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sur 288 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
1903: Mamah Cheney et Franck Lloyd Wright tombent follement amoureux l'un de l'autre. Problème: ils sont mariés, mais pas ensemble.
De la cour des Valois à l'Amérique du début du XX°, peu de différence: tels la princesse de Montpensier et le duc de Guise dans la nouvelle de Mme de Lafayette, la grande bourgeoise féministe et l'architecte star succombent aux affres de l'adultère et sacrifient en plus de leur réputation leurs enfants (qui n'étaient pas un sujet sous l'Ancien régime).
La question de l'honneur, rebaptisée « intégrité » reste, elle, bel et bien au coeur du débat: comment être digne de soi? Doit-on accepter de vivre dans le mensonge ou tout sacrifier crânement à de hautes aspirations ? Mamah va tout perdre: ses enfants, sa vie facile, la reconnaissance sociale. Elle découvre la culpabilité, la solitude, la pauvreté et trouvera une issue dans ses propres ressources intellectuelles.
La passion amoureuse n'est plus ce danger contre lequel mettait en garde Mme de Lafayette : elle est devenue le symbole même de l'honnêteté, et les enfants ne font les frais de cette nouvelle revendication que parce que l'hypocrisie sociale n'admet pas le divorce.
Ainsi nous balade la première partie de cette biographie romancée, comme la quête d'une indépendance sur fond de revendication suffragette tandis que Wright ajoute sa caution révolutionnaire, lui qui rejette les conventions victoriennes au profit d'une architecture organique et libératrice.
A moins que ce couple représente moins la modernité en marche que la persistance des valeurs aristocratiques.
L'aristocrate est persuadé de sa supériorité intrinsèque. Tout lui est dû, d'autant plus qu'il a l'amabilité sereine de ceux à qui tout sourit. Esthète raffiné, il puise dans les poches des autres pour s'offrir ce à quoi il a droit, tel Don Juan estimant que M. Dimanche est bien heureux de se faire détrousser par un homme tel que lui. Wright vit à crédit sans le moindre scrupule. Mamah se laisse entretenir sans trop se poser de questions et s'aperçoit tardivement que sa propre liberté a été payée par le sacrifice de sa soeur, la disparition de sa nièce, les efforts de ceux qui l'entourent pour gérer le quotidien et permettre à notre couple d'exprimer sa créativité sans être bridé par les contingences matérielles.
Quand le petit personnel ne donne plus satisfaction, il peut, comme le cuisinier Vatel, se suicider dans la plus totale indifférence (je ne connais rien de plus incisif concernant les rapports de classe que la lettre de Mme de Sévigné relatant cette mort). Ou alors il la joue à la Nat Turner.
Peut-on être libre en comptant sur le dévouement d'autrui? Peut-on être démocrate quand on fait des maisons que seuls les plus riches peuvent s'offrir ? Peut-on être dans le sens de l'histoire quand on est privilégié ? L'histoire (vraie) de Mamah et de Franck nous pose de troublantes questions auxquelles nous ne désirons guère apporter de réponses.
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Commandé le 24 juillet 2020 – Librairie Caractères/ Issy- [ Lu en décembre 2021 ]

La chronique très enthousiaste de l'amie palamede en juillet 2020 m'avait incitée à commander cet ouvrage autour de l'architecte, Frank Loyd Wright… il attendait patiemment sur mon très impressionnante PAL… Je le débute enfin, désirant ensuite le transmettre et l'offrir à un ami, architecte à la retraite , en complément de surprise pour le Sapin de Noël…

Fiction historique des plus captivantes, documentée par l'autobiographie de Frank Lloyd Wright, par les lettres de Mamah Borthwick et par les articles abondants dans la presse de l'époque, « Loving Frank » mêle tout à la fois Histoire amoureuse, émancipation féminine et une plongée dans l'univers créatif, singulier, d'un des plus grands maîtres de l'architecture moderne…Ouvrage que j'ai lu « voracement » en une nuit…

