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Il y a de ces livres qui, une fois finis, vous bouleversent, perturbent vos nuits et vous donnent envie d'avancer. NO HOME (1) ou HOMEGOING (2) de Yaa GYASI en est un. No Home relate l'histoire de deux demi-soeurs Effia et Esi nées au Ghana au XVIIIe siècle. Nous suivons les descendants d'Effia, mariée à un gouverneur britannique esclavagiste, au Ghana ; puis ceux d'Esi, qui a été vendue comme esclave pendant le commerce triangulaire, aux États-Unis. le lecteur voyage ainsi entre le Ghana et l'Amérique tout au long du livre, en alternant des escales dans l'Afrique de nos pères guerriers, des plantations de coton, des mouvements des activistes Noirs, la Guerre de Sécession, La Grande Immigration, la vie dans les rues de Harlem, d'Alabama, etc. jusqu'à nos jours.
Ce que nous appellerons des chapitres de ce livre est, en réalité, titré du prénom de chaque personnage principal. C'est un livre phénoménal où chaque partie constitue une nouvelle à elle seule.

Écrire l'histoire

« Nous croyons celui qui a le pouvoir. C'est à lui qu'incombe d'écrire l'histoire. Aussi quand vous étudiez l'histoire, vous devez vous demander : “Quel est celui dont je connais pas l'histoire ? Quelle voix n'a pas pu s'exprimer ? Une fois que vous avez compris cela, c'est à vous de découvrir l'histoire. » (3)
C'est probablement une des raisons pour laquelle Yaa GYASI nous présente un premier roman aussi intense et dense, une saga familiale en somme, étalé sur plusieurs générations, qui met le lecteur face à lui-même. Qu'on soit Blanc ou Noir, l'esclavage posé comme fondement de ce roman fait écho à nos craintes intérieures. Pourquoi chercher un responsable à ces atrocités alors que nous le sommes tous ?
« Il y a un fort sur la côte du pays fanti, on l'appelle le fort de Cape Coast. C'est là qu'ils gardaient les esclaves avant de les expédier à Aburokyire : l'Amérique, la Jamaïque. Les marchands ashantis y amenaient leurs captifs. Des intermédiaires fantis, étés ou gas les gardaient, puis les vendaient à des Anglais et à des Hollandais ou à celui qui offrait le meilleur prix. Tout le monde était responsable. Nous l'étions tous… Nous le sommes tous. » (4)

Maame, la matriarche, celle par qui tout avait commencé, n'était-elle pas elle-même une esclave ashantie, ce genre d'esclavage que nous peinons à abolir au sein de nos foyers aujourd'hui ? No Home n'est-il pas la métaphore d'une société qui crie la fin de l'esclavage sur le papier, mais qui, dans la plupart des actes que nous posons, est toujours d'actualité ?

Les fables, les légendes, l'Afrique Noire

No Home est également un rappel de ces contes que nous avons jadis, aimés entendre, le soir, autour du feu, pour ceux qui ont eu cette chance. Ainsi, nous y retrouvons les mises en garde de l'Anansi l'araignée — Yévi Golotoé, chez mes frères et soeurs du Togo. Nous revivons le retour des guerriers et les fêtes arrosées d'« Akpeteshi » et du vin de palme — Déha. Nous y mangeons de l'igname, du fufu. Nous assistons aux remises de dotes, aux mariages, aux superstitions, à l'interprétation des rêves et de la folie. Nous redécouvrons la langue twi et des expressions, pour ceux qui ont des origines ghanéennes, en parcourant les rues de Kumasi, d'Edweso, de Takoradi : Akwaaba, Obroni, sah… Bref, la Gold Coast. Et les grands noms à jamais gravés de nos mémoires tels : Omanhini, Nyame, Yaa Asantewa, Osei Tutu, Kwami Nkrumah etc.

Célébrer la femme

En filigrane de ce livre s'inscrit le combat des femmes.Tout au long, Yaa GYASI nous peint des personnages féminins mythiques. L'auteure nous montre le combat des mères qui, le plus souvent, paraît, de prime abord, insignifiant, mais détermine l'évolution de leurs progénitures que cela soit au Ghana ou en Amérique. Ainsi, c'est sur l'acte posé d'une femme « Maame » que commence ce livre. C'est également sur la détermination de sa descendante « Marjorie » que se ferme ce roman malgré son historique noir, empreint de sang, de souffrance et de deuil que nous avons toujours du mal à faire, donnant l'espoir à l'humanité.

