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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Fatou Diome a 32 ans quand elle écrit « Le ventre de l'Atlantique ». Enfant illégitime, Fatou est née au Sénégal puis elle a émigré en France, à Strasbourg, où elle termine en 2003 un doctorat de lettres modernes. Rejetée par les siens pour cause d'illégitimité, elle se propose dans cet ouvrage de nous expliquer l'Afrique, mettant l'accent sur la vraie nature de l'Eldorado que représente la France pour les jeunes Sénégalais.

Dans ce premier roman, Fatou se met en scène : elle raconte, sans pudeur, son émigration, ses joies et ses déboires. Son regard est lucide, acéré et sans complaisance : elle dénonce les obstacles à l'immigration, les rigueurs de l'hiver strasbourgeois, les chimères, la pauvreté, la précarité des exilés, leur misère, la promiscuité des foyers Sonacotra, la ségrégation, le racisme et la solitude de ses frères Sénégalais, partis à la recherche d'un petit coin de paradis. La France, terre d'accueil, a un gout amer pour Fatou Diome. Elle se souvient. Son frère, voulait la rejoindre pour entrer dans un club de foot, devenir un champion et gagner des millions : l'argent, synonyme d'ascenseur social, était censé faire des miracles. Il la relançait au téléphone, sans arrêt, et lui demandait de lui payer un aller simple en avion pour venir en France. Fatou arrivera à l'en dissuader. Elle a eu du mal à lui faire comprendre et à faire admettre aux siens que cette France mythique vers laquelle ils portaient tous leurs regards ne valait pas leur petit coin de terre, Niodor, petite ile située au sud-ouest du Sénégal, lieu de naissance de la narratrice.

Le style de Fatou Diome est vivant, assez coulé, attachant, fleuri et parfois passionné. Vous découvrirez des scènes de vie du village, la gastronomie locale réduite au couscous de poisson, au thiéboudjéne et au poulet yassa, les coutumes ancestrales, les marabouts qui promettent monts et merveilles (« elle courra derrière toi comme un chien derrière son maitre »), les parents qui marient leurs filles de force, les petits commerce, les dettes qu'on ne peut rembourser, des émotions, des cris de désespoir et des joies. Dans le récit de Fatou Diome, l'Afrique en prend également « pour son grade », car, voyez-vous, l'Afrique n'est pas un Eldorado sauf pour quelques quinquagénaires occidentaux attirés par les beautés locales, tentés par de petits trafiques et se soulant au whisky dans des hôtels cinq étoiles pour touristes. Quelques touches de poésie émaillent l'ouvrage. Les personnages sont très typés : il y a Salie (en fait l'auteure) qui vit en France, Mandické qui veut devenir champion de foot dans un club Français, Sankélé jeune femme au destin tragique (puisque son mari jette en mer le fruit illégitime de ses entrailles), El-Hadj, l'homme de Barbès, revenu à Niodor après s'être enrichi à Paris, Paolo Maldini, superbe idole du football Italien, Ndogou, ex-collégienne et responsable du centre téléphonique de Niodor, Ndétaré, l'instituteur marxiste et syndicaliste qui apprendra quelques rudiments de français à Mandické, Moussa, immigré qui reviendra au pays en charter, encadré par les gendarmes, et qui se suicidera, incapable de se refaire une vie convenable au pays, Gnarelle, une seconde épouse (au Sénégal, c'est la polygamie), qui pour récupérer son mari n'hésitera pas à coucher avec un marabout, Garouwalé, grand adolescent toujours prêt à dire et à redire, et encore bien d'autres ...

