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Puisque Flaubert se serait écrié "La Bovary, c'est moi !", pourquoi Isabelle Flaten ne s'emparerait-elle pas de Charles qui lui, n'est pas Gustave ? Opérant ainsi par la même occasion un malicieux clin d'oeil à toutes les théories du genre et autres polémiques en vogue (un petit trait qui pointait déjà à la lecture de Triste boomer, son savoureux précédent roman). C'est la liberté suprême de l'écrivain, celle de la littérature tout entière en fait. Quel lecteur n'a pas rêvé de retoucher un peu une histoire, de changer la fin ou d'en savoir plus sur un personnage trop peu développé à son goût ? L'exercice auquel se livre Isabelle Flaten n'est pas une réécriture mais plutôt un changement d'angle ; là où Flaubert précipitait son lecteur dans les pensées (torturées) d'Emma, l'autrice entreprend d'éclairer celles de Charles peu épargné par Gustave à l'époque, comme la majeure partie de la joyeuse compagnie provinciale qu'il se faisait un plaisir d'égratigner. Ce n'est pas non plus une entreprise de réhabilitation, juste peut-être un désir né d'une compassion envers cet homme sous influence depuis son plus jeune âge et que l'autrice nous présente comme un individu épris de simplicité, d'harmonie et de tranquillité. Couvé par une mère aigrie par sa propre expérience matrimoniale, marié presque de force à une femme bien plus âgée que lui, poussé à la médecine par des ambitions qui ne sont pas les siennes, sa rencontre avec la jeune Emma lui fait entrevoir une perspective inédite de bonheur et sans doute de maîtrise. La suite, on la connaît si on a lu Flaubert mais on ne sait rien des sentiments qui traversent cet homme qui peut passer pour faible comme souvent les gentils.

