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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
New-York va mal, très mal : les immeubles menacent de s'effondrer rongés par un cancer du béton qui les mine lentement, les riches l'ont désertée pour se réfugier en banlieue et les chiens, redevenus sauvages, se sont regroupés dans les montagnes.

John l'Enfer y exerçait le métier de laveur de carreaux sur les gratte-ciel, nullement gêné par le vertige à l'instar de la plupart de ses congénères Cheyennes.
Lorsqu'il perd son emploi John l'Enfer se propose d'assister Dorothy une jeune aveugle dont il vient de faire la connaissance.
Si John ressent peu à peu naître des sentiments pour la jeune femme, celle-ci semble plutôt attirée par Ashton Misha, ancien marin.

L'intérêt de ce roman n'est pas l'histoire d'amour mais bien dans la lente agonie de cette ville tentaculaire et fascinante.

« John l'Enfer » est un roman assez déroutant qui flirte avec la science-fiction et le récit apocalyptique.
Il a été couronné par le Prix Goncourt en 1977.

J'ai eu beaucoup plaisir à relire ce livre plus de quarante ans après sa parution.
J'ai aimé y retrouver John, tellement attachant dans sa volonté de sauver sa ville avec ses pauvres moyens tout en protégeant celle qu'il aime.
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La lèpre de la pierre attaque le ciment des gratte-ciel de New York, les chiens et les riches quittent la ville qui se meurt faute de moyens financiers pour en assurer l'entretien. Au milieu de cette fin d'un monde, John l'enfer, un Cheyenne survit, comme un ange gardien pour ses deux compagnons, Dorothy, jeune femme temporairement aveugle dont il est amoureux et Ashton, officier de marine échoué là. L'histoire est impossible à résumer, mais on suit avec beaucoup d'intérêt le destin de notre trio. J'ai beaucoup apprécié l'ambiance chargée de symboles, et ai retrouvé avec plaisir tous les quartiers connus de New York.
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Lorsque l'on pense à New York, on pense ébullition culturelle, mouvement perpétuel, réinvention continuelle. John l'Enfer, un laveur de carreaux d'origine cheyenne, ne pense pas cela. New York, dans les années 1970, est une ville violente qui attire à elle toutes les merveilles et toutes les misères du monde. Depuis les buildings dont il lave les carreaux, accroché à eux par des ventouses, John l'Enfer sent que la situation de la ville se dégrade. Il le sent littéralement, à travers le béton, le verre, le métal. Lui, dont le peuple est insensible au vertige, ce qui le rend immédiatement qualifié pour l'emploi qu'il occupe - et en cela New York est une assurance contre le chômage - voit même, depuis peu, ses collègues et congénères tomber des façades et s'écraser sur le sol. Au hasard d'un service dans un hôpital, il fait la rencontre de Dorothy Kayne puis d'Ashton Mysha. C'est avec ce trio que Didier Decoin nous emmène dans les rues de New York.

Dorothy est docteure en sociologie. Elle est devenue aveugle, provisoirement, à cause d'un accident de surf tandis qu'Ahston Mysha, qui officie dans la marine marchande, soigne une appendicite dans la cité verticale. John et Ashton deviennent les yeux de Dorothy. A tous les deux, elle inspire des sentiments amoureux. Entre les deux hommes s'établit une rivalité bien naturelle, et pourtant fondée sur un respect mutuel qu'explique l'assurance qu'a chacun de ne pas pouvoir contenter Dorothy tout seul. Bien sûr, une peur les unit aussi, celle du jour où Dorothy retrouvera la vue, et les verra dans leurs apparences physiques, et non plus ne les imaginera grâce à leurs voix, à leurs souffles ou à leurs manières de bouger. Après des débuts prometteurs passés dans la maison de John situé sur Long Island, le trio retrouve New York, ses bas-fonds et ses dorures et s'entête à aller tout au bout de l'aventure. Pour John, celle-ci débute par la perte de son emploi à cause d'un patron peu scrupuleux. Ashton lui emboîte le pas : pour subvenir aux besoins, et donner à Dorothy ce qu'elle mérite, le marin polonais vend en viager ses organes à un docteur d'Atlanta.