Alors, ce premier roman vaut-il le détour ? Oui, si vous êtes passionné par les problèmes de l'immigration. Mais, autant vous le dire, dans cet ouvrage le football est partout, alors si vous n'êtes pas accroc à ce sport vous aurez probablement du mal à poursuivre votre lecture. Un autre point à noter, « Le ventre de l'Atlantique » a manifestement été écrit par une auteure que les thèses marxistes ne laissaient pas indifférente : en Europe, vous êtes d'abord noirs, accessoirement citoyens, définitivement étrangers (page 202). Alors, au-delà de l'absence de concessions, vous aurez peut être l'impression de lire un tract stigmatisant la condition ouvrière des immigrés Africains en France car l'Afrique y apparait comme manifestement manipulée par l'occident : génération africaine de la mondialisation, attirée, puis filtrée, parquée, rejetée, désolée, nous sommes les Malgré-nous du voyage (page 250). Un peu grosse, la ficelle ? Peut-être, car si l'Afrique peine à retenir les siens c'est aussi parce qu'elle ne se presse pas de bâtir les conditions de la confiance dans un avenir local. Maintenant, prenons un peu de recul. Ce que nous conte Fatou Diome, c'est le mal-être de tout être humain déraciné. Elle sent manifestement qu'elle n'est plus tout à fait Sénégalaise et qu'elle ne sera jamais tout à fait Française. C'est probablement la triste réalité de tout immigré, qu'il soit Africain, Brésilien, Russe, Chinois ou d'une autre nationalité. Fatou est une exilée en permanence (page 294); elle est désespérément en quête d'une terre d'accueil (page 295). Douce utopie ? On est toujours rattrapé par son histoire personnelle, accroché à ses racines. Alors oui, Fatou Diome souffre : elle écrit, répondant à une voix intérieure qui lui intime d'obéir, pour dire et faire tout ce que sa mère n'a pas osé dire et faire (page 262) mais aussi pour exprimer sa solitude d'immigrée et son regret d'être rendue si loin du rugissement des pagaies, des parfums de la mer et des algues de l'Atlantique. le mal du pays dans toute sa splendeur !

Un livre authentique, simple, à mi-chemin entre politique et roman auto-biographique. A ne pas négliger.
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Voilà un premier roman enthousiasmant qui montre avec un regard acéré, la chimère que représente la France pour de jeunes africains. Salie elle, est sur le sol français, seule après un mariage et un divorce qui la laisse seule et désemparée, elle découvre bien vite que l'Eldorado est jonché d'obstacles, bien loin de l'image rêvée. Que la précarité est le lot de nombreux exilés. Son jeune frère Madické, plutôt bon footballeur rêve de rejoindre sa soeur pour lui aussi « profité du Paradis idyllique ».
Un double regard que Fatou Diome (qui elle-même a vécu cette expérience en débarquant à Strasbourg) sait de quoi elle parle.
Son roman est réussit car il n'est jamais dictatique, l'auteur manie avec talent humour, légèreté, pour porter un regard lucide sur une triste réalité. le tout dans un style fluide, généreux et très attachant. L'espoir fait vivre, mais combien de temps ?
Un joli roman pour découvrir l'univers de Fatou Diome.
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Dans ce premier roman très prometteur, Fatou Diome insufflait beaucoup de sa propre histoire à son héroïne, Salie, jeune sénégalaise émigrée à Strasbourg parce qu'elle n'avait pas trouvé sa place dans son village et pourvue d'un talent, l'écriture. Son jeune frère, Madické, passionné de foot, voit dans le ballon rond la possibilité d'un avenir radieux en Europe, un avenir au pays de l'opulence, où l'argent coule à profusion et où tout est facile. Et Salie a toutes les peines du monde à tenter de l'en dissuader...
Ce texte, très pédagogique, tente "d'expliquer l'Afrique" aux cartésiens occidentaux que nous sommes, et décrypte le miroir aux alouettes que représente pour les sénégalais un pays comme la France. Parallèlement, Fatou Diome met aussi le doigt sur la difficulté à faire admettre aux Sénégalais que la France n'est pas le paradis qu'elle semble être, vue des tropiques.
On dévore ce texte, bercé par une langue fleurie, sans complaisance, et pleine d'humour.
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Je me suis dirigée vers le Sénégal ces derniers jours. Un voyage découverte pour une auteure encore inconnue pour moi. La lecture fut à la fois rude et plaisante. Je pense que les causes des difficultés viennent du style de l'écriture, trop dense. Ecrit comme un monologue, je n'ai pas pu le lire les pieds en éventail.

L'auteure parle au nom de l'Afrique. Elle a placé dans son texte tous ses combats et ses revendications. J'ai senti que son amour pour son pays était très fort, même si elle s'en est arrachée et qu'elle en parle d'un point de vue extérieur aujourd'hui. Enfant illégitime, la complexité du sentiment identitaire s'est installée très tôt dans sa vie. Sans cesse, elle a recherché vers un ailleurs possible une place qui aurait pu devenir sienne. Son chant lyrique pour une recherche de liberté est d'ailleurs très beau.

