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EAN : 9782742773923
190 pages
Actes Sud (27/02/2008)
3.35/5   33 notes
Résumé :
Dans un manoir anglais, à la fin du XIXe siècle, Emily Pearl a trouvé une place comme préceptrice du fils d'un lord. Le petit maître est attachant, son père est un veuf d'une séduction puissante. Emily entame avec ardeur cette existence prometteuse. Mais la réalité resterait fade sans les mots dont elle la colore, et sans les lettres de sa mystérieuse sœur Virginia, partie vivre en Amérique. A son journal, Emily confie son espérance de la rejoindre, ses bonheurs et ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Emily et Virginia sont soeurs.
L'une est gouvernante au manoir de Lord Auskin, et la préceptrice de son fils.
L'autre, Virginia, a quitté le domicile familial le jour de Noël pour tenter de vivre selon ses choix, selon ses désirs. Et même si, pour cela, pour s'assumer, elle doit devenir fileuse et connaitre le sort d'une tâche rude, être exploitée dans l'Angleterre de la fin du XIXème siècle. Ces petites mains corvéables à souhait dans une industrie qui ne se soucie que bien peu de ses ouvriers, les femmes besognent au fil des heures, à la merci du contremaitre ou du directeur quand elles ne sont pas rivées aux métiers qui tissent, les enfants employés pour se glisser sous les métiers, et pour qui l'enfance n'a plus que la saveur du souvenir à l'heure où il faut gagner sa part de pain au sein de la famille.

Virginia a choisi la liberté, celle d'aller où elle le souhaite, celle d'être le seul maitre de sa vie et d'en choisir l'avenir, ne laissant pas le hasard décider de tout.
Emily est moins audacieuse et sa vie se résume davantage à se laisse porter, à aller où on a décidé pour elle, sous l'emprise des décisions des parents, du Lord et de ce fiancé qu'elle n'a pas choisi et de ce mariage qu'elle subit.
Son seul "ami" est son cahier, ce confident des pensées pour le meilleur et le pire pour elle et ceux qui la côtoient, dans lequel réalité et affabulations voisinent avec vérité et mensonge...

De leurs vies respectives, les détails sont distillés à travers les échanges épistolaires des deux jeunes femmes, lettres qui bientôt traversent l'océan puisque Virginia a gagné l'Amérique.
Et c'est un peu comme si s'allumaient quelques fenêtres de l'Histoire, quelques lumières sur quelques événements marquants : pour aborder l'abolition de l'esclavage sur les terres américaines, et les perceptions des modifications de la société là-bas et en Angleterre, pour évoquer Salem - lieu de vie pour un temps de Virginia et des siens - et l'ombre des sorcières comme un présage lorsque le nom de celle ville prononcé fait songer au pire, pour poser un regard sur Ellis Island et le poids de la solitude et du désespoir qui accablent le lieu, pourtant gage d'espérance et de liberté...

Virginia comblée de sa condition, même dans les moments d'adversité, femme aimée, dans sa plénitude, vivante, et mère attendrie.
Emily, amante sans attache si ce n'est l'affection qu'elle porte à son élève dont les jours sont comptés.
L'une avance, vit, l'autre observe, jalouse s'aigrit. L'une habite l'existence, l'autre ne côtoie et ne songe qu'à sa fin. L'une s'enthousiasme quand l'autre se laisse porter par ses sentiments et s'éteint, se recroqueville...
L'aventure assumée de l'une rend plus criante la fixité de l'autre comme deux faces d'un miroir qui réfléchit la condition féminine de l'époque.


Un récit, touffu, tout en circonvolutions, comme une lanterne magique dans ce qu'il dévoile et dissimule, dans ce qu'il laisse deviner pour mieux le réfuter. Une écriture choisie, tout en érudition qui happe le lecteur et le dirige jusqu'aux phrases finales qui modifient une dernière fois la perspective que pourrait à nouveau prendre ce récit.
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Depuis le dernier salon du livre à Paris où j'ai assisté à une intervention intéressante de Cécile Ladjali, j'avais l'intention de découvrir une de ses oeuvres.
Au hasard : Les vies d'Emily Pearl, édité en 2008 chez Actes Sud.
Résultat : bonne pioche ! Emballée par ce court roman, prenant et plus complexe qu'il n'y paraît au premier abord, je ne l'ai quasiment pas lâché une fois entamé.

