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EAN : 9782070347094
400 pages
Gallimard (27/09/2007)
3.67/5   190 notes
Résumé :
Clément Duprest, brillant étudiant en droit, intègre la police nationale en 1942. Contrairement à certains de ses collègues, Duprest ne « fait pas de politique » : il va se contenter de mettre au service de ses patrons son intelligence et son sens de l'observation. Au sein de la « brigade des propos alarmistes », il est chargé de repérer et de neutraliser les individus hostiles à Vichy... Ainsi commence la longue carrière d'un fonctionnaire que certains diraient irr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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C'est l'histoire d'un sale type, que ses camarades personnages connaissent sous le nom de Clément Duprest. Il n'a rien du type avec qui on aimerait passer la soirée, aller ou boulot ou même saluer sur le palier. C'est un personnage qui sur-rationalise tout ce qui l'entoure et il se rassure en appliquant avec un zèle à gerber tout ce que notre bon gouvernement de Vichy lui ordonne de faire. La chasse aux juifs et au communistes d'abord, puis aux indigènes, et à notre regretté Coluche. Et pour se dédouaner le fameux leitmotiv : "Je n'ai fait qu'obéir aux ordres", avec la variante "Je n'ai fait que mon travail"

Un petit Daeninckx pure sucre Mesdames et Messieurs pour conclure cette première moitié de décembre. Par rapport aux autres romans de l'écrivain, celui-ci me semble, d'un point de vue global, bien plus abouti. On sent bien le travail de recherches qui lui a été nécessaire pour l'écriture d'un ouvrage qui couvre une bonne partie de la seconde moitié du vingtième siècle. Pour une fois, Daeninckx a soigné la fin de son roman (il était temps !), mais alors le premier tiers… quel horreur ! quel ennui ! Trop de personnages et d'intrigues secondaires viennent noyer le lecteur et le découragerait presque d'aller au bout de sa lecture.

L'écrivain soulève dans cet ouvrage des questions qui fâchent. Son roman est un élément de réponse au "pourquoi au lendemain de la guerre tout le monde s'est découvert résistant, y compris ceux qui ont dénoncé leurs voisins?" Question intéressante à laquelle l'Etat français n'a toujours pas jugé bon de répondre. Ceci dit, il a fallu attendre le discours du 16 juillet 1995 pour que J.Chirac reconnaisse la responsabilité de la France dans la déportation de ses concitoyens français qui avaient eu le mauvais goût de naître juifs.
De même qu'on attend encore que l'Etat français reconnaisse toutes les horreurs qu'il a commis au nom de la France et de ses valeurs dans ses colonies, notamment en Algérie, et contre ceux qui avaient fait le choix d'immigrer en France - les harkis, et les autres aussi.

Ce portrait au vitriol a donc le mérite d'interpeller le lecteur - du moins celui qui ne se laisse pas impressionner par le fouillis de la narration et la distance qui est mise dans ce récit, à l'écriture aussi froide et factuelle que son personnage principal.