Au-delà de l'errance de trois personnages atypiques dans une ville qui l'est tout autant par son histoire et son aspect, John l'Enfer raconte en réalité ce qu'est New York et ce qu'est l'Amérique. Est-ce donc un hasard que les trois personnages en représentent l'identité complexe ? D'un côté la vieille Europe se retrouve en Mysha, marin polonais échoué sur le rivage. de l'autre, l'Amérique des origines, l'amérindienne, se retrouve à travers John. Dorothy, elle est l'Amérique neuve (la sociologie urbaine dont elle est spécialiste n'a rien à voir avec la nature des grands espaces), sans histoire ou presque (on ne connaît rien ou presque de l'histoire de Dorothy). L'Européen et l'Amérindien aiment l'Amérique, mais de façon différente : un seul veut la posséder physiquement. Dorothy a besoin des deux pour être soutenue et aimée.

New York est le quatrième véritable personnage de ce roman. La ville présente de multiples facettes, à l'instar de ses quartiers que Decoin explore : les docks de Manhattan, les ponts, Greenwich, Chinatown ... En réalité, New York est un vieux parchemin où s'écrivent toutes les histoires du monde, et que tirent à eux les candidats à l'élection municipale : d'un côté Ernst Anderson, chef des pompiers, un alarmiste qui redoute l'incendie ultime qui punirait l'arrogance de la cité (référence au feu purificateur) ; de l'autre, le sénateur Cadett, qui soutient le maire en place, personnage fantoche. le sénateur est un politicien dans toute sa petitesse. Par son obstination à survivre aux cataclysmes, à ne pas s'avouer vaincue, à contraindre l'apocalypse, New York signe la fin d'une certaine spiritualité. Elle est la capitale des frustrations, des injustices, de l'immoralité : et alors ? Dans la vaste ville, il n'y a que John l'Enfer qui se préoccupe de cela. Ashton Mysha voit sa propre vie s'échapper sur le Vastitude, ce bateau sur lequel il officiait. Son monde c'était la mer. Quant à celui de Dorothy, celui des ténèbres, elle tente de s'y habituer. le monde de Dorothy n'est pas New York, car New York refuse la nuit. Les néons allumés ici et là rappellent les désirs et les plaisirs de chacun : la nourriture, la musique, le sexe. le coeur de New York bat encore puissamment lorsque les pires cataclysmes semblent la menacer.

Il y a, dans John l'Enfer, une sorte de prophétie biblique en cours de réalisation. Il n'est pas improbable que nous assistions à l'effondrement de la civilisation : voyez ces signes, visibles (la fuite puis l'invasion des chiens, la montée menaçante des eaux souterraines, les poussières infimes qui encrassent les carreaux bien plus vite) et invisibles (la mythique lèpre de la pierre) dont le messager est un Amérindien laveur de carreaux. Ne nous étonnons pas de la modestie de son état : il est prophète car il peut prendre de la hauteur. Il est prophète car il est insensible au vertige sous toutes ses formes. Il est prophète car il parle d'une ville et d'un mal qui le dépassent.
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Dans ce livre, il y a tout ou presque. Tout plein d'émotions, de la plus grande fierté et noblesse au pire crasseux sentiment, de l'amour, de l'Amour, du propre et du sale, du propre et du figuré. Decoin c'est un peintre, couche par couche, il peint un tableau de New-York comme assez peu de New-Yorkais que j'ai pu lire ont su faire, ou au moins aussi bien. Pas évident. Pas un livre français sur l'Amérique, comme trop le font, non ici c'est un livre américain. Point. Un "grand" livre américain. L'écriture semble facile, pas vraiment d'effet de style mais pas de non-style non plus, c'est tout sauf plat. Il y a des reliefs, des gratte-ciel au bas-fond de l'écriture.
Decoin, c'est un auteur. Evidence pour beaucoup, mais de plus en plus pour moi.
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Excellent roman américain écrit par un français.
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Ce livre de Decoin nous parle de New York, non pas la flamboyante cité internationale, mais d'une cité immense malade de ses constructions Une New York sordide et lépreuse dont le béton pourrit et dont les infrastructures qui lâchent, inondant les rues d'une boue immonde
Des buildings dont la restauration voir même l'entretien nécessiterait des millions, absents des caisses de la ville
Une villeaussi à la merci d'un incendie qui se révélerait fatal car incontrôlable avec des pompiers sur le qui vive en permanence mais impuissants
Une ville au bord du précipice en attente du bon vouloir des hommes.