L'écriture d'Isabelle Flaten, sa façon de manier la langue que j'avais déjà particulièrement appréciée dans Adelphe réussissent non seulement à faire de cette lecture un vrai plaisir - qui peut donner envie de lire ou relire Madame Bovary - mais également à chasser toute tentation de comparaison. Il y a du rythme, de la verve, elle tresse habilement les éléments assimilés du roman de Flaubert notamment les traits de caractère de Charles, cette tendance à s'en remettre au destin, tout en élargissant la focale et en épaississant son personnage. le bonhomme absorbe les chocs, pense parfois à se rebeller et sous la plume empathique de l'autrice entrevoit même la possibilité que l'histoire racontée par Flaubert n'ait pas tout à voir avec la réalité. Ultime pirouette née du pouvoir suprême de la plume, à condition qu'elle soit de qualité, et c'est bien le cas ici.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Quelle gifle que cet « Honnête homme » que je viens de refermer ! Quel exercice de style que ce roman ! Quel beau texte aussi et quelle belle plume que celle d'Isabelle Flaten qui avec ce magnifique roman a réussi à rendre hommage autant à Gustave Flaubert qu'à Charles Bovary, l'époux falot et un peu niais, pour ne pas dire apparemment complètement crétin d'Emma !
L'exercice était risqué pour pas dire dangereux : se proposer de raconter l'histoire que tous les amateurs de littérature classique connaissent bien du point de vue de Charles, raconter sa vie à lui-même, c'était audacieux… périlleux. Et pourtant…
Moi qui suis férue de mes classiques et plus encore de toute la production romanesque de mon dix-neuvième siècle adoré, j'étais aussi curieuse que circonspecte, aussi pessimiste qu'attirée quand j'ai repéré l'ouvrage d'Isabelle Flaten paré de son beau bandeau rouge « Tout le monde connaît sa femme, mais l'histoire de Charles Bovary mérite d'être racontée ». Bien sûr, il est de splendides réécritures, des paris qui flamboient de leur première à leur dernière page. J'en veux par exemple pour preuve l'excellent « Belle Amie » de Harold Cobert… Mais il y a des ratés aussi, des échecs cuisants… Là, il s'agit quand même de Flaubert, de Monsieur salammbô lui-même ; il s'agit des Bovary, de ce roman acide et génial, culte et que moi j'adore…
Comme je venais de finir « L'Impératrice de Pierre » et que je n'avais plus rien à dévorer, j'ai pris le risque. Fureter dans une librairie quand on n'a pas décidé d'une nouvelle lecture, c'est comme faire ses courses quand on meurt de faim… Cela finit toujours par du chocolat, des pâtisseries … ou de nouveaux romans…
« Un honnête homme » m'a ferrée dès sa première page où le style très écrit, fluide et élégant de Flaten m'a happée. Un style qui n'est pas dénué d'un certain classicisme mais riche d'un je ne sais quoi d'ample, d'organique, de malicieux aussi. le texte ne manque pas non plus d'intelligence, de rythme et de verve. Un délice qui marie le gout de cette manière d'écrire cher au siècle de Flaubert à la saveur d'un rien de modernité.
D'emblée le ton est donné et on découvre Charles aux prises avec son premier mariage dans un récit où domine un point de vue interne extrêmement maîtrisé, d'une sensibilité déconcertante. le ton est donné, la focalisation opère son réajustement, la partie commence. C'est ainsi que là où Gustave Flaubert nous donnait à voir les pensées romanesques et torturées d'Emma, Isabelle Flaten, elle, se glisse dans les pas de son époux, comblant les blancs laissés par Flaubert, les nouant cependant habilement avec ce que son brillant prédécesseur avait écrit formant ainsi une trame aussi solide que cohérente. C'est là que réside l'exercice de style, mais le roman serait bien froid s'il n'était que cela. Or, il va au-delà en proposant des personnages qui s'ils demeurent fidèles à Flaubert (mention spéciale pour Homais et Emma !) s'en détachent. Ainsi Charles, que l'auteur n'avait guère épargné en 1857 , se révèle ici particulièrement touchant. C'est un homme simple, bon, naïf peut-être. « Un honnête homme » ne le réhabilite pas complètement toutefois et comme dans « Madame Bovary » on voudrait le secouer souvent, lui ouvrir les yeux, le voir un peu plus combattif qu'il n'est, mais il est vraiment touchant et cette perspective inédite sur l'affaire de Yonville le rend enfin intéressant. On a envie de le connaître, de le découvrir, de le comprendre… Il y a dans la plume d'Isabelle Flaten beaucoup d'empathie, de compassion voire d'affection pour ce personnage souvent mal-aimé : c'est ce qui donne de la profondeur au roman, ce qui en fait un très beau texte en plus de son virtuose travail formel.
Ainsi, j'ai adoré découvrir les personnages de « Madame Bovary » sous un nouvel angle, je les ai reconsidérés parfois, j'ai revu mon jugement pour certains et j'ai aimé être touché par Charles que, un peu comme sa belle épouse, je prenais de haut, j'ai adoré retrouver l'atmosphère étriquée de Yonville et sa cohorte de personnages tous plus petits les uns que les autres. L'ironie de Flaten est d'ailleurs à l'avenant de celle de Flaubert, pour mon plus grand plaisir !Un exercice de style donc, une pirouette mais des meilleures. Un hommage magnifique rendu à un auteur dont chaque ligne frôle toujours la perfection. Un personnage émouvant contre toute attente et une vraie fidélité à l'oeuvre originelle.
Maintenant, je n'ai qu'une envie : relire « Madame Bovary ».
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Flaubert ne nous offre pas un portrait flatteur de Charles Bovary, l'époux d'Emma. Sous la coupe de sa mère, peu doué ( il n'obtient pas le titre de médecin ), il ne parvient pas à offrir à son épouse la vie animée dont elle rêvait et la fait végéter , voire dépérir.
Isabelle Flaten, au contraire entreprend de réhabiliter celui qu'elle présente comme Un Honnête Homme . Sensible, soucieux de ses patients, cet homme s'égare parfois dans les méandres de la psyché d'Emma en se référant aux diktats et croyances misogynes de l'époque, mais revient vite au bon sens et à la tendresse dont il est coutumier. Il n'hésite pas à montrer son amour envers Berthe, sa fille qu'Emma tour à tour chérit ou repousse. Bref, c'est un homme dont le comportement détonne au XIX ème siècle mais qui pourrait très bien être notre contemporain.
Avec un style malicieux et un récit tout en vivacité, Isabelle Flaten confirme ici tout le bien qu'on pensait d'elle et parvient même à faire apprécier un personnage que l'on rangeait plutôt du côté des benêts.
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« Tout le monde connaît sa femme, mais l'histoire de Charles Bovary mérite d'être racontée » … Bon slogan publicitaire ! S'emparant de ce monument de la littérature qu'est Madame Bovary, Isabelle Flaten nous propose de le relire à travers le regard et les états d'âme de Charles, le mari un peu falot, limite benêt du roman de Flaubert.