Si je dois donner un aperçu du livre, je dirais qu'il représente un appel. Il est question de tout ce qui va mal en Afrique, comme par exemple les conditions de pauvreté ou le paludisme, poussant les Africains à vouloir s'échapper de la misère ambiante vers la France, lointain Eldorado qu'ils rêveraient de rejoindre. de belles pages lyriques nous emmènent sur la vague du "partir" et du "revenir", mouvements de l'errance, de la solitude, de la tristesse, mais aussi de l'envol, de la conquête, du renouveau, du risque,… L'émigration est vastement et bellement explorée dans ce roman.

L'auteure se penche sur la question des femmes, objets de trocs dans des négociations, ou objets de collection dans des mariages polygames. J'ai aimé les proverbes africains, ils sont merveilleux. Ils m'ont rappelé les nombreux proverbes et chansons dont ma grand-mère méditerranéenne aimait agrémenter le quotidien. Je me demandais toujours dans ces moments-là comment elle faisait pour se rappeler des justes au moments propices. Cela pourrait peut-être paraître ridicule de ne pas m'en être aperçue auparavant, mais en y réfléchissant, je m'aperçois aujourd'hui que ces proverbes, dictons et chansons sont du langage.

Pour revenir au "Ventre de l'Atlantique", j'ai aimé l'engagement, la ferveur. Certaines pages sont très belles. Cependant, j'ai un peu souffert du manque d' "illustration" par les histoires des personnages (y compris la narratrice – auteure), les intrigues. Fatou Diome parle de tant de choses dans ce livre que ce serait dommage de ne pas le lire pour écouter son appel. J'ai eu personnellement un gros coup de coeur pour toutes les pages sur l'émigration, l'expatriation – elles sont, je dois dire, absolument sublimes.
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Je suis bien triste de l'avouer, mais ce livre ne m'a pas plu plus qu'il le faut. Et pourtant, j'aime bien les récits où le narrateur migre vers une nouvelle contrée... avec tout les apprentissages que ça comporte et la capacité d'adaptation dont il doit se munir. Mais je suis restée plus hermétique à celui-ci... Peut-être à cause de l'écriture, que je n'ai pas trouvé assurée. Je comprends que c'est un premier roman, soit, et je ne suis personne pour juger d'une écriture, puisque je n'écris pas moi-même... Je parle seulement du sentiment ambivalent que m'a donné la plume de Diome. Et puis, beaucoup de référence à un sport que je n'aime pas tant... Bref, une couverture très engageante pour moi, qui me promettait une traversée éprouvante... surtout avec le titre, et qui malheureusement, ne l'a pas fait avec moi. Il en faut pour tous les goûts, qu'ils disent ! ;)
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Et, si pour changer, on causait FOOT !

Salie est partie en France. Son frère veut la rejoindre. Pour lui, la France représente le pays où tout est possible, où tout peut lui réussir, une Terre promise. Il a ses modèles : les footballeurs sénégalais. Ils sont les rois dans leur pays d'origine et leur avenir en France est une réussite, une intégration parfaite… Une seule idée en tête : fuir son triste destin. Mais Salie voit les choses différemment. Elle vit en France, rencontre quotidiennement des galères, se frotte à la ségrégation, au racisme, à la pauvreté. Comment faire comprendre l'autre coté du miroir à son frère ? Un frère qui ne comprend pas les craintes de sa soeur, qui ne veut pas croire en ses difficultés et n'accepte pas que la France ne soit pas le pays idéal alors que ses idoles arrivent si bien à le faire rêver là-bas…

