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Dernière page fermée sur une lecture bouleversante!

Bouleversée de revivre l'attentat qui m'a profondément meurtrie quand il a eu lieu, moins que l'auteur du roman bien évidemment, mais il y a, j'en suis persuadée, un avant et un après dans mon système de pensée.

Bouleversée par le long parcours de l'après, semé de dangers, de peurs, de douleurs .

Complètement retournée par la difficulté de tenir pour vivre en composant avec ses morceaux de corps et ses morceaux de vie.

Il y a là une image pas très belle mais très prenante, de la force qu'un homme doit trouver pour ne pas sombrer après la rencontre avec l'impensable. J'ai souvent pensé au retour des soldats meurtris au cours des pages, peut-être l'effet gueule cassée mais le vrai point commun c'est l'effroi qui menace de faire tomber dans la folie celui ou celle qui est transpercé par ce qui ne nous est pas concevable.

Il y a une multitude de références littéraires et artistiques qui m'ont donné envie de plonger dans la bibliothèque du monsieur, une culture qui lui offre des mots, des images, des béquilles, où il puise la capacité de transcender les souffrances en tout genre, la culture comme une arme pour vivre.

J'ai beaucoup pleuré, les mots ont cet effet là sur moi, et ce livre ne m'a pas encore donné toute sa puissance, il va longtemps errer dans mes pensées, livre fermé mais mots qui vont vivre encore longtemps en moi.

Un livre à lire.
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Un livre brillant, intelligent, terriblement lucide et humain.
Le parcours de reconstruction de Philippe Lançon, rescapé de l'attentat de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015, terriblement défiguré, qui va subir de multiples interventions chirurgicales et greffes.
Je vais être brève car de très belles chroniques ont déjà vu le jour.
Mon avis :
C'est un texte bouleversant sans être larmoyant, puissant et sensible.
Et toujours en écho, un baume, un secours : la littérature et les arts ; les livres lus, les pièces de théâtre qui l'ont marqué, les visites au musée dès qu'il peut marcher un peu et s'évader.
Bien sûr, il faut s'accrocher pour éviter de se perdre dans le labyrinthe des mots, des références qui sollicitent (ou pas) notre mémoire, c'est aussi une lecture exigeante qui requière de la concentration.
J'ai franchi cet obstacle et j'ai pris un grand plaisir de lecture et une belle leçon de vie.
Chapeau Monsieur Lançon !
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Plus de 140 critiques déjà ! Je vais donc faire court. Ce livre est le récit de ce qu'a subi Philippe Lançon, depuis la veille de l'attentat dans les locaux de Charlie Hebdo, jusqu'aux derniers jours de sa reconstruction physique et psychique. Ayant découvert l'écriture de Philippe Lançon dans les chroniques de Charlie, j'ai retrouvé sans surprise son écriture excellente, juste et délicate. Le récit est poignant, lent comme l'est son chemin, intelligent comme cet homme discret et simple. Un témoignage édifiant et émouvant.
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Philippe Lançon est un des rescapés de l' attentat du 7 janvier 2015 qui a décimé en presque totalité l'équipe de Charlie Hebdo. Ceux qui, en ouvrant ce livre, n'en attendent qu'une relation ou analyse de l'événement, faite par un témoin privilégié, si j'ose dire, puisque étant sur place, au coeur de l'horreur, n'ont qu'à vite refermer cet ouvrage.
Car, ce n'est pas du tout de cela qu'il s'agit, même si, bien sûr, l'auteur raconte en détail cette matinée du 7 janvier 2015, le dernier jour de sa vie d'avant, et la sidération dans laquelle il s'est retrouvé, visage fracassé, témoin du massacre de ses amis, la cervelle de l'un d'eux à portée de main.

Ce livre, c'est un témoignage, c'est la renaissance de Philippe Lançon, ayant survécu à cette monstruosité et devant se reconstruire, au sens premier du terme, aussi bien physiquement que psychologiquement, malheureux pantin, entièrement livré aux soins et expérimentations du monde médical et se débattant avec et contre sa douleur.
Utilisant toutes ses ressources mentales, caparaçonné dans sa bulle pour survivre, convoquant à sa rescousse son héritage musical et littéraire qui lui permet de se transcender, Philippe Lançon nous délivre une extraordinaire leçon de courage.
Comment survivre à l'horreur absolue, quand on a vu s'écrouler le monde autour de soi ?
Comment trouver au fond de soi les ressources pour "revivre"
Comment supporter les longs mois de souffrance, d'interrogations .....

Philippe Lançon raconte la lente, longue et douloureuse reconstruction de son apparence tant physique que mentale, au cours de ses plus de 200 jours d'hospitalisation, ses multiples opérations de reconstruction faciale et sa longue rééducation..... et trouve moyen d'ajouter quelques touches d'humour dans la relation de son enfer quotidien !
Ce témoignage exceptionnel est porté par une écriture magistrale, précise et efficace, douloureuse et poétique, sensible, qui emporte le lecteur dans un torrent d'émotion.
A lire !
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Le lambeau | Philippe Lançon

Cette lecture m'a accompagné plusieurs jours. Et elle ne me quittera jamais définitivement.

