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Avant d'entamer ce premier volume des journaux de Charles Juliet, il est nécessaire d'avoir lu le neuvième pour ne pas sombrer dans le désespoir. Il est nécessaire de savoir qu'une issue positive existe à tout ce marasme ou bien vous risqueriez de clore ce premier volume après trois pages. Ce journal se lit comme une succession d'aphorismes quasi quotidiens sur la mort, le suicide, l'ennui, la haine de soi, le néant... le programme n'est pas reluisant mais l'exercice de connaissance de soi, de sincérité et de lucidité qu'entreprend ici Charles Juliet est saisissant de courage. Il invite à assumer l'image que le miroir renvoie à chacun d'entre nous, cette étape nécessaire à toute renaissance, à tout dépassement de l'ego, à tout amour véritable de soi et surtout d'autrui. Et puis, laborieusement, quelques lueurs émergent. A méditer longtemps...
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« Spectateur d'un moi terriblement morne et ennuyeux, je traînasse loin derrière moi-même. »
Charles Juliet, dans le premier tome de son journal (1957-1964), dévoile sans pudeur son mal de vivre. À vingt-trois ans, après une enfance en famille d'accueil et une adolescence vécue sous l'uniforme dans une école militaire, il décide de se consacrer à l'écriture et à l'introspection, abandonnant dès lors ses études en médecine. « Si je n'avais pas l'écriture, je ne pourrais vivre. Et pourtant, c'est précisément l'écriture qui me rend la vie impossible. (…) Affronter chaque jour l'ennui, le dégoût de soi, l'horreur de vivre, pour les mettre en mots, est une tâche surhumaine. »
Être hypersensible, Charles Juliet veut vivre sans compromis avec lui-même dans un monde qu'il pressent chaotique et dans lequel il se sent exclu. « Quand on me demande ce que je fais et qu'il me faut avouer que j'écris, je suis gagné par la honte. »
J'apprécie le genre littéraire du journal et celui-ci relève plus que jamais de la sphère intime; j'en ai entrepris la lecture sans me douter de la charge émotive que je retrouverais dans ses pages, ne connaissant de Charles Juliet que son passage récent à La Grande Librairie. Cet homme calme au regard triste m'a bouleversée par ses phrases lourdes de sens et cette lecture que j'ai débutée au lit, il a fallu que je la lise au grand jour pour mieux dormir ensuite. La prose magnifique enrobe un discours troublant, sorte de face à face cruel avec son ego. L'auteur reconnaît lui-même que la relecture de ces notes fut pour lui une épreuve empreinte de consternation, de confusion et de désolation mais qu'il avait à l'époque une exigence de « ne pas se mentir à soi-même, se clarifier et faire sourdre la lumière là où sévissent les ténèbres. »
Les journaux de Charles Juliet se continuent sur une longue période et je continuerai d'y faire des incursions de façon sporadique.
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« 13 janvier

La triste et banale histoire de tout amour: il commence dans l'avidité, se poursuit dans les habitudes et s'achève dans l'ennui. »

