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3,43

sur 607 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Victorien Salagnon a été l'homme de tous les combats : engagé dans la résistance pendant la seconde guerre mondiale, devenu soldat par habitude et par incapacité de faire autre chose pendant les guerres d'Indochine et d'Algérie. Des années d'obéissance aux ordres, avec des sentiments mêlées : la volonté d'employer la force, la torture, le meurtre, « une dernière fois », pour mater définitivement toute rébellion et développer le pays ; et le sentiment que leur présence même est un aveu d'échec de tous ces beaux projets.

La plongée dans ces trois guerres est particulièrement réussie, on ressent pleinement cette ambiance paradoxale : d'un côté, on est tenté de conforter Salagnon dans sa position, de défendre la justesse de sa cause et de l'absoudre de ses erreurs. Cependant, on se rend bien compte de l'hostilité de tout un pays, et que les gens qu'il est sensé défendre sont ceux dont il doit se méfier le plus.

Le narrateur m'a par contre nettement moins convaincu. S'il sert à faire la jointure entre ces trois récits en interrogeant Salagnon sur sa vie, ses commentaires et ses quelques péripéties m'ont semblé assez fades. Son seul intérêt à mon sens est de montrer que la guerre marque toujours les esprits, bien après avoir déposé les armes, et que les plaies qu'elle a causés ne se sont pas encore complètement refermées de nos jours.

Un premier roman ambitieux pour cet auteur, que ce soit sur le choix du thème ou sur la qualité de l'écriture. Malgré quelques petits défauts par-ci par-là, j'ai été absorbé par les 700 pages du roman.
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Il y a déjà quelques temps que ce « Goncourt » me faisait de l'oeil sur une étagère. le titre est un peu intrigant. La quatrième de couverture ne nous renseigne pas vraiment. Mais surtout il fallait un peu de courage pour s'attaquer à ces 630 pages écrites sans espaces inutiles.
Ce roman traverse l'histoire de France à travers ses guerres depuis 1940 jusqu'à l'Algérie, en passant bien sûr par l'Indochine.
Le héros, un jeune homme un peu paumé qui vit à Lyon rencontre Victorien Salagnon, ex-baroudeur qui a participé à toutes les guerres depuis 1940. Celui-ci lui apprendra à peindre et, pendant ces séances lui racontera sa vie et ses aventures . C'est l'occasion pour ce jeune homme de nourrir sa réflexion et de développer certaines théories basées sur notre histoire, tendant à expliquer la société actuelle.

Le style est simple et pourtant particulier, lié à la construction du roman où se succèdent des chapitres narratifs concernant la vie de Salagnon et des chapitres de commentaires dans lesquels s'expriment de nombreuses idées.
On a parfois l'impression que l'auteur avait tellement de choses à dire qu'il a choisi cette forme d'écriture pour tout caser. On trouvera des idées sur l'idée d'être Français, l'immigration, l' intégration, le vivre ensemble, etc.

La fin est un peu diluée comme la plupart des commentaires.
L'idée principale est que ces vingt années de guerre ont façonné ce qui est notre société aujourd'hui. Bien sûr ce livre fait polémique, mais il est passionnant à lire et si l'on oublie les longueurs on comprend la décision des jurés du Goncourt.
On aurait pu avoir un livre de guerre et un essai sur la guerre et la société. Alexis Jenni allie les deux avec finesse et intelligence.
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Deux avis différenciés pour cet ouvrage à deux têtes, dont il est, au final, plutôt complique de faire la synthèse : l'un enthousiaste pour le volet 'Roman' qui m'a emballée, l'autre plus nuancé pour le volet 'Commentaires' qui me laisse plus perplexe.

Le roman dans le roman retrace la vie d'un homme de guerre qui aura traversé vingt ans d'expérience belliqueuse française depuis les maquis de la deuxième guerre mondiale jusqu'à ceux, plus glauques, de la guerre d'Algérie, en passant par les remugles piteux de celle d'Indochine, le tout en parvenant à préserver son âme grâce à son silence, et à la maîtrise du dessin.
Cette partie-là est passionnante, très inspirée, écrite avec verve et couleur, et offre à son lecteur une plongée dans l'acide de la guerre crue, ses errances, ses temps de néant, de violence, ses motivations triviales, sans rien cacher de ses échecs patents. Cette 'plongée dans l'acide' est quasiment palpable, que ce soit la moiteur morbide de la jungle tonkinoise ou les sous-sol nauséabonds de la villa algéroise où les paras commettent leurs pires exactions. Un récit dur, violent, mais réellement jouissif.

