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sur 2133 notes
"J'aurais aimé les hommes en dépit d'eux-mêmes." par mes rêveries de promeneur solitaire. Dans ce péplum hollywoodien avant l'heure, Flaubert lui ne donne nullement matière à les aimer tant leurs bassesses contrastent avec les richesses de Carthage, la luxuriance des décors et forcément la splendeur des costumes. Mais la longueur et le nombre des descriptions, malgré tout le talent de l'auteur, n'arrivent pas plus qu'au cinéma à me masquer le côté factice d'un exotisme géographique et historique outrancier, ni à combler la faiblesse du scénario.

J'avais le souvenir attendri d'un coeur simple lu adolescent, est-ce à dire qu'à cet âge je me serais laissé ébahir par salammbô ? J'ai un doute, la rondeur de sa poitrine n'aurait probablement pas pu, même à l'époque, compenser sa naïveté et sa froideur.


La mesquinerie des riches carthaginois est sordide, qu'elle leur attire le courroux des mercenaires indûment escroqués me paraît justice. Je suis un barbare, heureux de vous apprendre qu'après avoir eu connaissance de cette ode à la bêtise humaine Caton l'ancien n'eut de cesse de marteler son "Delenda Carthago." à chaque discours au sénat.


Deux étoiles pour la bêtise de la guerre c'est même trop alors que j'aurais aimé donner cinq étoiles pour la guerre à la bêtise.


Peu d'espoir, l'on connaît la chanson :
https://www.youtube.com/watch?v=i3bgATxmemc
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Le Flaubert que j’aime : orientalisant, rêveur, généreux, plein de riches images et de descriptions somptueuses, le même que celui de « La tentation de Saint Antoine ». Sauf qu’il existe une petite différence entre ces deux livres. Autant « Saint Antoine » est bourré d’idées aussi baroques que le style, autant « Salammbô » est un pur plaisir esthétique et se contente d’user d’anciennes formules éprouvées par le théâtre classique.
L’histoire se déroule à Carthage suite à la première guerre punique. Des mercenaires employés lors de cette guerre face aux Romains se retournent contre les Carthaginois qui, défaits et au bord de la ruine, tardent à les payer. Inspiré de personnages historiques, excepté celui de Salammbô, Flaubert présente la situation ainsi :
Le gouvernement oligarchique de Carthage est représenté par deux suffètes qui s’opposent. D’abord Hannon, lâche, malade, cupide, soutenu par la majorité, le véritable symbole du peuple punique dans l’esprit de Flaubert. Puis le général Hamilcar, qui apparait bien plus tard dans le roman, riche et valeureux guerrier relativement isolé au sein de son peuple. Du côté des mercenaires, le héros est Mâtho, lui aussi est un valeureux guerrier mais il est tombé fou amoureux de la fille d’Hamilcar (la fameuse Salammbô) dès qu’il l’a aperçue. Il est accompagné par un ancien esclave nommé Spendius qui joue un peu le rôle du valet fourbe, le faux ami, le mauvais conseiller. Enfin, Salammbô qui ne tient pas un rôle aussi important que pourrait le laisser envisager le titre, est donc la fille d’Hamilcar, jeune vierge consacrée à la déesse lunaire Tanit, le pendant féminin du dieu solaire Baal dans la religion des Carthaginois. Elle a été élevée par un eunuque, Schahabarim, qui est pour elle ce que Spendius est à Mâtho, le rôle de la duègne ou de la vieille nourrice dans le théâtre classique.
L’intrigue est donc convenue, un mélange de roman épique et de tragédie classique. Mais tout est une question de style. Et Flaubert déploie ici toute son artillerie lexicale pour nous transporter dans son orient mythique, luxurieux, saturé de pierres précieuses, d’or, de riches étoffes, d’exotisme, quand ce n’est pas pour nous plonger dans des bains de sang et de sauvagerie.
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Pourquoi (re)lire Salammbô ? Parce que si on a déjà lu ce livre, on l'a souvent fait au lycée et sans vraiment en profiter ; alors que si on le lit ou relit plus tard, quand on a déjà pas mal de lectures derrière soi, là on en profite, là on prend du plaisir ! C'est un livre magnifique, parfaitement écrit et le lecteur part loin, très loin ... Il devient Hamilcar, il devient Mâtho ou Spendius ; il vit à Carthage, trois siècles avant J. C. dans un monde cruel et violent. Les noms des lieux, des gens, la longueur des phrases, le choix du vocabulaire, tout contribue à l'enchantement !

