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Rubayat est un recueil percutant, surtout par rapport à l'époque où il fut écrit et aussi pour le contexte culturel qu'il reflète. L'auteur lettré et savant scientifique perse nous offre des vers au ton irrévérencieux envers la société musulmane où il évolue. Il n'hésite pas à glorifier avec une certaine désinvolture, la jouissance terrestre, en s'amusant au travers de ses mots à faire des anaphores sur le vin, des métaphores charmantes sur les femmes, plaidant sans cesse, pour vivre ici bas une vie de plaisirs, en célébrant un hédonisme existentiel permanent sans tabou, envers l'alcool, les filles, la fête sans se soucier des préceptes ou des dogmes d'un carcan religieux étouffant. Car pour lui, le paradis d'Allah n'existe pas, pas plus que l'enfer d'ailleurs, poussant même jusqu'à se moquer avec un humour raffiné de l'abstinence, du jeune en souhaitant au plus vite, le jour d'après ou le vin coulera de nouveau à flots. L'auteur, croit-il un minimum ? Sûrement juste une conviction de façade pour ne pas être trop inquiété dans une société conservatrice. En fait, en décortiquant ses vers, on ressent son agnosticisme, l'amenant au doute peut-être parfois, mais surtout à l'impossibilité de définir Dieu, finalité philosophique le confortant dans son idée de profiter de la vie sur terre au maximum, avant de redevenir poussière pour l'éternité.
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« Limite tes désirs des choses de ce monde et vis content.
Détache-toi des entraves du bien et du mal d'ici-bas,
Prends la coupe et joue avec les boucles de l'aimée, car, bien vite,
Tout passe... et combien de jours nous reste-t-il? »

Les quatrains d'Omar Khayyam #editionsivrea

Ce grand poète persan qui naquit vers l'an 1040, nous a légué une poésie magnifique qui ne cesse d'éblouir, de nos jours encore…

Je dirais que ses vers, ses quatrains somptueux, se résument en trois mots essentiels: amour, ivresse, vie!

« Lève-toi, donne-moi du vin, est-ce le moment des vaines paroles ?
Ce soir, ta petite bouche suffit à tous mes désirs.
Donne-moi du vin, rose comme tes joues...
Mes voeux de repentir sont aussi compliqués que tes boucles. »

Mais il y a bien plus que cela! Il y a aussi la beauté des fleurs, le chant des oiseaux, la nature qui s'épanouit et surtout un regard qui se pose sur elle et un poète capable de la chanter avec talent et délicatesse!

« Tous les matins la rosée emperle les tulipes,
Les violettes inclinent leurs têtes, dans le jardin;
En vérité, rien ne me ravit comme le bouton de rose,
Qui semble ramasser autour de lui, sa tunique soyeuse. »

Il y a aussi le chant du vin, de l'ivresse, de la joie de vivre qui lui valurent bien des soucis et des critiques de ses contemporains qui jugeaient son attitude et sa poésie à l'aune de l'Islam et son interdit lié à l'alcool…

« Imite, autant qu'il dépend de toi, les libertins;
Sape les fondements de la prière et du jeûne.
Ecoute la Parole de Vérité d'Omar Kháyyam :
« Enivre-toi, vole sur les grands chemins, et sois bon. » »

Pour autant, le vin n'est pas tant pour lui une manière de s'opposer à la religion que simplement une célébration de la vie, du cadeau qui nous est fait chaque jour, du souffle qui nous anime… le vin célèbre, rend joie, fait oublier l'inéluctable…

« Sois heureux, Kháyyâm, si tu es ivre,
Si tu reposes près d'une aimée aux joues de tulipe, sois heureux:
Puisque à la fin de tout tu seras le néant,
Rêve que tu n'es plus, déjà... sois heureux. »

La poésie de Khayyam est beauté et enchantement, ivresse et splendeur, simplicité et candeur…

« Ce que je veux, c'est une goutte de vin couleur de rubis et un livre de vers,
Et la moitié d'un pain, assez pour soutenir ma vie.
Et si je suis alors assis près de toi, même en quelque lieu désert et désolé,
Je serai plus heureux que dans le royaume d'un sultan. »

Elle est un instant de vie au bord du trépas, une danse avant l'abîme, un abandon avant l'ultime révérence, une joie simple, un émerveillement…

« La journée est belle, la brise est tiède et pure;
La pluie a lavé la poussière qui ternissait la joue des roses.
Le rossignol dit à la rose, en la langue antique et sacrée :
«Toute ta vie, enivre-toi de chants suaves et de parfums !» »

