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sur 306 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
À chacun sa vision de la fin du monde, pour Joseph Kamal, il va s'en faire une longue idée non pas une fois ni deux, mais trois fois.
Roman assez étonnant où l'enfer est ici à juste titre, les autres ou à défaut des autres, soi-même...
Incarcéré, Joseph se confronte au monde carcéral dans toute sa laideur et sa basesse. Harcèlement, fouilles intempestives, injures, Joseph suffoque entre ces gens qui ne semblent nourris que par la haine.
Survient une catastrophe nucléaire où la moitié de la population française est disséminée. Joseph se retrouve seul. Seul avec lui-même.
Cette partie regorge d'une poésie toute particulière trouvant son essence dans la nature environnante. Seul bémol dans la contradiction entre ce style onirique et le langage du personnage, souvent grossier et brutal.
Passé ce bémol, Sophie Divry dessine un roman où la nature est seule maîtresse des hommes. Joseph plonge coeur ouvert dans cette solitude où il délaisse peu à peu la haine des autres pour l'amour de son environnement. Chocolat, le bélier noir ou Fine la petite chatte sont autant de réconforts pour Joseph qui aura compris que souvent, on est bien plus heureux entourés d'animaux qu'auprès des hommes.
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De l'enfer au paradis ?
Le dernier opus de Sophie Divry commence comme un roman noir : le narrateur, Joseph Kamal, est condamné à être emprisonné pour sa complicité dans un braquage, braquage au cours duquel son frère a trouvé la mort. Il va subir l'enfer carcéral : la promiscuité, la saleté, la violence, les humiliations, le sadisme des matons, la protection ambiguë des caïds…
Le style adopté par l'auteure correspond tout à fait au statut du narrateur, un jeune homme sans éducation qui s'exprime par des phrases courtes et des notations crues pour décrire l'abjection.
Et puis intervient l'impensable : une catastrophe nucléaire irradie la moitié de la France ((Joseph ignorant les détails concernant l'explosion, le lecteur n'en apprendra pas plus), la prison est évacuée et Joseph en profite pour s'évader. Il décide de vivre seul, en pleine nature, à l'écart d'un genre humain qui a révélé toute sa bassesse et pour ne pas être repris par les autorités.
La suite du roman, écrite à la troisième ou à la première personne, décrit une renaissance, la renaissance d'un homme qui redécouvre ce dont il a été privé par son incarcération, les mille merveilles de la nature : c'est un véritable chant du monde, pour reprendre le titre d'un roman de Giono, que l'auteure exprime en nous faisant partager les sensations et les sentiments de son personnage.
Mais, pour ce Robinson misanthrope, la solitude se fait parfois très pesante, la vie n'est pas toujours facile, notamment en hiver, il faut aller toujours plus loin pour trouver de quoi se nourrir : les nuages s'accumulent sur le paradis que s'est construit Joseph...
Une belle réussite romanesque et poétique.
Merci à Babelio et aux Editions Noir sur Blanc pour cette découverte.
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Une attaque à main armée d'une bijouterie par deux malfrats tourne mal. Lorsque les policiers interviennent, l'un des bandits tire et il est aussitôt abattu. L'autre est arrêté. Il s'agit de Joseph, son frère, qui est conduit en prison où tout est fait pour l'humilier. Gardiens et détenus font assaut de brutalité.