Yaa GYASI signe ici un grand roman qui rend hommage à la littérature ouest-africaine. Merci pour ce roman à travers lequel nous avons marché, les pieds meurtris, dans les forêts de nos ancêtres jusqu'au fort de Cape Coast. Merci pour ce rappel historique douloureux de ce que « ceux qui sont partis » ont vécu hors du Berceau de l'Humanité. Nous avons pleuré et tenté de faire le deuil de ceux que nous avons perdus, parés de nos pagnes noirs et rouges ou de nos Kenté, en dansant sur l'« adowa ».
Lien : http://www.lacroiseedesplume..
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1er coup de coeur de lecture de l'année!

Une magnifique fresque historique et familiale, qui traverse les siècles et les continents, des années 1700 au Ghana à nos jours.

J'ai tout particulièrement apprécié les chapitres concernant les XVIII et XIX ème siècle, la vie de ces villages d'Afrique, face à l'arrivée de "l'homme blanc", les croyances, les rivalités, la place de la femme... on s'attache très vite aux personnages, et quand un chapitre s'arrête pour laisser place à un descendant de ce personnage, il y a presque de la frustration de ne pas en savoir encore plus!
Il y a les couleurs et les parfums du Ghana, puis ceux des champs de coton, des mines de charbon ou de Harlem, le roman est très riche, très sombre parfois, mais il y a toujours une petite note d'espoir qui renait.

Mais peu à peu, les liens se font, et les thèmes évoluent avec l'avancée dans le temps, de la traite des esclaves aux discriminations actuelles, du Sud au Nord de l'Amérique.
Déracinement, identité impossible, les blessures demeurent, générations après générations.


Un livre historiquement et sociologiquement important, traité d'une belle façon narrative.
Lien : http://lecture-spectacle.blo..
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Yaa Gyasi, jeune universitaire afro-américaine offre aux lecteurs un merveilleux cadeau avec ce beau roman qui illustre l'histoire sur sept générations successives d'une famille originaire du Ghana issue d'une même ancêtre Maame dont les deux filles ont connu des sorts bien différents. Effia épouse un officier britannique et sa lignée reste au pays et doit composer avec les guerres tribales et la participation active des siens à la capture et à la traite des esclaves. Esi réduite en esclavage est conduite en Amérique et le sort de sa famille n'est guère plus enviable , des champs de coton aux mines de charbon. L'espoir entretenu par l'abolition de l'esclavage à la suite de la guerre civile est déçu par la persistance de la ségrégation et les inégalités sociales criantes qui conduisent à la désespérance et à la délinquance. Même la beauté du jazz issu des clubs de Harlem ne suffira pas à occulter l'omniprésence de la drogue qui ruine les liens familiaux.
Le fil rouge se dévide au fil des années et chaque personnage dont le nom figure en tête de chapitre, illustre une partie de cette histoire terrible qui n'est que très rarement évoqué du côté des intéressés.
Comme le dit si bien un des personnages :" Nous croyons celui qui a le pouvoir. C'est à lui qu'incombe d'écrire l'histoire. Aussi quand vous étudiez l'histoire, vous devez toujours vous demander "Quel est celui dont je ne connais pas l'histoire ? Quelle voix n'a pas pu s'exprimer ? "Une fois que vous avez compris cela, c'est à vous de découvrir cette histoire."
Voici que Yaa Gyasi a donné la parole aux oubliés de l'histoire, à ceux dont on ne parle pas si ce n'est en terme de statistiques.
Les ravages de la colonisation sont décrits sans concession mais l'auteur a aussi voulu éviter les aprioris réducteurs et les jugements de valeur à sens unique ; cette exigence donne toute son authenticité au récit qui est d'autant plus émouvant que chacun des protagonistes présentés tour à tour attache le lecteur à son histoire singulière. Les personnages de femme sont particulièrement beaux comme Akua "la femme folle " qui porte en elle la trace des drames dont elle a été témoin, Willie la mère courage dont la voix fait résonner les églises de puissants negro-spirituals...mais aussi Marjorie, la jeune intellectuelle contemporaine qui dans un poème adressé à sa grand-mère résume admirablement les liens qui se sont tissés au fil des générations.
Avec Marcus, le jeune homme issu de la seconde lignée, Marjorie fermera la boucle et pourra montrer à tous que même si le chemin est long et tortueux , l'avenir offre de nouvelles promesses
Ce roman magnifique est aussi un hymne à l'Afrique chatoyante et colorée. On ne sort pas indemne de cette lecture car tant de douleur ne peut laisser insensible mais ce livre fort mérite largement les cinq étoiles que je lui ai attribués.
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No Home est une saga qui apporte un regard incroyable et horrible sur l'histoire, le colonialisme et l'esclavage au Ghana et en Amérique, à travers 250 ans. Comment l'auteure a-t-elle réussi à créer de tels personnages, couvrir tant d'histoire, et raconter une histoire aussi complexe, mais convaincante en seulement 300 pages, je ne sais pas.