… la vie tout simplement!
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Alors que Khayyam n'a pas catégoriquement nié l'existence de Dieu, il avait ses questions et ses inquiétudes au sujet d'un tel être surnaturel, et était pour le moins fortement sceptique quant à l'idée d'une vie après la mort.
'Khayyam ', se demande-t-il dans un quatrain, 'qui a dit qu'il y aurait un enfer ? Qui a été en Enfer et qui est revenu du Ciel ? '

Khayyam rit à l'idée qu'il vivra après sa mort, en particulier dans un paradis islamique rempli de belle jeunes femmes et de vin - les mêmes choses que l'islam orthodoxe en Iran proscrivait. Doutant des promesses faites par la religion dans laquelle il est né, il ne s'intéresse qu'à cette vie, dont il déplore amèrement l'éphémère et est déterminé à tirer le meilleur parti - avec des quantités prodigieuses d'alcool.

Malgré toutes les libertés qu'il a prises avec les Rubáiyát, c'est en grande partie grâce à FitzGerald que Khayyam s'est si bien comporté en Occident. En revanche il est une figure controversée dans beaucoup de pays musulmans compte tenu de ses opinions sur la religion et l'au-delà, ainsi que de son goût insatiable pour le vin (et la belle vie en général).

Certains ont tenté de dépeindre Khayyam comme un musulman soufi, affirmant que le vin qu'il prône si longuement et avec tant de détails est métaphorique plutôt que littéral – le vin serait l'âme...En fait ils détournent la poésie de Khayam comme l'ont fait les targoumins juifs et les glosateurs chrétiens avec la Cantique des cantiques

D'autres l'occultent : la République islamique selon un article de 2019, a commencé à retirer Khayyam et d'autres géants littéraires persans des manuels scolaires.

Vous aimez Omar Khayyam et vous lisez l'anglais ,alors c'est la splendide traduction de FitzGerald qu'il faut lire; le traducteur a fait de ce recueil une des gloires de la poésie anglaise.

Lien : http://holophernes.over-blog..
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Khayam était un grand savant perse. Né au milieu du XIème siècle, il s'est intéressé entre autres aux équations du trois et quatrième degré , à l'astronomie (et à instaurer les années bissextiles), aux coefficients binomiaux. Un homme en avance sur son temps.
Parallèlement , il écrivait des quatrains (Rubayat).
Lecture très agréable , où l'auteur ne peut s'empêcher de boire du vin à chaque ligne ou presque , demandant à Dieu de regarder la bonté de son coeur et non ses beuveries ou ses courses trépidantes derrière les tulipes , à savoir les filles.
Khayam veut croire à Dieu, à sa bonté mais n'en veut aucune contrainte. Lui il croit au jus de vigne , va à la mosquée pour changer ses tapis et pense que l'on devrait jeûner de prière plutôt que de vin.
Bon , il a eu quelques soucis avec les religieux durant sa vie.
Il y a aussi de l'autodérision puisque l'auteur n'hésite pas à se mettre en scène.
Une lecture agréable , forcément dépaysante, et qui remise dans son contexte est sacrément surprenante.
Khayam , un peu comme les poètes Tang Li Baï ou Du Fu est un épicurien.
Il croit en un Dieu que jugera la bonté de son coeur et non pas son asservissement.
J'ai découvert cet auteur , non pas en lisant l'histoire des mathématiques ! , mais dans le dictionnaire insolite de la Turquie dont je vous ai déjà parlé. Qu'encore une fois, je ne saurais trop vous conseiller.
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Cet ouvrage , outre les quatrains , contient une introduction exposant la vie du poète et aussi l'aventure de sa redécouverte par le poète anglais Fitz Gerald . Il présente aussi en appendice un certain nombre de textes sur Kayyam ( Renan,Gauthier, ) et sur le soufisme. J'aime beaucoup cette poésie septique et hédoniste et ce personnage d'un savant et poète si éloigné de l'image que donne aujourd'hui (hélas) de l'Iran les fanatiques barbus au pouvoir.
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"On assure que celui qui boit ira en enfer. — Comment croire à cette parole mensongère ? — Si celui qui aime le vin et celui qui aime l'amour vont en enfer, — demain tu trouveras le paradis plat comme la main."

