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L'Irlande du 19ème siècle, celle des campagnes et de la pauvreté : voilà le décor de ce beau roman d'Hannah Kent, une saga qui nous plonge dans cette campagne irlandaise avec un soin extrême dans la reconstitution

Hannah Kent qui s'est fait connaître avec À la grâce des hommes (Presses de la Cité, 2015), a construit son second roman en prenant soin de mélanger avec une grande maitrise fiction aux faits historiques, avec en toile de fond pas mal de croyances et de mythologie, le récit est un bel hommage à la nature et à ses pouvoirs infinis

Inspiré de faits réels, Dans la vallée montre à quel point le folklore irlandais était un système de croyances populaires extrêmement complexe, d'une ambigüité terrifiante.Grâce à un talent de conteuse hors pair, l'auteure fait revivre la vallée et le comté de Kerry. entre malnutrition et misère la plus totale.

La plume de Hannah Kent est si finie qu'elle parvient à rendre ces gens de petite condition attachants et souvent poignants.



L'ensemble sonne si juste tour à tour ombre et brumeux , à l'image de cette campagne irlandaise que Hannah Kent décrit.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Dans la vallée Hannah Kent Les Presses de la Cité Août 2018.

Roman surprenant et fascinant que celui-ci, un roman qui nous entraine en Irlande au début du 19 ème siècle dans une vallée encaissée, un petit village est éparpillé sur les coteaux. An 1846, Martin s'effondre brutalement alors qu'il s'activait à nettoyer un fossé. Nora sa veuve est anéantie, d'autant plus que depuis peu ils ont recueilli Micheal ,le fils de Johanna leur fille trop tôt disparue.. Mais cet enfant handicapé, incapable de marcher ou de parler alors qu'il va sur ses 4 ans est-il vraiment son petit-fils? N'y a t'il pas eu un échange fait avec un Fé , les Bonnes Gens sont si présents.... Se pose alors la question si il y a eu échange comment récupérer le vrai petit-fils et qui peut réussir l'opération si ce n'est Nance Roche, celle qui a un don, celle qui sait les plantes, les remèdes et accouche les femmes. Mais c'est sans compter sur le nouveau curé le Père League hostile à toutes ces pratiques qu'il juge païennes et hérétiques au nom de la Très Sainte Eglise ... Un roman qui démarre lentement, au pas lourd des hommes fatigués par le labeur et l'inquiétude des jours à venir, un roman qui soudain vous happe et que vous ne lâcherez plus .. Que reste t'il de toutes ces croyances dans le subconscient irlandais actuel? sans doute plus que nous le soupçonnerions .. Un bien beau roman que je recommande à tous ceux et celles qui aiment l'imaginaire et les légendes qui s'y rapportent . Bonne lecture.
Merci beaucoup aux Presses de la Cité via NetGalley pour ce partage.
#Rentreelitteraire2018 #NetGalleyFrance
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Ma fille cadette a offert ce livre à mon mari pour Noël.... Un bref résumé parlait de fées.... Fée = fantasy = mon mari qui adore l'heroïc fantasy....
Fan de cette littérature, passez votre chemin ! On parle ici des fées qui peuplent l'Irlande.... Et comme il se trouve que j'avais beaucoup aimé "à la grâce des hommes" de la même auteure, j'avoue avoir honteusement piqué le livre offert pour mon mari.
J'avais aimé "à la grâce des hommes" et j'ai aimé celui-ci.... Un rythme lent, la vie dans une vallée perdue de l'Irlande du début du 19e, en proie aux superstitions ancestrales autour de l'existence d'un petit peuple magique. Petit peuple qui peut ensorceler, enlever et remplacer.... Dans ce roman, il est question de la disparition d'un enfant qui aurait été remplacé par un changelin, fils de fée, et donc incapable de parler, marcher.... et surtout des croyances qui vont l'entourer (il serait cause de la malédiction qui fait que le lait des vaches n'est plus).
Grand mère de l'enfant et guérisseuse du village vont tenter de faire revenir l'enfant et de faire disparaître le changelin.