Tout, de la couverture à la quatrième laisse penser à un roman de facture classique se déroulant dans un manoir anglais à la fin du XIXème siècle. On découvre rapidement qu'il s'agit du journal d'Emily, préceptrice du jeune fils malade d'un lord, séduisant veuf…évidemment. Elle s'y confie bien sûr, mais toute l'originalité ici vient d'un permanent chassé-croisé entre le quotidien confiné de la narratrice au coeur de la campagne anglaise et la vie de sa soeur Virginia, partie vivre en Amérique, relatée ( ou fantasmée, who knows ? ) grâce à des bribes de sa correspondance.

Emily rêve de liberté et de reconnaissance à une époque et dans un cadre qui ne sont pas précisément les plus propices pour une jeune femme de sa condition. Alors, progressivement, pour donner consistance à ses rêves et aider un peu le destin, elle devient manipulatrice, utilisant entre autre le pouvoir de son journal, intentionnellement laissé à la lecture de son amant…le veuf séduisant, évidemment. Les conséquences prennent une tournure de plus en plus tragiques, jusqu'à l'impardonnable.

Cécile Ladjali a selon moi un réel talent de conteuse, un style à la fois efficace et poétique, alternant phrases courtes et ciselées avec des descriptions plus fouillées, délicatement évocatrices.
La double construction de l'intrigue entre réalité et aspirations fantasmées d'une jeune anglaise et entre Angleterre et Amérique me semble être le point fort et particulièrement réussi de ce récit. Elle permet de pointer à la fois les entraves et convenances qui verrouillent alors la société anglaise, et tout particulièrement la condition des femmes en cette fin de XIXème et d'apercevoir les prémisses d'un nouveau monde en mouvement, tout en surfant en permanence entre "les vies d'Emily Pearl".
Je ne suis pas sûre finalement d'avoir réellement démêlé le vrai du faux dans cette pure fiction qui captive presque comme… une histoire vraie. Qu'importe, j'ai passé un très bon moment de lecture.
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Voilà un bon bout de temps que je possédais Les Vies d'Emily Pearl, j'ai donc profité de cet été pour le lire (enfin) !

Je dois dire que l'intrigue du roman m'a immédiatement plu, puisqu'elle raconte le destin de la jeune Emily Pearl, de 1897 à 1899, engagée comme gouvernante dans un manoir Anglais appartenant à Lord Auskin, un veuf séduisant et intimidant. Dès le début, le lien avec Jane Eyre était évident ; pourtant, au fur et à mesure du récit, je me suis rendue compte qu'Emily Pearl était une personne bien singulière et différente de l'héroïne de Charlotte Brontë. En effet, dans son "journal intime", la jeune gouvernante nous décrit son quotidien, ses amours avec le maître de maison, sa complicité avec son élève Terrence, brillant et attachant, mais malheureusement condamné à une mort précoce ; bref, les évènements s'enchaînent et donnent beaucoup de rythme au récit, ce que j'ai beaucoup apprécié.
Ainsi, entre des parents superficiels et égoïstes, un fiancé niais et ragoûtant, et une soeur adorée, Virginia, partie en Amérique, Emily ne sait plus quoi faire de sa vie...Elle rêve de rejoindre sa soeur tout en restant profondément attachée aux êtres qui l'entourent en Angleterre. La fin est vraiment inattendue et vient, d'après moi, sublimer cette héroïne exceptionnelle, qui, jusqu'au bout de ses efforts, reste digne et courageuse...

Bref, j'ai beaucoup aimé cette histoire documentée, constituant une réflexion sur la condition de la femme au XIXème siècle, et qui, en l'espace de 200 pages, m'a fait rêver et m'a chagrinée à la fois...

A lire !!

