L'écriture de Theresa Kishkan, délicate et poétique, transporte le lecteur à une autre époque dans un rythme agréablement lent. Le roman aborde les difficultés des peuples roms. Il évoque aussi la soif de savoir d'où l'on vient.
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En passant, je m'appelle Nestor. Et toi?
Patrin.
Patrin? Il m'a regardée plus attentivement. Il a prononcé quelques mots dans la langue de ma grand-mère, mais je n'ai pas compris. J'ai dû lui renvoyer un regard sans expression. Es-tu Rom?
Ma grand-mère l'était, et c'est elle qui m'a donné mon nom. Ça veut dire «feuilles», je crois? Et est-ce visible? Mon côté Rom, je veux dire?
Des feuilles, oui, mais plus que cela. Ce sont aussi les repères laissés par les voyageurs pour que les autres puissent les suivre. Des feuilles parfois, ou des bâtons, des morceaux de tissu attachés à un arbre. (...) Seuls ceux à qui le message était destiné pouvaient le comprendre. Et oui, les Roms reconnaissent toujours l'un des leurs.
D'ailleurs, qui l'avait fabriquée, en premier lieu? Elle m'avait raconté que sa mère l'avait mise sans dire un mot dans la marmite de cuivre qu'elle avait emportée avec elle en quittant le quai, à St.John, après l'avoir giflée et après que son père eut coupé de son couteau tranchant les piécettes qui ornaient ses cheveux. Elle allait entrer dans l'univers du gadžo avec une marmite en cuivre, une courtepointe et l'empreinte de la main maternelle sur la joue.
Des feuilles vertes sur un fond gris, du velours noir, la texture de la nuit, des ombres, le fil doré qui fait comme des rais de lumière à travers les branches, des traces d'oiseaux au petit matin.