"Voici un premier roman étrange, inhabituel , mystérieux, mélancolique à la structure narrative proche du conte , un écrit que l'on pourrait qualifier de roman "d'ambiance" qui nous interpelle !
L'auteur, à l'aide d'une prose délicate , comme éthérée, conte l'histoire tragique et contrariée de Manushe et d'Adrian , leur rencontre, leurs aspirations et leurs tourments.........
Dans les BALKANS , au coeur de contrées campagnardes reculées, traditionalistes " les vierges jurées" sont des femmes qui ,socialement, deviennent des hommes : elles partagent les prérogatives masculines , fumer, boire de l'alcool, négocier les conflits familiaux , et même utiliser les fusils , à une seule condition, elles doivent rester chastes totalement ....... et renoncer à leur féminité.
Elles en font le serment , Manushe est l'une d'elles .
Un jour, un homme frappe à sa porte. Il s'appelle Adrian .
Il s'installe au village , il a renoncé à sa vie de femme .......je n'en dirai pas plus sinon à dévoiler l'intrigue .
C'est un roman très original à propos d'un sujet :ces femmes albanaises, "les vierges jurées", dont je n'avais aucune connaissance .
Il nous parle de "l'identité et du genre,"de l'acceptation et du regard sur soi, de la difficulté de s'intégrer lorsque l'on est différent , du courage certain qu'il faut avoir pour exister et acquérir la liberté de choisir sa vie !
J'ajouterai que l'auteur évoque aussi le désir, la découverte de son corps et de celui de l'autre lors de très belles pages sensuelles .
Difficile de qualifier ce livre tout à fait dépaysant , inattendu, ambigu , baignant dans un climat poétique où l'auteur hésite sans cesse entre réalité, poésie et conte ........
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Très beau roman plein de poésie où les mystères identitaires s'entrechoquent en laissant d'indélébiles empreintes au fond des personnalités troublées par ces collisions inévitables dans une société archaïque, dure pour la femme, injuste envers toute forme d'amour véritable.
Deux héroïnes portent cette histoire, Manushe, vierge jurée, et Adrian, grande et attirante fille dont le père voulait qu'elle fût un garçon. Leur rencontre va permettre à chacune de conter à l'autre les misères de sa vie, fracassée sur l'autel de la volonté des plus forts.
Elles sont toutes deux magnifiques, impressionnantes dans la volonté qui les anime pour contrer cette adversité qui les persécute, seront-elles réunies dans un amour enfin protégé, à l'abri des traditions et des jalousies, voire des haines?
Lisez ce beau texte pour le découvrir, vous y ressentirez également la puissance des montagnes, les ombres profondes des lacs et la persévérance, disons le courage des rivières, pour être fidèle à un titre original comme tout ce très beau roman.
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Merci aux 68 premières fois qui me permettent de découvrir ce superbe roman d'Emmanuelle Favier, Le Courage qu'il faut aux rivières…
Ce roman porte en filigrane les codes traditionnels encore en vigueur dans certaines régions de l'Europe balkanique, Albanie et Kosovo surtout ; ces Kanun, liés aux traditions, sont une sorte de droit coutumier pour les tribus qui remonterait au XVème siècle.
Dans les Balkans, en Albanie notamment, les vierges jurées sont des femmes qui, socialement, deviennent des hommes ; tenues en haute estime, elles ont alors accès aux prérogatives masculines comme fumer, boire de l'alcool, mener les troupeaux, utiliser les fusils et négocier les conflits familiaux. En contrepartie, elles sont soumises à l'obligation de chasteté. Quand des familles n'ont pas assez d'hommes pour s'occuper des tâches qui leur sont normalement dévolues, des femmes peuvent alors assumer des fonctions masculines.
C'est toute la construction du genre qui est ainsi questionnée par Emmanuelle Favier ; pour reprendre une citation de Tahar Ben Jelloun citée en épigraphe de la troisième partie, « être femme est une infirmité naturelle […], être homme est une illusion et une violence […], être tout simplement est un défi ».
L'auteure nous livre dans son livre trois magnifiques portraits majeurs de femmes : la vierge jurée, la fille reniée et transformée, la fille née du viol de sa mère… Ces femmes vont en croiser d'autres, plus rapidement esquissées mais tout aussi superbement évoquées : prostituées, femme en mal d'enfant, épouses et mères… les destins vont se croiser, se séparer, se retrouver.
Faces à elles, le monde des hommes est bien sombre : ivrognes et chasseurs brutaux, pères autoritaires, proxénètes sans scrupules…, société masculine fortes de traditions et d'impunités. Quelques personnages cependant forcent l'admiration et le respect : un déménageur poète, un adolescent rêveur et aventureux, un chef de village ouvert à la culpabilité…
Dans ce roman, Emmanuelle Favier jongle donc entre archaïsme et monde contemporain, baladant le lecteur dans un entre-deux à la fois très concret et très poétique. L'écriture est belle, la langue est soutenue, le vocabulaire recherché… Ceux qui, comme moi, sont sensibles à « comment c'est écrit » seront comblés.
Le noeud thématique et métaphorique des rivières m'a touchée, ces « rivières qui pour former l'étendue [continuent] de braver la roche, le gel et la sècheresse », ces rivières dont les femmes partagent le courage, rivières allégoriques de sang et de lait mêlées… J'y ai lu un rappel du mythe d'Ophélie, fantasme féminin lié à la nature, à la virginité et à sa perte, victime sacrifiée et sanctifiée, femme au statut ambigu qui ne peut pas être mère… Je ne peux pas aller trop loin dans cette analyse pour ne pas risquer de divulguer trop avant dans la trame narrative mais il y a vraiment quelque chose à creuser dans la façon originale dont Emmanuelle Favier s'approprie et reprend ce mythe littéraire, dans une notion d'universalité et d'éternité, dans une temporalité floue, à la fois proche de nous et suffisamment imprécise pour faire autorité.
Pour moi, ce roman est un coup de coeur, un de ces livres qui me font dire « merci » quand je le referme.
Merci Emmanuelle Favier.
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E.FAVIER nous offre un roman d'une grande originalité tant par son sujet que la façon de l'aborder avec le destin croisé de deux femmes ,Manushé et Adrian. Chacune, pour des raisons différentes doit travestir son identité et endosser le statut de l'homme. A leur côté on rencontre aussi Dirina et Gisela, deux portraits émouvants. le décors ,en Albanie à la fois sauvage, très beau et dur, parfois oppressant et triste semble refléter l'intériorité de ces femmes: fortes et pourtant d'une sensibilité extrème. La souffrance leur est commune, le besoin de se connaître et se révéler aussi. A travers ce roman, on perçoit qu'E.Favier, au delà de la découverte de cette pratique encore existante dans les balkans "des vierges jurées", vient interroger la notion de "genre" et ce qui crée finalement , le sentiment d'être femme ou homme ou peut-être plus fortement encore la réalité et le sens "du genre". C'est un roman qui ne peut laisser indifférent qui bouscule intelligemment les "évidences". C'est aussi une belle histoire d'amour.
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S'inspirant des 'Vierges jurées' de l'Albanie profonde, Emmanuelle Favier construit habilement et dans une très belle écriture la rencontre pleine de tendresse de deux jeunes filles ayant subi ou désiré endosser le statut d'homme. Mais, dans un pays oú demeurent les codes d'honneur et les dettes de sang, les pires chatiments menacent celles qui rompent leurs voeux de chasteté.
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