Etant depuis des années passionnée par l'histoire de l'Architecture, j'avais bien en tête les réalisations principales de F.L. Wright, ses conceptions innovantes… ce roman historique nous fait entrer de plus dans l'univers mental, psychologique d'un créateur génial, mais au caractère des plus complexes…idéaliste, intellectuel brillantissime curieux de tout, charmeur, charismatique, avec un rapport opaque à l'argent, un brin mégalomaniaque…

« A peu près tous les habitants d'Oad Park se débrouillaient pour passer devant la nouvelle maison des Heurtley sur Forest Avenue. C'était soit une scandaleuse aberration, soit une oeuvre de génie, selon ce que vous inspirait son architecte Franl Lloyd Wright. Une "maison-prairie", disaient certains à propos des assises de briques étroites et allongées qui y couraient à l'horizontale comme les lignes des plaintes de l'Illinois.
Quand je la vis pour la première fois, la maison des Heurtley m'apparut comme une grosse boîte rectangulaire. Mais une fois à l'intérieur, j'eus l'impression de respirer. Tout n'était qu'espace, chaque pièce s'ouvrait sur la suivante, les poutres naturelles et les boiseries couleur écorce luisaient doucement et une lumière divine filtrait à travers les vitraux verts et rouges. le lieu dégageait une atmosphère sacrée qui rappelait une chapelle de campagne. (p. 17)”

Je le proposerai à mon ami , architecte… mais j'ai un bémol à exprimer… Peur qu'il y ait trop de place pour l'histoire romanesque, sentimentale par rapport à l'oeuvre même et au parcours de cet architecte, même si on apprend un nombre certain de détails et d'informations…sur ses réalisations avant-gardistes !

Ce roman, fort bien documenté par ailleurs, ne concerne qu'une partie de la vie d'un des plus grands architectes américains, entre 1903 et 1914… où un architecte original, génial va construire une maison pour un couple ; maison type de toutes ses idées avant-gardistes. Il tombera amoureux de l'épouse de son client et réciproquement… et suivront quelques années aussi passionnelles , intenses que cauchemardesques, car ils ont chacun, abandonné leurs foyers respectifs…au grand dam d'une société américaine puritaine, et d'un conformisme impitoyable, principalement envers les « Femmes » , ne restant pas dans « les rails »!
Un amour fou, complet, amoureux aussi bien qu'intellectuel…où chacun soutient l'autre dans ses exigences d'accomplissement…créatif et intellectuel !

L'auteure rend bien le caractère génial, innovateur mais complexe, ingérable de Frank Loyd Wright…dans de nombreuses descriptions, analyses de sa personnalité… dont dans les deux extraits suivants :

« Elle aimait la versalité intellectuelle de Frank ; lui qui passait ses journées à assembler des formes géométriques, il savait aussi s'exprimer par écrit avec une certaine verve et jouer du piano avec autant de brio que de sentiment. Quant à son âme extraordinaire, il suffisait de contempler les maisons qu'il concevait pour la voir exposée aux yeux du monde.
Mamah s'aperçut qu'elle l'aimait exactement pour les traits de caractère qui faisaient tiquer les autres. Il n'avait pas peur de dire ce qu'il pensait. C'était aussi un véritable excentrique chez qui elle retrouvait les frasques qu'elle en était venue à admirer chez son propre père. Une personne aussi sensible que Frank à l'harmonie de la nature, aussi encline à réfléchir en dehors des sentiers battus, ne se soumettrait pas si facilement aux contraintes sociales. « (p. 62)
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« Elle tomba sur quelques vers de Wordworth qui semblaient décrire Frank Lloyd Wright : " Il est un obscur et mystérieux travail qui rassemble les éléments discordants et les unit en un seul tout." Frank était tout cela à la fois: un homme-orchestre capable de créer une harmonie transcendantale, aussi bien qu'une cacophonie de cymbales.
Mamah avait toujours cru que l'âme de Frank se reflétait dans son oeuvre. Qu'il était bien l'homme qu'il croyait être: aussi fidèle à ses idéaux qu'on pouvait humainement l'être. « (p. 453)

