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EAN : 9782737324383
143 pages
Editions Ouest-France (16/10/2001)
4.4/5   5 notes
Résumé :
Artiste mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, Mathurin Méheut nous offre un remarquable témoignage direct de la vie sur le front Ouest, de Dunkerque à Toul. Ses dessins montrent l'existence de couleurs dans cet enfer terrestre surtout connu par les photographies en sépia. Ses "croquis de guerre" sont indissociables de ses lettres, en particulier celles qu'il écrit à sa femme.
Les œuvres de Méheut sont présentées chronologiquement et accompagnées d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Mathurin Méheut (1882-1958) est un peintre, illustrateur, céramiste breton. Né à Lamballe dans les Côtes d'Armor, il travaille tout d'abord chez un peintre en bâtiment à Lamballe, avant d'entrer à l'École régionale des beaux-arts de Rennes en 1898 avant de s'installer à Paris en 1902. Il publie des illustrations sur les poissons et les coraux. il séjourne et travaille à la station de biologie marine de Roscoff de 1910 à 1912 où il observe et dessine le milieu marin, d'où son ouvrage « Étude de la mer 1913-1914 ». Mobilisé à Arras, il réalise ses « Croquis de guerre », témoin de la vie dans les tranchées. Il revient ensuite en Bretagne où il devient le peintre officiel de la Marine. Comme tel, il participe à la décoration de neuf paquebots dont le « Normandie ». Il collabore comme céramiste pour la faïencerie Henriot à Quimper
Témoin d'une époque, et passionné par les hommes et les paysages de la Bretagne, il s'efforce de témoigner de cette vie et de ses coutumes qu'il voit progressivement disparaître. Il meurt à Paris en 1958. Il est depuis reconnu comme étant un artiste majeur du XXe siècle en Bretagne, témoin de la société bretonne travailleuse et pieuse de la première moitié du siècle.
C'est surtout sur cette période de guerre que l'on découvre le peintre. Une exposition au Musée d'Aubigny, à Auvers sur Oise de septembre 1918 à Mars 1919 rappelle son oeuvre. L'exposition donne lieu à un superbe catalogue et un ouvrage réalisé par Elizabeth et Patrick Jude, donc son arrière-petite-fille « Mathurin Méheut 1914 - 1918. Des ennemis si proches » (2014, Éditions Ouest-France, 144 p.).
L'exposition s'ouvre sur une toile des années 1950, réalisée d'après ses notes et croquis « Clémenceau visitant les tranchées ». Il faut dire que le peintre a été mobilisé à Arras, mais affecté sur les différents fronts. Il parcourt et assiste aux batilles du front de l'Artois, Argonne, Somme, Champagne, Meuse, Flandres, Lorraine, Picardie. Tout cela entre octobre 1914 et novembre 1918.
Il vit ainsi la plupart des évènements tragiques de la guerre, tout en prenant des notes et des croquis. Ce qu'il traduit ensuite par une abondante correspondance. « Je t'écris ces lignes pendant que les obus passent en sifflant au-dessus de nous (tantôt français, tantôt allemands) […] nos tranchées sont à peine à 200 mètres les unes des autres. Ici la lutte est particulièrement dure, le terrain se prend pied à pied […] que c'est triste aussi ces villes après le bombardement, tout est abandonné, les pignons fermés, les clochers abattus, les barricades, quelques malheureux êtres errants, des oiseaux affolés par tous ces bruits que répercutent les nuages ».
Il faut souligner que pendant l'été 1914, Mathurin Méheut séjourne avec sa femme Marguerite au Japon, grâce à une bourse « Autour du Monde » de la Fondation Albert Kahn. À la mi-octobre, il rejoint le 136e Régiment d'Infanterie dans les faubourgs d'Arras. Il envoie son premier dessin la semaine suivante. « Je n'ai pas de veine pour le premier dessin que je faisais (je dessinais la section au travail des tranchées). [… les aéroplanes (Taube)…] viennent repérer nos emplacements, les communiquer ensuite à leur artillerie qui nous crible ensuite de marmites qui éclatent avec un bruit infernal, épouvantable, d'obus, de shrapnels, tout cela passe au-dessus de nous et autour. L'on travaille au canon, l'on s'endort avec et l'on se réveille avec lui ».
Dès l'automne 1914, Mathurin Méheut observe et dessine pour l'armée. « Depuis ce matin 10 heures j'étais dans Arras à dessiner, quel bonheur. J'ai bien travaillé aujourd'hui et je suis très content […] Tu ne te figures pas comme ces quelques heures me font un effet moral épatant. Cela me retrempe, me redonne du courage. La profession renaît, la perspective du métier… illusions peut-être. Tant pis, c'est toujours autant de pris ». Il fait de la reconnaissance, analyse, note et synthétise, dessine des panoramas, repère les positions ennemies et établit des plans de défense des positions françaises, il repère les positions. « J'ai été chargé de faire un plan du secteur avec la vue des tranchées allemandes […] Ce n'était pas commode, car aussitôt que les Boches m'apercevaient me lever au-dessus des tranchées, pan pan ! J'ai eu du fil à retordre […] toutes les secondes on se fusille à bout portant […] les Boches étaient à 8 ou 10 mètres de nous ». En Novembre 1915, il est affecté à l'état-major, il s'inquiète de ses compagnons poilus. « Avoir vécu, couché, mangé, souffert côte à côte, avoir partagé les joies et les peines, je les quittais un peu comme un embusqué, cela me faisait du mal ». Puis, il est détaché au service topographique de l'état-major, exploite les informations des prisonniers et des évadés, court les secteurs, réalise des dessins aériens. Muté au service cartographique de l'armée, il interprète et restitue les premières photographies aériennes.