Malgré les "défauts" dans la narration mentionnés ci-dessus, j'ai tout de même apprécié lire ce roman subversif de Didier Daeninckx qui montre comment la France a brillamment recyclé ses salauds et les a laissé évoluer en son sein - en leur donnant régulièrement des promotions en plus !
Autre mérite de l'écrivain : il prouve que non, tous les Français ne sont pas arrogants, donneurs de leçons voir trop moralisateur vis-à-vis des pays étrangers et sont capables de regarder leur Histoire en face.
Merci Monsieur Daeninckx.
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On ne peut sortir de la lecture de « Itinéraire d'un salaud ordinaire » sans avoir la nausée.
Entre histoire de France et fiction, Didier Daeninckx raconte l'épopée d'un fonctionnaire comme la république les aime : bien obéissant et qui ne pose pas de questions.
Clément Duprest est étudiant en droit lorsqu'il décide d'intégrer la police nationale en 1942. Il est enrôlé dans la brigade des bobards en tant qu'inspecteur adjoint pour renseigner Vichy sur les activités clandestines des alliés de la France de Londres. A la libération, il ne sera nullement inquiété de ses activités de collabo car il a eu le nez fin et a pactisé avec la résistance pendant les dernières heures de l'occupation allemande. Son talent pour l'espionnage et le renseignement lui feront traverser les guerres d'Indochine, d'Algérie, mai 68, les gouvernements de de gaulle, Pompidou, Giscard, pour finir sa carrière au plus haut grade de commissaire et à l'élection de Mitterrand.
Le roman de Didier Daeninckx décrit parfaitement toute l'horreur de l'obéissance aveugle d'un petit fonctionnaire à sa fonction, à sa hiérarchie, sans état d'âme. C'est le lot abject encore aujourd'hui de nombre de serviteurs de l'état et de ses administrations, jusqu'aux fonctions les plus hautes comme celle de Matignon, car l'arrivisme et la compromission ne connaissent aucune frontière.
Editions Gallimard, Folio, 386 pages.
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Clément Duprest intègre la police en plein régime de Vichy et a pour mission de traquer les Juifs et les résistants. C'est son job, c'est sa vie, c'est normal. Mais le cours de la Guerre tourne, et les traqueurs deviennent les traqués, sauf si comme Clément on est assez habile pour assurer ses arrières, au cas où... Et passant entre les mailles du filet, il va se retrouver à travailler pour la République, cette fois pour traquer les Communistes...

L'histoire d'un homme quelconque qui subit L Histoire, d'un côté toutefois rarement narré. Pourquoi ? Parce qu'il est moins tabou de raconter du côté des victimes que du côté des acteurs des souffrances d'autrui ? Ce livre est une très bonne base de réflexion sur le devoir d'obéissance d'un fonctionnaire de l'Etat, qui subit des directives, lesquelles le moulent d'ailleurs petit à petit comme un torrent qui creuse son chemin parmi les rochers. le personnage principal est un homme qui fait son métier, qui reçoit ses ordres d'en haut et qui n'a jamais connu rien d'autre que ça. Malgré le temps et le changement de pouvoir, cet homme reste naturellement antisémite, suite au modelage idéologique du régime précédent.
C'est une lecture fort enrichissante et qui engage à la réflexion, au questionnement du travail par rapport à l'être humain, et qui renforce encore plus le respect pour tous les gens qui ne se contentent pas de suivre des ordres qui vont à l'encontre de la morale, du respect d'autrui ou qui vont tout simplement à contre courant de décisions prises dans les hautes sphères par des dinosaures éloignés des réalités du terrain depuis fort longtemps. Je m'égare sûrement un peu, mais l'image du décisionnaire dans son bureau bien au chaud peut s'appliquer à bien des contextes...
Didier Daeninckx a fourni un travail remarquable, embarquant le lecteur dans une page de l'Histoire de France. Toutefois la première partie reste plus entraînante que la seconde, laquelle commence à perdre de son souffle dès lors qu'on parvient à la Guerre d'Algérie, les actions se faisant moins précises, les détails historiques s'étalant sur un paragraphe au lieu de deux pages, les réactions en chaîne étant moins expliquées et donc dures à suivre pour qui est né bien après ces évènements.
L'on regrette parfois qu'il n'en soit pas plus dit sur Clément, tout n'est que suggéré : sa relation avec son fils, ses prises de notes et dossiers sur les gens qui s'apparentent clairement à des TOC...
Un livre fort intéressant, rapide à terminer une fois la meilleure partie passée, et qui offre surtout une autre perspective d'analyse de l'emprise de l'Exécutif sur ses citoyens.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Incipit :
Clément Duprest se remémore sa prise de fonction, tout jeune homme alors qu'il s'apprête à partir en retraite.
Pendant quarante ans il a suivi un itinéraire quotidien, un trajet le conduisant régulièrement dans l'Ile de la Cité, Quai des Orfèvres. Un parcours accompli par un « salaud ordinaire », c'est-à-dire, un homme bassement, banalement, médiocrement méprisable.
Quand on intègre en 1942 les Brigades spéciales après avoir passé brillamment le concours d'officier de police, on se doute du travail à accomplir : arrestation de terroristes (résistants, communistes…), de juifs, d'opposants au régime de Vichy…

