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Citations sur La Faim (103)

Il faisait grand jour quand j'ouvris les yeux, et j'eus le sentiment qu'il approchait de midi. Je mis mes souliers, rempaquetai ma couverture et repris le chemin de la ville. Pas de soleil aujourd'hui non plus, et je grelottais comme un chien. Mes jambes étaient mortes et mes yeux pleuraient comme s'ils ne pouvaient supporter la lumière.
Il était trois heures. La faim commençait à devenir un peu terrible. J'étais exténué, et j'avais des nausées. Tout en marchant je vomissais de temps à autre à la dérobée. Je descendis au restaurant populaire, lus le menu et haussai ostensiblement les épaules, comme si le petit salé et le lard fumé n'étaient pas du manger pour moi. De là je descendis à la place du Chemin-de-Fer.
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Je te le dis, ô sacré Baal du ciel, tu n'existes pas, mais si tu existais je te maudirais de telle sorte que ton ciel frémirait du feu de l'enfer. Je te le dis, je t'ai offert mon service et tu l'as refusé, tu m'as repoussé et je te tourne à jamais le dos parce tu n'as pas su reconnaître l'heure de la Visitation. Je te le dis, je sais que je vais mourir et pourtant je te honnis, ô céleste Apis, la mort entre les dents. Tu as employé la force contre moi et tu ne sais pas que jamais je ne fléchis devant l'adversité. Ne devrais-tu pas le savoir ? As-tu formé mon cœur en dormant ? Je te le dis, toute ma vie, chaque goutte de mon sang dans mes veines se fait une joie de te honnir et de conspuer Ta Grâce. A dater de ce moment, je renonce à toi, à tes pompes et à tes œuvres, je jetterai l'anathème à ma pensée si jamais elle te pense, je m'arracherai les lèvres si jamais elles prononcent ton nom. Si tu existes, je te le dis le dernier mot de la vie et de la mort, je te dis adieu. Puis je me tais, je te tourne le dos et vais mon chemin...
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La seule chose qui me gênât un peu, c'était, malgré mon dégoût pour la nourriture, la faim quand même. Je commençais à me sentir de nouveau un appétit scandaleux, une profonde et féroce envie de manger qui croissait et croissait sans cesse. Elle me rongeait impitoyablement la poitrine ; un travail silencieux, étrange, se faisait là-dedans. On eût pu croire à une vingtaine de fines petites bestioles qui penchaient la tête d'un côté et rongeaient un peu, penchaient la tête de l'autre côté et rongeaient un peu, restaient un moment tout à fait tranquilles, recommençaient, se frayaient un chemin sans bruit et sans hâte et laissaient des espaces vides partout où elles avaient passé...
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Je pleurai tout le long de la rue, j’avais de plus en plus pitié de moi-même et je répétais coup sur coup quelques mots, un appel qui me tirait de nouveau les larmes chaque fois qu’elles voulaient s’arrêter : « Mon Dieu, que je suis malheureux ! Mon Dieu, que je suis malheureux ! »
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Quel goût admirable cela vous avait d’être de nouveau un honnête homme. Mes poches vides ne me pesaient plus, ce m’était une jouissance de me retrouver à sec. En y réfléchissant bien, cet argent m’avait, au fond, coûté bien du souci secret, j’y avais réellement pensé à maintes reprises avec un frisson ! je n’étais pas une âme endurcie, ma nature honnête s’était révoltée contre cette action vile, parfaitement. Dieu merci, je m’étais relevé devant ma propre conscience. Imitez-moi ! dis-je avec un regard sur la place fourmillante, imitez-moi donc seulement ! J’avais donné de la joie à une pauvre vieille marchande de gâteaux, que c’en était une bénédiction ; elle ne savait à quel saint se vouer. Ce soir, ses enfants ne se mettraient pas au lit avec la faim… je m’excitais avec ces pensées et je trouvais que je m’étais conduit d’une manière admirable. Dieu merci, l’argent était maintenant hors de mes mains.
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Dieu bon, dans quel triste état j'étais maintenant! J'étais si profondément dégoûté et fatigué de ma vie misérable tout entière que je ne trouvais plus qu'il valût la peine de lutter pour la conserver. L'adversité avait pris le dessus, elle avait été trop rude. J'étais extraordinairement délabré, absolument l'ombre de ce que j'avais été un jour. mes épaules s'étaient affaissées, complètement déjetées de côté et j'avais pris l'habitude d'aller courbé de l'avant lorsque je marchais pour épargner tant soit peu ma poitrine. J'avais fait l'examen de mon corps quelques jours plus tôt, vers midi, dans ma chambre, et j'avais pleuré sur lui tout le temps. Il y avait des semaines que je portais la même chemise, elle était toute raide de transpiration et elle m'avait écorché le nombril. Il sortait de la plaie un peu d'eau sanguinolente mais cela ne faisait pas mal, c'était seulement affligeant d'avoir cette plaie en plein milieu du ventre. Je n'avais aucun remède là contre et elle ne cicatrisait pas toute seule. Je la lavais, la séchais soigneusement et remettais la même chemise. Il n'y avait rien à faire.
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Un monstre de voiture de boulanger passe devant moi et frôle ma jaquette de sa roue ; si j’avais été plus prompt je m’en serais tiré absolument indemne. […] je perçus une douleur à l’un de mes pieds, quelques orteils furent écrasés ; je les sentis pour ainsi dire se recroqueviller dans mon soulier.
[…] Je me dirigeai vers un banc du plus vite que je pouvais ; tous ces gens qui s’arrêtaient, les yeux fixés sur moi, me déconcertaient. A la vérité ce n’était pas un coup mortel, j’avais eu relativement de la chance, du moment qu’il fallait que le malheur arrivât. Le pire était que mon soulier avait été écrasé, mis en pièces, la semelle arrachée au bout. Je levai le pied et vis du sang dans l’ouverture béante. Bah ! cela n’avait pas été fait volontairement de part ni d’autre ; l’homme n’avait pas eu l’intention d’aggraver mon triste état : il avait l’air très effrayé.
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Pourquoi m'inquiéter de ce que je mangerais, de ce que je boirais, de ce que j'introduirais dans cette misérable boîte à asticots qui s'appelait mon corps terrestre ?
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Dieu avait fourré son doigt dans le réseau de mes nerfs et discrètement, en passant, il avait un peu embrouillé les fils.
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J'avais remarqué très nettement que si je jeûnais pendant une période assez longue, c'était comme si mon cerveau coulait tout doucement de ma tête et la laissait vide.

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