Un livre dont je recommande vivement la lecture, mais attention, ce n'est pas un livre facile à terminer.
C'est un témoignage extraordinaire sur un voyage d'exploration de 5 ans , dans les années 1820, autour de l'Amérique du Sud. Mais Darwin n'est pas un écrivain, il est même fastidieux à lire. Alors oui ce livre va parfois vous tomber des mains, à moins que vous ne passiez plusieurs pages d'un coup, voire les deux.
Mais j'ai quand même trouvé que c'était une lecture passionnante par son sujet, et parce que c'est le témoignage de 1ère main d'une aventure extraordinaire. Je vous livre en vrac quelques réflexions sur ce bouquin.
J'ai d'abord découvert qui était Darwin et qu'il s'était embarqué à 22 ou 23 ans après de multiples échecs et errements dans ces études. C'est un proche qui conseille au jeune homme de postuler pour rejoindre en tant qu'observateur naturaliste (bénévole) le voyage d'exploration du Capitaine Fitz-Roy (il a son sommet dans les Andes entre le Chili et l'Argentine), lui même âge de ...26 ans. le voyage a pour but de cartographier le cône Sud de l'Amérique
Darwin a touché à tout mais n'a rien terminé avant ce voyage, il ne sait pas très bien quoi faire de sa vie, et il n'a jamais quitté l'Angleterre. Par contre, son esprit penche clairement vers les sciences.
Ensuite, c'est un livre qui fait mesurer à quel point nombre de sciences sont à peine naissantes au début du XIXeme, et donc le progrès considérable accompli depuis.
Darwin a lu avant de partir un des premiers traités de géologie qui est une science qui émerge à peine. On commence à s'interroger sur la formation des reliefs, la raison pour laquelle on découvre des fossiles de coquillages à des centaines de km de la mer ou au sommet des montagnes. Et effectivement, une très grande partie du récit est consacrée à la géologie, ce qui a été une découverte pour moi. On pense toujours à Darwin naturaliste observateur de la faune et théoricien de l'évolution, mais le champ scientifique auquel il est capable de s'intéresser (et sérieusement) est immense.
C'est aussi un témoignage formidable sur le cône sud de l'Amérique Latine avant que l'homme européen ne transforme ces territoires. Je ne connais qu'une partie du Chili, mais j'ai été très impressionné par ce que j'ai découvert avec ce livre. le bateau embarque à son bord 2 Indiens "fuegiens", les tribus qui vivent dans le détroit de Magellan dans des conditions très précaires. Ils avaient été ramenés en Angleterre lors d'un précédent voyage. Tout un long passage du livre raconte leur retour dans leur peuple, et les impressions de Darwin sur ces popluations qu'il juge sans aucune tendresse. Les "progressistes" et autres "woke" d'aujourd'hui vont sûrement vouloir excommunier Darwin qui se montre plein de préjugés, raciste, méprisant, sans aucune empathie, mais c'est un esprit de son époque, du début du XIXème, qui s'exprime, pas un bobo parisien d'aujourd'hui. Les Fuegiens ont quasi disparu depuis le début du XXeme, Darwin nous livre presque un documentaire sur eux.
Le livre fourmille de découvertes, anecdotes et petits voyages dans le voyage. Darwin quitte fréquemment le bateau pour des explorations de plusieurs semaines , voire plusieurs mois. Ainsi traverse-t-il la Pampa pour rejoindre Buenso Aires depuis le sud en échappant aux indiens. Il explore des cavernes du sud de la Patagonie pour aller relever des fossiles de Paresseux géants et s'interroger sur la disparition de ces animaux, sur les conditions qui ont leur permis de vivre là. Il fait aussi une petite virée à Santiago du Chili depuis Valparaiso et escalade les Andes, formulant la théorie que ces montages ont émergé du fonds de la mer. Pour le niveau de connaissance que l'on avait à l'époque, ce n'est pas mal.
Paradoxalement, le passage sur les îles Galapagos au large du Chili, si abondamment cité quand on évoque Darwin, est relativement modeste dans le récit, et assez peu détaillé. Rien ne laisse penser qu'il va en tirer tant de matériaux pour élaborer sa théorie de l'évolution.
L'ensemble est écrit sur un ton assez plat, dénué d'émotion et ou d'annotations personnelles. Darwin semble ne jamais s'étonner de rien, alors que pour un Européen, la Patagonie est un choc visuel, une expérience sidérante. Darwin était peut être un jeune blasé, en tout cas, il n'a l'air époustouflé ni émerveillé par ce qu'il voit.
Les seules notes un peu plus personnelles concernent les colères gigantesques et le disputes avec Fitz-Roy, avec qui il semble malgre tout bien s'entendre.
Il rentre en Angleterre 5 ans plus tard, il n'en bougera plus, il mènera même une vie très sédentaire consacrée à la sciences, ses études et l'écriture.
A la fin du récit, il écrit quand même quelques pages un peu personnelles pour conclure qu'effectivement les voyages sont une bonne chose pour la jeunesse.
C'est un grand moment de lacher-prise british.
Une lecture à aborder l'esprit ouvert, pour ne pas s'arrêter au caractère fastidieux du bouquin, et être capable d'y voir ce qu'il a de riche et d'étonnant pour son époque.
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Quelque triste que soit la position des mineurs - on en peut juger d'après ce que j'ai dit plus haut - c'est une position fort enviée, car celle des ouvriers agricoles est encore bien plus dure. Les gages de ces derniers sont moins élevés et ils se nourissent presque exclusivement de fèves. Cette pauvreté provient principalement du système féodal qui préside à la culture des terres; le propriétaire donne au paysan une petite pièce de terre sur laquelle celui-ci peut construire son habitation et qu'il peut cultiver; mais, en échange, le paysan lui doit son travail ou celui d'un remplaçant pendant toute sa vie et cela tous les jours sans recevoir de gages.
Il est impossible de ne pas ressentir quelque surprise quand on voit la peur que font les tremblements de terre aux indigènes et aux étrangers qui habitent le pays depuis longtemps, bien que beaucoup d'entre eux aient un grand sang-froid. Je crois que l'on peut attribuer cet excès de frayeur à une raisons fort simple, c'est-à-dire qu'ils ne sont pas honteux d'avoir peur. Les indigènes vont même plus loin : ils n'aiment pas à ce que l'on semble indifférent. On m'a raconté que, pendant une secousse assez violente, deux Anglais, couchés par terre en plein air, sachant qu'ils ne courraient aucun danger, ne se relevèrent pas; les indigènes, plein d'indignation, se mirent à crier : "Voyez ces hérétiques, ils ne quittent même pas leur lit !"
Après avoir été deux fois repoussé par de terribles tempêtes du sud-ouest, le vaisseau de Sa Majesté le Beagle, brick de dix canons, sous le commandement du capitaine Fitz-Roy, de la marine royale, sortit du port de Devonport le 27 décembre 1831. L'expédition avait pour mission de compléter l'étude des côtes de la Patagonie et de la Terre de Feu, étude commencée sous les ordres du capitaine King, de 1826 à 1830 - de relever les plans des côtes du Chili, du Pérou et de quelques îles du Pacifique - et enfin de faire une série d'observations chronométriques autour du monde.
Le paysage, contemplé à travers l'atmosphère brumeuse particulière à ce climat, offre un grand intérêt, en admettant toutefois qu'un homme qui vient de débarquer et qui traverse pour la première fois un bosquet de cocotiers puisse songer à autre chose qu'au bonheur qu'il ressent.
Charles Darwin - L'origine des espèces
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