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Cela pourrait ressembler à un roman de l'ère victorienne mais si l'époque , le lieu et le fond de l'histoire correspondent à la littérature de cette époque, la forme n'a rien à voir avec le style de Jane Austen pour ne citer que la plus connue ou Charlotte Brontë pour la similitude du contexte de son roman Jane Eyre : une jeune fille de condition modeste , gouvernante dans un manoir habité par un Lord veuf et séduisant et son jeune fils .
L'histoire est racontée sous la forme d'un journal intime qu'Emily laisse volontairement sous les yeux de Lord Askin et dans lequel elle raconte sa vie, ses échanges épistolaires avec cette soeur ainée Victoria qui a eu le courage de quitter sa condition d'ouvrière pour partir aux Etats Unis mais aussi elle y insinue des malversations des autres membres du personnel du manoir , allégations souvent mensongères mais qui entrainent le renvoi de la personne soupçonnée.
Ce journal est souvent décousu, il est difficile de différentier la réalité des nombreuses affabulations avec par moment un dédoublement de personnalité lorsqu'elle laisse la parole à sa soeur.
Car Emily n'est pas une héroïne agréable , elle est calculatrice, froide, et mythomane.
Aucun des personnages de ce roman n'est sympathique , en dehors de Terrence, le fils de Lord Askin mais pour lequel on ressent plutôt de la compassion pour son infirmité, c'est une victime.
Manquent pour moi le romantisme qui fait le charme de la littérature du XIX eme siècle anglais, ainsi que l'acuité particulière de ces femmes écrivains qui avec une grande liberté et un une modernité étonnante ont décrit les moeurs de leur époque.

Il y a des terres qu'il est difficile de fouler pour un écrivain de notre siècle.
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Angleterre, 1898. Emily Pearl entre au service de Lord Auskin en devenant la gouvernante de Terence, un garçon de 7 ans dont la mère est morte à sa naissance. de nature rêveuse et insatisfaite, elle rédige un journal dans lequel elle dépose ses frustrations, ses correspondances, ses souvenirs, comme un flux monocorde, sans ponctuation, mais avec de fausses accusations.

***************
Nul n'a omis de remarquer le style victorien de cette histoire, tragique histoire (je cite de mémoire Malice et Lou, mais j'en oublie - il faudrait que quelqu'un se dévoue pour réaliser une page qui présenterait tous les billets de lecture sous les titres des livres appréciés...!).

Les prénoms des personnages féminins : Emily (Brönte ?) , Virginia (Wolf ?), y donne une touche très époque victorienne... Que de clins d'oeil en effet. Emily se raccroche à sa soeur, véritable bouée de sauvetage dans la mare d'ennui dans laquelle elle patauge.
"Mon ennui est d'un seul bloc, comme une pierre que l'on jette au fond d'un puits."

Seul Terence semble important, car faible : il a besoin d'elle. Au début, elle se méfie d'Alec Auskin, le père, qui lui semble intouchable, question de rang.

Puis ils deviennent amants, un rapport très trouble les lie, une sorte de perversion de l'interdit. Mais Emily ne peut se satisfaire. Elle pense rejoindre sa soeur, émigrée en Amérique. Mais elle se marie avec un garçon qui l'indispose. le mariage a lieu le même jour que le remariage de Lord Auskin avec Anne. Anne n'aime pas les hommes et passe son temps à folâtrer avec ses maîtresses. C'est le côté comique du livre, car il y en a.

A travers le journal, on découvre Virginia, la rebelle, partie à Londres gagner son indépendance en travaillant à l'usine. Virginia tombe amoureuse d'un pasteur, ils émigrent en Amérique. Ils s'installent à Salem où ils déclenchent l'hostilité des autochtones et réveillent les esprits des sorcières.

Partout l'eau est présente : mare, pluie, neige, océan, orage, la plage, la pêche, la baignoire.