Le récit se fait à la troisième personne du singulier,ce « ELLE » représentant l'amoureuse compagne, Mamah [Borthwick]…
A travers cette dernière, et son propre parcours de traductrice, d'écrivain en devenir, l'auteure nous fait découvrir ses propres curiosités et convictions à travers son enthousiasme pour une partie de l'oeuvre de la philosophe suédoise féministe, Ellen Key, dont elle traduisit plusieurs essais. Elle ira même jusqu'à apprendre le suédois…Mamah, tout en admirant et en aimant passionnément F.L. Wright, était devenue aussi exigeante envers ses propres compétences et son parcours individuel à construire. Une personnalité aussi indépendante, que brillante , maîtrisant plusieurs langues, ayant des projets d'écriture et d'ouvrage touchant les combats vécus des femmes…voulant se battre pour leur propre existence, et leurs talents distinctifs, en plus de leurs rôles obligés maternel et marital !

Un couple hors-norme, talentueux… que la presse persécuta d'une avalanche de diffamations, plus l'arrivée imprévisible d'une tragédie, qui brisa de la façon la plus cruelle et injuste ce couple que l'on ne peut qu'estimer pour leur courage, leur amour exigeant et constructif, un art de vivre avec les autres… Je n'en dirai pas plus.
Un livre , des êtres de chair et de sang… aussi attachants que captivants de par leurs fortes personnalités singulières et lumineuses , qui me resteront longtemps en mémoire!
Merci à Nancy Horan pour son talent à rendre de façon très vivante et impartiale ces deux destinées exceptionnelles !
Même si j'aurais aimé aussi que l'équilibre narratif se fasse plus nettement avec des parties plus développées sur les changements fondamentaux dans une société américaine au tout début du XXe siècle ; société en pleine mutation et bouleversements dans le quotidien des hommes et des femmes : dans les droits, dans les difficultés économiques, les pressions religieuses, l'approche d'une guerre en Europe…etc.



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Mamah Bortwick Cheney a tout pour etre heureuse en ce début du vingtième siècle à Chicago . Un mari aimant, de beaux enfants , mais un jour son chemin croise celui d' un architecte, et pas n'importe lequel, Franck Lloyd Wright .
Pour pouvoir vivre leur passion, ils vont abandonner leurs familles respectives et s'installer en Europe pour quelques temps . La presse se déchaine contre eux ...Malgré tous les aléas qu'ils vont rencontrer, ils reviendront aux Etats-Unis pour continuer à vivre leurs différents projets .
Plus qu'une histoire ( véridique )qui raconte la passion entre deux personnalités exceptionnelles, ce livre est aussi une plongée dans le Chicago puritain du siècle dernier. La presse a scandale est déjà bien présente ( le pouvoir et l'influence des médias aussi ) comme on va pouvoir le constater.
La réalité du statut de la femme est largement évoqué avec des relents de féminisme.
Franck Wright a laissé sa trace indélébile dans l'histoire. Je ne connaissais pas cet épisode de sa vie à la fois si beau et si tragique . Merci à Nancy horan de me l'avoir fait découvrir .

