Sandrine Kao est une jeune auteure, également illustratrice, qui travaille aussi bien sur des romans que sur des albums. Justement,
le banc est un roman qui a marqué pas mal de jeunes lecteurs récemment, et c'est donc tout naturellement que je me suis tourné vers cette lecture. Inutile de vous dire que je n'ai pas été déçu: je comprends parfaitement l'enthousiasme plus que vivant qui motivait les lecteurs du Banc.
Comment parler à la fois du racisme, de l'intégration, du regard des autres, du rapport au père, le tout dans un seul et même roman? Tant de sujets graves, sérieux, que
Sandrine Kao arrive à aborder avec beaucoup de facilité. Son écriture y est pour beaucoup. Sur la forme déjà. le narrateur est interne, ce qui favorise énormément l'empathie de la part du lectorat envers Alex, qui raconte ses mésaventures. Préférer le "Je" au "Il", c'est fort, ça crée une proximité. Alors que justement, si le narrateur avait été externe, on n'aurait pas été autant touché par l'histoire d'Alex. Autre chose: l'écriture est rapide, assez découpée, et cela vient contrebalancer le récit qui, au contraire, est relativement posé: nous avons droit aux questionnements intérieurs du jeune garçon et de ses pensées par rapport à son amie Sybille, sa bande d'amis, ses ennemis, son voisinage, son rapport avec sa mère, ses interrogations quant à son père. le récit, découpé d'une part en chapitres, est également découpé par le biais de passages en italique qui nous permettent de mieux cerner le personnage d'Alex et de comprendre son point de vue par rapport à ses parents, ses origines taïwanaises. le jeune garçon cherche à se rendre intéressant pour essayer de s'intégrer beaucoup plus facilement aux collégiens, mais il se rend compte que ça rend les choses encore pire qu'elles ne le sont déjà pour lui. En fin de compte doit-il rester comme il est, et les autres l'accepteront en apprenant à le connaître.
le banc en lui-même est central pour beaucoup de choses dans ce court roman, mais il n'est pas pour autant au premier plan, il joue comme élément déclencheur. Il n'apparaît qu'au début et à la fin de l'histoire, à chaque fois pour une situation différente. Aussi, j'ai bien aimé le parallélisme entre les enfants et les adultes: les deux mondes sont vus du point de vue de l'enfant, qui se rend compte de l'absurdité de la logique adulte mieux qu'un adulte lui-même. Cette histoire est racontée avec humour, de l'auto-dérision de la part d'Alex. le personnage lui-même est relativement crédible: sa façon de voir les choses est mature, alors qu'il sait se montrer impulsif. C'est une bonne alchimie qui s'opère en lui, ce qui fait qu'on croit en lui, face à l'adversité qui ose lui bloquer le chemin.
La lecture est fluide, le style de
Sandrine Kao est agréable. Je n'ai refermé le livre qu'une seule fois, après avoir lu la dernière ligne. C'est dire si j'ai été motivé! A la fin du bouquin, justement, il est dit que l'auteure partage les mêmes origines qu'Alex. Peut-être que
le banc raconte l'histoire d'enfance de la jeune auteure, et de façon plus générale parle du quotidien des enfants confrontés à l'ignorance et la bêtise dont sont issus le racisme et la peur de la différence. C'est justement une lecture qui devrait être proposée dans un cadre éducatif, pas nécessairement scolaire, ce afin de combattre dès le plus jeune âge les préjugés portés contre les personnes d'origine étrangère. Une lecture nécessaire face à un mal du siècle.
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