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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une pépite absolue, totale, qui me met bien en peine pour en rendre
compte...tant la richesse de cette fiction , nous entraînant dans les arcanes de l'oeuvre de Franz Kafka et Sadegh Hedayat, des affres et mystère de l'ECRITURE, de l'histoire des autodafés, des bibliothèques brûlées au fil de l'histoire de l'Humanité ... m'a captivée...et alimentent moult questionnements sur l'Acte de créer !
Très riche, très dense... Je ne sais par quoi commencer ?!!!

La narration se situe entre deux périodes temporelles: les années 1910-
1914 et les années 1950... A l'origine de cette fiction, la narratrice part à Prague, dans l'espoir de retrouver des traces de son père, décédé... , qu'elle n'a jamais connu. Elle prend un poste de jeune fille au pair chez les Kafka, où elle fait la connaissance de Franz...
40 ans plus tard, elle est à Paris, ayant créé sa propre librairie; elle croise
sur son chemin, l'écrivain iranien , Sadegh Hedayat.
L'absence cruelle d'une figure paternelle hante la narratrice. Une attirance
obsessionnelle pour les bibliothèques détruites par le feu ( dont elle a
fait le sujet de sa thèse, jeune) et sa fascination pour ces deux écrivains
talentueux lui offre une identité, une existence à travers les mots,
l'oeuvre de ces deux artistes.

Luce Notte, notre narratrice est comme une sorte de muse, d'inspiratrice pour ces deux artistes... rôle qui lui confère une identité...Elle, fille de personne, et en recherche d'un père idéal !!

"L'obsession des questions concernant l'écriture était venue quelques semaines après ma rencontre avec Franz. Avant, il y avait bien les livres, les hémicycles fréquentés pour la thèse, cependant mon rapport à l'écrit restait celui d'une collectionneuse. Les bibliothèques étaient davantage des décors en trompe-l'oeil que des lieux où la pensée véritable s'exerçait.
J'y étais simple spectatrice. Je glanais des informations sur les salles de lecture qui avaient brûlé, interrogeant la nature de l'incendie. (...)
Les salles de lecture dévastées par les flammes, qui en plus avaient été le repaire d'auteurs ayant détruit ou souhaité détruire leurs travaux, gardaient ma préférence. "(p. 127)

Un texte exceptionnel qui exprime la puissance des mots, de la Littérature. Cette littérature, rempart contre le désespoir de vivre. le troisième texte que je lis de cette écrivaine, après "Ma bibliothèque, lire, écrire, transmettre" (Le Seuil, 2014) et "illettré" (Actes Sud, 2016); je retrouve des échos avec ces lectures antérieures, dont un noyau central souvent
traité par Cécile Ladjali: La Transmission....


Nous revisitons les oeuvres de Kafka et d'Hedayat....pour ma part, j'ai appris de nouveaux éléments comme celui concernant Hedayat,traducteur de Kafka, en 1948 d'après une édition française, qui a été également le premier en Orient à essayer d'analyser l'univers kafkaïen dans sa préface à "La Colonie pénitentiaire", intitulée "Le Message de Kafka" (1948)


"Les livres de Sadegh sont les plus noirs, peut-être les plus angoissants jamais écrits. Mais c'est justement parce qu'ils enferment la nuit qu'ils me donnent le jour. Il écrit pour que nous autres, lecteurs, nous ayons moins peur." (p. 85)

De très beaux passages sur "L'Oeuvre à faire" , mystère des mystères...ainsi que sur la part active, primordiale du Lecteur....

