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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une lecture enchantée au fil de l'écriture légère, érudite et espiègle de Patrick Deville qui nous emmène cette fois en Inde sur les traces de Pandurang Khankhoje, combattant pour l'indépendance bien moins connu que Gandhi.
Les longues phrases littéraires de Deville captivent par la forme autant que le fond, nous emportant dans l'espace et le temps découvrir des faits historiques souvent méconnus, qui font écho à d'autres dans ses autres ouvrages, l'ensemble formant une fresque splendide et insolite, parallèle ou décalée par rapport à L Histoire ordinairement connue.
Le narrateur de ce nouveau "roman sans fiction" (au sein du cycle en cours de l'ambitieux et magnifique "projet Abracadabra") est un dandy nonchalant et curieux, pince-sans-rire et parfois doucement mélancolique, car tout passe et les gloires sont éphémères.
Lisez ce livre où Patrick Deville a niché aussi son très touchant art poétique, page 66 :
"À cet instant où on ne sait trop lequel des deux convois s'est remis en mouvement, ces passagers dont je ne saurais jamais rien, aperçus au travers des filets argentés de la pluie sur la vitre, s'évanouissaient et disparaissaient. J'aurais voulu connaître la vie de chacune des ces personnes réelles qui peut-être étaient convaincues, pour certaines, d'avoir vécu déjà, et de devoir après leur mort vivre à nouveau, entamer avec elles une conversation, savoir quels pouvaient être leurs émotions, leurs chagrins et leurs espoirs, si elles imaginaient une existence différente, comment on vivait ailleurs, à Tallinn ou Tahiti, et je pensais qu'il était inutile d'ajouter des vies de fictions à toutes ces vies absolument uniques, susceptibles d'attirer à elles notre infinie miséricorde pour cette condition humaine que nous partageons, et que chacune de ces vies méritait qu'on la sauve par le récit, et celles des disparus qu'on les relève depuis l'oubli aussi bien que celle de Pandurang Khankhoje, une vie de "freedom fighter" comme il y en eu des dizaines de milliers au long de ce vingtième siècle qui n'en fut pas avare."
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Même lorsque son aventure littéraire personnelle est elle-même un moment contrariée par une pandémie et le confinement qu'elle entraîne, comme ce fut son cas en 2020, même lorsqu'il peut parfois, à l'instar des héros qu'il met en scène, être saisi par le doute et questionner le sens de sa tâche, Patrick Deville poursuit inlassablement le « projet Abracadabra », un projet de douze romans dans douze lieux du monde, forgé il y a plus de vingt cinq ans, un projet formidable par sa durée et son envergure, et dont il nous livre ici, avec Samsara, le neuvième opus. Infatigable voyageur autant qu'explorateur têtu de territoires parfois délaissés de la littérature et des archives, il nous emmène à cette occasion aux quatre coins de l'Inde, et on l'y suit avec le plus ardent des plaisirs, tant chaque page est riche de nouvelles anecdotes ou de détails captant notre curiosité, retrouvant cet art du « roman sans fiction », vrai kaléidoscope mêlant le présent et la mémoire d'un lieu, imaginant une infinie conversation entre ses protagonistes et d'autres héros de l'Histoire ou de la fable, célèbres ou moins connus, locaux ou très éloignés dans l'espace ou le temps, créant ainsi souvent des rapprochements aussi baroques que féconds.