Joseph était un type bien. Il avait un boulot : « J'étais le chouchou de la boîte d'intérim. » Mais il s'est senti obligé d'aider son frère pour braquer la bijouterie, celui-ci étant dans une mauvaise passe. « C'était impossible de le laisser tomber face à ses amis. Ces mecs-là, ils auraient été capables de le descendre, s'il s'était défilé. »
En prison, Joseph va devoir courber la tête et s'adapter. « Ici les gardiens sont capables de vous laisser crever, les amis de vous trahir. » Il n'en peut plus. On ne sait s'il va pouvoir supporter cet enfer. C'est une explosion nucléaire qui va le libérer : la moitié de l'Europe irradiée, la moitié de la France évacuée. Cette catastrophe lui a donc permis d'être évacué de la prison, puis de s'enfuir.
Il va se retrouver seul en zone interdite et, au début, va vivre dans une petite maison comme un rat. Il se terre la journée pour ne sortir qu'au couchant pour aller boire et chercher de l'eau au ruisseau. Il rapporte aussi quelques provisions récupérées dans les maisons vides. Sa hantise est d'être aperçu par un drone.
Mais, petit à petit, il va reprendre de l'assurance et tenter de vivre normalement, n'hésitant pas à faire pousser des légumes, tendre des pièges pour les lapins…
Les paysages décrits par Sophie Divry sont magnifiques et la nature enchanteresse. La faune et la flore sont décrites de manière extrêmement poétique.
Si Joseph est sensible à cette beauté de la nature, il éprouve néanmoins beaucoup de difficultés à vivre seul. Alors qu'au cours de son incarcération, il dit lui-même : « Combien je donnerais pour ne plus voir personne, pour ne plus les entendre, ces hommes, ces détenus… » Voilà que maintenant la solitude lui pèse atrocement.
Par chance, un mouton et un chat qu'il parviendra, grâce à la nourriture, à approcher, deviendront ses compagnons de vie jusqu'à la troisième fin du monde qui va le frapper.
Trois fois la fin du monde est un livre romanesque et poétique, une véritable ode à la nature. Il pose la question suivante : vivre avec les autres est souvent un véritable enfer mais vivre seul est-il supportable ?
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Sophie Divry est une auteure protéiforme : si l'on repense à le diable sort de la salle de bain ou encore à La Condition pavillonnaire, les sujets et le style étaient déjà très différents. Et c'est avec Trois fois la fin du monde un nouvel exercice de style : la parole est donnée à Joseph, qui s'est fait chopé lors d'un flag, sur un braquage qui a mal tourné : son frère Tonio a été abattu par la police et Joseph se retrouve sous les barreaux.
C'est tout un univers que découvre le jeune homme : avec sa cruauté, ses trahisons, les choix impossibles, la violence, qu'elle vienne des co-détenus ou des matons. de quoi se forger une armure psychique , avec le risque que ce qui restait de bon en vous disparaisse à tout jamais.
C'est un événement inopiné, mais une bonne aubaine pour Joseph, l'explosion d'une centrale nucléaire, qui lui permet d'échapper à l'univers carcéral, pour découvrir une extrême liberté, qui a tout d'une robinsonade . Seul dans les ruines d'un monde qui semble disparu, Joseph apprend la survie et découvre le manque des autres.
Le récit alterne le monologue intérieur du héros et la narration externe. Joseph utilise un lexique de petite frappe, auquel s'ajoutera le parler de la tôle. Et c'est une constante tout au long du récit, même lorsqu'adapté au cadre de solitude qui est le sien, et nourri de ce que les ruines lui offrent comme ressources de stratégie pour suivre, Jo reste un gamin paumé. Si l'enfer a pu être les autres, l'enfer est aussi présent sans les autres, sans infos, sans rumeurs, sans présence humaine même médiatisée.