Les excroissances du roman, dans lesquelles le narrateur, au contact du héros guerrier du roman dont il écrit l'histoire (premier effet miroir) pendant que ledit guerrier lui apprend à peindre (deuxième effet miroir) , traîne son état végétatif tout en faisant l'exégèse du roman du guerrier (troisième effet miroir, on commence à saturer), ces excroissances donc, ou commentaires, ou que sais-je, servent à poser avec une réelle virtuosité de plume mais de lassants effets de répétition, la thèse du roman selon laquelle la France, ne s'étant jamais remise de l'humiliation de 1940 ni de la colonisation, perpétue un racisme vengeur jusque dans son approche actuelle de l'immigration et la perception de "l'autre", la langue française ne suffisant pas aux plus frustrés à jouer son rôle historique de ciment. Une thèse qui se défend et est amenée de façon bien plus brillante et fine que ces pauvres lignes, mais dont personnellement je regrette que l'auteur n'ait pas été au bout de sa démarche littéraire en en réussissant la mixtion avec la trame romanesque.

Au final, une lecture dense et enfiévrée d'un roman virtuose mais qui parait inabouti, et peut-être cherche à trop dire.

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Il est souvent reproché à la littérature française actuelle son nombrilisme, son penchant désolant vers l'égotisme, ou le culte de l'égocentrisme systématique .

Avec L'art français de la guerre d'Alexis Jenni, nous tournons résolument le dos à ce travers pour nous diriger vers des questions de fond : la place de la guerre dans l'histoire récente de la France, la place de la violence dans la société française , le rôle de l'histoire dans la conscience d'une nation. Et nous entrons dans le vif du sujet dès les premières lignes du roman .Le récit part de la rencontre d'un jeune habitant de la région lyonnaise un jour de 1991, situé aux débuts de la guerre du Golfe .Ce garçon rencontre Victorien Salagnon, ancien maquisard, engagé volontaire dans l'armée et combattant des guerres d'Indochine et d'Algérie.

L'habileté d'Alexis Jenni est d'éviter l'écueil, qui aurait consisté à élaborer un récit romanesque, un de plus, de ces guerres .Le roman oscille entre la restitution des échanges entre ce jeune homme et Victorien Salagnon, accompagné de la femme de sa vie, Eurydice, dont il a fait la connaissance en Algérie, et d'autres relations, parmi lesquelles un certain Mariani, compagnon d'armes.

Le fil conducteur du roman est le suivant : La France a, peu ou prou, conduit depuis 1945 jusqu'à 1962 la même guerre : « -Vous ne l'avez pas remarquée la guerre de vingt ans ? La guerre sans fin, mal commencée et mal finie ; une guerre bégayante qui peut-être dure encore. La guerre était perpétuelle, s'infiltrait dans tous nos actes, mais personne ne le sait .Le début est flou : vers 40 ou 42, on peut hésiter. Mais la fin est nette : 62, pas une année de plus .Et aussitôt, on a feint que rien ne se soit passé. »

Autre fil conducteur du roman :la référence à Sun-Tsu , auteur de L'art de la guerre, auquel Alexis Jenni fait référence implicitement dans le titre de son roman .Après avoir évoqué un dialogue de Sun-Tsu avec un empereur de Chine, il décrit le rôle destructeur de la ,peur dans l'accomplissement des guerres : « Nous , les gens, nous avons des jus psychiques et volatils qui agissent comme des odeurs et les partager est ce que nous aimons le plus .Quand nous sommes ensemble, ainsi unis, nous pouvons sans penser à rien d'autre courir , massacre, nous battre à un contre cent. »