Challenge ABC 2014/2015
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Partant de vies réelles, Nancy Horan nous raconte la vie de Mamah Bortwich Cheney. Cette jeune femme, marié de manière conventionnelle aux Etats-Unis, va rencontrer le célèbre architecte de Chicago, Frank Lloyd Wright. Elle va devenir sa maîtresse et décider de quitter sa vie conventionnelle à Chicago, en laissant mari et enfants pour partir avec lui à Berlin. Celui-ci part quelques mois en Europe pour préparer une monographie de ces oeuvres. Nous sommes dans les années 30 et nous allons nous retrouver dans l'Europe de ces années là. Ces deux personnages vont nous entraîner à Berlin, à Paris et en Toscane.. En France, Mamah va faire une rencontre importante. Lors d'un débat elle va rencontrer la philosophe suédoise, Ellen Key. Cette auteure d'essais va lui permettre d'émanciper et elle va devenir sa traductrice pour les Etats-Unis, même si elle n'a pas toujours d'accord avec l'ensemble de ses idées.
Frank lloyd Wright va décider de rentrer aux états Unis. A leur retour, ils vont faire l'objet d'une campagne ignoble de la presse avec des articles sur leurs vies et leurs choix. Frank Lloyd Wright va décider de construire une maison à Mamah dans son Wiscontin natal. Cette maison sera construite selon ses concepts architecturaux. Il va alors construire et aménager une belle maison prairie.
Ce livre est un roman sur l'architecture mais aussi et surtout l'histoire de cette femme qui a décidé de faire des choix dans sa vie de femme, des choix parfois difficiles dans l'Amérique puritaine du début du siècle. Romanesque, ce livre est un portrait réussi de cette époque à travers de réels personnages historiques ; Cela pourrait être un sacré scénario pour un film.
J'avais choisi de lire ce livre pour le portrait de l'architecte mais j'ai découvert la vie de sa maîtresse et aussi cette philosophe suédoise, qui a été l'une des premières écrivaines à écrire sur la condition féminine et la nécessaire émancipation des femmes. L'auteure décrit parfaitement la société de Chicago, le monde des cabinets d'architecture, la vie à Berlin, Paris et en Italie mais aussi les sentiments intimes des personnages.
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Si le nom de Franck Lloyd Wright brille au firmament de l'architecture, s'il évoque des images de bâtiments aux formes et aux conceptions avant-gardistes (Fallingwater house, le musée Guggenheim…), on connaît moins l'homme intime. 1907 : Franck, 40 ans, tombe éperdument amoureux de Mamah Cheney, 38 ans, une cliente de son cabinet d'architecture. Aucun des deux ne se satisfait du mariage conformiste et sans amour qu'ils mènent chacun de leur côté. L'idylle, d'abord consommée en cachette, éclate au grand jour lorsque Franck et Mamah (prononcez May-mah) décident de vivre en accord avec eux-mêmes. Afin d'échapper aux pressions morales de l'opinion publique et de leurs familles, le couple s'exile plusieurs mois en Europe. Mais la presse se chargera de faire ses unes de cette affaire qui choque les moeurs puritaines de l'Amérique.

Pour ce roman autobiographique, Nancy Horan a précédé l'écriture de nombreuses recherches et restitue à merveille le contexte social et culturel en pleine effervescence de ce début du XXème siècle.

Si ce roman est l'occasion de découvrir un homme aussi libre dans sa vie privée que dans sa vie professionnelle, c'est surtout la voix de Mamah qui surgit, une voix d'une grande modernité, une voix féministe avant l'heure, qui devra affronter le mépris des bien-pensants. L'auteur met ici en avant l'influence de cette femme cultivée et indépendante (elle fut la traductrice aux Etats-Unis d'Ellen Key, féministe suédoise) sur le grand architecte. Franck lui construira Taliesin, une « maison de la prairie », inspirée des villas toscanes chères à Mamah, une pure création de l'architecture organique, ouverte sur la nature, un écrin pour leur amour.

Loving Franck nous offre une leçon de courage et d'honnêteté avec le récit de cet amour magnifique et émouvant qui finira de manière tragique en 1914. L'écriture de Nancy Horan est d'une fluidité absolument délicieuse : les mots glissent, filent, vous embarquent dans cette histoire folle et non moins réelle que l'on dévore. Un livre captivant qui plaira autant aux amateurs d'intrigues passionnelles qu'aux fans d'architecture.

Impossible, une fois cette lecture achevée, d'en rester là ! 
La vie et les travaux de Frank Lloyd Wright nous intriguent définitivement. 
Car en 1914, F. L. Wright a encore plus de quarante années à vivre et tant d'édifices célèbres à réaliser. Je lirai donc (sûrement) Les femmes de TC Boyde qui apparemment reprend le fil de l'histoire là où Nancy Horan l'a laissé. Les travaux et l'évolution de l'architecture de Wright que l'on suit en filigrane dans ce roman me pousse également vers Frank Lloyd Wright aux éditions Phaidon, de Robert Mc Carter.

Et pour terminer, je vous propose quelques photos de Taliesin à Spring Green dans le Wisconsin, en équilibre sur la colline, construite en 1911, cfr lien ci-dessous :
http://www.galenfrysinger.com/wisconsin_taliesin.htm
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L'histoire de deux amants qui vont payer très cher les frais de leur romance, interdite en ce début de XXe siècle.