Cette 3eme entrée dans le 1er journal (1957-1964) de Charles Juliet donne le ton : rien, absolument rien ne sera épargné ni à l'auteur ni au lecteur qui va assister, impuissant, à une véritable descente aux enfers spirituelle de l'écrivain. Aux journées tétanisantes d'ennui se succèdent les rencontres embarrassantes et les pensées suicidaires. « Je marche, marche… Je suis certain d'avoir tout raté, d'être un médiocre promis à une minable déchéance. Seule pensée qui me donne un peu d'apaisement, celle du suicide, qui vient pourtant tout aggraver. » La lecture de ce journal intime est réellement effrayante, d'autant plus qu'une certaine lucidité alliée à une impossible exigence font que nous ne pouvons que comprendre cet homme pris dans les filets du désespoir. Comment ne pas être saisi d'effroi lorsque nous comprenons que le jeune écrivain passe des journées assis devant son bureau sans pouvoir écrire une ligne ? « Comment veux-tu pouvoir écrire ? Tu te hais. » Charles Juliet creuse en lui, au plus profond, il veut déceler son origine, son essence même. Cette obsession lui fait passer ou renier tous les instants de légèreté que la vie lui apporte. « Vivre aux aguets de soi-même, à l'écoute de sa lucidité, c'est arracher de soi les racines de la vie. » Mais ce journal est l'occasion de découvrir un immense poète à l'orée de sa vie artistique, et on est à chaque page estomaqué par les fulgurances qui traversent les pensées de l'écrivain: » Seule une oeuvre pourrait conférer ordre, sens et continuité à ma vie. » Et c'est dans les derniers pages de ce dense journal qu'on aperçoit enfin une clarté qui vient éclairer la vie de Charles Juliet, à son grand étonnement. Les racines sont là, une vie d'écrivain peut commencer. Mourir pour mieux renaître.
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Le premier tome du grand oeuvre de Charles Juliet. On pourrait croire qu'un journal ne constitue pas un livre, mais une anecdote littéraire. Voilà la démonstration qu'il peut en être tout le contraire. Plongée en apnée dans une jeunesse qui s'éprouve à la difficulté de vivre. Puissant.
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Longue introspection de sept années, l'auteur, né en 1934 a donc entre 23 et 30 ans. Malgré le titre rajouté plus tard, la fin de ce journal s'ouvre sur un peu de lumière. La souffrance est créatrice mais il faut au départ balayer les scories, les préjugés sociaux et intellectuels, se faire un peu la morale et se garder de la tentation suicidaire. le risque, cependant est de devenir sec et aride comme un désert, de « s'ennuyer parmi les autres », d'être déçu par la vie extérieure.
Il faut cependant relativiser et admirer ces réflexions dues au début à un jeune homme de vingt-trois ans qui travaille à devenir écrivain, écrit de la poésie et du théâtre et dont le refus des concessions pourraient passer pour une posture. Or, ce qu'il est en train de devenir, il va le puiser à l'intérieur, il plonge dans l'inconnu pour se singulariser car il faut bien affronter la vie.

« Lorsque je touche le fond, je cherche à me reposer sur cette idée que la trame des habitudes, des obligations, et surtout les amitiés, me protègent de moi-même, constituent des liens puissants qui me rattachent à la vie, me gardent de céder au découragement et d'en arriver au geste fatal. » (19-3-1964)

Quand on est jeune, on pense avoir raison contre le monde entier et l'auteur plaint ceux qui ont une vie ordinaire, ne s'affranchissent pas du quotidien peut-être aussi parce que lui-même a choisi sa solitude, son introspection, il semble parfois exagérer le tragique car il n'est ni classique, ni romantique, ne veut aucun effet de style ni expression exacerbée des sentiments humains qui semblent l'encombrer.

« Ces êtres sur qui le bonheur s'acharne sont vraiment à plaindre. Ils ne naîtront jamais, ne sauront pas vivre, ne connaîtront rien de l'existence. (3-12-1964) »

Des propos discutables sous forme d'aphorismes de poète maudit jalonnent ce Journal mais il est vrai que dans un journal intime, on est libre de se tromper comme d'avoir raison si tant est que la vie fonctionne en ces termes. Il semble que j'aurais aimé lire ce livre à l'âge de l'auteur au moment de son écriture. Maintenant je trouve presque le propos un peu naïf même s'il n'est pas dénué de sincérité. Tout le monde souffre. Reste à en faire un terreau créatif.
Je finirai en disant que j'ai acheté ce livre en 1995 lors d'une exposition à laquelle participait Charles Juliet et un de mes amis avec qui il avait travaillé sur un livre illustré de ses peintures. J'ai mis longtemps à le lire et viens de le finir, le repoussant toujours comme un creuset de découragement. Je ne pense pas aller plus loin dans l'oeuvre de cet auteur.