On peut relever au cours du livre la présence répétée de propos acerbes à l'encontre du Général de Gaulle : « Il nous donna, parce qu'il les inventa, les raisons de vivre ensemble et d'être fiers de nous .Et nous vivons dans les ruines de qu'il construisit, dans les pages déchirées de ce roman qu'il écrivit, que nous prîmes pour une encyclopédie, que nous prîmes pour l'image claire de la réalité alors qu'il ne s'agissait que d'une invention ;une invention en laquelle il était doux de croire . »
On le voit , l'histoire de France , dans ses épisodes les plus cruels, est omniprésente .Ce qui sauve Victorien Salagnon de la barbarie et de la cruauté, c'est la peinture , art auquel il s'adonne entre deux combats , qui le distancie des événements, qui le pousse à élaborer , par ses desseins et ses peintures, des souvenirs , sources de rééquilibrage psychologique pour lui.
On trouve aussi, dans ce roman, de très éclairantes réflexions sur les liens existants entre ce passé, un peu lointain peut-être pour certains, et l'actualité sociale de la France :
« Nous avons manqué à l'humanité .Nous l'avons séparée, alors qu'elle n'a aucune raison de l'être .Nous avons crée un monde où selon la forme du visage, selon la façon de prononcer le nom, selon la manière de moduler une langue qui nous était commune, on était sujet ou citoyen. Chacun consigné à sa place, cette place s'héritait et se lisait sur les visages. »
C'est probablement un des meilleurs romans sur ce sujet : le rapport de la France à son passé colonial, à son art de la guerre.
A lire absolument.



Lien : http://bretstephan.over-blog..
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Ce livre très dense de 630 pages a retenu toute mon attention.

Comme je l'ai emprunté à la bibliothèque j'ai dû me dépêcher un peu et je le regrette car c'est un livre qu'on ne peut pas avaler d'une traite.
Il s'est passé un phénomène bizarre avec ce roman si je m'obligeais à le lire vite il me lassait mais dès que je le reprenais je le trouvais passionnant.

Deux destins d'homme se croisent , l'un jeune qui vit une grave dépression et un vieil homme peintre et ancien parachutiste ayant fait trois guerres : la libération , l'Indochine et l'Algérie .
Les récits et les réflexions sur les guerres sont passionnants et bouleversants.

Le monde contemporain en particulier la banlieue lyonnaise est aussi pour l'auteur en état de guerre je trouve cela plus discutable mais je ne vis pas en banlieue. J'ai trouvé sa peinture du monde d'aujourd'hui beaucoup moins bien réussi que les passages sur les conflits du passé.


Les personnalités des anciens parachutistes sont minutieusement disséquée, on a l'impression de mieux comprendre ce qui amène les hommes à savoir se battre.

Les guerres coloniales sont une pure horreur et la défaite semblait inscrite dans la nature même du conflit. Mais c'est plus facile d ele dire aujurd'hui qu'à l'époque.

Jamais un livre n'aura aussi bien fait ressortir l'horreur de la guerre et je me demande ce que pense les militaires français de ce livre.


Pour le style j'ai été un peu déçue , les répétitions sont insupportables et les relâchements vers la langue orale sans aucune justification un peu étrange.

Je pense que ce roman aurait supporté quelques coupures qui aurait allégé la lecture.


Lien : http://luocine.over-blog.com..
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Si le prix Goncourt 2011 a été attribué à "L'Art français de la guerre" le premier roman d'Alexis Jenni, c'est parce qu'il a le mérite d'éclairer notre histoire récente à la lumière du remords colonial en présentant une chronologie documentée entre les horreurs du passé et celles du présent. Je trouve pourtant que la forme dessert le fond notamment par la longueur et les répétitions même s'il est vrai que pour faire le récit de tous les événements sur trois continents, plusieurs décennies et trois guerres, il fallait se donner du temps.

On assiste à une alternance entre les périodes sous forme d'un constant aller-retour entre les commentaires du narrateur qui vit à Lyon de nos jours et les romans qui sont plutôt des récits du peintre Victorien Salagnon, ancien résistant qui a fait l'Indochine et l'Algérie. Devenu parachutiste, il peint au sens propre et au figuré la torture et autres barbaries de ces guerres.
Certains passages violents soulèvent le coeur et font faire des cauchemars (je pense au massacre de Sétif par exemple), cela montre notamment comment le racisme, le nationalisme, la peur de l'autre viennent bien de notre histoire, quand on croit que l'ordre vient de la force.