Salammbô, une lecture envoûtante !
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« La température devint si lourde que les corps, se gonflant, ne pouvaient plus entrer dans les cercueils. On les brûlait au milieu des cours. Les feux, trop à l'étroit, incendiaient les murailles voisines, et de longues flammes s'échappaient des maisons comme du sang qui jaillit d'une artère. Ainsi Moloch possédait Carthage ; il étreignait les remparts, il se roulait dans les rues, il dévorait jusqu'aux cadavres. ».

Quel étonnant roman ! Loin des univers, en apparence plus feutrés, de « Madame Bovary » et de « L'éducation sentimentale », ce brûlot nous emmène loin dans le passé, dans un épisode des fameuses guerres puniques, près de trois cent ans avant J.C.

Je ne sais si Flaubert a été inspiré par les poèmes cruels et sanglants de Victor Hugo dans « Les Orientales », parus trente ans plus tôt, avec eux aussi leur lot de sang et de têtes coupées sur des piques, mais le caractère cruel de ce texte reste confondant.

Flaubert, pour préparer ce roman a fait un séjour de quelques mois en Tunisie, sur les traces de l'ancienne Carthage. Et il a aussi, et surtout, lu et relu tout ce qui était alors disponible sur le sujet.
Ces lectures lui seront fort utiles pour tenter de se justifier, après les critiques reçues. Pour faire court, on lui reproche (notamment Sainte-Beuve) d'en avoir trop fait dans le sadisme et la volonté d'épater le bourgeois.

On sent que pendant ces années d'écriture Flaubert jubile vraiment avec le langage : emploi de vocabulaire rare, situations extrêmes en effet. La ligne rouge à ne pas franchir à l'époque, c'était des scènes de sexe explicite, comme on dit aujourd'hui. Et en effet, la nuit que salammbô et Mathô passent ensemble est floue. Mais symboliquement tout caractère sexuel n'est pas absent avec notamment la présence auprès de salammbô d'un énorme serpent, avec lequel elle joue.

L'action n'est pas toujours très claire, tant les factions et les personnages en présence sont changeants. Il m'en restera, je pense, une sensation d'avoir vraiment lu un roman unique et puissant.
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(Une des critiques littéraire de 1862)
Imaginez un modeste volume arrivant au public avec un nom obscur et un titre tel que celui-ci : « Etude d'après Polybe sur la guerre des Mercenaires, épisode de l'histoire de Carthage (-241-238 avant J.C) », l'indifférence du public était acquise d'avance à l'auteur et à son oeuvre.

Au contraire, voyez salammbô. salammbô ! Un nom rempli de mystère, associé au nom retentissant de M. Gustave Flaubert ! salammbô, cette histoire ou cette légende retrouvée dans les profondeurs des siècles ; un rêve de volupté orientale, ressaisi par une science presque magique, dans le lointain des civilisations évanouies, rendu 1000 fois plus piquant encore par la nouveauté des moeurs, des sites, des climats.
Tant d'attraits réunis : la surprise pressentie des yeux et des esprits jointe à l'étrange séduction, moins littéraire que sensuelle, du souvenir de Mme Bovary ! Voilà ce qu'on disait, ce qu'on espérait ; et même avant que le livre parût, son succès n'était pas douteux.