Beau récit que l'on pourrait affiler au nature writing des anglo-saxons. Robinson des temps modernes, dont le passé lui interdit à jamais la recherche de ses semblables, Joseph s'est bien involontairement isolé, pour se retrouver face à lui-même au coeur d'une nature qui ne lui fait pas de cadeaux.

Un tout petit bémol, très personnel : c'est la voix de Sophie Divry, que j'écoute avec plaisir dans Les papous dans la tête, que j'entendais en parcourant le récit. Difficile alors de laisser Joseph se dessiner au fil de son monologue, et de permettre à l'histoire d'exister pour elle-même.
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Ce livre est trés différent des autres oeuvres de Sophie Divry.

"Trois fois la fin du monde" nous surprend par sa construction intelligente et parfaitement maîtrisée, tout d'abord la brutalité du monde carcéral où notre héros : Joseph, naïf et gentil, âgé de 22 ans, se retrouve après un braquage avec son frére Tonio qui y perd la vie,.

L'auteur nous décrit avec un réalisme effrayant la vie en prison : promiscuité et violence inouïe , harcèlement continuel , effacement de la personnalité et intimidation , espèce de survie terrible au quotidien, fouilles humiliantes, vacarme , insultes , tutoiement systématique , cris des matons et coups bas des caïds, l'enfer de l'enfermement .....

Puis la mort vient un matin, deuxième partie: une catastrophe nucléaire survient.

Troisième partie : Joseph se cache dans la zone interdite , recherche la solitude absolue , s'installe dans une ferme désertée .

Il retrouve la maîtrise de son temps, organise une vie au sein de la nature comme un Robinson Crusoé , le vent, les odeurs, la terre qui respire, la nuit qui prend le domaine, des moments incroyables au contact de la nature sauvage , d'animaux : la tendresse de Fine la chatte et Chocolat le mouton. ....

Cette vie de solitude qu'il ne partage avec personne le pousse à réfléchir au fait qu'il ne peut se passer des autres , le contact lui manque , l'homme est un animal social qui ne peut se passer de ses semblables ...." Y a t- il encore des hommes quelque part ? "
L'auteur est une magicienne des mots.

Ce récit est à la fois intime et universel, puissant, prenant , d'une intensité psychologique et d'une justesse saisissante , poétique et envoûtant, original dans sa forme même si nous ne saisissons pas tout à propos de la catastrophe et des radiations ......Petite restriction....
C'est une ode à la nature . L'écriture est imagée et fluide. le lecteur visualise l'écoulement des saisons et ses variations ....à l'infini....

Cet ouvrage ressemble à une espèce de parabole à propos de la Liberté et de la Solitude ! L'auteur a l'art de nous surprendre et de se renouveler .

Quels rapports entre" la cote 400"," la condition pavillonnaire" , "Quand le diable sort de la salle de bain" ?
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Ce roman nous raconte l'histoire de Joseph Kamal, adolescent sans histoire, avec plutôt de bons résultats à l'école, une vie ordinaire qui bascule brutalement car il a voulu accompagner son frère dans un braquage, alors qu'il n'en avait pas envie mais ne se sentait pas le droit de le laisser y aller tout seul.

« J'étais sûr que ce braquage était une mauvaise idée et qu'il allait à sa perte. Mais comment est-il fait celui qui laisserait perdre son frère sans prendre le risque de se perdre avec lui. » P 14

Le braquage dérape et son frère est tué par des policiers, et c'est le brusque contact avec la prison, la fouille, les conditions de détention, les relations avec les caïds qui ont connu son frère, et il se retrouve, alors qu'il est primo-délinquant dans le quartier des criminels, ce qui va entretenir sa haine et sa colère vis-à-vis des surveillants.

Et puis, un jour, l'explosion d'une centrale nucléaire de dernière génération provoque l'irradiation de la moitié de la France, et joseph profite du transfert des détenus vers une zone non contaminée pour s'échapper. Il va se mettre en mode survie, tenter de résister, apprendre à se nourrir, à cultiver des légumes. Il entre dans une nouvelle dimension, découvre la solitude, son silence assourdissant qui contraste tant avec le bruit et la violence de la prison.

J'ai aimé la manière dont Sophie Divry a construit son roman dystopique en trois chapitres totalement différents les uns des autres, avec des titres lapidaires : « le prisonnier », « La catastrophe » et « le solitaire » ; tout au long du récit, elle passe du « il » au « je », du langage maîtrisé au langage carcéral, avec des constructions de phrases qui changent complètement, augmentant l'intensité du récit ; on passe aussi de la description à la réflexion, aux émotions, et l'évolution du héros dans ce récit est très intéressante, son apprentissage de la solitude.

De la catastrophe nucléaire, on saura en fait peu de choses car ce n'est pas l'objectif du livre, c'est simplement le déclencheur de la transformation de Joseph. On passe d'un milieu violent, fermé avec la prison à une nature, certes libre mais à quel prix ?