Il met en scène les moments du quotidien du poilu, ses joies et ses peines. Il décrit aussi l'exécution d'un soldat en juillet 1915, coupable de trahison, en fait mort de peur face au front. « Chose terrible, atroce, l'exécution d'un poilu du régiment qui s'était débiné au moment d'une attaque. Quel affreux moment. J'en étais retourné toute la journée et je t'assure, je n'ai pu t'écrire après cela. C'eût été trop triste. Je ne puis, même actuellement, rien te dire. Cela est tellement impressionnant devant le régiment ! « .
Dans les lettres à sa femme, Mathurin Méheut dit sans retenue la vie au front, la rigueur du quotidien, mais se garde de tout engagement politique, évoquant parfois, en détour, la censure. « Nous dormons assis, recroquevillés pour que notre pauvre capote "mouille" en surface le moins possible » Il se révolte aussi. « C'est atroce, atroce ; il faut, on a le devoir d'arrêter cela, ce n'est plus la guerre de bravoure, de témérité ou de génie, c'est le charnier et le massacre. […]. Comment ne pas devenir fou, idiot, comment résister à un carnage pareil ».
Il dessine également des cartes de Noël et de voeux pour la 1ère Armée. En Novembre 1918, le lieutenant Méheut est à Homblières, dans l'Aisne. Dans la nuit du 7 au 8 novembre 1918, des plénipotentiaires allemands s'arrêtent au presbytère qui sert de quartier général au général Debeney qui commandait la 1ère armée française avant de rejoindre Rethondes. La délégation allemande est venue négocier l'armistice. Une gouache, un dessin au crayon et une aquarelle « C'est fini. […], « Les vainqueurs vont remiser ». Il fait donc parti des tout premiers à connaître la fin du conflit. « Je ne m'attendais pas à être témoin d'un des plus grands spectacles du monde. J'en suis encore tout bouleversé, enfin on aura les preuves sous forme de croquis et de notes ».
Démobilisé en 1919, il se retire dans le pays Bigouden pour tenter de se ressourcer. Il prépare sa deuxième exposition personnelle au musée des Arts décoratifs à Paris, à laquelle il pense depuis son retour du Japon. Cette exposition devra être à la hauteur de celle précédente en 1913. Il va s'imposer comme le peintre de la Bretagne. avec une dizaine de panneaux décoratifs sur la vie en Bretagne. Il va alors collaborer pendant plus de trente ans avec les faïenceries Henriot à Quimper, mais aussi avec la Manufacture de Sèvres et Villeroy & Boch. En particulier, il dessine un service à poissons pour le restaurant Prunier à Paris, place de la Madeleine.
Les grandes compagnies maritimes lui demandent la décoration de leurs plus beaux paquebots, comme le « Normandie » ou les paquebots de la Compagnie des Messageries Maritimes Françaises qui font le trajet Marseille-Indochine.

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Participant et témoin de la grande guerre de 1914 à 1918, Mathurin Méheut a réalisé sur le front de nombreux dessins et aquarelles. Entre chaque assaut, l'artiste consacre l'essentiel de son temps libre à «croquer» ses «braves poilus» mais également la faune et la flore qui environne le front.
Ces observations complétées de croquis et de lettres adressés à sa femme met en regard des oeuvres d'artistes allemands 'ennemis si proches".
Magnifique.
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Un livre sur la guerre 14-18 traité à la manière d'un carnet : l'artiste y croque la vie quotidienne vue par un poilu parmi les autres, mais plus talentueux (de par son art) que les autres.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
En plus d'être un combattant courageux, Méheut fut un témoin exigeant et talentueux. Comme il l'écrit à sa femme, "j'ai à me justifier en art plus que comme soldat". Mais une fois que l'armistice est signé, que "c'est fini", le soldat Méheut cesse de dessiner la guerre et ses "braves poilus".
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Je t’écris ces lignes pendant que les obus passent en sifflant au-dessus de nous (tantôt français, tantôt allemands) […] nos tranchées sont à peine à 200 mètres les unes des autres. Ici la lutte est particulièrement dure, le terrain se prend pied à pied […] que c’est triste aussi ces villes après le bombardement, tout est abandonné, les pignons fermés, les clochers abattus, les barricades, quelques malheureux êtres errants, des oiseaux affolés par tous ces bruits que répercutent les nuages
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Je n’ai pas de veine pour le premier dessin que je faisais (je dessinais la section au travail des tranchées). [… les aéroplanes (Taube)…] viennent repérer nos emplacements, les communiquer ensuite à leur artillerie qui nous crible ensuite de marmites qui éclatent avec un bruit infernal, épouvantable, d’obus, de shrapnels, tout cela passe au-dessus de nous et autour. L’on travaille au canon, l’on s’endort avec et l’on se réveille avec lui
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Nous dormons assis, recroquevillés pour que notre pauvre capote "mouille" en surface le moins possible » Il se révolte aussi. « C’est atroce, atroce ; il faut, on a le devoir d’arrêter cela, ce n’est plus la guerre de bravoure, de témérité ou de génie, c’est le charnier et le massacre. […]. Comment ne pas devenir fou, idiot, comment résister à un carnage pareil
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Depuis ce matin 10 heures j’étais dans Arras à dessiner, quel bonheur. J’ai bien travaillé aujourd’hui et je suis très content […] Tu ne te figures pas comme ces quelques heures me font un effet moral épatant. Cela me retrempe, me redonne du courage. La profession renaît, la perspective du métier… illusions peut-être. Tant pis, c’est toujours autant de pris
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