Jusqu'à la fin, j'attendais la tragédie annoncée dans le résumé de la quatrième de couverture… On attend de savoir ce qui va se passer de si terrible (durant toute l'histoire, seul le fait d'être traqué par les journalistes leurs rends la vie difficile). Et puis, vient la fin, inattendue jusqu'au dernier moment. La tragédie annoncée est bien là... mais les causes ne sont pas forcément celles que l'on croit.

Une histoire émouvante et tragique à la fois.
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Ce livre, inspiré de faits réels, raconte l'histoire d'une passion amoureuse, dans les années 1900, aux Etats-Unis. Mamah Borthwick est mariée à Edwin Cheney. ils ont deux enfants et vivent une existence paisible jusqu'à ce que Mamah tombe amoureuse de l'architecte chargé d'établir les plans de leur future maison. Il s'appelle Frank Lloyd, c'est un génie dans son domaine. Entre Mamah et Frank, se produit ce qu'on appelle un coup de foudre, de ceux qui foudroient littéralement. Mais à l'époque, une femme ne quitte pas son foyer facilement et encore moins avec ses enfants. Pourtant, Mamah choisi de quitter le domicile conjugal pour vivre sa passion, laissant les enfants à leur père.
Nous suivons le couple illégitime en Europe (Frank a également quitté femme et enfants). Mamah souffre beaucoup de l'absence de ses enfants mais tiens bon. Avant-gardiste, elle tient à gagner sa vie et se lance dans la traduction d'une écrivaine féministe, trouvant du réconfort dans l'étude de l'oeuvre de cette femme. Mais les coups durs sont fréquents. Littéralement persécutés par les journalistes, il leur faut bien du courage pour ne pas baisser les bras. Quand ils retournent en Amérique, l'accueil est glacial. Mais ils font face, courageusement...

J'ai passé un très bon moment en compagnie de ce couple attachant et courageux. J'ai aimé imaginer les lieux où ils séjournaient et les réalisations de Frank Lloyd, que je me suis empressée d'aller découvrir sur internet. J'ai trouvé Mamah Borhwick extrêmement courageuse. Je ne la blâme absolument pas pour ses choix de vie, même si, personnellement, je n'aurais pas pu laisser mes enfants derrière moi comme elle l'a fait. Ce fut une lecture très prenante. J'avais hâte chaque soir de retrouver Frank et Mamah pour faire un bout de chemin avec eux, me demandant s'ils arriveraient un jour à mener une existence paisible, où les enfants de Mamah auraient leur place. La fin du livre est inattendue, vraiment très triste.
Un bon roman !
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Je termine ce livre bouleversée après être passée par toute la gamme possible des réactions d'une lectrice lambda qui, tout en connaissant l'architecte Frank Lloyd Wright et ses belles réalisations, ignorait tout de sa vie privée. Autant dire que je suis passée par bien des émotions durant la lecture de ces 540 pages (Buchet/Chastel éd.). Tout d'abord, j'ai failli abandonner dès la première partie tellement l'histoire de l'infidélité du couple Frank Lloyd Wright et Mamah Borthwick Chesney, chacun marié de son côté avec 9 enfants à eux deux, me semblait convenue et désormais banale mais l'intérêt est venu dès leur fuite en Europe et s'est accru avec la rencontre entre Mamah et la féministe suédoise Ellen Key dont elle voulait devenir la traductrice au point de ne pas suivre son amant lors de son retour en Amérique. Quant à la troisième partie, le divorce de Mamah et les retrouvailles avec ses enfants, la construction de Taliesin, leur maison commune à elle et Frank mais près de la famille de celui-ci et la fin surtout, je l'ai trouvée d'une grande intensité dramatique. J'ai avalé ce récit, le coeur battant, d'autant plus que je savais l'histoire vraie puisque, comme journaliste, la romancière avait fait de sérieuses recherches avant de se lancer dans son récit.
La grandeur de ce roman tient avant tout pour moi au fait que ce ne soit pas une simple histoire d'amour contrarié, violemment rejeté par la société et la presse de l'époque mais c'est surtout l'évocation plus ample de la difficulté d'être une femme libre en ces premières années du XXe siècle qui est au centre du récit.

