Retrouver Serge Joncour, grâce à Pauline que je remercie, c'est toujours un grand plaisir car cet écrivain emmène son lecteur dans des lieux qu'il connaît ; il conte une histoire captivante de bout en bout tout en cernant bien la psychologie de ses personnages : voir L'amour sans le faire, L'écrivain national et, Repose-toi sur moi, les trois romans que j'ai lus avant Chien-Loup.
Ici, il mène en parallèle deux époques séparées par un bon siècle : 1914 et 2017. C'est habilement construit, bien articulé et toujours très instructif comme cette constatation à la veille de la Première guerre mondiale : « Même là, au plus profond de la campagne la plus reculée, on voyait bien que le monde était soumis à l'inconséquence d'une poignée de régnants, tous cousins qui plus est, plus ou moins de la même famille. »
Ce « là » dont il parle, est le village d'Orcières, perdu aux confins du Massif Central, dans le Lot. Il est surplombé par une colline pas facile d'accès sur laquelle trône une maison dont l'histoire est agitée. C'est justement cette maison isolée que Lise trouve sur internet, en 2017 : un gîte où passer trois semaines, au soleil, en pleine nature, et dans une zone épargnée par les ondes. Franck, son compagnon, producteur de films, n'est pas d'accord mais il accepte et loue un 4 x 4 pour se rendre là-bas.
3 août 1914 : la guerre est déclarée. Les hommes partent mais aussi des millions d'animaux, des centaines de milliers de chevaux sont réquisitionnés plus des boeufs, des chiens, des moutons, des mules, des pigeons, des ânes, des chèvres, etc… Contrairement à ce qu'on a prétendu, les hommes sont partis tête basse, dans les larmes car les femmes allaient devoir moissonner sans eux.
Serge Joncour, tout en conservant l'intérêt de son récit, réussit à rappeler ce que fut la vie de toute une population frappée par la guerre, particulièrement à la campagne, rendant un hommage émouvant aux femmes : « Chaque bataille, chaque journée de combats abolissait des couples, les robes noires n'en finissaient pas d'éclore chaque jour elles fleurissaient par milliers. ».
Il a pensé aussi aux cirques qui sillonnaient le pays avec des animaux sauvages en captivité et qui se sont trouvés immobilisés. Il fallait nourrir les bêtes ou les voir confisquées pour l'effort de guerre. Justement, à Orcières, un dompteur allemand, Wolfgang Hollzenmaier demande au maire un coin tranquille où se réfugier avec lions et tigres. Je vous laisse le plaisir de découvrir l'endroit.
Sur place, en août 2017, Lise connaît le bonheur absolu mais c'est Franck qui joue le premier rôle avec un chien-loup qui fait même oublier à Franck que ça ne capte pas ! « Franck passa la main sur le dos de cette bête puissante, comme pour en prendre la mesure, ou l'amadouer, c'était un genre de chien-loup, son poil était long, à la fois rêche et doux, plein de vigueur, il affichait l'attitude altière, la souveraine indifférence de ceux qui se savent domestiqués par rien. »
Une fois le décor planté, je me suis laissé entraîner jusqu'au bout d'une double histoire pleine de surprises, d'enseignements et d'amour – Lise et Franck mais aussi Joséphine et … - en immersion complète dans une nature foisonnante et sauvage, un régal !
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