Je ne connaissais pas
Annie Ernaux ou très peu, à travers
Passion simple et
La place, lus il y a très longtemps. J'avais une sorte d'a priori sur elle. Je l'ai réellement découverte sur le plateau de la Grande Librairie "Émission spéciale
Annie Ernaux, prix Nobel de littérature 2022" diffusée le 19 octobre dernier. Cela m'a donné envie d'en savoir plus. A la bibliothèque, j'ai emprunté "
Écrire la vie", "L'atelier noir", "
Le jeune homme". J'ai commencé par la lecture de "L'atelier noir", dont le titre m'évoquait "
Dans l'atelier du poète" de
René Char. La forme du journal m'intéressait également beaucoup, un de mes modèles étant "
La Semaison" de
Philippe Jaccottet. Même si
Annie Ernaux est romancière et n'écrit pas de
poèmes, le processus de création littéraire mis à nu dans le journal avec lucidité et sincérité, m'a semblé au moins aussi intéressant que ses
oeuvres elles-mêmes. "C'est un journal d'avant-écriture, un journal de fouilles", prévient
Annie Ernaux. Dans l'atelier noir, elle aborde maintes questions que se pose sans doute tout écrivain : quelle longueur aura le texte (court, long ?), quelle énonciation ("je / elle" ?), quels thèmes, quelles histoires, quels personnages, quel point de vue, quelle forme, quel ton, quel temps (présent, imparfait ?) etc. "Le problème de la méthode est réellement fondamental." Elle résume dans "L'atelier noir" ce qu'elle appelle sa "théorie" (interactions pour chaque individu entre son histoire sociale et familiale,
L Histoire et l'imaginaire romanesque). Elle s'interroge "pour quel usage sera fait tel ou tel livre ?". Elle revient à plusieurs reprises sur l'importance de la relecture. Pour elle, "Le problème, c'est pas de savoir si bien ou pas bien (écrit) mais le désir de poursuivre."
"L'atelier noir" nous plonge dans les affres et les délices de la création et, personnellement, me booste pour continuer mes propres essais de journal de lecture-écriture de façon positive et optimiste, en "surmontant mes impasses", sans me décourager par "mes parcours d'hésitation". Je crois me reconnaître dans ce que dit
Annie Ernaux : "J'attends obscurément de ce journal qu'il m'éclaire sur ce désir et je suis stupéfaite de constater que, à mon insu, il m'a toujours menée jusqu'ici, dans des délais plus ou moins longs, vers ce que j'allais écrire, consentir à écrire enfin."