Parfois, je ne comprends pas les auteurs. J'ai dû relire deux fois le premier chapitre. C'est important un premier chapitre : il donne le ton, éveille la curiosité, donne envie de continuer la lecture. J'ai lu : "le désert, un navire sans voile, la marche, la mort, le sang, une explosion, on ne peut pas comprendre… "Comme un tableau surréaliste. Heureusement je suis vite sorti du tableau et j'ai trouvé Erik Winter et Bertil Ringmar examinant trois individus tués par balles, gisant dans une mare de sang sur le sol d'une supérette des quartiers nord de Göteborg. "On se croirait à Chicago dans les années 20" s'exclame Ringmar. Et il ajoute, plus tard : "On se retrouve ici dans les quartiers nord, si vivants avec leurs différents groupes ethniques, leurs quatre-vingt-six nationalités, leurs bandes de jeunes hautes en couleur et leurs gangs solidement implantés."
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Puis, j'ai vite reconnu le style si particulier d'Åke
Edwardson fait d'échanges courts de brainstorming entre Winter et Ringmar, de longues réflexions personnelles de Winter et d'auditions souvent sans queue ni tête. Intrigant, lors de la découverte d'un roman de cet auteur ; mais énervant dans la lecture d'autres livres du même auteur. Ce style si particulier ralentit le déroulement de l'intrigue, sans rien apporter de plus au récit. Dans
Ce doux pays, au fil des pages on s'aperçoit qu'on fait du surplace. L'enquête n'avance pas. Ringmar le reconnait "on tourne en rond" dit-il. C'est vrai que les enquêteurs ont affaire à des témoins qui ne veulent pas parler à la police. C'est la règle de cette banlieue. L'enquête consiste donc principalement à poser les mêmes questions aux mêmes personnes à l'occasion de multiples interrogatoires successifs, espérant qu'ils en diront un peu plus à chaque fois. Peine perdue. Lassant! Agaçant même. Heureusement à 40 pages de la fin, un indic fournit enfin une information qui, pour la première fois, va faire avancer l'enquête. Et le récit devient alors passionnant.
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Le roman aborde un sujet de société de plus en plus d'actualité : l'immigration. Et plus particulièrement : l'intégration problématique des nouveaux arrivés, leur difficulté à trouver un emploi et un logement, le risque qu'ils se tournent vers une activité criminelle faute de travail, et la difficulté pour les parents immigrés - qui souvent ne parlent pas le suédois - de contrôler la vie de leurs enfants. Les trois morts de la supérette étant d'origine étrangère, le sujet de l'immigration est donc naturellement au centre de l'enquête. Vers la fin du récit, parlant de la raison probable du massacre, Halders, l'adjoint de Winter, évoque la haine. Un sentiment qu'on rencontre tous les jours dans nos journaux, associé aux maux modernes de nos sociétés. Notons au passage que la Suède "terre d'accueil" a fermé ses portes aux migrants fin 2022.