C'est donc un roman intéressant sur le fond parce qu'il fait le lien entre les guerres coloniales et les guerres sociales. le tableau est pessimiste parce que l'auteur met en avant la difficulté du vivre ensemble mais il tente de comprendre pourquoi.


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Challenge ABC 2023-2024
Challenge Goncourt illimité
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Deux guerres en parallèle.

Celle de Salagnon. Regard bleu acier trempé. Et la mort partout, la mort dans les rivières, la jungle, la mort sur soi, en soi, qu'on ne peut plus quitter. Là-bas, l'Indochine. Les autres tombent, les uns après les autres. Pas lui.

Salagnon peint.
Et si l'encre protégeait ? Sauvait ?
Et si l'encre lui avait permis de survivre...
Salagnon peint.
A la fin, il ne restera que l'art.

Deux guerres en parallèle.

Celle du narrateur.
Qui accepte de raconter l'Indochine, l'horreur, l'inénarrable, voilà, il accepte de raconter ça, ce qui n'a pas de mots.
En échange, Salagnon lui apprend à peindre.

Alors c'est quoi sa guerre, au narrateur ?
C'est la vôtre.
La mienne.
Celle qui n'a pas cessé depuis toutes ces décennies.
Une guerre de race.
De peur.
Une guerre au quotidien. Une violence qui passe presque inaperçue, presque, il faut lever la tête et la reconnaître pour ce qu'elle est.
En bas de chez vous, entre la police et les manifestants.
Quand on vous demande vos papiers. Ou pas.
Au bureau, quand il faut tenir encore et encore, esclave d'une violence qui ne dit plus son nom.
Dans le métro, et puis à la télé...
Dans le silence et l'indifférence.

Une guerre qui n'en finit plus.

Alexis Jenni a affûté consciencieusement ses mots avant de se jeter dans la bataille. C'est cinglant. Sanglant.
La plume heurte, accroche, te ramène sur les lieux du crime si besoin est.
Il établit un lien entre deux époques, deux situations qui semblent aux antipodes, et la démonstration ne manque certes ni de panache, ni de discernement.

Un Goncourt mérité. (Je ne l'aurai pas dit souvent ça 😄)
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Alexis Jenni est un jeune auteur, au sens où c'est son premier roman publié. Mais ce prof de sciences-nat de 48 ans n'a rien d'un jeune premier (sans vouloir offenser les profs de SVT ou les quadra pré quinqua...)

Le roman s'articule comme un double miroir (oui, j'ai envie de faire dans la métaphore) (pardon, je ne digresserai plus, à copier 20 fois) un miroir qui renvoi les reflets de deux générations, de diverses périodes de troubles et de deux hommes au milieu de l'Histoire, telle qu'elle s'écrit.

Le narrateur est un presque marginal, invisible parmi les invisibles des laissés pour compte de notre société, plus prompte à rassurer les marchés que ses citoyens. Revenu de tout, il se tourne vers la peinture comme nouveau projet. Par hasard il tombe sur Victorien Salagnon, un vieux peintre qui vend ses toiles sur un marché. le narrateur demande à apprendre la peinture avec lui. Victorien accepte, en échange de quoi le jeune homme devra écrire l'histoire de Victorien Salagnon.

Commence ainsi un récit, en miroir. Treize chapitres qui alterneront entre la biographie du vétéran militaire Victorien Salagnon, et le commentaire actualisé des nouvelles formes de guerres.

Car le coeur de l'histoire est là. La guerre est au coeur de tout. La guerre sur les différents fronts, vécue par Salagnon est un écho ancien aux nouvelles guerres, sociales, économiques, pétrolières, qu'on vit aujourd'hui. Les émeutes des « banlieues » françaises, et les émeutes de la Casbah d' Alger, les sales guerres se répètent dans des miroirs trop répétitifs.