On sait que Carthage, cette Venise africaine, formait ses armées de mercenaires qu'elle allait recruter, avec ses flottes, au bord de toutes les mers. Dans la triple enceinte de ses murs, elle rassemblait, à certains jours où la guerre commençait, des bataillons de toutes les origines, de toutes les armes, de toutes les langues. Il y avait des milliers de Numides et de Maures, des milliers d'Ibères, de Gaulois et de Ligures, des milliers de frondeurs baléares et de Grecs (…)
Etrange et formidable rassemblement de population historiques ou fabuleuses, accourues des contrées les plus diverses et les plus lointaines. La riche Carthage achetait le sang d'une partie du monde et le versait à flots sur tous les rivages où elle avait un comptoir à établir, un commerce rival à ruiner. Ce n'était pas le sang de la patrie qui coulait sur les champs de de bataille : c'était son or.
Que lui importait ces torrents de sang barbare dont elle inondait la Sicile, pourvu que ces vaisseaux fussent maîtres des rivages et des mers ?
Mais, une fois la guerre achevée, la paix rejetait ces cohortes mercenaires sur Carthage, qui frémissait de les voir revenir affamées et avides.
De là de fréquents révoltes, dont la plus terrible est celle que nous décrit M. Flaubert et qu'on appela la guerre inexpiable. Elle éclata entre la 1er et la 2ème guerre punique, et ne fut étouffée que sous le poids des hécatombes humaines.

Mâtho et Spendius, un Africain et un esclave fugitif de Rome, furent les chefs de cette grande révolte. Un suffète (magistrat), Hannon, fut égorgé et mis en croix.
Il ne fallut rien moins que l'épée d'Hamilcar pour avoir raison des rebelles. Il les enferma dans le défilé de la Hache et en massacra 40 000 en un seul jour. Une dernière bataille lui livra Mâtho, qui périt sous les coups de la populace, dont une fête horrible où les Carthaginois vainqueurs montrèrent une barbarie égale à celle des vaincus.
Voilà la trame des événements, telle que l'histoire la livrait à la fantaisie du poète.

Il faut reconnaître que M. Flaubert, avec l'instinct d'un art élevé, s'est appliqué à ne pas trop déconcerter nos souvenirs et qu'il a su conserver les grandes lignes de l'histoire dans leur tragique simplicité. le détail est orné jusqu'à l'excès : le fond n'est pas sensiblement altéré.
Mâtho et Spendius sont restés au premier rang dans le roman, comme ils y sont dans l'histoire. La grande figure d'Hamilcar Barca les domine tous. Hannibal, enfant, se montre à ses côtés. La seule création véritable, parmi les personnages, c'est la soeur d'Hannibal, la belle salammbô. Mais, la véritable héroïne du roman, c'est l'héroïne donnée par l'histoire, Carthage elle-même, avec son luxe et ses richesses incroyables, avec ses statues en or pur, ses temples couverts de lames d'or ; avec les quatre étages de ses tours et ses trois enceintes hautes de trente coudées ; avec ses remparts gigantesques dont l'épaisseur abriterait des écuries pour 300 éléphants et 4000 chevaux, des casernes pour 80.000 soldats ; avec ses ports et ses jetées colossales dont la mer, après 2000 ans, n'a pas encore usé les dernières assises : avec ses entrepôts immenses où étaient enfouis les produits et les tributs du monde.
Voilà ce qui a tenté l'imagination de M.Flaubert, et ce n'est pas seulement dans la reconstruction de la ville que s'est déployé son talent, c'est aussi dans la peinture des mourus politiques de Carthage, des dissensions violentes de ses citoyens, de sa construction jalouse et défiante, de ses moues fastueuses et bizarres. C'est toute une renaissance matérielle et morale ; ce n'est rien moins que la résurrection d'une civilisation morte.
Cette oeuvre s'analyse sans aucune peine. C'est comme un panorama historique illustré, qui se déroule devant nos yeux en scènes parfaitement distinctes, en tableaux mobiles et détachés, comme au théâtre. On pourrait en marquer les principaux aspects, successivement déroulés devant nous, en les séparant par des titres particuliers.