Dans Samsara, Patrick Deville confronte les destins de Gandhi et de Pandurang Khankhoje, deux des principaux meneurs du combat pour l'indépendance de l'Inde. Si le premier, « héraut de la non-violence », est évidemment très célèbre, devenu le mythique modèle des militants pacifiques jusqu'à Greta Thunberg, le second, « combattant révolutionnaire » infiniment plus belliqueux, l'est beaucoup moins, et c'est surtout sur ses traces que l'auteur conduira son enquête. Pandurang Khankhoje, né en 1886, plus jeune, de dix-sept ans, que Mohandas Gandhi, est très vite, dans son adolescence, conquis par les thèses des penseurs indépendantistes, convaincu qu'il faudra prendre les armes pour se délivrer du joug colonial britannique. Et c'est d'abord sur les mers qu'il conquerra, fuyant sa famille, sa propre liberté, nettoyant le pont où l'on abat des boeufs pour nourrir l'équipage, puis arrivé au Japon, après mille péripéties, donnant des cours d'anglais à des candidats à l'immigration aux Etats-Unis, avant de les suivre sur le bateau qui les y emporte. Il y étudiera l'agriculture, acquérant un vrai savoir d'expert dans le domaine, qui lui sera utile dans la seconde partie de son existence, lorsqu'il aura abandonné la carrière des armes. C'est aux Etats-Unis aussi qu'il se forme à l'art militaire, et c'est là qu'il participe à la création du « Ghadar Party », un mouvement indépendantiste indien, qui se veut démocratique et ouvert à tous, sans distinction de religions ou de castes, et qui compte rapidement plus de cinq mille membres, prêts à combattre contre les Anglais. Un acharnement contre l'ennemi colonial, qui l'entraînera parfois à faire des choix paradoxaux, combattant, par exemple, au Moyen-Orient, dans le camp des allemands au moment de la Première guerre mondiale… Critiqué et découragé par ses échecs, Pandurang Khankhoje choisira de déposer les armes, pour rejoindre le Mexique et mettre son talent d'agronome au service de l'Etat, en même temps qu'il fréquente Frida Khalo, Diego Riviera et la joyeuse bande d'artistes et amis qui gravite autour d'eux, dont la sulfureuse Tina Modotti ou l'énigmatique Traven. Et c'est, finalement, ce Mohandas Gandhi qui lui paraissait si naïf, mais que Churchill traitait de petit « fakir séditieux », qui l'emportera pacifiquement contre la puissance coloniale, ouvrant la voie à l'indépendance et au pouvoir de Nehru, un Gandhi dont Pandurang rédigera la notice nécrologique pour un journal mexicain après son assassinat en 1948…
Au fil d'un roman dans lequel Patrick Deville prend le temps de décrire aussi villes et paysages de l'Inde, loin de la carte postale, et de s'attarder sur les richesses, économiques comme le coton ou culturelles comme le Mahabharata, de son patrimoine, le lecteur rencontre, autour du parallèle entre ces deux grandes figures historiques, une foule de petits ou grands acteurs de la vie du pays ou du monde, convoqués là par la nécessité ou, parfois, par une simple association d'idées. Et c'est le charme ainsi renouvelé de cette écriture, créant dans son mouvement vagabond, comme une mythologie de notre temps, commencée en 2004 avec Pura Vida en Amérique latine, avant de rebondir en 2009 avec le formidable Équatoria en Afrique, puis d'aborder l'Asie et les territoires indonésiens, avec des détours en Europe… le titre de cette étape indienne, Samsara, évoque la grande roue hindouiste du destin et des réincarnations, laissant entendre que chaque existence n'est peut-être elle-même qu'un moment fragile d'une épopée beaucoup plus longue, dont nous ne maîtrisons pas l'orientation. Mais pour l'heure, entrez dans la ronde, la grande roue du récit de Patrick Deville, vous ne le regretterez pas !
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Aujourd'hui je vais évoquer Samsara nouveau roman de Patrick Deville qui s'inscrit dans son formidable projet démesuré intitulé Abracadabra. C'est le neuvième tome, douze sont prévus pour bâtir ce monument. le précédent opus s'intitulait Fenua et était consacré à la Polynésie. Cette fois l'auteur nazairien se plonge dans l'histoire de l'Inde, pays dans lequel il séjourne pour conduire son enquête littéraire. Il reste fidèle à son écriture particulière, syncopée, visuelle et précise.