Une sorte de symbole purificateur, un désir de baptême, de renouveau.
"Souvent je pense aux vagues. Je les associe à ma soeur. C'est à cause de leur façon de caresser la plage, avec leur grands bras qui se replient et laissent sur le sable un film brillant. (p.139)"

Emily raconte dans son journal des petites anecdotes de la maisonnée, parfois fausses. Elle découvre qu'en médisant, en laissant traîner son journal à la lecture d'Alec, elle va déclencher des règlements de comptes, condamner des innocents à être mis à la porte. Son comportement ira même jusqu'à occasionner la mort. Drôle de puissance pour une frêle jeune femme qui se dit victime. Une victime qui se défend avec des mots, des armes invisibles mais pas moins efficaces.
Puis Emily se réveille.
"Je reviendrai à mon cahier. A tout ce qu'il y a de faux et de vrai écrit à l'intérieur. Je n'y écrirai plus que mon bonheur, ma joie d'être là et d'être juste. Je renoncerai à voyager. Je renoncerai à suivre les plumes, les trains, les bateaux. Virginia comprendra. Ma vie de femme et de mère est ici. Je l'ai admis. Je ne suis plus la même. J'ai changé. Je suis celle que je veux être. Enfin. (p.181)"

Un an passe. Terence dépérit. Il souffre même. Emily décide d'abréger ses souffrances. Raté. Elle provoque l'indignation de son amant qui la chasse. Ce sera le signal de départ pour Ellis Island, Virginia l'y attend.

Un livre désiré (cette formule n'est-elle pas un gage en soi ?) après la lecture du billet de Holly qui pourtant ne racontait pas l'histoire (mais quand Holly estime un livre, c'est qu'il a quelque chose de plus).

Un livre dévoré en quelques heures, je suis parfois exigeante avec les dénouements ! Néanmoins l'histoire me laisse sur ma faim. Je m'explique. Un style magnifique, certains paragraphes sont "trop beaux" comme disent les jeunes aujourd'hui. A en pâlir d'envie. Avec un talent pareil, j'aurai fait une héroïne admirable, or je trouve qu'elle "craint".

D'elle, on ne sait rien de réel au fond. Même le journal ne reflète -peut-être pas- la réalité.
Emily reste à la surface, elle y flotte, comme si elle avait peur d'être elle-même. Elle ne se voit qu'au travers de sa soeur, qui semble si insouciante. Ah ! quelle contrariété ai-je eu quand les soeurs se manquent de quelques jours autour de la tombe de leur parents !

Mais je dis que je reste sur ma faim, c'est que j'aime les histoires qui finissent bien. Je vais finir par croire que j'ai un fond romantique !
Tant qu'à faire, je vous livre ma version. Rien n'empêche qu'Emily soit parmi les survivants, non rien ne l'empêche !
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Le nom est-il l'identité, Emily ? Il l'est. Votre nom, votre titre décident de tout. Ils décrètent un monde entre vous et moi. Vous le savez bien. Chère Emily, je ne vous suis pas. Quand nous faisons l'amour, il n'y a plus qu'Emily et Alec...Oui. Il n'y a plus qu'eux, Lord Auskin. Mais vous conviendrez que les circonstances font qu'il nous est difficile de provoquer quotidiennement un tel contexte, afin que nos deux gentils prénoms triomphent des codes et des empêchements !
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Qu'est-ce qui nous appartient vraiment dans notre vie ? Que retient-on ? Que reste-t-il de tout ce que l'on aura décidé à notre place ? La joie ? La douleur ? l'acharnement à vivre ? La tentation du lâcher prise ?
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Elle est comme cela, Virginia. Un oiseau écorché. Têtu. Un piaf tout gris, qui n'ose pas dire qu'il aime.
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Souvent je pense aux vagues. Je les associe à ma soeur. C'est à cause de leur façon de caresser la plage, avec leur grands bras qui se replient et laissent sur le sable un film brillant.
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On saisit alors les fleurs, on pince les pétales entre nos ongles et, quand on obtient un nombre suffisant de confettis, on les lance par poignées dans l'air froid. Ils retombent comme une neige douce. Comme la pluie d'un mariage. On ne dira rien à papa, hein ? On ne dira rien à ton père. Allez, on file ! On a une promenade à cheval à faire, si je me souviens bien. Terence membrasse. Nous ne regardons pas en arrière. La tombe sans fleurs nous remercie peut-être déjà de ne pas avoir cru à sa réalité.
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Vidéo de Cécile Ladjali
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