- Premier tableau : Le Festin. Les mercenaires se livrent à une monstrueuse orgie dans les jardins d'Hamilcar, absent. Déjà une sourde colère agite ces âmes barbares. On pressent la perfidie de Carthage, la fureur de ces foules armées. A l'heure où l'ivresse se déchaîne et s'anime jusqu'au sacrilège, voici que du faîte de son palais descend la fille d'Hamilcar, la vierge vouée à la Vénus carthaginoise, à l'équivoque déesse, à Tanit, avec son escorte de prêtre eunuques.
Elle calme par des chants divins le grossier délire de ces brutes repues de viandes et de vins, et se retire à pas lents, laissant derrière elle comme une flamme invisible, dont deux de ces barbares vont être dévorés, Narr'Havas, le jeune roi des Numides, et le terrible Mâtho.

- 2ème tableau : L'armée des mercenaires à Sicca. le conseil des Anciens obtient, à force de promesses, que les chefs des mercenaires emmèneront à quatre journées de Carthage ses terribles hôtes qui finissaient par affamer et ruiner la ville. Nous assistons au défilé de toutes les populations connues dans ces temps-là. C'est un véritable ouragan d'hommes. L'amour de Mâtho s'exalte de plus en plus par l'absence. Spendius, le Grec, un rusé, un esclave savant et corrompu, excite, aiguillonne sa fureur et la dirige où il veut, du côté de Carthage. (…)

Pendant que les barbares prennent les armes, salammbô, comme une victime prédestinée à d'étranges sacrifices, s'agite et s'inquiète. Sa virginité est vaguement troublée par la curiosité des mystères de la déesse Tanit ; elle est impatiente des révélations du grand-prêtre, elle les sollicite et s'étonne de les trouver toujours vagues et fuyantes. Un mal inconnu l'accable. (…)

Mais déjà les mercenaires sont sous les murs. C'est ici que l'auteur place la description de Carthage, de ses remparts, de son acropole, de ses marchés. La révolte éclate. Des scènes effroyables se succèdent. Nous entendons de toutes parts les cris, le bruit des armes, le fracas de la guerre barbare. Spendius, en promettant à Mâtho de lui faire revoir salammbô, s'introduit la nuit avec lui à Carthage, par le canal du grand aqueduc, pénètre dans le temple de Tanit, où repose le Voile sacré, le Zaïmph, le palladium de la république.
Mâtho l'enlève, s'en enveloppe, apparaît un instant aux yeux épouvantés de salammbô, sur le seuil de la chambre virginale, dans la gloire sinistre de son sacrilège, et transporte dans le camp des barbares ce gage de la fortune de Carthage.

Les provinces sujettes se joignent aux mercenaires. Hannon est écrasé. Par bonheur, Hamilcar arrive. Ce ne sera pas trop du courage de ce grand homme de guerre et du dévouement de sa fille pour sauver des derniers désastres.
Tandis qu'Hamilcar tient la campagne avec des peines inouïes contre l'innombrable armée des barbares, des paroles vagues d'abord, puis précises, du grand prêtre, préparent salammbô à son rôle.
Elle sera la Judith de Carthage, Judith, moins l'assassinat.
Elle doit (les dieux le veulent) reconquérir le voile sacré en se donnant elle-même à Mâtho. Ce n'est pas à un prix moindre que Carthage peut-être sauvée.
Dès lors, le sacrifice accompli et raconté jusqu'au bout, avec une abondance extraordinaire de détails, tout change. La fortune de la patrie se relève, les mercenaires sont écrasés. On célèbre les fiançailles de salammbô avec le chef des Numides, Narr'Havas ; c'est la rançon dont Hamilcar paye la trahison du jeune roi. La mort de Matô, captif promis à la fureur et aux coups du peuple, marquera l'heure de la cérémonie. Il vient mourir aux pieds du trône où siège salammbô.
Mais elle-même n'appartient plus à la terre, elle tombe ! Tanit, la terrible déesse de la volupté et de la mort, l'a prise. Elle ne survivra pas à son barbare amant, massacré sous ses yeux.