"Ce sont les lecteurs qui arrachent les oeuvres à la damnation, aux flammes de l'oubli, à la poussière des heures qui transforment encre et papier en sable. (...)
La conscience du lecteur est une digue entre un sens qui se perd et l'histoire qui danse devant ses yeux pour être recomposée par sa lecture. Privé de son lecteur, l'auteur n'est rien. Il n'est que le signataire d'un néant, d'une lettre muette, sourde et aveugle.
C'est tout le sang du lecteur qui irrigue la carcasse sèche des livres. (p. 150)

Je reste peu satisfaite de cette chronique...inévitablement, car ce roman est d'une richesse et d'une prodigalité incroyable quant à de vastes analyses, questionnements sur la Littérature, la valeur des mots, le très complexe acte de créer, comportant sa part de ténèbres... Une lecture exceptionnelle dont je suis enchantée !...




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Une incursion dans la vie de Kafka et de Sadegh Hedayat, un roman audacieux.

Luce Notte fait des recherches sur les bibliothèques pour sa thèse. Pour survivre pendant ses études, elle devient servante dans la maison des Kafka à Vienne. Déjà une atmosphère glauque, un père autoritaire et un fils tourmenté avec qui elle noue un lien d'amitié et qui lui permet de lire ses oeuvres.

Elle quittera Vienne pour Paris où elle tiendra une librairie et nouera une amitié avec l'auteur iranien Sadegh Hedayat. Un homme dépressif dont on sait qu'il finira par se suicider. Des retours en arrière sur la vie de Luce et des similitudes entre les destins des deux auteurs qui conjuguent une virtuosité littéraire avec de terribles tourments de création.

Je ne connaissais pas Sadegh, mais avec Kafka, il ne fallait pas s'attendre à la facilité et aux lunettes roses. C'est donc un ouvrage pas si facile d'accès mais c'est aussi une écriture magnifique et une profonde réflexion sur les processus de l'écriture.
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Une narration particulière pour ce livre, faite de flash back réguliers, heureusement clairement identifiés.
Le premier chapitre est finalement une sorte d'épilogue, et c'est à partir de cette date Paris, la nuit du 1er au 2 avril 1951 que nous allons effectuer un parcours rétroactif.

Luce Notte, fille de personne, fille née de père inconnu, élevé par le compagnon de sa mère qu'elle affectionne particulièrement, rêve d'écrire une thèse mais de basse extraction, ses chances de devenir docteur ès lettre sont minces. Etudiante enragée, grâce à ses excellentes notes au baccalauréat, elle obtient une bourse et part étudier à Prague. Bien qu'elle soit boursière, elle doit travailler pour réussir à payer ses études. Et c'est ainsi qu'elle débarque comme jeune fille au pair dans la famille de Kafka. Elle se lie d'amitié rapidement avec Franz, jeune homme de son âge et lui aussi plus intéressé par les études littéraires que par un travail de gratte papier dans une compagnie d'assurance.

On retrouve Luce 40 ans plus tard à Paris. Elle a réalisé sa thèse, a ouvert une librairie dans laquelle, un soir, par hasard, elle rencontre Sadegh Hedayat, écrivain iranien, fuyant la censure de son pays.

Voilà grosso modo la trame du roman.

Parce que finalement cette histoire n'est qu'un prétexte pour écrire de merveilleuses pages sur les affres de la création, la douleur des auteurs obligés de travailler le jour pour gagner de quoi vivre, et tenter d'écrire le soir, la nuit, pour se réaliser réellement dans ce qui est leur vraie vie, la littérature.

C'est un roman totalement inclassable, tant l'autrice nous parle avec fougue et justesse de la difficulté d'écrire, de l'incompréhension des proches, de la douleur de la censure, du doute qui assaille les auteurs, qui parfois en viennent à brûler leurs manuscrits persuadés qu'ils ne valent pas la peine d'être lus.
C'est un texte foisonnant, complexe, écrit dans une langue riche. Elle nous fait entrer dans la psyché des auteurs, il m'est arrivé de relire certains passages plusieurs fois pour m'imprégner totalement de leur détresse, j'aurais pu noter des pages entières d'extraits tant j'ai été happée par ses mots.
J'ai repensé à ma découverte l'an dernier d'Antonin Artaud par le biais du livre de Justine Levy, son fils.

