Alger, le 4 mars 1956. Mehdi est chargé d'interroger des fellagas pour le compte de l'Armée française. Un soir, alors qu'il encadre un nouveau groupe de prisonniers, il reconnaît une ancienne relation. Diesbach, un «Européen» qui a embrassé la cause indépendantiste, est un coureur cycliste que Mehdi a croisé lors de compétitions. Les deux hommes discutent toute la nuit séparés par les barreaux de la cellule. Ils évoquent le Grand Prix de l'Echo d'Alger qui doit se tenir le lendemain matin. La course serait le terrain idéal pour une nouvelle échappée…
Avec cette nouvelle,
Didier Daeninckx creuse son sillon :
le roman noir de l'Histoire. Il aborde ici la guerre d'Algérie et les «corvées de bois» qui désignaient les exécutions sommaires des prisonniers algériens. L'évocation de ces crimes croise le récit d'une épopée sportive. Quelques années plus tôt, en 1950, une équipe représentant l'Afrique du Nord avait participé au Tour de France. Un des membres de l'équipe, Abdel-Kader Zaaf, avait défrayé la chronique. Sous une chaleur écrasante, à bout de force, il avait saisi un bidon tendu par un spectateur. Assoiffé, le coureur avait éclusé ce bidon rempli de… vin. L'effort, la chaleur et l'alcool ont secoué fortement notre sportif. L'anecdote sera reprise le lendemain par l'ensemble des quotidiens lui offrant ainsi une gloire fragile.
Daeninckx a donc atteint son objectif : il a exhumé l'existence d'Abdel-Kader Zaaf des vestiges du passé. Les quelques pages de son texte ont participé à un devoir de mémoire.