J'ai longtemps été partagée entre deux sentiments contradictoires: le rejet et l'agacement devant la légèreté des personnages quant à l'abandon de leurs enfants. Ceux de Mamah n'avaient alors que deux et sept ans si je me souviens bien. Pour moi, il n'y a rien à faire, excuser un tel comportement m'est difficile. D'un autre côté j'ai admiré la prise de position féministe qu'elle a adoptée par la suite et son courage pour affronter tous les moments de détresse éprouvés au cours des nombreuses épreuves vécues dans la solitude la plus complète. le personnage de Frank Lloyd Wright ne sort d'ailleurs pas grandi de cette histoire me semble-t-il. Je l'ai ressenti comme trop égoïste et léger pour être attachant. Ceci dit, j'ai beaucoup aimé ce livre et je vais poursuivre avec quelques recherches sur ces personnalités remarquables mais fragiles aux destins si tragiques .
Lien : http://liratouva2.blogspot.f..
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“Loving Franck” est le premier roman de Nancy Horan et il a obtenu (et mérité) le prix Fenimore Cooper de la meilleure fiction historique. L'auteur nous raconte la rencontre passionnée de Mamah Borthwick Cheney (1869-1914) et du célèbre architecte Franck Lloyd Wright (1867-1959).

Mamah connut une enfance choyée, elle fit des études à l'université ce qui lui permit de devenir professeur puis bibliothécaire. Elle devint militante des droits des femmes, notamment pour le droit de vote, et participa à de nombreuses réunions féministes. Malgré sa volonté d'indépendance, Mamah finit par céder aux avances de Edwin Cheney. Elle l'épousa et eut avec lui deux enfants : John et Martha. En 1903, Edwin demanda à Franck Lloyd Wright de leur construire une maison, laissant le soin à Mamah de régler les détails avec l'architecte. Cette rencontre fut un coup de foudre pour tous les deux. “Pourtant, pendant les travaux, partis d'un simple détail architectural, leurs échanges s'étaient maintes fois transformés en longues discussions. Aujourd'hui, Mamah gardait un souvenir enchanteur de ces six mois de collaboration. Franck Lloyd Wright avait stimulé son esprit comme personne.” L'architecte est lui-même marié et a sept enfants avec sa femme Catherine. Mais l'amour est plus fort que tout et en 1909 Mamah et Franck quittèrent leurs familles, ils s'exilèrent en Europe en espérant ainsi faire taire les commérages. Mais la lutte pour leur vie commune n'en était qu'à ses prémices.

L'histoire racontée dans “Loving Franck” est celle de deux fortes personnalités, de deux précurseurs. Franck Lloyd Wright voulait inventer une architecture typiquement américaine. Il allait à l'encontre du classicisme ambiant. Son architecture était organique, ses maisons devaient être en accord avec la nature et avec le mode de vie de ses habitants. Tout dans la maison contribuait à l'effet voulu par l'architecte, le décor ne devait pas défigurer l'ensemble. Lorsque Mamah et lui décidèrent de vivre ensemble, Franck construisit, dans la vallée de ses ancêtres dans le Wisconsin, une maison représentant la quintessence de son art, appelée Taliesin. “Elle l'avait souvent entendu dire que la réalité d'un bâtiment réside dans sa dimension intérieure. Votre façon de vivre et votre devenir. Ici, à Taliesin, il n'avait pas envie d'encombrer l'espace d'objets qui n'élèveraient pas leurs âmes. Mamah non plus.” Et ce quitte à se ruiner, Franck place son besoin de beauté au-dessus de toutes considérations matérielles. Sa liaison avec Mamah (car Catherine refusait obstinément de divorcer) lui causa certes des torts dans l'obtention de contrats mais les problèmes financiers du couple provenaient surtout des dépenses faramineuse de Franck. La légèreté de celui-ci et ses mensonges à propos de l'argent compliquèrent grandement la vie du couple. Il faut également souligner l'incroyable opiniâtreté de Franck Lloyd Wright. Par deux fois, Taliesin fut détruite par le feu, à chaque fois l'architecte reconstruisit sa maison.