Même histoire, mêmes personnages, même temporalité, mais cette fois c'est Charles qui est au centre du roman. Ce n'est pas une réécriture, c'est un changement de focale. C'est Charles qui raconte son parcours, ses ambitions et ses espoirs déçus, lui qui ne rêvait que d'une vie simple et tranquille avec une femme aimante et des enfants. Mise en lumière d'un homme attentionné, sensible, soucieux de ses patients , se tenant au courant des progrès de la médecine et cherchant à se perfectionner dans ce métier qu'au départ il n'a pas choisi mais auquel il s'est attaché. Un homme fragile aussi et peu sûr de lui, modeste par goût « Depuis tout petit la simplicité est son foyer et les simagrées sa hantise… La démesure des hommes le désole profondément »
Aux côtés d'une Emma fidèle au portrait qu'en dresse Flaubert apparaît donc un Charles plutôt attachant malgré (ou grâce à !) ses faiblesses, sans oublier le microcosme de la petite ville de province , ses notables et ses commérages …

Le roman vaut aussi par le style de l'auteure : c'est très (bien) écrit, alerte, rythmé, avec des expressions très imagées et une certaine dose d'humour.

Un pari risqué que ce livre mais un pari réussi ! On a envie, en le refermant de reprendre Madame Bovary bien sûr et aussi de découvrir d'autres livres d'Isabelle Flaten.
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Elle court, elle court la rumeur…

Ma vraie première rencontre avec Emma Bovary est assez récente. À l'occasion d'un week-end rouennais en 2021, j'ai eu la chance de découvrir un parcours immersif de cette oeuvre de Flaubert dans la Maison Marrou. À ce stade, j'avais beaucoup de peine et d'empathie pour Emma. Puis, quelques mois plus tard, nous nous sommes lancés dans la lecture de ce classique avec la joyeuse bande du #caféduclassique. Retournement de situation, Emma ne me paraissait plus du tout sympathique ! Elle m'avait même profondément agacée. En refermant le roman, c'est finalement Charles qui m'avait le plus intéressée, même si j'en gardais le souvenir d'un « trop gentil », un peu nigaud, qui ne comprenait clairement rien aux femmes. Pas le prince charmant escompté pour Emma, mais pas un mauvais bougre pour autant.

Alors quand j'ai vu cette nouvelle parution d'Isabelle Flaten, dont nous suivons chaque sortie avec la #teamflaten, je ne pouvais clairement pas passer à côté. Et comme, on ne change pas une équipe qui gagne, c'est avec @b.a.books que je suis partie à la découverte de cet honnête homme.

Je ne vais pas refaire un résumé puisque le récit de l'autrice suit les principaux évènements que nous retrouvons chez Flaubert, à un détail près 😉. On pourrait penser que nous n'avons plus rien à découvrir, que l'originalité fera défaut, ou qu'il existe une certaine facilité en écrivant sur quelque chose qui existe déjà. Et bien, c'est bien mal connaître Isabelle Flaten ! A l'instar de Flaubert qui s'était brillamment glissé dans la tête d'une femme, l'autrice a su relever le défi inverse en se glissant dans la tête d'un homme. On pourrait presque en faire une oeuvre miroir, car rappelez-vous dans un couple il y a toujours deux versions d'une même histoire ...   

J'ai aimé découvrir l'enfance de Charles, son mariage arrangé avec sa première femme de vingt ans son ainé (tout aussi agaçante que la jeune Emma), son histoire familiale (avec des parents aussi borderline l'un que l'autre), et ses débuts de médecin. Dans une écriture fluide et addictive, nous replongeons dans ce couple et cette époque avec délectation. Nous retrouvons les travers de la société d'alors, qui faute d'avoir Netflix, n'attendait que les ragots pour se divertir.

Chaque personnage secondaire est tout aussi intéressant avec des psychologies travaillées. Mais surtout ce qui m'a réconforté, c'est que mes sentiments envers Emma n'ont pas absolument pas changé. Peut-être ai-je été un chouia plus clémente, lui laissant le bénéfice de la jeunesse au début du mariage 🙃.

