J'ai acquis “
Mille femmes blanches” de
Jim Fergus sur un site anti-gaspi de ma région : « Je donne, je reçois » Chacun donne ce qu'il n'utilise plus mais qui est encore en bon état et qui peut intéresser ou dépanner quelqu'un et en contrepartie, vous pouvez demander ce qui vous intéresse. Comme les critiques étaient bonnes sur Babelio, j'ai demandé ce livre. Bien m'en a pris. J'ai passé un très bon moment. Mais comme beaucoup, je me suis interrogée sur la véracité de cette narration et j'ai recherché des informations.
Le roman de
Fergus est basé sur un fait presque historique : En 1875 l'un des grands chefs cheyennes, Litlle Wolf, a rencontré le Président Ulysse Grant. Nul ne sait de quoi il fut question mais
Jim Fergus a imaginé une proposition de Little Wolf au président : marier des hommes de la communauté cheyenne avec des femmes blanches. Selon la vision naturelle simpliste des indiens, les enfants à naître seraient le parfait métissage des cultures blanches et indiennes et permettraient l'intégration et une meilleure assimilation des deux peuples. En contrepartie, il propose le bien le plus précieux des indiens des plaines, les mustangs. Un échange de mille femmes contre mille chevaux !
Jim Fergus imagine que cette offre a été partiellement acceptée et qu'un premier contingent d'une centaine de femmes triées dans les prisons et hôpitaux psychiatriques aient été échangées contre des chevaux. La liberté contre un acte patriotique d'éducation des sauvages ! le livre est présenté sous forme de carnets intimes d'une de ces femmes, retrouvés dans les archives cheyennes par J. Will Dodd, un des descendants de celle-ci, journaliste indépendant. Il s'agit de May Dodd, jeune femme d'une famille bourgeoise de Chicago, enfermée dans un asile pour avoir eu deux enfants hors mariage avec un homme qui n'était pas de son milieu.
L'auteur imagine que ces malheureuses accepteraient ce marché en estimant que leurs conditions de vie chez les sauvages seraient meilleures que dans le monde civilisé, et qu'à tout le moins leur propre vie semble enfin leur appartenir.
On suit donc la vie de May Dodd, on apprend la raison pour laquelle elle a été enfermée dans un asile et pourquoi elle a été amenée à partir dans les confins des plaines du Nebraska pour se marier avec un Cheyenne. Elle témoigne de sa rencontre avec les «sauvages », de son adaptation à ce rude mode de vie en harmonie avec la nature, les saisons et les animaux. May Dodd et ses compatriotes, reprises de justice, aliénées et exclues de la société, volontaires pour aller vivre auprès des "sauvages" et leur donner un enfant, vont s'adapter, comprendre et finalement aimer ce mode de vie tellement différent.
Les portraits de ces femmes sont réussis. Leur évolution est intéressante : au départ, leurs réticences ensuite leur adaptation pleine d'étonnement. La barrière de la langue est bien présente pendant une grande partie du récit puis elles arrivent à se faire comprendre par signes puis progressivement apprennent quelques mots et expressions Cheyennes.
Ce livre nous ouvre les yeux sur l'injustice du sort des Indiens d'Amérique, ce peuple divisé, incapable de rassembler les tribus pour affronter l'Homme Blanc. C'est un témoignage bouleversant du processus d'éradication mis en place à cette époque. Ce sont aussi de beaux portraits de femmes dans un monde où beaucoup de portes étaient fermées : elles montrent une personnalité et un courage remarquables et deviennent attachantes. Je me suis procuré le second tome que j'ai déjà commencé.