Comment survivre si l'on est tout seul, tel Robinson sur son île, à l'affût des bruits bizarres, des dangers éventuels, un retour à la terre, au rythme des saisons et des cycles veille-sommeil… lui qui voulait tant être seul, tant la promiscuité lui pesait en prison, tant il était avide de silence :

« J'ai tellement envie d'être seul maintenant. Entièrement seul. le besoin de solitude me torture presque physiquement. Ah qu'on me donne de l'air, de l'espace. Combien je donnerais pour ne plus voir personne, pour ne plus les entendre ces hommes, ces détenus, ces corps près du mien, ne plus les voir bouger, combiner, dominer, causer, ne plus les entendre mastiquer, se gratter, ronfler, pisser, et répandre autour de moi toute cette saloperie d'humanité. » P 65

Sophie Divry pose aussi une autre question : l'homme peut-il survivre seul ? Même s'il tente de vivre en harmonie avec la Nature, n'a-t-il pas besoin d'être en contact avec ses congénères ?

Ce roman est une ode à la vie et à la Nature, et à son respect surtout ! sujet qui touche chacun de nous, étant donné le massacre généralisé de la planète auquel nous assistons en ce moment, avec les catastrophes provoquées par l'homme et la nécessité de réapprendre tous les gestes les plus élémentaires que nos Anciens maîtrisaient et qu'on oublie.

C'est le premier livre de Sophie Divry que je lis et c'est une belle découverte ! et je remercie vivement Rakuten et les éditions « Notabilia » qui m'ont permis de lire ce roman!

#MRL18 #Rakuten

Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Ce que j'ai ressenti:

*Onde de choc fois trois/Onde de choc trois fois…*

Perdre son frère, sa liberté, sa dignité pour une seule journée d'erreur de jeunesse, c'est le lourd fardeau que Joseph Kamal va payer, maintenant, entre les murs de cette prison. Condamné à subir la haine, démuni face à cette violence insensée. Sophie Divry nous emmène au coeur de ces cellules où les comportements sont désaxés, les relations déstructurées, l'air nauséabond, l'atmosphère irrespirable, et même, toi, lecteur, tu te prends en pleine face, la violence démesurée de ces établissements de l'ombre…C'est le premier uppercut qu'elle va t'infliger, et si, jamais tu te relèves encore, malgré la douleur, les blessures ouvertes, les failles béantes dans l'inconscient, elle ne s'arrêtera pas en si bon chemin…Elle te contera les enfers: trois fois. Trois fois trop bouleversant, trois fois trop bien, trois fois trop intense. A coups de plume percutante, à coups de caresse poétique, à coups de maux déchirants. Les mots justes, pour le dire…Que la fin du monde, peut prendre tellement de formes…

« Mais comment est-il fait celui qui laisserait perdre son frère sans prendre le risque de se perdre avec lui? »

*Solitude et Mal-être…*

Lecture en trois temps, mais juste le temps de retenir ma respiration, entre ses pages, je me suis perdue, avec plaisir, dans ces fins du monde, dans le monde des hommes, dans un monde sans hommes, dans le monde de Sophie Divry qui y sublime la Nature, et raconte la vie d'un homme égaré, ses états d'esprits, ses coups du sort. Dans le bruit ou dans le silence, c'est la solitude qui asphyxie Joseph : seul face aux autres, seul face à la catastrophe, seul face à l'environnement. Jamais bien tout seul, jamais bien seul, jamais bien…Une souffrance intime, un vide à combler, une vie aux multiples fractures. C'est une robinsonnade moderne qui touche de près, nos plus profondes angoisses…

« La peur s'efface, une ivresse la remplace. »

*Retour aux sources…*

J'ai beaucoup aimé la sensibilité et la plume de Sophie Divry. Elle peut décrire aussi bien la violence que les instants suspendus, la beauté d'un paysage que la virulence d'une échauffourée. Elle tend toujours vers un espoir, comme s'il était à portée de main, peu importe le lieu, le temps, la personne…Magnifique et époustouflant dans sa singularité, j'ai adoré cette lecture. A l'aube d'une des fins du monde, une si belle histoire contée avec délicatesse, ça promet encore quelques jolis instants à vivre, sur Terre….



