AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,18

sur 3928 notes
C'est ouvrage est une merveille à deux titres. Par le choix de son thème et la façon de le traiter dans un premier temps. Par sa mise en forme ensuite, avec ce style prodigieux qui n'appartient qu'à Yasmina Khadra.
Un demi-siècle après la conclusion des accords d'Evian qui scellent l'indépendance de l'Algérie, le sujet est toujours explosif. Alors que nombre de protagonistes des deux partis sont encore de ce monde, il faut du courage pour s'attaquer au thème, de l'habileté pour ne pas relancer la polémique. L'exercice est sans doute plus aisé pour un Algérien de souche qui pourrait s'enorgueillir de cette page de l'histoire de son pays. Mais là n'est pas le propos de Yasmina Khadra. Il prône l'apaisement.
Il relate les faits sans parti pris et les opinions avec impartialité. Bien entendu il évoque aussi quelque part – il le fallait bien - les sources du mal, avec ce racisme latent qu'il rapporte par la bouche d'Isabelle : « Je suis une Rucillio, as-tu oublié ?… Tu m'imagines mariée avec un arabe ?... Plutôt crever ! ». Ce mal contre lequel Younès, alias Jonas, n'imaginera même pas se révolter, même s'il lui vole son bonheur. Mais Yasmina Khadra veut dépasser les clivages pour donner la parole au coeur. Il veut exprimer la somme de souffrances que les contemporains de cette époque en ce pays ont pu endurer, au cours de ce qu'on appelait pudiquement en métropole « les événements ».
Aussi toute généralisation étant forcément abusive, l'humanisme de l'auteur veut nous mettre en garde contre les assimilations. Emilie en sera le symbole. Elle s'insurgera de voir Younes ne pas répondre à son amour déclaré au mépris de toute ségrégation : « as-tu jamais osé une seule fois dans ta vie ?».
Younes est un spectateur indolent des soubresauts de ce pays qui s'ouvre au nationalisme. Il passe à côté de cette guerre, même si le malheur le rattrape souvent. Il voudrait tant que les choses soient plus simples, que le coeur parle plus fort que la raison.
Métaphores, allégories, font de cet ouvrage une merveille de style imagé, à l'alternance bien dosée entre les dialogues, les portraits et la narration.
« L'hiver se retira un soir sur la pointe des pieds pour faire place nette au printemps. Au matin, les hirondelles dentelèrent les fils électriques et les rues de Rio Salado fleurèrent de milles senteurs. »
Un romantisme un peu désuet contrebalance la dureté des événements : « Elle n'était plus de chair et de sang. Elle était une éclaboussure de soleil. » Les éléments naturels sont autant de personnages qui animent le récit : « La fournaise des dernières semaines s'était calmée. Dans le ciel épuisé par la canicule, un gros nuage filait sa laine, le soleil en guise de rouet. »
Le vocabulaire est familier sans être populaire, riche sans être pédant, imagé sans être fumeux, toujours juste. « Ils élevaient autour de leur bonheur des remparts imprenables en s'interdisant d'y creuser des fenêtres. »
Ce que le jour doit à la nuit est un très beau roman, ses enjeux sont nobles, sa lecture est un régal.
Commenter  J’apprécie          151
Les envolées lyriques de Yasmina Khadra m'ont laissé pantois tant il manie magnifiquement bien la langue française. Son style, fait d'hyperboles et de personnification, aide à faire parler ce qui entoure le personnage, comme tant d'êtres uniques qui changent et se transforment au grès des émotions et du temps. Je trouve que sa plus grande force à travers ce roman, et de mettre des mots sur les émotions et d'en associer la valeur du temps qui passe (passé, présent, futur) et l'environnement qui entoure les personnages.

C'est mon premier roman de Yasmina Khadra. le titre m'avait interpellé par sa beauté et mon envie de le lire m'amena à l'acquérir.

En le terminant, je ferme la porte d'une histoire lointaine, mais pas tant que ça, à travers une Algérie où les idéaux et les ravages de son indépendance l'ont permise d'être libre et en paix, pour un temps.

Je m'attendais à une histoire d'amour, et je fus surpris de trouver aussi une histoire de forte et belle d'amitié entre les personnages, de besoin d'indépendance d'un pays et des conséquences tragiques et meurtrières pour les individus au milieu de cette guerre entre pros indépendants (Front de Libération Nationale) et Français voulant garder la main mise sur ce territoire.

La forme du roman s'articule en plusieurs chapitres correspondant aux vies du personnage, si différentes, et fait progresser l'histoire. On y découvre les grandes villes et leur bidonville (Oran), et d'autres plus petite et intimiste comme Rio Salado (désormais nommé El Malah), me rappelant les décors du sud de la France.

Cependant, je regrette quelque peu le manque, parfois, d'articulation entre les chapitres, nous laissant penser à des périodes de vies totalement différentes, mais finalement c'est peut-être le cas....