En bref, un roman que je vous recommande!
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Prodigieux, un livre-somme. Si vous voulez vous approchez du secret, lisez cette épopée digne d'un bovarysme éclatant.
Dans les plis de ce roman édifiant, l'ascension fabuleuse d'une autrice, Isabelle Flaten, remarquable et sublime, tant son intuition, ici, est une gageure.
« Un honnête homme » un portrait de constance et de bravoure, celui de Charles Bovary.
Le charme fou d'une écriture qui ensorcelle. Nous sommes en plongée dans l'immédiateté d'un chef-d'oeuvre.
Un récit intense, brillant, qui rassemble l'épars, la vie de Charles Bovary, réhabilitée, le double-cornélien d'Emma Bovary, l'inoubliable de Gustave Flaubert.
D'emblée l'ambiance est posée. le style résolument accrocheur, signifiant, surdoué. Un livre unique dont l'aura est le papier calque de l'époque-même. C'est ici, la beauté suprême de « Un honnête homme ». Écrire une mise en abîme en mimétisme absolu. le futur classique vient d'éclore.
« Entre Héloïse Dubuc et lui, les choses ne vont pas comme il l'avait prévu. Il s'était figuré le mariage telle une grande porte ouverte sur un lendemain prometteur. Il lui semblait qu'avec une épouse à son bras, il allait pouvoir emprunter la route commune, être de plain-pied parmi les autres. Jusqu'à ses noces, il avait été emmuré dans une forme d'exil difficile à identifier ».
« Et de la même façon, toujours aplati sur son caillou, il déplore ce triste sortilège qui a converti son propre mariage en punition et sa femme en succube. Quoi qu'il fasse, quelle que soit la manière dont il s'y prend, Héloïse le blâme, rien ne va comme il faut ».
Lui, jeune médecin, dont la mélancolie est un ricochet sur la rivière de ses jours. Mal-aimé, dont la nostalgie est désespérante. Héloïse est beaucoup trop âgée pour lui, aigrie et pernicieuse. Vieillissante, méfiante, voire méchante, la tendresse inexistante, les murs gris de leur antre donne le vertige à Charles. « Il escompte que demain sera un jour lumineux, un baume sur l'obscurité d'hier ». Il résiste, soigne ses patients avec cette bonté qui déborde de lui. Magnanime, jusqu'au risque de s'écrouler, l'abnégation au plaisir, les malades sont un garde-fou. On aime si fort ce jeune homme pétri d'humanité, triste comme la pluie en plein hiver, dans la disgrâce de ses jours. Héloïse va mourir. Il laisse le radeau voguer sur les flots. L'indifférence pourtant l'accable. Manichéen quelque peu, les persiennes closes, il ne connaît pas l'amour pour se plaindre. Jusqu'au jour où il rencontre une jeune fille puérile de dix-sept ans dans une ferme, son père s'est blessé. Charles, le docteur, tel le Phénix renaît. Il perçoit enfin l'envoûtant frisson de la connaissance.
« À peine a-t-il franchi le seuil de la ferme qu'Emma interrompt aussitôt ce qu'elle était en train de faire pour se consacrer entièrement à lui… Emma a des enthousiasmes d'une spontanéité qui le ravit, un rien l'exalte, un rayon de soleil comme la moindre anecdote issue de sa bouche. Elle rêve maintenant à voix haute de poursuivre la conversation ailleurs, impatiente d'échapper à la monotonie de cette fichue campagne ».
Ils vont se marier. Emma est une femme-enfant. Elle qui a connu le couvent, l'éducation stricte. le regard baissé sur le monde. Éprise de romans sentimentaux, elle idéalise sa vie. Charles est éveillé, vif, et attendrissant. Une soumission insidieuse, Emma qu'il aime plus que tout au monde, le piège se referme. Elle, secrète et introvertie. Rêveuse et envieuse voire chimérique. Bipolaire, égocentrique, elle est l'anti-héroïne de ce récit valeureux pour Charles. Lui, qui pourrait prétendre être notre contemporain. Avec les désirs d'un homme qui se voudrait père et maternant. le socle d'une famille ordinaire en quelque sorte. Charles, un homme juste, simple et intègre. le paradoxe avec Emma, frivole et inconstante. Lui, s'enferme dans le déni. Emma cherche le plaisir, la reconnaissance sociale. Frustrée et incomprise, capricieuse et qui sera pour la petite fille qui va naître une mauvaise mère. Comment Charles va-t-il affronter les épreuves ?
« Il sait qu'elle lui en veut de son inaptitude à se fondre dans le moule mondain, tout comme il lui en veut de s'épanouir sans vergogne dans les vanités ».
Emma vit une double-vie. Mirages et fantasmes, elle trompe Charles effrontément. Elle jongle avec ses propres mensonges. Les fondations vacillent. le foyer prend l'eau. L'argent fond comme de la neige au soleil. Charles est sur le fil. Un ange-gardien aux ailes coupées. le choc des vérités vont altérer ses sentiments. Emma est un oiseau blessé. Peut-il encore sauver son âme ?