J'ai redécouvert la vie de doute et de souffrance de Franz Kafka, j'ai totalement découvert celle de Sadegh Hedayat dont je n'avais jamais entendu parler, inutile de préciser que j'ai maintenant une furieuse envie de le lire.

Je n'avais jamais entendu parler de Cécile Ladjali, je l'ai découverte par l'intermédiaire de l'excellente émission de Cécile Coulon : la source, sur France Inter. Je ne peux que vous recommander de vous intéresser à elle et de la découvrir, sa plume ne vous laissera pas indifférent.
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L'écriture de Cécile Ladjali m'éblouit toujours autant ! Luce Notte étudie les autodafés et les bibliothèques qui ont péries par le feu à travers les siècles. Elle quitte Berlin en août 1912 pour s'installer à Prague où elle devient fille au pair dans la famille Kafka pour financer ses études. Franz, dépressif qui hait profondément son père tyran se cache pour écrire son Journal* et ce qui deviendra le Verdict. Quarante ans plus tard Luce est devenue libraire à Paris et va rencontrer Sadegh Hedyat qui a fuit l'Iran après la parution de son livre La chouette aveugle. Tous les les 3 sont à la recherche d'un père. Luce n'a qu'un bout de photo du sien et sa mère lui a fait promettre, avant de mourir, de le retrouver afin de le maudire de l'avoir abandonnée fille-mére. Franz, recherche un père qui l'aimerait et l'encouragerait dans son art. Sadegh, un père-patrie qui l'accepterait dans sa liberté de penser.
Mais avec le cadeau d'une valeur inestimable que les 2 écrivains vont offrir à Luce, elle va trouver bien plus qu'un père, une identité !
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C'est avec une plume d'orfèvre que Ladjali nous porte dans un chassé croisé de vie, d'introspection, et de peurs. le processus d'écriture et de création qui bousculent tant les écrivains est ici au coeur du roman. Une quête pour Kafka et l'auteur iranien Hedayat où la narratrice accompagne les craintes et les ombres de chacun avec virtuosité.
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C'est l'histoire d'une fille, Luce Notte, la fille de personne, et de trois hommes, mais pas n'importe lesquels !
Son père, d'abord, le grand absent, celui qu'elle n'a jamais connu, qu'elle cherche désespérément, qu'elle imagine, idolâtre, déteste aussi parfois d'avoir abandonné sa mère en emportant des livres, mais qui sera son « guide ».
Franz Kafka, ensuite, avec qui elle va partager l'amour de la littérature, lui qui aimerait ne vivre que pour ça, mais qui est contrecarré par un père tyrannique. Elle va l'écouter, lire ses écrits en cachette, le conseiller mais surtout le soutenir dans son travail d'écrivain, lui qui aurait envie de détruire tout ce qu'il a déjà tant de mal à coucher sur le papier. « L'écriture est une descente. On descend chercher les mots dans le monde des ombres. Comme Orphée. On voit les morts. L'effroi. Toute sa beauté […] On dompte les monstres. On survit à la nuit et on en revient. […] le travail de l'écrivain devient alors une ascension lente vers le jour. Vers la clarté. »
Et enfin Sadegh Hedayat, écrivain iranien rencontré dans le Paris des années 50. Lui aussi est en plein doute. Exilé depuis qu'il a écrit « La chouette aveugle », il perd pied, n'arrive plus à écrire et tout comme Kafka qu'il a par ailleurs traduit, il cherche à faire disparaître son oeuvre. Elle le tient un temps hors de l'eau, lui parle de Franz et de tant d'autres.
Pour Luce, dont le sujet de thèse est « les livres à l'épreuve du feu », elle a trouvé auprès de ces deux écrivains de quoi illustrer la construction et l'anéantissement. Dans leur folie, elle « les aide à sa manière. Je deviens le choeur de leur vie. le choeur qui chante derrière eux ».
C'est à la fois d'une tristesse immense et d'une grande beauté tant les mots sont choisis avec soin et délicatesse.
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