« Oui c'est cela. Que les étoiles le prennent, que les étoiles l'aspirent, qu'il sombre dans le ciel. »



Ma note Plaisir de Lecture 9/10
Lien : https://fairystelphique.word..
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Joseph découvre la prison en même tant que la douleur de perdre son frère, tué lors d'un braquage. Désormais, il va connaître l'isolement au milieu des autres, la saleté, la perte d'intimité. Sauf qu'une catastrophe industrielle inattendue va lui permettre de s'enfuir de la prison, Joseph se retrouve seul, dans la zone touchée par les radiations. Il va lui falloir survivre coûte que coûte.

Sophie Divry est une romancière ( elle est 100% lyonnaise, car résidente lyonnaise :o) prometteuse, qui est parvenue dans plusieurs de ses romans à insuffler , une certaine poésie dans son univers qui pourrait sembler un peu banal en premier lieu.

Projet original qui se propose de nous faire passer de la dureté du du milieu carcéral à celle de la nature la plus sauvage, le lecteur passe brusquement d'une cellule de prison à l'immensité de la nature sauvage.

Trois fois la fin du monde combine les genres ( drame carcéral, chronique social, récit de survie) avec ambition et réussite en allant même du coté du roman philosophique : Vivre seul rend-il plus heureux??

Trois fois la fin du monde est donc une agréable découverte sur un thème déjà exploité mais transposé dans notre monde complexe basé sur la possession Comme dans ses précédents romans, Sophie Divry sait faire montre d'un un sens de la tension dramatique pour livrer un roman singulier et puissant.


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Robinson Crusoé à la française

En jetant un repris de justice dans une zone contaminée par un accident nucléaire, Sophie Divry nous livre une version trash de Robinson Crusoé et sans doute l'un de ses romans les plus aboutis.