Magnétique, grandiose, cinématographique, lucide, « Un honnête homme » rend hommage à Charles Bovary et remet d'équerre l'énigme bovarienne. Dans une langue époustouflante de justesse, le triomphe d'une histoire , la véritable présence humaine de Charles Bovary. Publié par les majeures Éditions Anne Carrière.
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Quelle idée culottée que de vouloir écrire, en réponse au texte de Flaubert, la véritable histoire de Charles Bovary !!
Mais c'est mal connaître Isabelle Flaten que de la croire incapable de relever un tel pari.
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Vous connaissez Emma Bovary ? Cette insupportable jeune femme qui n'en peut plus de changer d'avis et d'humeur, et que rien ne satisfait, une femme menteuse, infidèle et dépensière ? Certains la traiteront d'hystérique, d'autres de capricieuse, mais tous s'accorderont à dire qu'elle ne ménage pas son mari, le (trop) gentil et surtout un peu trop niais, Charles Bovary. (mais peut-on être qualifié de "trop" gentil ? En quoi serait-ce un défaut de vouloir rendre heureux et satisfaire ses proches ? Mais bref.... je m'égare, ceci est un autre débat).
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Isabelle Flaten réussit l'exercice de raconter la même histoire (on y retrouve les jalons essentiels du roman de Flaubert), mais en plaçant au centre du propos ce fameux mari, donc. Elle nous raconte son enfance et sa mère qui lui dictera ses choix, son premier mariage avec Heloise, âgée de plus de 20 ans que lui,.... mais elle nous révèle aussi un secret que Flaubert s'était bien gardé de nous confier...
On découvre un homme qui ne sait décidément pas y faire avec les femmes, même s'il gardera toujours comme ligne de conduite deux choses : le respect et l'envie de rendre heureux. Un homme sensible, qui ne rêve que du classique combo mariage/foyer/enfant en vogue à son époque, bien loin des envies de grandeurs et de faste d'Emma.
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Isabelle Flaten se permet aussi de donner le point de vue de Félicité, la bonne à tout faire du foyer Bovary, totalement lucide mais fidèle jusqu'au bout à ses employeurs...
Et puis, cerise sur le gâteau, on se délecte de ces passages où l'autrice laisse parler la rumeur : la rumeur qui enfle, qui ose, qui s'offusque, qui ne se rassasie jamais ! Ju-bi-la-toire !
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La plume d'Isabelle est belle, simple et efficace, employant juste ce qu'il faut de mots pour servir son propos. Ni trop, ni pas assez. C'est rythmé, intelligent, et drôle !
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Pas d'inquiétude, Un honnête homme n'est pas une réécriture de Madame Bovary, elle est son pendant, la mise en lumière de ce qui s'y passe dans l'ombre, de l'autre côté des projecteurs. Et cet exercice périlleux, dangereux, est ici pleinement réussi ! J'ai (re)lu Madame Bovary cet été et il me fallait absolument lire le texte d'Isabelle Flaten par la suite. C'est chose faite et j'en suis ravie !
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Décidément, Isabelle me séduit toujours énormément lorsqu'elle place l'homme au centre de ses récits. Je me répète mais... lisez Adelphe ! Et je rajoute désormais à mes recommandations : lisez Un honnête homme !
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L'honnête homme, c'est Charles. Charles Bovary. Isabelle Flaten a eu l'excellente idée de raconter le roman de Flaubert en adoptant son point de vue.
Il n'a guère eu de chance dans ses relations avec les femmes. Dorloté par sa mère, il s'est soumis à ses volontés mettant de côté ses rêves. Elle lui fait épouser une veuve, laide mais riche, elle est ruinée. Heureusement il tombe amoureux d'Emma. Amour réciproque semble-t-il, pourtant la vie harmonieuse ne dure pas longtemps. On revit alors tous les passages clés du roman. le brave Charles a beau faire, il ne satisfait jamais Emma . Il veut lui faire plaisir mais ne partage absolument pas ni ses goûts ni son besoin de paraître. Lui souhaite une vie de famille simple, prend plaisir à s'occuper de Berthe, n'a pas l'ambition d'un Homais ni la finesse d'esprit d'un Léon. Il aime sa femme, sa fille, les gens qu'il soigne, il vit aussi dans le doute et les remords pour les erreurs accomplies.
Une écriture travaillée, agréable à lire qui rend compte des moeurs de l'époque et de la complexité de cet homme dont on s'est tant moqué !
Une belle découverte.
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Isabelle Flaten donne voix et vie à Charles Bovary
Quelle belle idée que de vouloir sortir Charles Bovary du flou où l'a positionné Flaubert, quel jeu difficile que de vouloir le faire vivre sans copier Flaubert ! Isabelle Flaten y arrive fort bien et son livre, d'une lecture très agréable, éclaire un homme attachant.

