Chambre nymphale de
Maude Elyther est un récit déroutant. le début poétique, tourmenté, très mélancolique nous plonge en plein spleen. le narrateur au désespoir nous entraîne dans les ténèbres, dans un monde semi-onirique teinté de sang.
Ces premières pages m'évoquent inévitablement la psychiatrie. On est vite percuté par les émotions qui se dégagent et bousculé par la voix menaçante qui se matérialise dans les moments de doute.
L'homme semble perdu, se cherche avance à petits pas dans diverses directions. Se retrouvera-t-il dans cette incertitude, au milieu de tout ce flou ?
Le sens des choses lui échappe alors que pourtant, il sait, au fond de lui toutes les réponses sont présentes, mais cachées, inaccessibles. Veut-il vraiment les faire ressurgir ? Une impression de schizophrénie s'empare de moi, tout cela est si mystérieux et inquiétant. Qu'est-ce qui lui fait si peur ? Quel monstre enfoui dans le passé ne faut-il pas déranger ?
On oscille sur la corde raide, entre folie et raison, sans savoir de quel côté on va tomber, sans être sûr du côté où se situe le narrateur.
L'histoire est embrouillée, torturée, à l'image de l'esprit d'Otto. Difficultés et gêne face à des sentiments ambivalents, mélange de douleur et plaisir, doute, méfiance devant les blancs de la mémoire, c'est compliqué à suivre et par moment, je m'égare, je me sens malmenée par cette histoire.
Qu'est-ce qui relève du réel, du délire, ou du fantasme ? Comment faire la part des choses tant le mystère est bien entretenu ? L'atmosphère passe de pesante à sordide, c'est oppressant, étouffant, dérangeant. Respirer sereinement au milieu de ces pages relève de la gageure.
Une lutte s'engage. Je lâche prise, ne cherche plus à comprendre, pour me laisser porter, les réponses finiront bien par arriver.
Le récit alterne entre poésie, espoir, tourment et toxicité. Car oui, certains passages sont violents, certaines relations sont malsaines, parfois ambivalentes et fluctuent entre rejet et attirance.
Cependant, le message reste celui de l'espérance.
« La solitude ne m'égratignera plus de ses griffes. Les plaies infectées qu'elle m'a laissées cicatriseront. »
La forme s'adapte au fond avec brio ; une succession de phrases courtes, un rythme saccadé, presque décousu, de nombreuses phrases frustrantes qui s'achèvent en points de suspension sans livrer tous leurs secrets. Tout contribue à créer une atmosphère perturbante, presque suffocante.
La mise en page elle-même est originale. On suit visuellement l'évolution du récit. On comprend qui parle juste dans la présentation du texte.
Au milieu de cette noirceur, une touche de lyrisme et quelques vers viennent adoucir les traits.
En même temps qu'Otto, le texte se construit. Il se transforme, tout prend corps au fur et à mesure qu'il prend confiance et rassemble les morceaux de sa mémoire. Tout s'apaise, devient plus serein, tant dans l'écriture que dans l'histoire en elle-même.
Le début dévoile des nuances de blanc, rouge et noir, c'est sombre et sanglant. Puis, ces couleurs changent, évoluent en parallèle aux émotions et progrès d'Otto.
Toute une palette prend corps et ce ne sont plus de simples couleurs. Elles deviennent de geai, vermillon, elles évoluent et vivent. C'est comme une naissance, ou une renaissance, une ouverture au monde dont chacun semble enfin découvrir la richesse et la beauté, comme une éclosion vers des émotions plus positives.
C'était un voyage atypique, à la fois dérangeant et optimiste comme je n'en effectue pas souvent à travers les livres, qui laisse une trace une fois la dernière page tournée et qui ressemble bien aux éditions Noir d'Absinthe.