Le roman est passionnant, j'avais du mal à l'arrêter, plongée que j'étais dans les légendes irlandaises, le rythme de la vie d'un village de l'Irlande du 19e... mais aussi sidérée par ce qu'on a pu faire subir à des malheureux (souvent des enfants "différents", paralytiques, handicapés....) qu'on croyait enlevés par les fées.

Challenge pavés 2020

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****

En 1826, dans une vallée reculée d'Irlande, les croyances et autres superstitions rythment la vie quotidienne. Nora Leahy vient de perdre son mari, foudroyé lors de son travail au champ. Elle se retrouve seule, avec à sa charge le fils de sa fille unique morte depuis peu. Son petit fils, Micheàl, est un enfant « étrange », qui ne parle pas, ne marche pas et hurle à longueur de journée. Cet enfant devient vite la source de superstition et semble être à l'origine de tous les maux de la vallée...

Nous plongeons grâce à ce très beau roman au coeur de l'Irlande du XIXème siècle, dans les petits villages fermés sur eux-mêmes et sans peu d'ouverture sur le monde. Croyances, mauvais sorts et guérisseuses sont les seules explications possibles aux difficultés du quotidien. Hannah Kent possède une très belle écriture, toute en images et en douceur. On sent qu'elle s'est longuement documenté et on est totalement entouré par le monde invisible qu'elle depeint. L'histoire tragique de ce petit garçon est basé sur des faits réels et on frissonne à l'évocation de ce qu'il a pu endurer. Sans prêter aucun jugement, l'auteur écrit sur l'ignorance et les croyances qui poussent parfois à commettre l'irréparable... avec de bonnes intentions !!

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Presses de la cité pour leur confiance.
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Entre rivière, forêt et collines, la vallée se déploie avec ses étendues de champs, ses fossés, ses murets de pierre, ses tourbières, ses coteaux de joncs et de bruyère et ses modestes chaumières.
Chaque chapitre retraçant ce fait tragique, emprunté à la triste réalité de l'année 1826, porte un nom de la flore présente dans ce petit hameau du Comté de Kerry au Sud-ouest de l'Irlande. Une flore dans laquelle Nance, l'herboriste et guérisseuse, puise tous les bienfaits et toute la richesse qu'elle recèle afin d'apaiser les maux des habitants. Des plantes qui constituent ici un personnage puissant de par leurs pouvoirs bénéfiques ou mortels.

Une des chaumières abrite la douleur de Nóra. Son mari vient d'être foudroyé par une crise cardiaque alors qu'il creusait un fossé pour évacuer les pluies. Anéantie de chagrin, Nóra doit faire face aux préparatifs de la veillée funèbre tout en serrant dans ses doigts crispés les perles de son rosaire.
Rafales de pluies, âtre où brûle la tourbe, jarres de poitín et fumée sortant des pipes de terre, l'atmosphère oppressante de cette veillée à la lueur des brûle-joncs nous étreint. Entendez-vous le coeur des pleurs pour le départ de l'âme du défunt ? C'est sinistre et saisissant.
Nóra, qui a déjà perdu sa fille, se retrouve alors seule pour s'occuper de son petit-fils Micheál qu'elle prend soin de cacher, honteuse que ce petit garçon de quatre ans d'une maigreur spectrale, sans cesse hurlant, ne pouvant tenir sur ses jambes ni articuler le moindre mot, soit réellement ce petit qu'elle avait pourtant vu bien portant et babillant deux ans auparavant.
Ne serait-ce pas plutôt un changelin, un fé ? Une créature échangée avec son véritable petit-fils qui a été enlevé par les Fairies, ce peuple invisible de Bonnes Gens, dénommées ainsi pour ne pas attirer leur foudre et par là même le malheur. D'ailleurs depuis que ce petit est arrivé dans la vallée, des signes annonciateurs de mort se sont multipliés, la malédiction semble cerner les habitants et se manifester partout, même dans l'impossibilité de baratter la crème, dans les mauvaises récoltes, dans les poules qui s'abstiennent de pondre !
Alors pour se protéger de la mort, il ne faut pas oublier de glisser du sel et de la cendre dans ses poches en quittant la maison de Nóra.

Croyances, superstitions, pratiques et traditions païennes imprègnent chaque geste, chaque pensée, au fin fond de cette vallée. Gare ! Car le mal et le malheur peuvent s'attraper, il faut donc les chasser.