C'est le voeu de sa mère qu'il soit médecin, il ne sera qu'officier de santé, mais qu'importe, elle le marie avec une riche veuve plus âgée que lui, revêche pour augmenter le plaisir. Il passe de sa mère à sa femme sans qu'on lui demande son avis. Que voulez-vous, c'est un bon fils ! Mais attention, ce n'est pas un benêt, un niais, un sot… C'est seulement un bon fils qui apprécie la simplicité, une certaine tranquillité et, surtout, qui voudrait être heureux et…. qui laisse faire la vie.
Et puis vient Emma, fille d'un de ses patients. Dès le premier regard, il sait qu'il est amoureux, épris d'elle et que c'est pour la vie. « Au fil de leurs rencontres, cela se confirme, entre Emma et lui les choses se passent à merveille. »Pour une fois, il se sent acteur de sa vie. Il épouse la jeune fille une fois le délai séant passé. Après quelques mois d'un bonheur parfait, il se rend compte, sans se l'avouer, qu'il n'arrivera jamais à contenter son Emma. Il paiera très cher pour cela. Heureusement, partir au galop sur son cheval, visiter ses malades, les recevoir dans son cabinet le remplissent d'une joie pure et simple. Lui qui a embrassé l'état de médecin pour faire plaisir à sa mère, le devient par passion et s'abonne à plusieurs revues pour augmenter son savoir. Oui, c'est un bon médecin.
Lui qui rêvait d'une vie harmonieuse avec femme et enfants, se retrouve avec une seconde épouse bipolaire, des dettes abyssales, alors, qu'en épousant Emma, il pensait reprendre la main sur sa vie réglée par sa mère. La naissance de leur fille ne change rien au programme. Mauvaise épouse, elle sera mauvaise mère
Isabelle Flaten connaît très bien Madame Bovary, elle décortique les moeurs de l'époque, le mariage arrangé auquel Charles se plie parce qu'il ne connaît pas autre chose. Charles fait partie des notable de cette petite ville provinciale. de ce fait, il est suivi par tous les yeux des voisines qui cancanent à coeur joie lorsque tout va mal.
Gustave Flaubert, lorsqu'il écrit Madame Bovary dépeint les moeurs de l'époque avec une joie féroce, mais… en homme de son temps, y semble bien à l'aise.
J'ai aimé cette lecture, cette revisite côté Charles. L'écriture d'Isabelle Flaten est dansante, changeante, légère avec une touche d'ironie. Comme un impressionniste, elle dépeint Charles par petites touches, sans s'appuyer, tout en lui donnant de la profondeur. Elle fait le portrait d'un homme plus complexe, fragile, mais bien campé dans sa campagne normande. Roman miroir dont j'ai apprécié la pirouette finale malicieuse
Un livre, une écriture qui furent un grand moment de plaisir

Lien : https://zazymut.over-blog.co..
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On pourrait qualifier ce livre de roman psychologique. Mené de façon vive et alerte, sans longueur, non dénué d'humour et riche de formules qui font mouche, il rend compte des états d'âme et des revirements de l'« honnête homme », Charles Bovary, de l'état d'esprit de Félicité, la bonne, ainsi que de la « rumeur » publique et de l'environnement sociologique d'une petite ville au 19e siècle.

J'ai trouvé simplement que dans les dernières pages, le clap de fin arrive de façon bien précipitée... les évènements sont relatés à la va-vite, sans qu'on n'aie plus aucune évocation du ressenti et des pensées intimes de Charles. Cette fin presque « en queue de poisson » est ma seule réserve.

Mais au total, un moment de lecture très agréable et addictif.
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