Une lecture parfaite pour l'automne.
A l'approche d'Halloween, j'aime bien frissonner un peu. Cette lecture était donc toute indiquée pour passer un bon moment sans être traumatisée pour autant.
Encore une fois, le livre objet est très réussi, la couverture est sublime et nous donne un avant goût de l'atmosphère qui va suivre.
J'ai fait les choses à l'envers, puisque j'avais commencé par lire «
La curiosité est un péché mortel » qui est le deuxième tome de la série « Lizzie Martin » traduit en français. Ce second tome m'avait vraiment beaucoup plu et avait le mérite de se lire indépendamment sans soucis de compréhension.
Ce premier tome est assez différent, puisqu'il pose réellement les bases de la saga et nous présente les deux protagonistes, Lizzie Martin et l'enquêteur Benjamin Ross.
Ann Granger revient sur leur passé et les conditions de leur tout première rencontre. J'ai trouvé ce moment là très touchant, et de ce fait, j'ai mieux compris l'évolution particulière de leur relation.
La structure narrative est bien pensée, nous naviguons entre des chapitres représentant tour à tour soit le point de vue soit de Lizzie soit celui de Benjamin. Tous deux sont liés par une découverte macabre. Pourquoi Madeleine, une jeune dame de compagnie s'est-elle enfuit de chez sa bienfaitrice ? Que lui est-il arrivé pour que sa vie s'achève sur une note aussi tragique? C'est ce que les deux amis tentent de découvrir. Tandis que Ben enquête avec son équipe, puisqu'il est inspecteur de son état, Lizzie quant à elle va tenter de découvrir avec son sens logique ce que cache la demeure de Dorset Square. La jeune femme de nature spontanée va devoir faire preuve de diplomatie pour percer à jour les secrets des domestiques. Car à une époque où les codes de la bienséance régissent l'existence, et où les rumeurs alimentent le quotidien de tout un chacun, il est très difficile d'obtenir des renseignements.
A travers ce roman,
Ann Granger établit le portrait d'une société bourgeoise, qui vit à travers des idéaux et des règles strictes. C'est une époque où les jeunes filles devaient se plier aux exigences de leurs parents ou de leur protecteur et manifester une conduite irréprochable. Cette pauvre Madeleine, sauvagement assassinée est décriée même dans l'au-delà. C'est presque si l'on condamne plus son comportement outrageux que l'acte barbare de son meurtrier.
Ce qui unit Lizzie et Ben ce sont justement leur empathie pour les personnes dans le besoin et leur esprit de révolte concernant cette société qui semble ne jamais vouloir évoluer. Ils se ressemblent assez puisque ce sont deux personnalités fortes, de nature franche, qui n'hésitent pas à bousculer l'étiquette ni à remuer ciel et terre pour défendre une cause qui leur tient à coeur. Grâce aux valeurs inculquées par son père, Lizzie est à la fois cultivée et altruiste, elle lit Darwin, et n'hésite pas à confronter ses idéaux aux dogmes pré-établis. C'est un modèle de franchise, doté d'une force de caractère et d'un grand sens moral. C'est une amie à qui l'on pourrait se confier sans hésitation. Quant à Ben, il représente presque l'homme idéal, à la fois protecteur, compréhensif et perspicace, il semble n'avoir que des qualités. Ce sont deux figures qui s'accordent parfaitement et sont vraiment très agréables à suivre.
Concernant le décor, il est très différent du second tome. Tandis que la suite nous faisait découvrir la campagne anglaise, ici l'intrigue se déroule entièrement dans l'atmosphère confinée de la ville.
Ann Granger dépeint une Londres assez lugubre, où la misère est omniprésente et la saleté pave les rues. Cela permet à l'auteur de faire un parallèle avec le passé de Ben et Lizzie, qui ont vu de près les dégâts causés par le travail dans les mines et qui ont conscience du coût réel du charbon. L'atmosphère brumeuse et pluvieuse de la ville est brillamment décrite et ajoute une note inquiétante à l'ambiance. le brouillard est en fait, un élément clé du récit, presque un pion supplémentaire de l'intrigue.
L'énigme de ce premier tome est finalement assez simple, le cercle des personnages présents étant finalement assez restreint. le dénouement est peut-être moins surprenant que dans le second tome. Ce n'est que la première aventure de Lizzie Martin, on lui pardonne donc sa maladresse et son manque d'expérience. Ce sont justement ses étourderies qui m'ont valu un bon moment de frisson à la fin....
Ann Granger a un style bien à elle, qui colle parfaitement avec l'époque victorienne. le seul bémol ? Les pages défilent beaucoup trop vite. La plume est si fluide et l'intrigue si prenante que l'on ne voit pas le temps passer. Même si je garde une petite préférence pour
La curiosité est un pêché mortel, ce tome-ci m'a quand même énormément plu. J'ai apprécié faire connaissance avec les protagonistes et en savoir plus sur leur passé et leur rencontre peu commune. Même si je lis très peu de romans policiers, j'ai définitivement adopté la série "Lizzie Martin" et je me réjouis à l'avance de lire le prochain tome intitulé "
Un assassinat de qualité".