Tout d'abord il faut préciser que le titre Samsara évoque le principe de la roue des réincarnations, propre à la civilisation et à la religion prédominante en Inde. Patrick Deville se rend sur place (son périple semble à peine perturbé par la pandémie de Covid-19) et consulte des archives et des documents pour composer ce récit vivant et immersif. le pays est immense et terriblement varié, il sillonne les différents lieux ne se contentant pas de la capitale et des lieux touristiques, ses pas le mènent sur les traces de ses protagonistes. Il est un écrivain voyageur, un baroudeur et un explorateur. Il choisit toujours des personnages réels qui servent de fil conducteur à sa narration, il écrit des romans sans fiction. Cette fois ils sont deux héros principaux : Mohandas Gandhi et Pandurang Khankhoje. Ces deux hommes ont eu une influence notoire et un rôle politique majeur (avec des méthodes différentes) pour l'émancipation du pays du joug de la Grande-Bretagne. le récit raconte notamment l'émancipation de la couronne britannique. L'auteur part sur leurs traces aussi bien dans le pays (là où ils sont nés et ont vécu) qu'à l'étranger où ils ont séjourné. C'est plus d'un siècle d'histoire qui est raconté par le prisme de ces deux vies singulières. Comme toujours l'auteur tisse des liens entre les protagonistes de ses différents ouvrages ; ainsi furtivement apparaissent Yersin et Frida Kahlo, le Mexique, la Californie et le Japon sont évoqués. En moins de deux-cent pages Samsara offre un voyage extraordinaire à la fois dans l'Inde coloniale et dans la nouvelle nation indépendante. Deville rencontre des gens simples et formidables, des témoins de ces événements qui constituent le coeur de la narration.
Samsara a su me séduire malgré mon attirance très modérée pour l'Inde. Retrouver la prose et le dispositif littéraire imaginé par Patrick Deville est un ravissement. Son érudition n'est jamais pédante, il parvient à proposer une immersion totale dans l'environnement qu'il décrit. Et le lecteur reste en attente de la prochaine destination qui permettra de boucler à la fin un épatant tour du monde.
Voilà, je vous ai donc parlé de Samsara de Patrick Deville paru aux éditions du Seuil.

Lien : http://culture-tout-azimut.o..
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Construit autour de la figure de Pandurang Khankhoje, ce roman retrace le parcours d'un révolutionnaire cosmopolite dans l'Inde coloniale puis indépendante.
Avis : Ce roman fait partie de la série Abracadabra, « romans sans fiction », où l'on part sur les traces de personnages historiques. Malgré le langage soutenu, on apprend plein de choses, cela vaut la peine de s'accrocher. Ici on parle de l'indépendance de l'Inde à travers Pandurang Khankhoje (personnage méconnu) qui contrairement à son contemporain Gandhi prônait la lutte armée. Il a beaucoup voyagé, vécu en exil, notamment au Mexique (où il s'est marié, a eu des enfants, a fréquenté le couple Kahlo-Rivera), était un scientifique reconnu dans son domaine, l'agronomie. le seul reproche que je fais à ce roman est qu'il manque une carte de l'Inde : en effet, Patrick Deville raconte en parallèle de l'histoire son propre voyage dans ce pays.
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Que du bonheur, Samsara, le 9 ème ouvrage de Deville nous emporte vers son immense érudition. A l'ombre de Khankodje, on y croise Gandhi, Modotti, Diego Riviera, Lawrence d'Arabie, Wilhelm Wassmuss, Troski, Lénine.. Nous prend par la main afin de traverser l'Inde d'hier et d'aujourd'hui. J'y ai appris des mots aussi que j'ignorais comme ingambe. Deville se prête à merveille à la lecture à haute voix. A lire absolument après les précédents ouvrages. Deville donne envie de lire des bio de Traven, Annie Mascarene, la reine de la guerre des Cipaye, Tina Modotti etc... Ouvrage incontournable de cette rentrée littéraire.
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