Quelques longueurs se font vite oublier car les talents de l'auteure se font jour en diffusant à la perfection une ambiance sombre, miséreuse, où plane l'inévitable ignorance de ces pauvres gens qui, dès leur plus jeune âge, baignaient dans les multiples croyances héritées des ancêtres et transmises lors des veillées d'hiver.
On perçoit l'humidité de la cahute recouverte de mousse de l'herboriste, la chaleur et l'odeur de sa chèvre au fond de la pièce. Les brassées d'ajoncs sur les sols de terre battue crissent sous nos pas pendant que les pommes de terre, bien souvent l'unique nourriture pour des estomacs affamés, cuisent dans la marmite.
Ces femmes de la vallée vont pied nus dans la boue et traînent derrière elles les dernières rumeurs de leur petite communauté, avec plus ou moins de fiel, de rancoeurs et de peur.
C'est l'estomac noué que l'on assiste aux souffrances de ce petit Micheál, petit être handicapé impuissant et livré aux mains ignorantes mais désireuses de le guérir. La jeune Mary, qui représente ici les enfants qui se louent à la saison pour ramener quelques sous dans une famille nombreuse, allègera la charge de Nóra et prendra pitié de cet enfant hurlant. La perception de l'éveil de son attachement émeut profondément.

Hannah Kent, de sa plume fluide et élégante nous transporte sans effort dans cette vallée irlandaise d'un autre siècle et touche au plus profond de notre sensibilité avec cet univers poignant distillé avec un réalisme saisissant. Un très beau roman à découvrir en faisant toutefois attention à ne pas croiser de lueurs vacillantes au détour de ses pages habitées, car les Fairies pourraient bien s'emparer de vous !
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Un superbe roman, écrit tout en finesse et en douceur, c'est tellement beau ! L'histoire se passe dans l'Irlande des années 1825, une époque où les traditions ancestrales étaient encore bien vivantes. Une époque où les croyances au monde magique, celui des fées et autres créatures, faisaient partie de la vie quotidienne des villageois. Tout y était relié. Que l'on parle de malheurs ou de bonne chance, les Bonnes Gens en étaient responsables. Pour eux, la religion et le monde magique sont deux choses différentes. Au lieu de parler d'anges, on parle de fées. D'ailleurs le curé n'approuve pas du tout ces pratiques et ces croyances ! Mais au fond, le résultat est le même. Que ce soit la volonté de Dieu ou des gobelins d'empêcher les vaches de produire du lait ou les poules de pondre, ça ne change pas grand-chose...

Ici, la grand-mère Nora tente par tous les moyens de récupérer son petit-fils, dont elle croit que le corps est possédé par une de ces créatures. Elle veut le sauver et retrouver le petit garçon tel qu'elle l'a connu il y a de cela quelques années. Pour ce faire, elle fait appel à la guérisseuse de la région, Nance Roche, reconnue pour ses bienfaits mais aussi crainte par les villageois à cause de sa différence et le fait qu'elle vive recluse, en dehors du monde. Au fur-et-à-mesure que l'histoire avance, on peut voir à quel point les superstitions peuvent aller loin et avoir un impact réel sur la vie des gens ! le commérage va bon train. Et le curé qui s'en mêle...On a presque l'impression de revenir au temps des sorcières !

C'est une histoire passionnante, fort bien documentée probablement, qui nous fait apprendre des tas de choses tant sur la nature de l'île que sur les superstitions irlandaises de l'époque. Une histoire choquante aussi de voir à quel point les gens peuvent être crédules. Mais cela est fait d'une façon respectueuse et on a toujours envie d'aller voir plus loin, de connaître l'issue, et les personnages sont tantôt attachants, tantôt haïssables...

Et surtout, c'est d'une belle qualité de plume ! Presque poétique. J'ai adoré "Dans la Vallée" et le recommande sans hésiter ! Une pépite, vraiment !
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C'est le genre de gros bouquin qu'on a envie de glisser dans son sac pour un long week-end d'automne à la campagne au coin du feu. de ceux qui promettent le dépaysement mais n'en oublient pas pour autant de semer quelques graines dans l'esprit du lecteur, de chatouiller un peu ses idées reçues. de lui rappeler qu'il fut un temps où il croyait encore aux fées et aux lutins lui aussi. Bref, de lui redonner le goût des légendes qui se transmettent depuis des millénaires ; tout en interrogeant sur ces croyances auxquelles les humains ont besoin de se raccrocher pour tenter de trouver un sens aux drames de leur vie.