Dans tout cela, dira-t-on, où est le roman ? (…) Ce serait un poème plutôt, ou un drame, réglé par l'implacable Nécessité. Mâtho est saisi d'une sorte de furieux délire à l'aspect et au nom de salammbô. C'est une possession plus encore qu'une passion. salammbô a horreur de ce Mâtho auquel elle vient se livrer. Quand elle cède en frémissant à ses sauvages étreintes, elle le maudit encore, mais elle obéit à l'ordre secret des dieux avec une sorte d'innocence inspirée et subjuguée ; c'est une profanation mystique qu'elle subit avec épouvante. Il n'y a, en tout cela, d'émotion que la curiosité étonnée, ou les orages des sens. Les émotions du coeur n'y sont nulle part.

Que faut-il donc chercher dans ce livre ?
- Des portraits d'abord : ceux de Spendius, de Mâtho, d'Hamilcar, d'Hannibal, qu'on aperçoit de loin en loin, et sur le front duquel tombe déjà le rayon sacré : de salammbô enfin, en qui s'agite l'inquiète et douce folie des victimes désignées par les dieux.
- Des scènes ensuite ; il y a en de fort belles. Les plus remarquables, à mon sens, sont l'invasion nocturne du temple de Tanit, dont l'horreur sacrée pénètre l'âme de Mâtho, et toutes les scènes qui suivent le retour d'Hamilcar à Carthage : la revue de ses vastes domaines, de ses richesses, de ses esclaves : l'examen qu'il fait de la gestion de ses intendants ; le dédain qui se révèle dans ses attitudes et dans ses paroles pour ses lâches concitoyens ; l'empire que prend sur eux cette âme forte ; sa lutte au milieu des Anciens contre l'envie furieuse qui veut l'accabler ; ses doutes sur la vertu de sa fille, sa colère gigantesque, sa dictature. Il y a dans toutes ces scènes qui se succèdent, je ne sais quelle grandeur et quelle simplicité qui saisissent l'imagination. (…)

M. Flaubert sait beaucoup de choses sur cet épisode de l'histoire de Carthage et sur toute cette histoire en général. Il a épuisé à peu près tout ce qui a été écrit touchant cette civilisation singulière ; il en possède à fond les détails. Tous les vocabulaires lui sont familiers. Mais il en abuse. Il a la faiblesse de ne vouloir rien perdre de ce qu'il a appris avec tant de peines et de soins. Il trouve le moyen d'utiliser aussi bien sa science du bric-à-brac carthaginois que les parties les plus élevées de son érudition. (…) le réalisme érudit n'est pas sans quelque vague parenté avec le pédantisme. N'est-ce pas toujours le même principe : ne faire grâce à ses lecteurs d'aucune preuve de son travail et de son savoir-faire ?
(…)
Après tout, sachons gré à M. Flaubert d'avoir visé haut et d'avoir souvent atteint son but ; il nous a rendu l'impression éclatante et vive de l'antique Carthage.

