Dune, c'était pour moi un mur infranchissable, un cycle ardu, aride, au terme duquel on ne parvenait que grâce à un déploiement incroyable d'efforts, pendant lesquels on perdait des litres de sang, de larmes et de sueur.
Oui, je sais, c'est stupide, un a priori.
Parce que bien évidemment, vous vous en doute vu la note que j'ai mise, ça n'a pas été le cas. Enfin, si vous me connaissez, vous pourriez vous dire que l'un n'empêche pas l'autre, vu la note que j'ai mise pour Neuromancien alors que la lecture a été une lutte de chaque instant. Mais Dune, non : Dune est passé comme une lettre à la poste. Et je l'ai déjà relu une fois (j'en suis à la 2e relecture).
C'est ici le premier point important à retenir. Si vous hésitez à lire Dune parce que vous craignez un texte difficile, poussiéreux et sec, ôtez-vous cela de la tête. En effet, le cycle s'aborde très facilement : la prose est fluide, captivante. le texte est d'une incroyable fraîcheur et très actuel. Ca se lit facilement, sans accroc, sans vocabulaire particulièrement compliqué, ni concept ardu à assimiler.
Alors certes, tout n'est pas expliqué tout de suite, et il y a beaucoup d'acteurs et de personnages. le roman se concentre sur une petite partie de la galaxie qui semble immense, et on a parfois l'impression de nager dans un océan, laissant dans l'ombre beaucoup d'aspects. Mais ces zones d'ombre n'entravent pas la compréhension du texte ni des enjeux du roman.
Au contraire, l'introduction de chaque chapitre par un petit chapeau provenant de textes fondateurs propres au roman apporte du contexte et un regard a posteriori intéressant. de la même façon, le glossaire en fin de roman et les appendices apportent des éclairages fort bienvenus.
Comme avec Neuromancien, je me suis rendu compte à quel point Dune était à la source de beaucoup de textes… Avec comme souvent, un paquet de choses intéressantes, passionnantes, complexes… qui étrangement s'évaporent d'adaptation en adaptation, d'inspiration en inspiration. Autant dire que j'ai eu de quoi me mettre sous la dent avec ces 900 pages où chaque mot a son poids, son sens, son utilité.
Ce premier tome est un tome d'introduction : on pénètre dans ce système interplanétaire à petits pas, sans en savoir tout tout de suite. On en découvre son système politique, sa diplomatie, son réseaux d'acteurs et d'organisations tous liés ensemble… avec au centre le fameux Mélange qui régit tout. Déjà, bien capter tout ça prend un peu de temps, et j'ai compris des choses à la relecture.
C'a déjà été dit et redit : Dune pourrait se lire comme un manifeste écologique visionnaire, mais aussi un discours sur la politique : ses rapports avec la religion, le pouvoir, la liberté d'entreprendre des réformes, la mise en place de lois et de cadres étatiques, la différence entre "le bon tyran et le mauvais tyran" etc. Derrière cela, il y a également tout une série de réflexions sur le rapport entre l'Homme et la machine, la manipulation génétique pour des visées eugénistes etc. Je ne vais pas développer davantage tout ça ici, j'en parle un peu dans ma chronique mais comme d'autres spécialistes ont déjà abordé tout cela bien plus brillamment, pas la peine d'en remettre une couche médiocre.
Ce que j'ai surtout envie de souligner, c'est la métamorphose de Paul Atréides. La métamorphose, c'est un sujet que j'aime beaucoup voir exploité. Et ici, c'est absolument remarquable. La mutation, étape par étape, de Paul tout au long de ce roman est fabuleuse et captivante. Evidemment, elle est liée à tous les sujets que j'ai évoqués plus haut, et qui en font une métamorphose complexe, difficile, lente, laborieuse. Lire ses états d'âme, ses questionnements, ses craintes, son refus d'avancer mais son impossibilité de reculer, pour y aller quand même malgré lui, et constater horrifié où il en est… Pour moi, on n'est pas du tout dans une quête initiatique d'un héros : il n'y a pas de héros, il n'y a pas de quête, et il n'y a rien d'initiatique. On est dans tout l'inverse et c'est bien plus passionnant. Chaque page dézingue Paul, en toute majesté, malgré tout : ça reste beau, ça reste grand, ça reste incroyablement puissant.
Anakin Skywalker, à côté, il peut se rhabiller. Fait pas le poids.
Bref, vous aurez compris que j'ai été conquise : par tout ce que Dune offre à lire, ses réflexions, son worldbuilding, son souffle épique, son côté aventures, sa facilité d'accès. pour moi, c'est un bouquin complet.
Pour avoir lu les tomes suivants jusqu'au 4, Dune et le Messie restent mes favoris, de loin. Bon, il faudra que je relise les 3 et 4 parce qu'on n'est plus du tout sur le même style ni le même registre, ils sont aussi puissants mais différemment; malgré tout, je trouve que Dune tout seul (même sans le Messie, d'ailleurs, franchement génial mais était-il absolument nécessaire aussi ?) est un sommet inégalé.
Peut-être que je changerai d'avis quand j'aurai relu le reste, ou dans 20 ans.
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