Un constat bien amer de ce que peut être la vie d'une expatriée dans un pays qui est loin d'être une terre d'accueil. Je tiens à préciser que ce roman date de 2003. Toute ressemblance avec des footballeurs actuels serait fortuite. Si pour des millions d'africains, le football continue de faire rêver, pas sûr que l'image donnée en soit très flatteuse. Enfin, ceci est un autre débat, car le sujet principal du roman reste l'immigration, entre le rêve de partir vers ce pays "idyllique" et la triste réalité d'une expatriée qui ne rêve plus qu'à un retour improbable dans son pays d'origine...
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
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Par le biais de ce roman, je découvre le Sénégal avec le thème de l'immigration. Fatou Diome a un talent de conteuse. Cependant, je préfère de loin Calixthe Beyala. Une histoire sympathique (si j'ose dire) qui met en garde l'échec de l'immigration, ou du moins ses travers. Toutefois, ce livre ne sera pas un de mes coups de coeur mais il restera dans ma mémoire comme découverte de la littérature africaine.
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Le ventre de l'Atlantique dépeint une vision sénégalaise de la France, ses rêves, ses croyances et la réalité de l'émigration. Madické, jeune sénégalais, footballeur féru de l'équipe italienne rêve de devenir un footballeur professionnel en France. Sa demi-soeur qui vit à Strasbourg essaie de l'en dissuader.
Ma lecture a été laborieuse car le football et les retranscriptions de match sont trop longs et trop présents. Je me souviendrais des trente premières pages relatant un match…. Trop long et inintéressant pour moi et je ne voyais pas où l'autrice voulait en venir. Pourtant, le style est agréable, la thématique de l'émigration vu par des sénégalais m'a plu.
En conclusion, une lecture en demi-teinte.
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Le Ventre de l'Atlantique est le premier roman d'une auteure africaine, vivant en France. Elle raconte, de manière très imagée les fantasmes que nourrissent les Africains sur la France (pays rêvé où l'on est payé à rien faire), le désir d'émigration, l'envie féroce et le mépris amer vis-à-vis de ceux qui sont de l'autre côté, qui ont réussi mais qui "se prennent pour des Blancs", ces individualistes, qui n'acceptent (parce que c'est la tradition) que de mauvaise grâce de se faire pomper le sang et l'argent par ceux qui sont restés au pays. Fatou Diome raconte les archaïsmes, les superstitions, l'emprise des sectes religieuses sur un peuple semi-analphabète que l'Etat a abandonné. Elle raconte aussi le racisme des Français (sans victimisation mais avec acuité) qui encensent ces Noirs lorsqu'ils marquent des buts en équipe de France mais qui leur jettent des bananes quand un match est perdu. C'et un premier roman qui comporte de maladresses (longues descriptions de matches de foot, mantra sur la dignité inutile) mais qui n'en demeure pas moins une belle découverte.
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Premier roman (précoce) de cette auteure migrante venue du Sénégal. Nous lui devons un "récit de migration" où l'auteure s'identifie largement avec la narratrice, mais dont le thème n'est presque pas sa propre migration, mais celle qu'elle s'emploie par tous les moyens à épargner à son frère, en dépit des nombreuses sirènes qui retentissent dans son petit village insulaire. A partir de ce personnage fraternel et de son obsession du football, véritable emblème dans la mythologie de la migration - et là réside sans doute le côté le plus original du roman -, une variété de personnages secondaires du village se déclinent par rapport à leur posture face à l'émigration vécue et/ou fantasmée, sous forme d'épopée (ou de palabre) villageoise : l'instituteur idéaliste exilé, l'homme de Barbès, le vieux pêcheur, la grand-mère, les copains du frère.
Souvent dans les premiers romans d'auteurs migrants, le poids autobiographique mêlé au besoin du témoignage endigue le flux d'une véritable "poétique de la migrance". Celui-ci ne fait pas exception. de plus, une certaine "primeur" stylistique peut être perçue par des sauts de registre et autres écarts apparemment pas entièrement maîtrisés.
Pourtant, en partielle contradiction avec mes propos sur l'autobiographique, je m'aperçois avec plusieurs jours de recul que les citations que j'ai retenues et que voici, y sont toutes afférentes (mais, plus que d'une contradiction, cela relève sans doute de mes propres intérêts) :

« Irrésistible, l'envie de remonter à la source, car il est rassurant de penser que la vie reste plus facile à saisir là où elle enfonce ses racines. Pourtant, revenir équivaut pour moi à partir. Je vais chez moi comme on va à l'étranger, car je suis devenue l'autre pour ceux que je continue à appeler les miens. » (p. 190)

« le petit carton de la nationalité ne se colle pas sur le front ! A moins de se tailler des tchadri dans le drapeau de Jeanne d'Arc, ils n'ont aucun moyen de convaincre les défenseurs de la préférence épidermique de leur légitimité tricolore. » (p. 202)

« Enracinée partout, exilée tout le temps, je suis chez moi là où l'Afrique et l'Europe perdent leur orgueil et se contentent de s'additionner : sur une page, pleine de l'alliage qu'elles m'ont légué. » (p. 210)

« L'écriture est la cire chaude que je coule entre les sillons creusés par les bâtisseurs de cloisons des deux bords. Je suis cette chéloïde qui pousse là où les hommes, en traçant leurs frontières, ont blessé la terre de Dieu. » (p. 295)

« Je cherche mon pays là où on apprécie l'être-additionné, sans dissocier les multiples strates. Je cherche mon pays là où s'estompe la fragmentation identitaire. […] Je cherche mon territoire sur une page blanche ; un carnet, ça tient dans un sac de voyage. » (p. 295-296).

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