Face à ce génie, le destin de Mamah Bothwick Cheney est également remarquable. Fervente défenseure du droit des femmes, Mamah était en avance sur son temps. Etre une femme au foyer, avoir des enfants ne lui suffisaient pas. “Car d'aussi loin qu'il lui en souvint, Mamah avait toujours ressenti un manque sans pourtant arriver à le préciser. Elle avait meublé ce vide avec toute sortes de choses - livres, réunions de l'association, militantisme pour le droit de vote, cours - mais rien ne l'avait comblée.” Ce manque c'est l'accomplissement de soi, la réalisation de quelque chose de personnel. Mamah fit preuve d'un courage exemplaire en quittant son mari, en abandonnant ses enfants qu'elle adorait. Elle refusait d'être hypocrite avec sa famille mais l'amour de Franck ne suffisait pas à combler le manque. Elle cherche sa voix à travers celles de Charlotte Perkins Gillman (dont j'ai parlé ici à travers son roman “La sequestrée”) et surtout de la philosophe suédoise Ellen Key. Elle décida de traduire l'oeuvre de cette dernière afin que ses idées se diffusent aux Etats-Unis et que les femmes conquièrent leur indépendance. le livre de Nancy Horan rend un vibrant hommage à cette femme qui affronta la diffamation, l'humiliation publique pour affirmer ses convictions. La vie de Mamah Borthwick se termina par un terrible drame au moment où sa vie semblait enfin apaisée, l'empathie du lecteur n'en est que renforcée.

Le livre dense, précis de Nancy Horan nous rappelle que le combat des femmes pour l'indépendance fut long et douloureux. Nous devons aujourd'hui nous remémorer le courage de certaines d'entre elles qui, par leurs choix de vies, firent avancer les choses. Mamah Borthwick était l'une d'entre elles, son incroyable destin méritait bien un livre et celui-ci est particulièrement réussi.
Lien : http://plaisirsacultiver.unb..
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J'attendais beaucoup de cette lecture, voilà qui augure une déception, me direz-vous… Non, ce n'est pas le cas, cette lecture fut passionnante en particulier le début et la fin. J'ai éprouvé de l'empathie pour le personnage de Mamah (prononcez May-Mah) Borthwick Cheney, femme d'une grande loyauté qui ne pouvait se contenter d'une liaison clandestine et qui lui préféra l'opprobre de toute une Amérique bien-pensante et friande de potins. J'ai été touchée par le personnage de Mamah, par sa solitude même lorsqu'elle est bien entourée, par ses doutes quant à la pertinence de ses choix, par ses rêves d'avenir enterrés, par son statut de femme à part, intellectuelle et cérébrale.

Le roman dépeint avec clarté, également, les réactions plus ou moins vives de l'entourage du couple Wright-Borthwick. L'auteur évoque très bien le milieu bourgeois du début du XXème siècle à Chicago, milieu cultivé et ouvert en apparence, où les créations architecturales de Frank Lloyd Wright font fureur, notamment les « Prairies Houses » dans la banlieue résidentielle de Oak Park. Frank Lloyd Wright est un personnage à part, travailleur infatigable, séduisant mythomane, qui satisfait ses passions pour l'esthétique et la beauté, même si c'est à crédit. J'ai été intéressée par les théories architecturales de Wright, par les idées féministes de Mamah et celles de la suédoise Ellen Key dont elle a été la traductrice. Les différentes étapes du périple européen du couple, les rencontres qu'ils ont fait, l'évolution de leur vie de couple, les relations avec leurs enfants, rien ne manque à ce livre sur un destin que l'on peut qualifier sans aucun doute de romanesque.

Non, si j'ai une légère restriction, je ne saurais pas précisément l'expliquer, à part peut-être une légère mollesse aux deux tiers du livre, si ce n'est que je pense qu'il peut ne pas plaire à tout le monde. C'est frustrant de ne pas réussir à mettre le doigt sur le pourquoi de cette impression ! Je ne peux donc que vous conseiller de le lire pour vous faire votre propre idée.

Merci à Guillaume et aux éditions Buchet-Chastel pour l'envoi.
Lien : http://lettres-expres.over-b..
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