Le château des étoiles, tome 15 : De l'Ether à la Terre

Vénus : le nom de ce monde lui-même appelle à la plus douce des voluptés. S’étonnera-t-on, alors, que les hommes chargés de défricher la planète y soient pris d’accortes visions ? Plusieurs pionniers et pioupious ont affirmé avoir aperçu, entre les arbres et les lianes, des silhouettes aux formes généreuses leur faisant signe de les suivre.
Faut-il y voir les effets du « vitriol » distillé sur place à partir de plantes indigènes ? Ou la moiteur torride des forêts vierges de Cythère et d’alentour dissimule-t-elle des indigènes chichement vêtues, lascives et peu farouches, modernes Amazones attendant de fondre sur nos féroces soldats, attirées sans nul doute par l’universel prestige de l’uniforme ?
Le fait demeure, troublant : nombre des zouaves et autres tirailleurs allés « à la besogne » dans la forêt n’en reviennent pas. Sont-ils tombés entre les griffes d’hétaïres prêtes à leur bondir dessus, attirées par l’aubaine en des lieux où jamais la main de l’homme n’a mis le pied ? Quels sévices peuvent-elles faire subir à ces malheureux ? À quel épuisement du corps et des sens peuvent-elles les exposer ?
Depuis que ces rumeurs sont revenues jusqu’à la Terre, les recruteurs ne savent plus où donner de la tête. Le plus cagneux des traîne-patins du Faubourg se sent des velléités de conquérant prêt à affronter la jungle. Nombre de volontaires se voient déjà en protagonistes d’agapes proprement sardanapalesques.

Allez, viens, toi ! Je te ramène à la serre… Un oiseau n’a rien à faire dans un endroit où les hommes peuvent voler !