de l'homme vers une plus grande humanité. Finalement, ne vient-on pas à la lumière en pleurs ? Les pleurs ne sont-ils pas notre première voix ?
Et c'est ce que Kapa-Kapa prêche, par d'autres mots : la solution du monde est que notre être nous déborde. Et la larme nous rappelle : nous, plus que tout, ne sommes-nous pas faits d'eau ?
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"Cette nuit-là"
Mariazinha attend la visite annuelle de Sidonio Vidas, son épisodique époux. Le voilà maintenant, en pompeuse apparition, loué soit-il ainsi que sa vaniteuse voiture. Il n'est jamais autant arrivé. Il se comportait comme la pluie avec les fontaines sèches : il inondait après l'absence
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FAUTE AVOUÉE À MOITIÉ PARDONNÉE


Je n'ai jamais voulu. Ni prou, ni partie. Je n'ai jamais
été moi, ni dona, ni dame. Je suis toujours restée
entre le milieu et la moitié. Je n'ai jamais dépassé les
mi-chemins, les mi-désirs, la mi-saudade. D'où mon
nom : Maria Metade, Marie-Moitié.

p.5
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Vers figurant en introduction au livre


La missanga, toutes la voient.

Nul ne remarque le fil qui,
en un collier voyant, assemble les missangas.

Ainsi est la voix du poète :
un fil de science recousant le temps.

p.4
missangas : perles de verre



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Videos de Mia Couto (15) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Mia Couto
Dimanche 2 octobre 2022 Clôture du FIG 2022 et annonces du FIG 2023 avec François-Xavier FAUVELLE, président 2022, Merieme CHADID, grand témoin 2022, Mia COUTO, président du Salon du Livre 2022, Bruno TOUSSAINT, maire de Saint-Dié-des-Vosges et Thibaut SARDIER, président de l'ADFIG
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