Aussi à force d'utiliser l'hyperbole et les phrases très bien construites - et justement trop bien construite - cela met de côté l'histoire en elle-même et recentre tout sur le personnage principal, à travers ses nombreuses tergiversations, pensées et retour sur soi qui le fragilisent et fragilisent aussi notre attachement à ce dernier.

Yasmina Khadra s'est utilisé la langue française et l'utilise à bon escient. J'ai retenu quelques phrases qui m'ont marqué pendant leur lecture :

"Le sommeil m'isole et je n'ai pas envie d'être seul dans le noir".

"Le temps observe une pause."

"Elle cadençait la foulée du temps."

"Je n'étais pas resté longtemps avec ma mère. Ou peut-être une éternité. Je ne me rappelle pas. le temps ne comptait pas ; il y avait quelque chose d'autre, plus dense et essentiel. Comme au parfois des prisons, ce qui importe, c'est ce que l'on retient de l'instant partagé avec l'être qui nous manque."

L'Algérie indépendante et son passé colonial sont étroitement liés et permettent de dresser un tableau de la difficulté pour le personnage principal de se positionner, pris en étau entre ses origines arables, et son mode de vie occidental. Ainsi, le regard que l'auteur pose sur chacun des protagonistes nous rappelle qu'un conflit n'est jamais noir et blanc, mais que cela est beaucoup plus complexe ; que des amitiés et des familles se déchirent à travers ces conflits et perdent, souvent, toute leur histoire en quittant leur racine.

Enfin, je n'ai pas beaucoup parlé d'amour, mais elle est bien présente dans ce roman et s'effleure de bout en bout du début à la fin, qu'elle soit l'amour d'une mère et d'un père, l'amour d'une famille, l'amour en amitié et l'amour d'un pays. L'amour comme sentiment amoureux entre deux êtres va être jonché ‘d'instants ratés', et la description qu'en fait l'auteur nous projette avec eux en nous faisant craindre le pire, mais ça, je vous laisse le découvrir.



Commenter  J’apprécie          149
Yasmina Khadra est un magnifique conteur- poète, tout dévoué à la cause de sa patrie.
Dans ce roman qui pourrait être considéré comme une biographie romancée, l'auteur nous emmène sur les traces de Jonas- Younès, qui traverse, jeune adulte, les années terribles de l'accès à l'indépendance de l'Algérie.
Le style de l'auteur, très coloré, voire lyrique, ne fait qu'accroître cette dimension de la déchirure ressentie par Younès, né algérien pauvre, pris en charge par un oncle pharmacien, qui lui permet de profiter d'études et d'intégration dans un groupe de jeunes de la meilleure société. Mais Younès, finalement, n'est ni algérien, ni français et rien n'est facile dans ces conditions. Rajoutez à cela une histoire d'amour idéalisé mais "raté" à cause, justement de cette non- finitude, vous avez un roman qui se lit comme une romance dont on est pressé de voir l'accomplissement !?
Commenter  J’apprécie          140
Un livre très touchant. Le roman s'ouvre sur une enfance heureuse dans un pays prospère. Mais une nuit, le feu vient ravager le travail de toute une vie. Descente aux enfers du père, Younes sera élevé par son oncle pharmacien. Une enfance cabossée dans l'Algérie des années 30. Younes grandira au milieu de la communauté pied-noire. Jusqu'à ce que les prémices de la décolonisation fassent tout voler en éclats. Un livre à lire même si certains passages sont très durs.
Commenter  J’apprécie          140
Etant une fan de Yasmina Khadra, je me suis encore régalée avec ce livre. La vie , la guerre en Algérie, vues de l'intérieur...un univers dans lequel on pénètre sans parti pris. On regarde les personnages agir, on vit avec eux, on pressent ce qui va arriver. Regard sans haine . Etonnement de se trouver là , de ne pas se sentir à sa place. Mal être de se trouver à la limite de deux cultures sans jamais savoir où se situer vraiment.....n'est-ce pas là le mal du monde dans lequel nous vivons, où mixité, intégration, tolérance restent des mots ....rien que des mots
Commenter  J’apprécie          140
Avec son écriture limpide Yasmina Khadra nous amène dans les entrailles de l'histoire de l'Algérie. La vie d'un être déchiré, comme son pays, Younes ou Jonas, Jonas ou Younes, comprendre et exister, en glissant des deux cotés du miroir.. C'est beau, poignant, vrai,
Une grande sensibilité intelligente éclate dans un livre d'un grande beauté,
Merci Monsieur Khadra
Commenter  J’apprécie          140
Belle lecture vite dévorée. de très jolies phrases.
J'ai l'impression que je retrouve le plaisir de lire et de dévorer les livres, quel bonheur !
Commenter  J’apprécie          135
Ce que le jour doit à la nuit raconte l'histoire de Younes, de sa tendre enfance, dans les années 1930, jusqu'en 2008. Au début du roman, Younes vit avec sa famille dans la campagne algérienne, jusqu'à ce que son père perde tout. Ils se retrouvent à vivre dans les bidonvilles d'Oran, dans la misère. Bien qu'il soit un homme très fier, le père de Younes, désirant un meilleur avenir pour son fils, le confie à son frère pharmacien. La femme de ce dernier, Germaine, une française, rebaptise l'enfant, Jonas. Et, à partir de là, ce jeune garçon, va sans cesse se retrouver à cheval entre deux mondes. Arrive les années 1940, et la guerre. Son oncle, qui est un grand idéaliste, est arrêté pour avoir des sympathies nationalistes. Vu l'état dans lequel il rentre chez lui, on peut supposer qu'il a été torturé, même si ce n'est pas explicitement dit par l'auteur. La famille quitte Oran, et part se reconstruire à Rio Salado, une petit ville à une soixantaine de km. Jonas s'intègre peu à peu à cette communauté pied-noir. Il se fait une bande d'amis pour la vie : Simon, Fabrice et Jean-Christophe, à laquelle vient se greffer Dédé et José. Tout va bien dans le meilleur des mondes, même si la Seconde guerre mondiale a laissé des traces et que les premiers échos de la guerre d'Indochine se font sentir. Néanmoins, leur vie bascule avec l'arrivée de la jolie Emilie. Celle-ci s'avère être la fille de Madame Cazenave, avec laquelle Jonas a eu une relation intime. le problème est qu'ils tombent amoureux l'un de l'autre, et que Madame Cazenave fait promettre à Jonas, de ne pas toucher à sa fille. Dès lors, la relation entre Jonas et Emilie, mais également entre Jonas et ses amis d'enfance, va peu à peu décliner, parallèlement à la montée des tensions, puis de l'éclatement de la guerre d'Algérie.