(Elme-Marie Caro, journal La France du 9 décembre 1862)
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Critiquée ,encensée, incomprise, admirée : telle est l'oeuvre que Gustave Flaubert nous offre dans son roman Salammbô avec trois thèmes qui me sont chers : à savoir
L'Orientalisme ( très prisé à son époque ), l'antiquité avec la guerre des Mercenaires contre Carthage (souvenirs des guerres puniques contre Rome ) et surtout l'érudition au service d'une immense documentation !
Un festin mémorable est offert aux mercenaires par les Carthaginois qui, n'ayant pas obtenu l'argent ou les avantages dus à leur aide vont partir à Sicca et se mettre en tête de vaincre par les armes Hamilcar Barca, Narr'Havas, le vieil Hannon et le conseil de Carthage !
Mais si le style de Gustave Flaubert est classique , limpide, lumineux : dans ce roman, il excelle dans les précisions, les descriptions colorées, les détails évocateurs qui m'ont donné l'impression d'être déja dans du cinémascope ! A tout moment, parmi les ethnies diverses et variées, les ruses, les cruautés, la barbarie ..bref pendant les combats je m'attendais à voir arriver couverts de poussière et de sang : Russel Crow ou Charlston Heston !
L'histoire d'amour entre Mâtho et la vierge de la déesse Tanit est très classique comme d'ailleurs l'issue de leur idylle ! Avec un siècle d'avance tous les "ingrédients " des "peplums "étaient réunis !
Un roman époustouflant d'une grande beauté qui n'a rien de commun avec le célèbre Madame Bovary de 1856 ! à lire ou à re-lire ...

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De Gustave Flaubert nous connaissons bien Madame Bovary ou bien L'éducation sentimentale, mais nous connaissons un peu moins salammbô. Et pourtant c'est bien celui dont je me souviens le plus tellement il m'avait envoûté. J'utilise souvent l'adjectif envoûtant mais croyez-moi pour ce livre il prend vraiment tout son sens.

Dans ce roman Flaubert réussi à ressusciter la cité antique de Carthage et nous emmène dans un épisode de la première guerre punique qui opposait les Carthaginois et les Romains. Ici nous sommes dans un conflit interne entre les Carthaginois et les mercenaires qui ont participé à la première guerre punique. Ces derniers sont venus réclamé leur solde au chef de Carthage, mais ils vont être lésés, en gros ils se sont fait arnaquer ce qui mène au conflit interne. 

Ensuite nous avons salammbô. Lorsqu'elle apparaît elle attire le regard de tous les hommes présents et captive l'attention de tous les soldats. salammbô est la fille du chef de guerre de Carthage, le chef Hamilcar. C'est une jeune vierge très pieuse, complètement dévouée au culte de la déesse Tanit, une des trois déesses protectrices de Carthage. Les descriptions qui sont faites de salammbô et de ses toilettes, de ses parures sont magnifiques. Flaubert a le sens du détail et ce n'est pas peu dire. Il pare son héroïne de soieries, de textiles très fins, de perles et de bijoux époustouflants. Et ce qui ressort de l'aspect physique de salammbô c'est une grâce et une beauté sublime mais lointaine et inaccessible.

salammbô est un personnage lunaire, et d'ailleurs Flaubert la met souvent en scène de nuit alors qu'elle prie la déesse Tanit sous les étoiles. Elle dévoue sa vie au culte de Tanit, la déesse de la fécondité et de la croissance. Et d'ailleurs à bien des égards on peut souvent confondre salammbô et Tanit.
salammbô, même si elle n'est pas présente dans tous les chapitres est une héroïne qui m'a marqué car c'est avant tout une présence, elle brille d'une aura quasiment mystique.

Elle va vivre une histoire d'amour impossible avec Mâtho qui est un jeune Libyen, chef des mercenaires. Il a été complètement subjugué par sa beauté dès l'instant où il l'a aperçu. Il va commettre l'outrage de dérober le vol du voile de Tanit qui est un objet sacré, cela dans le but d'attirer l'attention de salammbô.

Dans ce roman Flaubert nous fait la démonstration de tout son talent narratif. Tel un peintre, il fait renaitre la cité antique de Carthage et nous donne à voir les édifices, le port et les jardins. Avec des descriptions très détaillées, il nous donne à voir des tableaux magnifiques. Il réussit à nous imprégner de splendides images qui aujourd'hui encore sont gravées dans mon esprit. Il a fait renaitre Carthage et toute l'atmosphère qui s'y rattache.