C'est un livre qui fleure bon l'Irlande, ses nuances de vert et ses paysages humides. L'Irlande du 19ème siècle, celle des campagnes et de la pauvreté, pommes de terre à tous les repas, pieds nus dans la terre, fumets des corps fatigués mélangés à ceux des bestiaux dans les chaumières. La vie de Nora bascule le jour où son Martin s'écroule d'un coup dans le fossé qu'il était en train de creuser. La voilà veuve en charge de son petit-fils, Michéal alors qu'elle n'avait pas fini de pleurer le décès de sa fille unique. Deux morts en quelques mois, il n'en faut pas plus pour que les habitants du village interrogent les signes et cherchent l'objet du malheur. Ne serait-ce pas cet enfant justement, qui, à quatre ans ne parle pas, ne se tient même pas sur ses jambes et pousse des hurlements terribles ? Nora aussi s'interroge. Est-ce bien l'enfant de sa fille ou bien les fées l'ont elle échangé contre un des leurs ? Mary, la jeune fille engagée par Nora pour s'occuper de l'enfant semble parvenir à le calmer parfois mais Nora s'enfonce dans ses croyances et demande à Nance, la guérisseuse qui vit au-dessus de la vallée de l'aider à retrouver son "vrai" petit-fils, tandis qu'autour d'elle, l'ambiance se fait de plus en plus suspicieuse, surtout lorsque le nouveau curé se met en tête de détourner durablement la population de ces superstitions d'un autre âge...

Il faut saluer la performance de l'auteure qui nous plonge dans cette campagne irlandaise avec un soin extrême dans la reconstitution sans jamais nuire à la fluidité de la narration. Par-delà les croyances et la mythologie, le récit est un bel hommage à la nature et à ses pouvoirs infinis à travers le personnage de Nance, vieille femme solitaire qui connaît chaque fleur, brin ou branchage, et qui parle aux "Bonnes Gens", ces petits êtres invisibles qu'il ne faut surtout pas fâcher. Les clans s'opposent. L'Eglise n'entend pas laisser son influence se dissoudre dans les superstitions. Quant aux individus... ma foi... ils finissent par prendre le parti qui les arrange. Et le lecteur, lui, est invité à s'interroger sur ce qui pousse chacun à tenter de trouver des explications la plupart du temps irrationnelles pour expliquer l'inexplicable. Comme l'infirmité qui frappe un enfant.

