Classique de la philosophie, cet ouvrage m'a paru tantôt brillant, tantôt immensément décevant.
Il faut dire que
Descartes commence fort : dès son prologue, il affirme que le lecteur est sur le point de découvrir, en lisant ces quelques dizaines de pages, les preuves de l'immortalité de l'âme et de l'existence de Dieu. Rien que ça ! La déception est encore plus prévisible que dans "Lost", c'est dire.
Après un abrégé des méditations à suivre qui est loin d'être inutile, on est plongé tout de suite dans la première méditation. Et celle ci est à mon sens la plus intéressante : réalisant que l'essentiel de ses repères se fonde sur des préjugés acquis généralement dès l'enfance,
Descartes entreprend de tout remettre en doute pour voir si, au final, il n'y aurait pas quelque chose qui soit indubitable, donc vrai. La démarche est soigneusement expliquée (le "mauvais génie" imaginé est une idée très forte, à laquelle, je pense, nous avons tous déjà songé sans la mettre précisément en forme) et l'expérience se révèle productive : A la seconde méditation,
Descartes aboutit au fameux cogito, génialement démontré, qui parait presque impossible à contester dans son ensemble et auquel chaque individu semble pouvoir aboutir à la suite d'une méditation similaire.
Mais les choses se corsent. Tout échauffé par ses premières conclusions,
Descartes s'approche vite du soleil en souhaitant démontrer l'existence de Dieu. On rit doucement, mais le livre inclut d'exclure tout préjugé pendant sa lecture. Alors l'on suit le raisonnement cartésien, on se laisse bercer tranquillement, attendant de voir ou il pourrait mener.
Réponse : A pas grand chose. Les "preuves" de l'existence de Dieu (car il y en aurait plusieurs !) sont assez faibles, très contestables et mêmes réfutables, sont donc tout sauf des preuves, sinon des syllogismes imparfaits. Et l'ennui de l'ouvrage, c'est qu'il se fonde entièrement, à partir de cette troisième méditation, sur le principe que Dieu existe (puisque
Descartes pense l'avoir prouvé). Immortalité de l'âme et sa distinction avec le corps, réflexion sur le vrai et le faux... Tout cela n'est absolument pas convaincant, presque complétement inintéressant pour qui n'est pas un fervent croyant et n'a pas été convaincu par les raisonnements précédents : là est l'immense faiblesse de ces méditations, et l'explication évidente de l'ennui qui s'empare de beaucoup à la lecture de celles ci.
Je retiendrais donc surtout de cet ouvrage la fameuse expérience du doute, génialement présentée, avec une humanité des plus sincères qui vient affronter parfois cette philosophie (ce passage touchant où
Descartes exprime son envie de retomber dans l'illusion qui parait bien plus facile à vivre) et l'aboutissement au très intéressant cogito.
Dommage que la suite ne soit pas aussi bonne, mais au moins aura-t-il essayé, et même dans ce que je considère comme des erreurs ou des passages très faibles dans l'argumentation, la volonté et l'intelligence de certains propos sauvent cette fin d'ouvrage.