Grâce à des recherches historiques très poussées, en effet il a passé environ six ans de sa vie à se renseigner et à lire des ouvrages sur Carthage et sur les guerres puniques. Il a également effectué de nombreux voyages en Tunisie.
On ne peut vraiment pas nier que c'est un roman historique extrêmement bien documenté. Et peut-être un peu trop selon ses détracteurs.

Mais pour moi c'est plus que ça. C'est presque un roman de l'imaginaire car en effet j'ai rarement lu un texte avec une telle puissance évocatrice. Cela fait treize ans que je l'ai lu et j'ai encore des images bien nettes dans mon esprit. J'ai été époustouflé par la puissance évocatrice phénoménale que l'on trouve dans ce livre, avec des descriptions très riches, parfois longues. Il faut s'en imprégner pour bien visualiser les choses.
Ce n'est pas une lecture facile et le lecteur moderne aura sans doute du mal avec ce style littéraire, mais pour moi c'est une pépite.

Avec une trame narrative digne d'une tragédie, 15 chapitres, des épisodes guerriers sanglants et très violents, l'incarnation du pouvoir et des opprimés, l'opposition entre le sacré et le profane avec le vol du voile de Tanit, mais aussi évidemment avec l'amour impossible entre salammbô et Mâtho. On sent que ces deux personnages filent inexorablement vers le destin avec une fin déchirante !

Tel un peintre, un tragédien, un historien, Gustave Flaubert avec salammbô nous offre un roman magnifique. Ce roman a fait polémique lors de sa sortie en 1862 car bien loin du courant du réalisme de l'époque, le lecteur ne pouvait pas s'identifier et se retrouver dans cet univers antique. Très critiqué, l'auteur a dû se justifier à de nombreuses reprises auprès de ses contemporains car salammbô représentait une « rêverie orientale » qui étonnait à l'époque.

Pour moi c'est un grand roman de la littérature française. Gustave Flaubert est l'auteur qui a ressuscité Carthage et créée salammbô une héroïne littéraire mystérieuse, mystique et à l'aura presque divine. Ça restera un de mes classiques préférés.

Je sais que les principales critiques de ce livre sont que le style est trop pompeux, les descriptions interminables et les personnages trop distants, trop lointains pour s'identifier. Et je peux comprendre tout ça, mais personnellement j'ai trouvé que c'est un roman à l'esthétisme fabuleux. salammbô est profondément ancré dans mon imaginaire et j'y suis très attachée.

J'ai d'ailleurs eu la chance d'aller en Tunisie et de visiter les ruines de Carthage quelques années après l'avoir lu. Et je peux vous dire que j'avais encore les mots de l'auteur en tête et j'ai passé un moment vraiment envoûtant.

Je termine en vous disant que salammbô est un roman magique qui vous emmènera bien loin.
Lien : http://marie-loves-books.blo..
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Ce roman historique se déroule au terme de la première des trois guerres puniques qui opposèrent Carthage à Rome (la première guerre punique, 264-241 av J.C).

Hamilcar l'un des deux suffètes (rois) de Carthage revient de sa campagne après avoir affronté les légions romaines. Dans ses bagages des milliers de mercenaires venu des quatre coins du monde méditerranéen débarquent sur les plages de ce qui deviendra, beaucoup plus tard, la Tunisie. Attendant d'être payés et désireux de rentrer chez eux. le suffète est encore en mer, à bord de la dernière trirème qui doit aborder la ville sous peu.

Le roman débute par la scène du banquet. Il a été dressé pour l'occasion dans les jardins du suffète.

« C'était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d'Hamilcar. »

Les mercenaires sont dans un premier temps impressionnés par la magnificence du lieu puis peu à peu, l'alcool aidant, ils finissent par s'enivrer et par tout détruire. Les guerriers ivres dégraderont le jardin, tueront quelques esclaves et blesseront mortellement les animaux sauvages parqués à proximité et pilleront les temples dédiés aux dieux carthaginois.

