Il s'agit d'une histoire courte, en 1 tome, et indépendante de toute autre, initialement parue en noir & blanc, en 1996 dans les numéros 1 à 5 de l'anthologie Calibrations. Cette édition est en couleurs ; l'histoire comprend 30 pages de bandes dessinées.
L'histoire commence dans une salle d'interrogation, certainement dans un commissariat. Un individu non identifié interroge Bridget Rinehart, une femme. La scène se passe le 16 juillet 1996, dans une ville non identifiée, au Nevada ou dans l'Utah (cette précision n'est pas apportée non plus). Toute la scène est dessinée en vue subjective ; c'est à dire que le lecteur perçoit l'interrogatoire par les yeux de celui qui le mène. L'interrogateur précise que cette discussion a pour objet de déterminer ce qui s'est réellement passé. Les premiers échanges permettent d'établir que Rinehart et son interrogateur sont d'accord sur le fait qu'elle est la seule survivante d'un massacre qui a exterminé la population d'une petite ville dans le désert dénommée Helen. L'interrogateur indique que Rinegart a été témoin de mutilations effectuées par des extraterrestres sur la population et il souhaite savoir comment elle s'est enfuie de cette ville et pourquoi elle est la seule survivante.
Warren Ellis a commencé sa carriè
re d'écrivain en 1990, en travaillant pour les magazines anglais Deadline et Judge Dredd. En 1994, il a commencé à travailler pour Marvel sur les séries "Hellstrom, prince of lies", "Doctor Doom 2099", Thor (Worldengine) et Wolverine (Wolverine: Not Dead Yet). Parallèlement à ces travaux pour l'un des 2 grands éditeurs de comics américains, il a continué à écri
re des récits pour des éditeurs indépendants, dont il a conservé les droits de propriété intellectuelle. Et parmi ces récits, il a écrit aussi bien des séries longues que des histoires courtes dans des formats diverses et variés. "Atmospherics" a été réédité par Avatar Press en 2011 et en couleurs du fait de la popularité d'Ellis. Cela permet de découvrir un de ses travaux de jeunesse. L'histoire proprement dite est courte (30 pages), peinte par
Ken Meyer junior.
Pour la précédente édition de 2002, Ellis avait rédigé une postface succincte qui est intégrée dans la présente édition. Il explique que l'idée lui est venu en écoutant les théories de
Whitley Strieber (écrivain d'horreur, par exemple
Wolfen, dieu ou diable) sur les expérimentations que feraient les "visiteurs" sur les vaches. Il s'agit pour Ellis de se moquer des élucubrations de
Strieber, tout en s'accaparant cette légende pour en faire quelque chose de plus sinistre. En 30 pages d'histoire, Ellis installe un face à face comme il sait bien le faire, sous la forme d'un interrogatoire. Bridget Rinehart et son interrogateur jouent au chat et à la souris sous les yeux du lecteur qui essaye de se faire son avis. Évidemment Ellis dispose de quelques munitions supplémentaires et le récit réserve plusieurs surprises.
À la lectu
re des planches, il ne m'est pas possible de savoir si Meyer a ajouté la couleur a posteriori, ou si la première édition était en noir & blanc uniquement pour une question de coût d'impression. Il a réalisé ses illustrations principalement à l'aquarelle, en délimitant parfois les contours des silhouettes par le biais d'un trait violet. Il adopte un style réaliste avec quelques détails significatifs. Il est par exemple possible de compter les morceaux de carrelages derrière Rinehart dans la salle d'interrogatoire. Il a une tâche assez complexe pour rendre les illustrations vivantes dans la mesure où le dispositif narratif est très contraignant : quasiment un plan fixe pour les 2 tiers du récit, correspondant au regard de l'interrogateur qui fixe Rinehart assise sur sa chaise, de l'autre coté de la table. Il fait preuve d'assez d'inventivité dans les expressions de Rinehart et ses mouvements limités pour traduire sa tension et ses sautes d'humeur, et autres revirements. de temps à autre, une image ou une courte séquence vient montrer au lecteur la vision intérieu
re de Rinehart alors qu'elle se remémore une scène, ou la vision que donne l'interrogateur des événements. Meyer illustre les "petits gris" avec retenue, et les expérimentations ne sont pas montrées. Il n'y a qu'une image qui semble un peu trop enfantine : une pluie de scalpels dessinée de manière trop littérale.
Au fil de cet interrogatoire, Ellis bâtit un suspense psychologique qui n'a rien de binaire pour raconter une histoi
re d'horreur, avec une chute inattendue. Les qualités de l'illustrateur évitent au récit de ressembler à une succession de cases avec uniquement des têtes en train de parler, défi pourtant audacieux au vu du dispositif narratif très contraignant. Ellis a réalisé d'autres histoires courtes qu'Avatar continue de rééditer telles que Dark Blue et City Of Silence.