C'est le cas de Clément Duprest qui accomplira toute sa carrière au sein de cette administration, adoubé par sa hiérarchie, gravissant régulièrement les échelons.
Dans la fonction publique, on doit observer le droit de réserve, de discrétion et le secret professionnel, c'est ce que s'est attaché de faire scrupuleusement Duprest, sans état d'âme.
Quand on est confronté à devoir accomplir quelque chose qui met en péril son intégrité physique, on peut (depuis 1982) exercer un droit de retrait, on peut aussi user d'un droit de désobéissance – et cela peut s'avérer quelque fois, un devoir impérieux - on peut aussi démissionner si la tâche à accomplir est contraire à son éthique personnelle, aux valeurs humaines.
C'est ce que se garde de faire Duprest, obéissant aux ordres, fonctionnaire zélé, respectueux de ses chefs, obtus, et sans grande valeur morale tant dans sa vie professionnelle que familiale.
La fin de la guerre se pressent. Son beau-père, Augustin Genin, lui conseille formellement de jouer double jeu et de communiquer des renseignements à un fonctionnaire préfectoral.
A la Libération, il est arrêté, emprisonné, confronté à un témoin qu'il arrêta, mais lui, ne s'est jamais livré à des actes de torture, et les services rendus au cours des derniers mois lui valent d'être libéré et de réintégrer son corps d'origine, alors que certains de ses collègues vont payer le prix fort.
Et la carrière se poursuit, le temps passe ponctué par la naissance d'un fils, Guy, la prise d'échelons, les promotions qui se succèdent, il finira sa carrière comme commissaire principal à un indice élevé. Et, parallèlement, une vie privée de petit bourgeois étriqué
Les affaires à traiter se définissent en fonction du paysage politique : traque des communistes, ( il rédige des fiches sur Ivo Livi – Yves Montand - , Brassens, Sartre…) chasse des partisans indépendantistes , enquêtes sur les milieux politico-maffieux…
Duprest quitte enfin son poste à l'avènement de la présidence de Mitterrand, finalement satisfait de n'avoir pas à servir la gauche.
Par ce récit, il nous est donné de réviser quarante ans de l'actualité politique française, de son Histoire.
Didier Daeninckx déterre, sans complaisance des affaires peu glorieuses, sentant puissamment le souffre et la fange (euphémisme pour ne pas user de grossièreté !) (Affaire Marcovic, une parmi les plus sales de la Ve République, Affaire Coluche…) .




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Clément Duprest, après des études de droit, a brillamment passé le concours d'inspecteur de police. Il est affecté aux Renseignements généraux, dans les Brigades spéciales, sur l'île de la Cité et… nous sommes sous l'occupation allemande, en plein procès de ceux que les autorités appellent des « terroristes ».