Ce livre, cependant, est peut-être la saga familiale la plus ambitieuse que j'ai jamais lue. La plupart des livres comme celui-ci couvrent trois générations. No Home en suit sept. Tout commence avec deux demi-soeurs - Effia et Esi - qui ne se connaîtront jamais. La famille de l'une connaîtra l'esclavage en Amérique, celle de l'autre restera au Ghana.

Chaque chapitre nous parle d'un nouveau personnage. D'abord Effia et Essi, puis six de leurs descendants, alors que l'histoire suit les changements culturels au Ghana et en Amérique - à travers le colonialisme, le racisme et les attitudes envers l'esclavage. Grâce aux personnages, nous vivons la vie durant les guerres tribales des années 1700, les horreurs du commerce transatlantique des esclaves, les manières dont les dirigeants proéminents du Ghana ont aidé les esclavagistes britanniques et américains, la peur créée par la Loi des Esclaves Fugitifs en Amérique et bien plus encore.

Quatorze personnages en 300 pages, c'est peut-être beaucoup pensez-vous ? Il n'en est rien. On passe de l'un à l'autre, d'une lignée à l'autre, d'un continent à l'autre, avec aisance, tant Yaa Gyasi est une conteuse hors pair. Elle prend des sujets importants comme l'esclavage et le colonialisme, les pimente avec de parfaites petites conversations et des regards sur la nature humaine. On a de l'empathie pour chaque personnage. La lecture en devient facile et captivante.

« Tous ceux qui vivent sur le continent noir doivent abandonner leurs croyances païennes et se tourner vers Dieu. Sois reconnaissante que les Anglais soient là pour te montrer comment mener une vie morale et pieuse. »

Nous, peuple belge, avons aussi pris part au colonialisme et sommes responsables d'actes peu glorieux. Heureusement que nous avons évolué et commencé à embrasser d'autres cultures.

Comme on peut s'y attendre, il y a de quoi être dégoûté dans ce livre. Fidèle à l'histoire, il est plein de sang, de coups de fouet, de langage raciste, de supériorité britannique et d'autres scènes qui vous retournent l'estomac. Cependant, Gyasi manipule avec sensibilité son sujet, en s'assurant que la violence est une représentation honnête de l'histoire, non gratuite.

Une histoire rudimentaire et détaillée sur les effets de longue date de la colonisation de l'Afrique et de la traite négrière. Une vraie réussite !
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L'histoire d'une femme africaine, d'une famille, de ses descendants, entre Afrique et Amérique, et au delà, l'histoire des Noirs d'Amérique, des esclaves...
Difficile de résumer ce magnifique roman, qui, bien que de construction et d'écriture totalement différentes, m'a rappelé ma lointaine lecture de "Racines", d'Alex Haley.
De chapitre en chapitre, depuis Maame, l'ancêtre Africaine au 18ème siècle, on chemine jusqu'à aujourd'hui entre les descendants de ses deux filles, une branche restée en Afrique, l'autre arrivée en Amérique dans un bateau négrier.
Le suivi du roman, un chapitre par personnage, en entrecroisant les deux branches, est facilité par l'arbre généalogique du début, qui nous permet de ne pas perdre le fil.
C'est beau, fort, puissant, émouvant, cela raconte la misère, la peur, la pauvreté, la mise à l'écart, la honte, les luttes entre les ethnies africaines, qui ont facilité, hélas, la traite des Noirs par les Européens, mais aussi la rage de vivre, le poids de l'ascendance, la bonté, la volonté de fer pour conserver sa dignité malgré tout.
Ce roman est un coup de coeur, et voit, je pense, la naissance d'une auteure prometteuse.
Merci à l'éditeur et à NetGalley qui m'ont permis de lire ce livre en avant première.
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