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Dans l'édition Hachette de 1978 cet ouvrage s'intitule simplement Journal I, mais le titre de Ténèbres en terre froide lui convient parfaitement tant il est sombre et oppressant. Il s'agit d'une oeuvre égotiste, autocentrée, d'une introspection acharnée où l'auteur ne s'intéresse qu'à son vécu douloureux et à son labeur d'écrivain. Les tiers n'y sont évoqués que de manière très allusive, ainsi sa femme M.L, une certaine Denise, un dénommé Descombin, son frère Robert. Il n'y fait que brièvement allusion au peintre et sculpteur Giacometti, à Reverzy, Kafka, Rilke. Peu de respiration donc, d'ouverture vers l'extérieur. Les saisons ne sont guère marquées et ne semblent pas influencer Charles Juliet en proie le plus souvent à un identique marasme. Celui-ci note quelques voyages sans en rien dire toutefois. Les mots ennui, désespoir, épuisement sont les vocables les plus fréquents et surtout celui de suicide, obsessionnel, qui revient presque à chaque page, ce qui n'empêche pas l'homme d'avoir désormais atteint 85 ans. Souffrant d'un fond dépressif hérité probablement de sa mère et aggravé par les privations et humiliations de toute sorte vécues lorsqu'il était enfant de troupe à l'école militaire d'Aix-en-Provence, l'auteur a fait le choix audacieux de se consacrer à l'écriture, sa femme acceptant d'assumer seule la charge matérielle du ménage. Ainsi Charles Juliet s'est privé de l'exercice équilibrant d'un métier, d'une activité quotidienne, ce qu'il revendique, estimant que toute profession l'aurait empêché d'écrire. Certes, il a souffert, creusé en lui-même, s'est interrogé et nombre de notes de son journal revêtent un certain intérêt, mais son égoïsme, sa morbidité agacent.
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Savoir que l'auteur est toujours vivant (il est né en 1934) et a choisi Apaisement comme dernier titre m'a vraiment aidée à affronter le volume I puisque je n'ignorais pas ainsi qu'il avait survécu à des moments intérieurs terribles. Ténèbres en terre froide, avec ses entrées brèves (contrairement à Apaisement), c'est la grande claque pour le lecteur. Tentation permanente du suicide, souffrance, épuisement, horreur de vivre, ennui. de plus (ou alors ce sera son salut?) "il te faut écrire, écrire, c'est-à-dire t'épier, te ronger, demeurer aux aguets, toujours exiger de toi le maximum et le meilleur."

"Parfois, je cède à mon sens de la vanité de toute création, et je décide de m'arrêter d'écrire. Mais alors l'existence m'apparaît tellement insupportable, que je n'ai plus rien à quoi me raccrocher. Ne reste plus que la solution du suicide. Mais l'effroi qu'il m'inspire m'assure que je n'aurai jamais le courage de l'accomplir. Et je suis renvoyé à la vie, donc à l'écriture, à cette drogue qu'est l'abrutissement quotidien de longues heures de travail."
"J'appartiens à cette catégorie d'écrivains pour qui écrire est toujours plus ardu, car pour eux, écrire est un moyen de s'explorer, se connaître, progresser vers toujours plus de lucidité et de conscience."

Il écrit donc. Romans, nouvelles, poèmes.
"Le poète a pour rôle de s'offrir à l'inconnu, de conduire à la lumière de la conscience ce qui gît dans les ténèbres du non-connu, du non-défriché. Il doit donc obéir à une volonté de clarifier, d'éclairer. Pourtant, la plupart des poètes semblent obéir à une volonté contraire."

Et le fameux Journal:
"J'aime écrire dans ce Journal. C'est pour moi un espace de liberté. Je ne me fixe aucune règle, sinon celle d'être totalement simple et sincère. Mais cette règle je n'ai pas à me l'imposer. Depuis longtemps elle est inscrite en moi et il m'est facile de m'y soumettre." (Journal VII)

De 1957 à 1964, une certaine évolution se fait jour, bien sûr, mais la tonalité demeure noire. Ce journal est paru beaucoup plus tard, sans retouches. Charles Juliet y parle aussi d'écrivains, peintres, sculpteurs, de rencontres, d'événements de son passé. Il lui faudra bien du temps pour être reconnu.
Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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Toute sa vie, Charles Juliet a tenu un journal qu'il publiera. Ce premier tome prend place durant la jeunesse de l'auteur. Il vient de quitter les enfants de troupe et d'abandonner ses études de médecine pour se consacrer à l'écriture avec ferveur.

J'aime énormément Charles Juliet. Pénétrer dans ses pensées de jeune homme, sa démarche d'écrivain, son rapport à la vie et à l'art est un privilège.

J'ai savouré ce journal et lirai les tomes suivants sans aucun doute.

A lire à son bureau.
Lien : https://lucioleetfeufollet.c..
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Quelle lucidité si jeune...
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Une véritable bible pour les lecteurs et surtout pour ceux qui écrivent. Une réflexion intelligent sur ce qu'est l'écriture et ce qu'il en coûte à ceux qui sont pris par la passion de l'écriture, ou même plus, par l'exigence de l'écriture.
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