La sagesse de ce fou d'amour et d'ivresse n'a de pair que son humilité.
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J'ai siroté ces quatrains dans la traduction d'Omar Ali-Shah, érudit soufi du siècle dernier. A la fois juge et partie mais non dépourvu d'arguments convaincants*, il soutient qu'Omar Khayyām est resté fidèle au soufisme, branche mystique de la religion musulmane qui s'oppose à une lecture littérale du Coran et permet certaines métaphores telles que le vin, pour désigner le principe fondamental de l'ivresse spirituelle. C'est possible, étant donné la proximité culturelle et chronologique de Khayyām avec de grandes figures du soufisme telles que Rûmî ou Saadi. Quant à savoir s'il ne s'est pas détourné ironiquement de la religion pour chercher un plaisir plus terrestre, c'est toute l'ambiguïté qui agite encore les commentateurs. L'inspiration poétique de Khayyām conserve une part de mystère, qui rejaillit dans les brefs quatrains exhalés comme des épigrammes :

« Un souffle sépare l'infidélité de la foi ;
Un autre distingue la certitude du doute.
Alors, chéris le souffle, ne le traite jamais à la légère -
Un tel souffle n'est-il pas la moisson de notre être ? »

Là où certains traducteurs tels qu'Edaward Fitzgerald ont donné de ce poète une image proche d'un nihiliste athée (ce qui fait dire à Fernando Pessoa dans le Livre de l'intranquilité, que « tout vient de la non-raison » chez Khayyām et aboutit à la « désillusion »), il se pourrait que l'un des plus grands savants du Moyen Âge cherche plutôt à « obtenir une vision plus claire de Dieu » (je cite là Ali-Shah) en étalant ses doutes au grand jour, à la manière des malâmatî, soufis de la « voie du blâme ». Moquerie contre Dieu ou soumission à son dessein, la poésie de Khayyām brasse en tout cas une imagerie universelle, avec parfois des accents de philosophie déterministe, sans doute influencée par ses activités de mathématicien et d'astronome :

« Quand les chevaux sauvages du Ciel ont obtenu leur selle,
Quand Jupiter a lancé son premier éclat, puis les Pléiades,
Mon sort a été publié depuis le Tribunal de Dieu,
Comment puis-je errer ? J'agis comme il est écrit. »

Que l'alcool soit le prélude à l'anabase ou au simple coma éthylique, la transe qu'il induit permet de flouter les limites des cinq sens, et donc du corps et de l'esprit.

« Si seulement je contrôlais l'Univers de Dieu,
Ne voudrais-je pas effacer ces Cieux imparfaits,
Et de rien édifier un vrai Paradis,
Où toute âme atteindrait le désir de son coeur ? »

Je lève mon verre à cette idée.

*Notamment ses réfutations, preuves à l'appui, des contresens commis par les traducteurs occidentaux dont le plus célèbre, Edward Fitzgerald, ne connaissait que très peu le persan, devant s'aider d'un dictionnaire... et de son intuition.
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Né en Perse dans la région du Khorasan vers 1050, fils d'artisan (son père était fabricant de tentes), Omar Khayyam, de son vrai nom Omar Iben Ibrahim el-Khaiami (littéralement Omar, fils d'Abraham, fabricant de tentes) est un des plus grands poètes célébrés encore aujourd'hui dans tout le Proche et le Moyen-Orient.

C'est tout d'abord en tant que mathématicien, géomètre et astronome qu'il acquière une grande renommée. Dès 1074, il publie de nombreux traités d'algèbre qui font autorité. C'est bien plus tard que le savant homme connaîtra une renommée littéraire, notamment en publiant les Robâiyât (Quatrains), textes courts composé de quatre vers. Oeuvre essentielle d'Omar Khayyam, les Quatrains seront découverts tardivement en Europe. La première traduction est faite en 1851.

Ces Quatrains n'ont pas été écrits dans le silence et la solitude que requiert le travail d'écriture mais composés lors de soirées de retrouvailles que l'auteur organisait dans sa demeure avec ses amis. Ces textes courts sont comme des sentences, des pensées douces mais toutes empruntes de scepticisme, de pessimisme voire de blasphème. En Perse, à une époque où les pouvoirs religieux et politique exerçaient une forte influence sur les esprits, les textes d'Omar Khayyam, circulaient en secret auprès de ses lecteurs.

Épicurien, goûtant aux plaisirs de l'éphémère mais rejetant toute forme de vie mondaine, penseur critique envers son époque et ses contemporains, contemplatif face au divin mais très méfiant à l'égard de tout dogme et du pouvoir religieux, Omar Khayyam apparait aujourd'hui encore comme un esprit libre, un penseur tout à fait à part.

