Bien Chers Frères, Bien Chères Soeurs,
Si nous sommes ici réunis en ce jour, c'est pour célébrer la disparition de notre jeune frère, Jean de Jésus. Puisse Dieu l'accueillir auprès de lui dans sa puissance et sa gloire, pour les siècles des siècles. Amen !
Critique :
Depuis « le nom de la rose », il ne nous avait pas été donné de nous retrouver dans un contexte religieux monacal pour élucider un crime.
Benoît Goffin, grand spécialiste des monastères et autres abbayes, nous y replonge, non pas au Moyen Âge, mais en avril 1982. Particularité du récit : il est révélé partiellement par la victime elle-même !
Que nous rapporte cette voix d'outre-tombe ?
Faisons connaissance avec le mort. Jean de Jésus, tel est le nom dont le novice a été doté en s'engageant dans les ordres, est au moment du récit, un jeune moine qui est entré en religion depuis trois ans. Il s'apprête à prononcer ses voeux définitifs lorsque la mort le rattrape définitivement. Sa communauté, les Frères de Notre-Dame, est installée à Bruxelles dans un quartier huppé et est célèbre pour les conférences qui s'y tiennent et qui attirent… disons… des catholiques plutôt conservateurs, venus écouter les conférences et autres sermons de grands orateurs.
La mort suspecte du jeune homme place dans l'embarras le prieur supérieur du monastère de Bruxelles, le Père Elisée de la Nativité. Il aimerait autant ne pas mêler la police à cette triste affaire. Pensez donc au scandale : un suicide ou un assassinat entre les murs d'un monastère, pile au moment où monseigneur Dutilleul, grand diplomate du Vatican, s'y trouvant, est venu négocier un accord avec les autorités européennes, accord qui pourrait changer la face du catholicisme ! Alors, imaginez tous les vautours anticléricaux ! Imaginez comme ils pourraient se repaître d'une telle histoire ! Non, vraiment, le docteur Alliaume, en bon chrétien, ne devrait pas parler d'homicide… Pourtant, le meurtre devient vite une évidence et pourrait être lié à la raison de la présence de l'évêque et à sa mission.
Une chose paraît sûre : si meurtre il y a, l'assassin fait partie de la communauté des Frères de Notre-Dame… Et parmi ces « saints hommes », il s'en cache au moins un qui est une âme damnée…
Mais les problèmes ne se limitent pas au monastère de Bruxelles. Monseigneur Dutilleul sait que l'Eglise risque gros en ayant protégé des personnages qui ont éclaboussé plus d'une soutane par leurs actes durant la Seconde Guerre mondiale…
Le style de l'auteur est en parfaite adéquation avec le cadre de son récit, et pour qui a fréquenté divers religieux, le discours des personnages leur paraîtra très familier. Sachez que
Benoît Goffin s'inspire de lieux réels dont il a changé les noms et certaines caractéristiques, ne vous donnez donc pas la peine de chercher les facultés universitaires Saint-Charles, ou le sinistre monastère en nid d'aigle de Caprimont. L'auteur ne tenant probablement pas à se faire excommunier en recourant à des noms bien réels des institutions où se déroulent d'infâmes complots.
Malgré la gravité du sujet, de petites touches d'humour viennent agrémenter le récit, notamment dans la description des personnages.
Benoît Goffin ayant beaucoup d'intervenants dans le récit, a eu l'intelligence de placer, en début d'ouvrage, la liste des protagonistes regroupés par lieux. Cela s'avère très pratique pour s'y retrouver.
Un sacré bon moment de lecture. Loués soient frère
Benoît Goffin et père Olivier Weyrich, son éditeur !