J'ai aimé ce roman car il raconte une histoire d'amour impossible, où les deux amoureux ne sont presque jamais en phase, ils ne font que de se rater. Ce sont un peu des Roméo et Juliette franco-algérien. Mais c'est aussi, au départ, une très belle histoire d'amitié, un peu à la vie à la mort. J'ai apprécié aussi le fait que ce soit une petite histoire dans la grande. Les personnages sont tous très intéressants, et reflètent tous, je pense, un certain état d'esprit spécifique à l'Algérie française. Ils sont le reflet de personnes qui ont ou auraient pu exister. Il est également intéressant de vivre ces évènements, le comportement des différents protagonistes, du point de vue d'un jeune algérien qui a su s'intégrer à cette communauté. Mais, en fait, s'est-il réellement intégrer? Il ne sait jamais où est sa place. En parlant poliment, il a "le cul entre deux chaises", tout au long du roman. Et, c'est cet antagonisme qui rend cette histoire unique et prenante.
Lien : https://elbooksmovies.wordpr..
Commenter  J’apprécie          130
Tous les ingrédients d'un bon roman sont réunis :
- Personnage principal attachant dont on suit le déroulement de toute la vie.
- Amitié, amour, trahison, serments, secrets
- Histoire de famille liée à la « Grande histoire » de la France et l'Algérie entre les années 30 et 70.
- Richesse et pauvreté
- Violence et humanité...
… donc voilà un très bon roman que j'ai dévoré.
Younès, fils d'une famille arabe extrêmement pauvre, est confié à son oncle pharmacien qui va l'élever, l'aider à grandir. Younès noue des amitiés avec des colons… mais au moment des révoltes, il lui faudra choisir son camp. Toute sa vie, il se retrouve « pris entre deux feux », en conflit de loyauté soit envers ses origines, soit envers ses amis.
Yasmina Khadra est un grand auteur qui nous fait entrer dans le coeur et dans la tête de ses personnages, quelles que soient leurs contradictions ou leur complexité.
Commenter  J’apprécie          130
A travers la vie de Jonas, nous vivons l'histoire et les contradictions de ce pays déchiré entre deux mondes dans l'Algérie des années lumineuses, puis sombres de la guerre. Mais également les sentiments, les conflits entre ces jeunes qui se côtoient, s'acceptent ou pas dans cette société aux différences sociales marquées.
Et pourtant quel sentiment de gâchis dans la vie du jeune Younes, qui devient Jonas. C'est une belle histoire d'amour, mais un amour impossible, à cause d'une promesse tenue, que l'on voudrait le voir rompre, avec parfois l'envie de le pousser, de le secouer, pour qu'il se réveille, pour qu'il réagisse et ne laisse pas faire la fatalité !!
C'est magnifiquement bien écrit. C'est un superbe roman, j'ai adoré.
Commenter  J’apprécie          130





Lecteurs (10147) Voir plus



Quiz Voir plus

Livres de Yasmina Khadra

Comment s'appelle le personnage principal de "Ce que le jour doit à la nuit" ?

Malik
Yousef
Younes
Mehdi

5 questions
229 lecteurs ont répondu
Thème : Yasmina KhadraCréer un quiz sur ce livre

{* *}