Itinéraire d'un salaud ordinaire, titre fort éloquent choisi par Didier Daeninckx, est lancé et nous allons suivre cet homme jusqu'à sa retraite. Ce salaud ordinaire suit un parcours pas ordinaire à cause de tous les événements qui ont fait l'Histoire de notre pays pendant près d'un demi-siècle. C'est une plongée au coeur de ces années, un rafraîchissement de la mémoire ou l'occasion d'apprendre de bien intéressantes informations sur l'arrière-cour de ce qui a fait la vie politique de notre pays.
Didier Daeninckx détaille bien les méthodes de ces policiers qui surveillent tout, la vie privée en particulier, ce qui permet, si nécessaire, d'exercer des pressions, d'obtenir une collaboration, d'infiltrer un réseau… pour le meilleur ou pour le pire.
Le pire est à l'ordre du jour puisque la police française fait du zèle afin de plaire à l'occupant. Duprest ne peut rien faire sans prendre des notes. Rien ni personne ne lui échappe, même les êtres qui lui sont les plus proches, son épouse, son fils !
Ce fichage maximum amène à la fameuse rafle du 16 juillet 1942. J'ai cru revoir les images du film de Robert Guédiguian, L'armée du crime, lorsque l'auteur décrit, raconte cette opération qu'on a osé nommer « vent printanier ». Après la rafle, plus de tailleurs, d'ouvriers pour la confection afin de fournir l'occupant… le Syndicat corporatif des confectionneurs demande à la police de récupérer toutes les machines dans les appartements vides. Terrible période à n'oublier jamais !
Un collègue de Duprest résume ainsi la politique du moment : « Je suis d'accord pour que l'on soit sans pitié contre les juifs, les communistes, les francs-maçons, toute la racaille qui a abaissé le pays, mais pas pour que l'on s'en prenne à l'esprit gaulois. »
La presse, la radio, les journalistes sont sous une surveillance étroite mais quelques-uns résistent au sein de la police et lorsque le vent tourne définitivement, ils sont de plus en plus nombreux. Duprest est interné à Fresnes, comme Tino Rossi, Sacha Guitry et bien d'autres qui s'en tireront ou pas, suivant les appuis qu'ils auront pu se créer.
Réintégré assez rapidement dans la police, Duprest reprend son travail de salaud ordinaire, exerçant même au Maroc, fichant Brassens avant de plonger dans la lutte contre le FLN, en pleine guerre d'Algérie.
Lorsque mai 68 bouleverse la France, Duprest utilise même son fils pour infiltrer les groupes d'étudiants qui tentent d'inventer une société différente. Tout cela nous amène jusqu'à l'élection de François Mitterrand, en 1981 lorsque, nouveau retraité, Duprest reconnaît un certain René Bousquet parmi les invités de la garden-party de l'Élysée, le même qui donnait des ordres pour la grande rafle de juillet 1942…


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Il est impératif de rester simple : la vérité doit être assimilable sans effort. L'auditeur sait que s'il faut réfléchir, c'est qu'on nous cache quelque chose. Pour qu'une pièce prenne une forme idéale, le forgeron ne compte pas ses coups de marteau. A la radio, le marteau, c'est les mots.
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On préparait donc la Révolution et personne n'en savait rien ! Mais qui est-ce qui venait voir les pièces de Brecht, les pièces de Genet ? Qui se mettait ainsi en état de bouleverser le monde ? L'ouvrier spécialisé de chez Citroën, le travailleur immigré des chantiers de la Défense, la mécanographe de chez Bull ? Non… Je vais vous le dire. Sur ces sièges repris par le peuple, s'épanouissaient des derrières bien nourris ! Ici, sur scène, on mimait la contestation sans troubler la digestion d'un public de banquiers, de directeurs d'entreprises, de marchands de canons. L'acteur versait une larme sur l'humanité de la condition des prolétaires pour absoudre les spectateurs payants de leurs problèmes de conscience. On purgeait les passions. L'Odéon, c'était le coeur à gauche et le portefeuille au chaud, bien à droite !
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Oui, j’ai en effet été désigné comme volontaire pour les grandes rafles de l’été… J’agissais sur ordre de mes supérieurs… Les lois reconnaissent qu’il n’y a pas de délit quand des actions contraires à la morale sont ordonnées par une autorité légitime…
Airaud l’interrompit.
-Le gouvernement provisoire a abrogé cet article du Code pénal auquel vous faites allusion…
Duprest comprit qu’il allait marquer un point décisif dans l’échange.
-Sauf que cette décision a été prise en juin 1944, et que ce que vous me demandez de justifier, Monsieur le Président, date de juillet 1942, c’est-à-dire plus de deux ans auparavant. Je ne pouvais pas me conformer à une recommandation qui n’existait pas…

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Si on commence à mettre au trou tous ceux qui plaisantent sur le régime et les Allemands, le pays devra se couvrir de prisons. Et il faudra que j'y conduise au moins la moitié de ma famille, moi en tête !
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On s'en fout de Simenon, il ne raconte que des conneries. Son Maigret, il passe son temps à faire semblant de réfléchir en fumant des bouffardes, alors que le secret du métier, c'est l'action !
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