Les chapitres sur Victorien et ses expériences militaires, sont parfois difficiles, étouffants, moites, le réalisme d'un soldat au fond du trou est incroyablement retranscris. Rien n'est oublié ou pardonné : le pathétique de certaines situation, le sordide, le sale. On a dit réalisme. J'ai aimé ce réalisme.

Les chapitres de « réflexion », sont quand même mes favoris. le narrateur fait à voix haute l'analyse et le procès d'une société en dérive. La dérive de la nation, de l'identité et de la transmission. Il fait le procès du mythe de la Grandeur. Qu'est ce que la grandeur d'un pays ? Quels principes et quel héritage, et quelle image souhaite-t-on transmettre aux autres, à ses citoyens et au monde ? Quelle est la force de notre identité, et que recouvre-t-elle ? Ce sont autant de questions que le narrateur explore et les quelques réponses qu'il donne sont celles d'un homme désabusé certes, mais aussi plein de fierté pour ce est vraiment l'honneur et la beauté de toute nation : sa langue, sa culture.

J'ai aimé ce souffle épique qui animait les propos du narrateur, cette volonté d'explorer, de donner un avis et de s'engager. Quitte à être parfois péremptoire, voire un peu répétitif.

Un grand roman !
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Premier roman très réussi, au croisement Lartéguy et Jonquet, la réflexion et la poésie en plus.

Ce premier roman paru en septembre 2011 pourrait n'être que le mélange, opéré par un habile praticien (pourtant débutant), des "Centurions" (1960) et "Prétoriens" (1964) de Jean Lartéguy avec le "Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte" (2006) de Thierry Jonquet. Il l'est, indéniablement, mais il est aussi bien davantage.

Le narrateur, lui-même cadre de gauche humaniste en rupture de ban et de société, qui après la rencontre accidentelle avec Victorien Salagnon, décide de se consacrer à l'apprentissage de la peinture en sa compagnie, tout en recueillant son récit, apporte une touche essentielle : les mémoires du résistant de 17 ans devenu lieutenant et capitaine parachutiste en Indochine et en Algérie, si elles témoignent d'une énorme empathie avec le sujet, seront donc entremêlées des réflexions propres, des doutes, des indignations parfois naïves du narrateur.

"On pourrait discuter la pratique : nous connaissons bien la colonne blindée ; cela explique que personne ne la remarque. Les guerres menées là-bas nous les menions ainsi, et nous les avons perdues par la pratique de la colonne blindée. Par le blindage nous nous sentions protégés. Nous avons brutalisé tout le monde ; nous en avons tué beaucoup ; et nous avons perdu toutes les guerres. Toutes. Nous. Les policiers sont jeunes, très jeunes. On envoie des jeunes en colonnes blindées reprendre le contrôle de zones interdites. Ils font des dégâts et repartent. Comme là-bas. L'art de la guerre ne change pas."

La présence en arrière-plan de l'ami de Salagnon, Mariani et de ses "GAFFES (Groupes d'Autodéfense des Français Fiers d'Être de Souche", crée bien le pont entre l'échec d'hier (dans toute sa complexité sur le terrain militaire) et la méthode de résolution choisie pour aujourd'hui, à savoir poursuivre au fond "l'art français de la guerre" coloniale... appliqué à nos banlieues.

Quelques lourdeurs incidentes, quelques bavardages occasionnels n'affaiblissent que très peu un roman qui, au-delà de son propos "direct" captivant, est irrigué par une réflexion pas du tout anodine quoique plus discrète sur l'art et le mentir-vrai, du général-romancier De Gaulle qui invente une France au capitaine-peintre Salagnon qui recrée des êtres humains au sein des boucheries guerrières, livrant au passage d'étonnantes pages sur l'art chinois du pinceau et de l'encre.... et des titres de chapitres d'un baroque qui fait rêver ("L'arrivée juste à temps du convoi de zouaves portés").
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Dans ce roman, l'auteur nous narre 50 ans de l'histoire de France à travers les différentes guerres du XXe siècle.
Victor Salagnon est un ancien militaire devenu peintre, c'est à travers son amitié avec le narrateur que le roman prend place avec une interrogation sur la France contemporaine.
Un premier roman bien écrit et riche en histoire qui a valu à son auteur le prix Goncourt en 2011. Une récompense bien méritée.
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