J'ai failli passer complètement à côté de ce livre. Plus compliqué à saisir que je ne le pensais, je l'ai commencé à la légère et son goût ne m'est apparu que quand je me suis posé pour le savourer comme il se doit.
Quelques phrases m'ont parlé, presque au tréfonds. Il n'y a rien de fondamentalement original, ni dans l'écriture ni dans le fond. Mais voilà, poum poum quelques résonances et me voilà conquis.
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J'entends ma voix et mon interrogation flotter, le temps se multiplie sans drogue. Il existe peut-être un espace de paix pour les je ne sais pas, j'aimerais y trouver ma place. Mais les histoires qui ne sont pas racontées sont immédiatement inventées, son histoire à lui inventée par moi dans chacun de ses silences.
Mon coeur se débat, je le laisse se débrouiller. En entrant dans la chambre 27, je sursaute, d'un coté d'un grand lit repose un pyjama bleu, de l'autre une nuisette lilas. Les deux vêtements étendus ressemblent à des personnes à la fois gisantes et dans l'expectative. Deux fenêtres donnent sur la rue, juste en face de la droguerie Georges, je relis mille fois ce nom pour m'accrocher à la terre. J'entends Black to black sortir d'une voiture qui passe. Une table aux jambes graciles me présente un bloc de papier. Je n'essaie même pas de résister à la tentation de lire ce qui a été griffonné dessus : N'importe quelle peine est acceptable dans la clarté (S. Weil). Je suis impressionnée.
J'entends encore en moi quelqu'un (qui doit être moi) s'étonner : De combien de lieux, d'époques, de gens sommes-nous faits !
Je ne sais ni pourquoi ni comment, moi qui suis affamée de mots je commence à puiser dans le silence de Yan une chose sauvage et éclatante. Une chose qui me parle.
Tous les enfants du monde demandent un jour à leur maman : Qu'est-ce que je vais faire quand tu seras morte ?... Et toutes les mères inventent sur-le-champ une vision éclatante de lumière, indiscutable. une image déposée quelque part en nous qu'il faudrait contempler à nouveau, absolument.