Ce livre est horripilant. Chaque chapitre, Chaque paragraphe commence plutôt de façon plaisante. Mais, au bout de quelques lignes surtout à compter du « roman I la vie des rats », tout se gâte : l'auteur se lance dans de grandes digressions, il se répète, il étale son savoir, il égare le lecteur. Ce style labyrinthique finit par étourdir et lasser. Exemple : 7 pages de considérations vaseuses sur le film de Pontecorvo « la bataille d'Alger ». Les dialogues des personnages (pour la plupart des militaires) sonnent rarement juste, s'éternisent en considérations pseudo philosophiques ou sociologiques.
Ce livre se présente comme une antithèse de l'art de raconter à la française en ce sens qu'il tourne le dos à l'esprit de concision : « qui ne sut se borner ne sut jamais écrire ». 639 pages pour nous convaincre que nos méthodes de guerroyer et de maintenir l'ordre sont dépassées c'est 600 pages de trop. L'appréciation négative sur les propos que tenait
De Gaulle en 1962 au sujet de la différence culturelle des arabes musulmans et des Français est sujette à caution. Les problèmes d'aujourd'hui en apportent la preuve !
Un roman c'est une histoire, pas un traité d'anthropologie. M. Jenni qui enseigne les sciences confond les genres et c'est bien ce qui agace le lecteur car son style se révèle en plusieurs points très appréciable : « formant autour de leur corps d'athlète une mandorle de vapeur parcourue d'arcs- en- ciel », « cela sentait les arbres résineux, les plantes succulentes qui se soulagent en soupirant d'épais parfums, les cailloux chauffés qui diffusent une odeur de silex ».
Alexandre Dumas a écrit des romans de 600 pages mais chaque chapitre est ciselé de manière à tenir le lecteur en haleine. Une fois le chapitre lu, le lecteur brule du désir de lire le suivant. Pas chez Jenni. Ou plutôt, il brule du désir de sauter des pages pour se concentrer sur l'aventure et non sur des réflexions sans fin. Les dernières lignes du roman n'évitent pas le cliché à la mode d'une scène de copulation. A bien des égards, cet auteur me rappelle
Giono : des descriptions admirables mais une pensée confuse et d'interminables longueurs.
Un dernier mot sur le prix Goncourt : il avait couronnait
John Little pour « les bienveillantes » un roman trop long. Il couronne aujourd'hui «
l'art français de la guerre », lui aussi beaucoup trop long. le jury méconnaitrait-il l'art français du roman ?