Alertée par le tapage, salammbô, fille d'Hamilcar, apparaît afin de rétablir l'ordre.

« Sa chevelure, poudrée d'un sable violet, et réunie en forme de tour selon la mode des vierges chananéennes, la faisait paraître plus grande. Des tresses de perles attachées à ses tempes descendaient jusqu'aux coins de sa bouche, rose comme une grenade entrouverte. »

L'histoire débute véritablement à cet instant. Au moment où, parmi les mercenaires, Matho, le chef du contingent libyen voit pour la première fois la princesse. Il tombe immédiatement éperdument amoureux. L'amour éprouvé par Matho devient véritablement l'énergie du roman.

Matho, porté par l'amour et le besoin irrépressible de retrouver salammbô, qui elle, ne l'a même pas remarqué parmi la foule de mercenaires, prendra la tête de la révolte (La guerre des mercenaires, automne 241- fin 258 av J.C).

Pour cela, il mènera une lutte sans merci contre Hamilcar, trainant ses compagnons d'infortune de bataille en bataille, de souffrance en souffrance jusqu'à ce qu'il l'a retrouve enfin.

Ce roman parle d'amour, de passion magnifiée au-delà de la souffrance et de la mort.

C'est un texte d'une beauté sans égale, porté par l'un des plus grands écrivains français. Pour moi, si nous ne devions retenir qu'un roman de l'oeuvre de Flaubert, ce serait celui-là tant il exprime avec brio et talent les sentiments qui nous animent tous.

De plus, c'est un plaisir intense de découvrir Hannibal enfant et de voir en images, à travers la plume de Flaubert, un épisode de l'histoire de l'antiquité.

La fin du texte est d'une beauté et d'une sauvagerie à couper le souffle.

Ce roman s'adresse aux passionnés d'histoire et d'aventures mais aussi aux coeurs tendres.
Lien : http://blogdecyrilleamiel.ov..
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Plaisir, fascination de la langue de Flaubert, si riche que souvent des mots me sont inconnus (à moi, ce n'est pas étonnant mais aussi au dictionnaire!). Images envoûtantes, peplum magnifique.

Parfois la violence est tellement insoutenable que je dois faire une pause.

Que doit ce récit à l'histoire et à l'imagination de l'auteur quand il décrit la diversité des costumes, des moeurs, des Mercenaires de tous ces peuples de la Gaule à l'Asie et à l'Afrique?
Et les cérémonies religieuse à Tanit ou à Moloch? Documentées ou inventées? Peu importe d'ailleurs...
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Un roman fascinant qui impose toutefois une certaine persévérance, tant les descriptions sont nombreuses, les personnages complexes et les glissements conduisant à de spectaculaires retournements de situations parfois difficiles à appréhender. C'est cependant toute la puissance démiurgique de Flaubert que salammbô révèle et qui subjugue. La trame historique de la révolte des mercenaires contre Carthage qui les avait employés lors de la première guerre punique qui l'opposa à Rome n'est qu'un prétexte pour donner vie à un univers fait de contrastes, d'exagération, d'excès, de mysticisme, de violence et de sang, de ruse et de trahison. L'homme y donne libre cours à ses instincts les plus primitifs et la belle et sensuelle salammbô incarne quant à elle le désir et le mystère qui peut lui faire accomplir les folies les plus audacieuses. En contrepoint de la force brute qui s'exprime lors des combats homériques que Flaubert décrit avec nombre de détails rivalisant de cruauté, la force de salammbô réside dans sa féminité qui exerce sur les hommes qui la croisent, Mathô, le chef des mercenaires en premier lieu, un pouvoir réel d'attraction et de fascination. Sa force réside également dans sa volonté inflexible et dans le caractère et le courage qu'elle démontre. Les combats qu'elle livre (intérieurs notamment) n'en sont pas pour autant moins violents et sources de retournements et de trahisons.
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