Elle était curieuse de découvrir enfin ce qui prendrait le relais de la vie terrestre. Ce n'était pas la première fois qu'elle tenait ce genre de propos, elle répétait qu'elle avait eu une belle vie et que désormais un autre niveau d'existence l'attendait, que ce soit la simple froidure de la tombe si le paradis n'existait pas ou un monde peuplé par les âmes de ceux qui étaient partis avant elle, et auquel elle croyait dur comme fer.
-Tout ce qu’il me reste dans la vie, c’est ma curiosité, avait-elle ajouté en baissant le ton.
Les chignons choucroute aussi rigides et aérés que de la barbe à papa.
Est-ce que ce genre de chose pourrait arriver ailleurs qu’en Islande ?
- Je n’en sait rien.
— Est-ce que ce genre de chose pourrait arriver ailleurs qu’en Islande?
— Je n’en sais rien.
(Metailié, p.343)
Il rangea son portable dans sa poche et regagna sa voiture en continuant à observer le Voyageur du soleil qui semblait s'apprêter à prendre son envol. Il émanait de cette œuvre une sensation de liberté qui n'était pas pour lui déplaire. Il passa à côté d'une poubelle, s'attarda quelques instants, fit tourner la relique de son père dans sa main, puis la jeta aux ordures et reprit sa route, le pas un peu plus léger.
Elle avait malgré tout réussi à rentrer chez elle, marchant dans la neige, traversant les rues décorées pour Noël, résolue à ne rien laisser paraître. A faire comme si rien n'était arrivé. Elle allait enfouir tout ça dans sa mémoire pour ne plus jamais y penser. Elle était sortie du Glaumbaer en se faufilant par la porte de service. Elle avait entendu ses collègues dans la cuisine, mais n'était pas allée les prévenir, ni leur demander de l'aide, ni hurler qu'elle venait de se faire violer. Elle avait gardé tout ça pour elle.
p.304
Konrad méditait sur l'ironie du sort. Sur la taille restreinte de la population islandaise. Sur les hasards qui régissaient la vie des gens. La manière dont ils la façonnaient. La manière dont ils l'anéantissaient.
La mémoire avait un fonctionnement surprenant. Certains souvenirs s'y ancraient et refusaient de s'effacer quoi qu'on fasse. D'autres étaient balayés sans même qu'on le remarque.
Konrad la revoyait quitter le musée, petite, désemparée et accablée par un passé douloureux. Elle avait tenu parole et ne l'avais plus contacté. Après que Marta lui avait annoncé la terrible nouvelle de son assassinat, il se demande s'il ne l'avait pas profondément déçue et si, dans une certaine mesure, il n'avait pas failli à son devoir. Abasourdi par ce coup de fil, il repensa à leur rendez-vous au musée. Il ne comprenait vraiment pas comment quelqu'un avait pu s'en prendre à cette femme discrète avec la violence que son ancienne collègue lui avait décrite .