Catherine Lamic se veut passeuse de mémoire. C'est donc à travers un recueil de témoignages qu'elle tente de nous livrer un portrait d'une France qui n'existe plus.
Les témoins choisis ont tous passé leurs vies sur les terres de l'ancienne Vicomté de Turenne, à cheval entre la Corrèze, le Lot et la Dordogne.
Ils étaient paysans, ouvriers, vignerons, commerçants, minotiers ou même parfois funambules.
Ils ont tous atteint un âge très honorable et ont vu le jour dans l'entre-deux guerres. A une époque où l'eau courante était presque une chimère, où le travail de la terre et l'élevage était le lot de presque chaque famille, où les parents, enfants, beaux-parents, petits enfants... se partageaient bien souvent un seul domicile, où obtenir un certificat d'étude était déjà une victoire en soi, où l'on commençait à travailler dès qu'on savait marcher. C'était donc une époque où le temps était rude mais où chacun, à sa façon, estime qu'il vivait mieux que sa descendance au 21e siècle.
J'ai beaucoup aimé ce recueil pour l'éclairage "vrai" qu'il apporte sur une région dans un passé à jamais révolu. J'ai été touchée par le fait que tous les témoins interrogés étaient encore vivants plus de 80 ans plus tard et j'ai été très intéressée par leur récit portant sur des activités qu'on ne met pas toujours en lumière.
Si le travail de
Catherine Lamic me semble d'une extrême importance pour que tout cet héritage humain ne tombe pas dans l'oubli, j'ai vraiment regretté qu'elle ait retravaillé les propos des personnes qui se sont confiées à elle. Bien entendu, ce n'était pas pour les détourner mais sans doute pour rendre l'écrit plus accessible mais cela induit le retrait de toute émotion. Reste donc un travail quasi journalistique où l'on ne sait pas déterminer si ce qui est écrit, pourtant à la première personne, a été énoncé par le témoin ou s'il s'agit d'une précision que l'autrice a ajouté pour éclairer le lecteur.
J'ai d'ailleurs détecté deux phrases parfaitement identiques dans deux témoignages différents, ce qui confirme que l'entièreté du propos n'est pas du fait des témoins.
Sincèrement, je pense que l'ouvrage aurait gagné à retranscrire fidèlement les propos, patoisant s'il le fallait, et à ajouter de manière claire dans le texte les éléments de contexte que l'autrice souhaitait insérer.
Cela reste néanmoins un ouvrage précieux pour ceux qui sont attachés à ces régions qui tentent de rester ancrées dans la terre et pour ceux qui savent que sans passé, il n'y a pas d'avenir.
Je remercie Babelio et les éditions Tertium pour ce passage de mémoire.