Dans cette ville sont englués des hommes et des femmes tous à la recherche de quelque chose de pas défini. Concrètement la recherche d'argent pour survivre semble le seul idéal de cette population. Parmi elle un trio amoureux assez improbable un indien Cheyenne que j'imagine tel le « Chef » Bromden, le géant indien de « vol au dessus d'un nid de coucou » laveur de vitre qui assiste à l'agonie des building, une jeune professeur aveugle en soins qui se laisse désirer et séduire, par defaut, par ses partenaires sans trop savoir ce qu'elle veut, un capitaine de navire polonais et un peu juif en transit à la recherche d'un contrat, amoureux comme le cheyenne de la jeune femme .
Ce trio singulier est en attente. Mais de quoi ?
Des relations ni très nettes  ni très saines mais toutes provisoires : l'un attentiste et respectueux de la bonne volonté de la jeune femme , acceptant contre son gré son concurrent, l'autre plus pressé par l'immédiat qui impose de fait une acceptation à la relation sentimentale et la jeune femme ballottée par elle-même dans sa nuit entre tous les possibles
Des personnages secondaires le chef des pompiers qui vise la mairie et utilise New-York à ses fins, un sénateur occultiste un concurrent du premier. L'argent pour ses deux-là et la pauvreté pour tous les autres la vie au jour le jour, la drogue, la prostitution, la nuit pour survivre.

Une curieuse migration massive des chiens de New_York dans les collines environnantes et leur retour dans la cité qui sème la peur. Un passage assez peu crédible et intrigant et peu compréhensible.

Une ville glauque dans une ambiance glauque avec des personnages glauques qui font des choses glauques

Une narration proposée sans avoir l'air d'y toucher avec distanciation et froideur et, donc, imposant au lecteur une lecture de la même eau. Toutefois on se laisse prendre, véritablement marabouté ou ensorcelé (Salem n'est pas très loin ), par cet univers pas comme il faut et on se prend de désespoir et fatalisme avec les personnages.
Seule la fuite du cheyenne (qui ressemble aussi, étrangement, à celle de Bromden voir plus haut) vers la terre de ses ancêtres donne une petite note d'espoir.
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Ce livre aura eu le mérite de me faire connaître Didier Decoin sous une autre face ! En effet la lecture de quelques-uns de ses ouvrages ne m'avait pas convaincu jusqu'à présent.

Cela est d'autant plus surprenant que j'ai du mal à imaginer le Didier Decoin que l'on connaît aujourd'hui, écrire ce roman de fiction, décalé ! La rencontre de trois solitudes dans un New-York imaginaire qui va à sa perte. Trois personnages attachants que l'on a plaisir à accompagner tout au long de cette aventure.
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New York, ville de tous les superlatifs, ville de tous les possibles, ville de tous les pouvoirs, ville d'Hommes, ville fatiguée, usée, malade, ville aux tréfonds oubliés, ville peuplée de tant de miséreux.
Ils sont trois, nos chétifs héros de la cité, ils ne se connaissent pas, mais leurs destins vont se croiser.
John l'Enfer, l'indien, laveur de vitres à la recherche d'un emploi depuis la faillite de son employeur, Dorothy, prof, provisoirement aveugle mais seule et Ashton Mysha, sous-officier de la marine marchande, débarqué pour cause d'appendicite aiguë. Les deux hommes sont sans l'avouer amoureux de Dorothy qui, elle, cherche, sans le reconnaître, du soutien vu son handicap.
Le trio va traverser la cité malade de ses entrailles et de son ossature. Ses égouts débardent, se fissurent, répandant leur contenu puant dans les caves des immeubles, le béton pourrit, le fer rouille, les bâtiments menacent de s'écrouler.
Personne ne veut prendre la mesure de la possible catastrophe.
Alors Ashton Mysha vend ses organes et se suicide, laissant la main à John qui fuit la ville pour les forêts du nord, en emmenant Dorothy loin de la ville destructrice.
J'ai aimé ce livre, il m'a fait penser à Bone de George Cesbro qui écrit aussi sur les entailles de New York et les miséreux qui la peuplent.
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