Les thèmes de ses Quatrains sont toujours liés à l'impermanence de la vie, des êtres et du temps, à la nécessité de vivre pleinement les plaisirs et les saveurs de l'amour, de l'amitié et de tout ce que nous offre la nature (l'auteur fait dans ses textes une grande place au vin, symbole d'un attachement à la terre mais aussi rempart contre les vicissitudes de la vie).

La lecture d'Omar Khayyam agit comme un révélateur d'une époque, de consciences très attachées à leur condition, à leur quotidien, aux usages en cours dans une société dirigée par un pouvoir politique et religieux omniprésent.

Plusieurs siècles plus tard, les résonnances de la Perse du XIème siècle sont nombreuses qui viennent jusqu'à nous, lecteurs, témoins d'un monde actuel en quête de sens.

"Ô coeur, puisqu'en ce monde le vrai même est une hyperbole,
Pourquoi t'inquiéter à ce point de ce trouble et de cet abaissement ?
Livre ton corps au destin, et ton âme à la merci des heures ;
Ce que la plume a écrit ne sera pas raturé pour toi."
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En apparence, une poésie simple et sympa qui chante l'ivresse et le Carpe diem, une irrévérence mélancolique qui invite à se réjouir et qui clame la sagesse de ne pas être sage.
Irrévérencieux au point que, d'après ce qu'Amin Maalouf écrit dans son livre-hommage à Omar Khayyam, après sa mort en 1131, en Perse « chaque fois qu'un poète composait un quatrain pouvant lui attirer des ennuis, il l'attribuait à Omar; des centaines de faux vinrent ainsi se mêler aux robaïyat de Khayyam, si bien qu'il devint impossible, en l'absence du manuscrit, de discerner le vrai. »
Les Robaïat sont donc peut-être l'oeuvre de toute une bande de poètes indociles, ce qui, contrairement au narrateur du livre d'Amin Maalouf, me réjouirait plutôt.
Les quatrains de Khayyam (& co?) sont sans doute moins simples qu'ils n'y paraissent: ils font l'objet d'un travail considérable d'interprétation et de traduction - au moins une cinquantaine en Français -, certains soulignant par exemple l'utilisation d'un vocabulaire soufi qui donnerait aux poèmes une dimension plus spirituelle que pochtronne. Bon, l'un n'empêche pas forcément l'autre, comme Omar Khayyam l'a dit bien avant avant Boris Vian:
« Amoureux et buveurs, dit-on, sont voués à l'enfer.
À cette absurdité l'esprit ne peut se faire.

Si vont en enfer qui aime et qui boit,
Le paradis demain
comme la paume de la main
sera désert. »
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Le grand poète et homme de science perse vécu au coeur du Moyen-âge iranien. de son oeuvre, on retient principalement les quatrains persans ou « rubaiyats » que j'ai lu (éditions de minuit). Enfin, lu… pas sûr. Plus que jamais, la guerre des traducteurs fait rage de sorte que je n'ai pas la certitude d'avoir lu Omar Khayyâm. Mais ce que j'ai lu est résolument fluide, agréable, métaphorique peut-être.

Ces réflexions sceptiques sur le monde social sont presque des avertissements de moraliste : « Souffre seul », « il vaut mieux que tu te fasses peu d'ami », « l'anxiété du lendemain est inutile » etc.

« Si la raison me tourmente encore, je lui cracherai au visage Une gorgée de vin... pour qu'elle dorme ! ». Mais le thème principal de ces vers m'as littéralement « saoulé ». Khayyâm fait les louanges du vin à longueur de strophe car « le vin est un rubis liquide, et la coupe en est la mine ». Aviné, le poète encourage son lecteur à boire, contre le coeur qui saigne de chagrin, contre l'assaut des doutes et du monde.

« Bois du vin... c'est lui la vie éternelle ». On comprend aisément le malaise, dans un Iran où même un panaché n'est pas au menu, d'assumer un héritage aussi provoquant, le scepticisme religieux de Khayyâm, la sensualité de ses poèmes et sa provocation à l'ébriété comme remède interpelle : dans quelle mesure est-il encore enseigné ? Ou est-ce une interprétation occidentale ? En effet, certains traducteurs s'insurgent, le vin est métaphorique, s'agirait-il d'une parabole théologique ?

Quoiqu'il en soit, et malgré la frustration de pas savoir très bien à quel point ce qu'on a lu est fidèle à ce qu'a écrit Khayyâm, l'expérience est agréable, simple et imagée. La récurrence du thème, qui jamais ne se dépasse ou ne s'approfondi véritablement, peut éventuellement lasser alors, c'est comme pour ce que vous savez…à lire avec modération.

Qu'en pensez-vous ?
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