Au cours de ma lecture, je me suis surprise à avoir envie que Nance ait raison, que le petit peuple des Fairies existe bel et bien... Mais l'auteure prend garde à livrer un roman qui évite tout manichéisme. Les personnages sont complexes, et la vérité sûrement pas unique. Les sentiments évoluent au fil de l'intensité dramatique. D'une histoire vraie, elle compose un récit tendu (malgré quelques longueurs) qui se lit avec grand plaisir et un réel intérêt.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Mon coup de coeur pour "A la grâce des hommes" et la plume de Hannah Kent combiné à mes rêves, mes désirs d'Irlande m'ont mise logiquement sur le chemin de "Dans la vallée".
Oui, je sais... ce titre qui donne envie de chanter, qui met tout de suite en tête les premières notes de ce tube qu'on connaît tous encore par coeur, le vent qui souffle sur les plaines de la Bretagne Armoricaine, tout ça… Mais de grâce, oubliez Manau, au moins le temps de rencontrer Norà, Micheàl et la vieille Nance, Mary... Oubliez les et laissez vous envouter par cette histoire tragique, sombre, étouffante... mais fascinante également, enchanteresse pour le meilleur et surtout pour le pire.
1825, sud de l'Irlande. Une vallée isolée, battue par les vents et la famine. Un hameau, à peine un village, niché au creux de la tourbière. C'est ainsi et c'est ainsi que le décor est planté. Ici la pauvreté et le froid se déchirent la survie des habitants que la misère enserre dans ses griffes. La mort aussi et elle frappe d'ailleurs dès le premier chapitre du roman puisqu'il s'ouvre avec celle de Martin, un homme brave et vigoureux, tombé comme par enchantement à la croisée des chemins. Ses compagnons s'empressent alors d'aller annoncer la pauvre nouvelle à sa veuve Norà, que le chagrin transperce. Peu à peu, les voisins et les amis défilent dans la modeste chaumière de cette femme un peu sèche que la fatalité vient d'assommer qui pour la veillée funèbre, qui pour la soutenir et lui apporter un peu de nourriture. Norà, elle , préférerait être seule: pour pleurer bien sûr et parce qu'elle a honte de Micheàl, le petit-fils que Martin et elle avaient recueilli après la mort de leur fille unique. L'enfant, en effet, est étrange, différent: malingre, il ne parle ni ne marche. Parfois, en revanche, il hurle et ses grands yeux sont un peu fiévreux et se promènent étrangement sur ce qui les entourent. Alors oui, Norà a honte et elle tente par tous les moyens de cacher ce gamin que Martin aimait mais qu'elle ne parvient à aimer.
Dans le village, en proie aux superstitions et à la misère, il n'y pas grand chose de plus que les contes et les commérages pour se distraire le soir à la veillée et bientôt ces derniers vont bon train: d'étranges lumières auraient été aperçues juste avant la mort de Martin et après tout on n'a jamais pu expliquer la mort de la fille du couple... Si Micheal est anormal, ce n'est peut-être pas un hasard... Et les poules qui ne pondent plus, les vaches qui ne donnent plus de lait... Cela a commencé quand l'enfant est arrivé dans la vallée. Suivez mon regard... Il est tellement étrange...
Norà cède à la panique mais nul ne peut l'aider: ni le médecin, ni le prêtre. Elle se tourne alors vers Nance, Nance Roche. La vieille femme vit en marge du village, dans une cabane enclose entre les bois et la rivière, c'est une guérisseuse qui connaît le pouvoir des plantes et des fairies en lesquels elle croit fort, comme d'autres croient en dieu. Alors que l'ancien prêtre la tenait en haute estime, le nouvel arrivant ne voit en elle qu'une folle, une sorcière, une païenne et elle est de plus en plus traînée dans la boue par ceux-là mêmes qui faisaient appel à ses services, la respectaient, croyaient en elle et en sa proximité avec les fairies, les créatures des légendes et des temps anciens...
Chaque jour au village la misère avance, un accouchement vire au tragique et la faim tenaille les estomacs et chaque jour, les gens s'en prennent davantage à Nance, "sorcière" qu'ils crient tous!
Elle pourtant chemine, avance, fait ce en quoi elle croit et elle peut aider Norà: Micheàl n'est pas son petit-fils, non, c'est un changeling, une créature féérique qui a pris sa place. Et elle, Nance Roche, sait comment faire revenir le véritable petit garçon.

Encore une fois et dans une langue toujours très belle qui fait la part (très) belle à la nature, aux arbres, aux fleurs et au chant des sources, Hannah Kent nous offre un roman poignant à l'extrême et très immersif. L'atmosphère qui se dégage du roman est certes envoutante, elle confine à la fascination mais elle est aussi lourde, pesante, étouffante. Quant aux personnages, ils sont complexes, profonds et si attachants que j'ai été touchée par le destin de chacun d'entre eux (à l'exception du prêtre!), émue, poignardée. Oui, ils font des erreurs et certains de leurs choix ne peuvent qu'angoisser, que terrifier mais quel empathie on éprouve alors à leur égard! C'est d'ailleurs étrange et parfois inconfortable d'avoir cette compassion pour Norà face aux maltraitances dont elle se rend coupable ou pour Nance dont les rituels sont souvent cruels... Oui mais ces deux femmes sont des fruits de leur époque, de leur société et elles ne font que ce qu'elles pensent être juste, bien. le personnage de Nance m'a particulièrement brisée le coeur, déchirée tant je l'ai trouvé émouvant, complexe avec les pans de son passé que la narration nous révèle progressivement...
J'ai vraiment adoré cette lecture qui va bien au-delà de la figure de la sorcière (que par ailleurs j'affectionne tout particulièrement) et qui interroge le folklore, les croyances mais aussi la rumeur ou encore le deuil. C'est un roman qui ne se contente d'être magnifique et émouvant mais qui a aussi une véritable portée ethnologique et c'est passionnant. A noter qu'il est d'ailleurs inspiré de faits réels et d'un procès qui fit du bruit en son temps et de l'histoire tragique de Bridget Cleary... J'aurai volontiers poussé un peu cette étrange exploration en lisant des ouvrages "scientifiques" sur le folklore irlandais à l'épreuve de la société mais malheureusement, les références que proposent Hannah Kent n'ont pas été traduites... Pas encore.
En attendant, je relirai les légendes.