Trois fois la fin du monde aurait aussi pu s'intituler trois expériences ultimes, de celles qui laissent des traces indélébiles et pour lesquelles l'auteur de la Condition pavillonnaire et de Quand le diable sortit de la salle de bain retrouve son terrain de prédilection, celui des moments de crise qui obligent à faire des choix, peut-être pas toujours conscients.
Comme il se doit, tout commence très mal. Tonio entraîne son frère Joseph dans un braquage qui vire au drame. Son frère est tué et Joseph arrêté. le jeune va alors très vite être confronté à la condition détentionnaire, aux règles qui régissent la vie dans les centres de détention et qu'il va devoir assimiler très vite. Car cette première «fin du monde» ne laisse guère la place à la fantaisie. En dehors ou avec la complicité des matons, il faut apprendre à survivre sans confort, nourriture, sommeil, calme et affection, mais surtout à une hiérarchie brutale et à une promiscuité répugnante. «Je me demande pourquoi mon frère ne m'a jamais dit un seul mot sur ses années de prison. Ça me serait utile aujourd'hui. Mais il est vrai que je n'étais pas censé m'y retrouver. C'était lui le voyou de la famille, pas moi.»
À la sidération du néo-détenu vient s'ajouter celle du lecteur qui découvre la loi des caïds, la violence aveugle et les châtiments qui n'ont rien à voir avec une quelconque justice. Avec Joseph Kamal, il se rend compte de l'abomination que peut représenter un séjour carcéral en France aujourd'hui. Et sous la plume de Sophie Divry s'éclairent subitement bien des questions. Les statistiques sur les taux de récidive ou sur la dimension criminogène de nos prisons s'incarnent ici. Avec de tels traitements, comment ne pas sombrer… ne pas être habité par la haine. « Ce n'est plus une haine étroite et médiocre, celle des premières humiliations, non, c'est une haine comme une drogue dure. Elle fait jaillir dans le cerveau des consolations fantastiques. Elle caresse l'ego. Elle transforme l'humiliation en désir de cruauté et l'orgueil en mépris des autres. Je ne hais plus seulement les matons, je hais aussi cette engeance de damnés qui croupit là, encline à la soumission, complice des guet-apens. Dans cette cellule étroite, sans matelas, mes pensées-haine se répercutent d'un mur à l'autre. Je m'y adonne avec plaisir, suivant de longues fantaisies mentales où moi seul, brûlant la prison, reçois le pouvoir de vie ou de mort sur les détenus et les gardiens, les faisant tour à tour pendre, brûler vif, empaler. Parfois la rêverie s'arrête brusquement, mon coeur plonge dans une fosse de chagrin à la pensée de mon frère. Je comprends pourquoi Tonio ne m'a jamais dit un mot sur ce qu'il a vécu ici. »
Aux idées noires vient pourtant se substituer une seconde «fin du monde» tout aussi dramatique : une catastrophe nucléaire. On peut imaginer le vent de panique face aux radiations et on comprend que tout le monde cherche à fuir. Une chance que Joseph ne va pas laisser passer, quitte à tuer à son tour. Un meurtre avec un arrière-goût de vengeance.
Vient alors la partie du livre qui m'a le plus intéressé. Joseph choisit de s'installer dans la zone interdite pour échapper à la police.
Quelque part en France, il rejoue Robinson Crusoé sans Vendredi à ses côtés.
« Toute sa vie, il a été éduqué, habillé, noté, discipliné, employé, insulté, encavé, battu – par les autres. Maintenant, les autres, ils sont morts ou ils ont fui. Il est seul sur le causse. » Il est libre mais seul.
Avec un sens de la tension dramatique, qui avait déjà fait merveille dans Quand le diable sortit de la salle de bain, Sophie Divry va alors creuser dans la tête de Joseph Kamal et nous livrer les pensées d'un homme qui, pour l'avoir déjà perdu, va chercher encore un toujours un sens à sa vie. Magistral!

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Depuis le temps qu'il attendait dans ma PAL, je me suis plongée hier soir dans Trois fois la fin du monde de Sophie Divry, roman de la rentrée littéraire 2018 des Éditions Noir sur Blanc, reçu via net galley.
Après un braquage avec son frère qui se termine mal, Joseph Kamal est jeté en prison. Gardes et détenus rivalisent de brutalité, le jeune homme doit courber la tête et s'adapter. Il voudrait que ce cauchemar s'arrête...
Une explosion nucléaire lui permet d'échapper à cet enfer. Joseph se cache dans la zone interdite.
Poussé par un désir de solitude absolue, il s'installe dans une ferme désertée. Là, le temps s'arrête, il se construit une nouvelle vie avec un mouton et un chat, au coeur d'une nature qui le fascine.
Trois fois la fin du monde est composé de trois parties : la première nous emmène en prison avec Joseph ; la seconde après l'explosion nucléaire ; et la dernière nous relate son installation et sa vie dans une ferme abandonnée.
J'ai lu ce petit roman d'un traite. J'ai apprécié ma lecture même si j'ai trouvé la première partie assez dure. Nous sommes en prison avec Joseph. Il s'est retrouvé là alors que son frère a été abattu devant lui. le braquage a mal tourné et il va le payer cher. Gardes et détenus ne sont pas tendres avec lui et parfois c'est un peu dur à lire.
La deuxième et la troisième partie sont moins difficiles à lire. La seconde partie se lit d'une traite ; elle est courte, et rythmée.
J'ai eu plus de mal avec la troisième partie car son installation est intéressante, sa vie à la limite de la folie, seul avec ses animaux est intéressante aussi. Toutefois c'est un peu lent et il y a quelques longueurs qui font que j'ai parfois un peu décroché.
L'ensemble donne un roman de la rentrée littéraire que j'ai apprécié de découvrir.
Je lui mets un joli quatre étoiles :)
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