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Hannah Kent est une grande écrivaine. Après le très bon "A la grâce des hommes", elle récidive et la première impression se confirme.

Il encore question de femmes, dans cette Irlande rurale du début du XIXème siècle. Mais quelles femmes ! le roman tourne autour de trois personnages et des croyances ancestrales qui cimentent encore cette petite société qui vit de peu, à la lisière de l'indigence et du malheur.

Et du malheur, Nora Leahy va en connaître. Après avoir perdu sa fille, son mari décède, et elle se retrouve seule avec son petit-fils de quatre ans, un enfant qui n'a pas l'usage des jambes et qui ne parle pas, qui braille toutes les nuits et se souille à longueur de journée. Or, lorsqu'elle l'avait vu, deux ans auparavant, il croissait normalement.

Et c'est là qu'entre en jeu les esprits, les "bonnes gens", ceux qui ont échangé son petit-fils contre cette créature.

Aidée de Mary, pour les tâches quotidiennes et la tenue de la ferme, et de Nance, la guérisseuse qui possède la don, elle tentera de récupérer son petit-fils.

L'ambiance de cette terre dure, cette vallée un peu isolée, qui a forgé les caractères est soigneusement restituée. le conflit ouvert entre les anciennes croyances populaires et la religion catholique porteuse d'émancipation est permanent. Ce conflit va irriguer toute la société, les relations entre ses membres et les prétextes qui permettent de faire porter la faute de ses malheurs sur l'autre.

Avec ce roman, on oscille sans cesse d'un monde à l'autre. Parfaitement maîtrisé, le récit est captivant porté par des personnages dont on atteint l'âme profonde. Et malgré la cruauté générale de l'environnement, de l'époque et de sa structure (notamment la place des femmes de ce monde là) on aime ces femmes au destin tragique.
Lien : http://animallecteur.canalbl..
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1825. Un petit village au sud-Ouest de l'Irlande. Hannah Kent nous raconte l'histoire de Nora Leahy, veuve, qui reste seule avec Micheal Kelliher, son petit-fils atteint de crétinisme. Elle ne supporte pas que cet enfant soit son petit-fils né bien portant. Nance Roche la guérisseuse pense que cet enfant est un changelin (un enfant de fée laissé à la place d'un enfant humain). Avec l'aide de Mary Clifford (la louée), elles vont tenter, par des pratiques de plus en plus cruelles, de faire revenir le véritable enfant.
Autour d'elles gravitent de nombreux personnages comme Peg O'Shea, la cousine, qui est la voix de la raison. Mary, la bonne, doute aussi du bien-fondé de leurs démarches. Nance, la guérisseuse, tente d'aider son prochain et ses qualités d'herboriste sont impressionnantes. Cependant elle perpétue des superstitions ridicules. Et dès lors que quelque chose de mauvais se produit dans le village, on la tient comme responsable et l'on passe vite de rebouteuse à sorcière.
Dans cette Irlande miséreuse où les gens ont froid et faim, chaque fait est considéré comme un présage, généralement mauvais, les superstitions sont omniprésentes et frôlent l'obscurantisme mais confrontés à la réalité de la ville, elles paraissent ridicules. Les temps changent et l'église catholique veut abolir ces pratiques anciennes.
Je ne sais pas si Nance, contrairement à Nora, croit vraiment qu'elle va ramener un enfant disparu mais elle veut absolument aider Nora. A l'époque, c'était peut-être aussi une façon de se débarrasser des bouches inutiles pour ces pauvres gens indigents, de se donner bonne conscience. Une façon de croire à la magie dans un monde misérable.
3.8/5

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