Lors du tristement célèbre attentat commis au sein de Charlie Hebdo Philippe Lançon est laissé pour mort, le visage à moitié détruit, sa mâchoire n'étant plus qu'un trou béant.

Au milieu de la souffrance morale et physique il y a surtout la finesse d'une plume incroyable qui va nous faire partager son combat, ses doutes, ses peurs...Véritable ode à l'amour, à l'amitié et à la famille.
Le ton n'est jamais plaintif, mais il ne se pose pas non plus en super héros.

Je suis admirative de sa capacité à ne pas céder à la haine non plus.
Admirative aussi de sa sagacité face à ce que la vie lui a réservée.
C'est sans aucune doute, un grand homme. Un grand homme pour un grand récit.

En cette période de covid-19 on ne peut que saluer et apprécier l'hommage incroyable rendu par l'auteur, tout au long du livre, au personnel hospitalier.

Admirable. Bouleversant. Précieux.



« Tout allait mal, mais tout irait mieux, donc tout allait bien »
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Ce récit est dans mon top dix des histoires qui marquent mon âme.
Voilà cinq ans, ils parviennent à tuer ceux qui caricaturent, ceux qui grossissent le trait, pour un public non pas avide de la facilité ni de la blague sans fond, mais un public qui souhaite garder un esprit critique, un public qui aime avoir un esprit éclairé sur les choses du monde. Un public, des lecteurs, des citoyens qui veulent regarder, lire les événements qui surviennent de par le monde à travers un autre média. Un public qui aime rire et prend les choses avec légèreté parce que pleurer à longueur de temps c'est fatiguant, rire soulage.

Ce public français refuse la pensée unique et les amalgames échafaudés rapidement, il refuse le diktat depuis longtemps. Ce public français garde les yeux ouverts. Ce public aime l'expression écrite comme orale, il en demande et en achète en permanence, c'est un besoin accolé à celui de boire un thé le matin.

Suite à cet attentat Monsieur Lançon prend le temps de donner sa version intérieure. Il commence un peu avant l'événement puis me fait vivre l'attentat en lui-même. Il m'explique ensuite ce mélange : calvaire, souffrance, déchéance de la bouche, culpabilité, résilience, guérison. Je l'en remercie, je vous donne à mon tour ce je retiens de ce récit stupéfiant.

J'écris ci-après quelques idées directrices qui marquent mon âme :

Le paradoxe : Monsieur Lançon est victime et pourtant il ressent de la culpabilité.

La haine : Elle est absente de toutes ces lignes, pas un soupçon d'appel à venger ces gestes très lâches. Cette irruption meurtrière ignoble sur des personnes sans défense peut provoquer une réaction en chaîne. C'est normal. Cette balle tirée traverse sa bouche, cette balle détruit sa bouche et ses dents, cette balle détruit son moyen d'expression. Il lui reste ses mains, sa pensée. C'est tant mieux.
La haine déconstruit. La résilience, sa prise de distance avec l'événement le sauve. Il ne s'occupe pas de trouver un coupable, c'est inutile. Pendant un moment, il se coupe de l'actualité immédiate. Il se concentre sur les opérations et sa guérison.

L'obsession : Ce cas n'est pas isolé des blessés à la guerre, il y en a beaucoup. Mais là l'explication est si précise que je pense à lui à ce qu'il endure, quand je conduis pour me rendre sur mon lieu de travail, quand je m'endors, quand je travaille ou que je fais la vaisselle. Un récit me fait rarement cet effet-là. Ce récit peut, peut-être, servir d'exemple pour tous ceux qui n'ont rien demandé à personne, pour tous ceux qui sont pacifistes, pour tous ceux qui souhaitent juste vivre sans souffrir de la bêtise humaine. Pour tous ceux qui dénonce la haine, pour ceux qui essaient de vivre en paix.

La forte empathie que je ressens pour le souffrant :
Je ne connais pas Monsieur Lançon, pourtant à partir du moment où il entre dans cette chambre à la Salpêtrière, je veux qu'il guérisse vite. Il m'explique comment il recommence à manger, à boire, à parler, à embrasser sa femme, à ne plus se cacher. Il recommence à moins souffrir. Voilà la démonstration de la puissance d'un récit fait uniquement avec du papier, de l'encre, et d'agitations neuronales. La puissance des mots paisibles et de l'art littéraire réside là.
L'effet sur moi est aussi puissant qu'un film de cinéma, ce n'est pas le même ressenti, c'est du même ordre. Les images qui restent après la lecture cela forment le souvenir ou l'absence de souvenir. En lisant ce récit je veux qu'il s'en sorte, je veux le sauver de son état défiguré, je veux qu'il retrouve une normalité. En lisant je le vois allongé là, il souffre puis guérit lentement, très lentement.
Sa division en plusieurs personnages : Monsieur Lançon explique très bien comment son cerveau lutte pour continuer à vivre. Il y a d'un côté, le patient, lui qui doit après cette opération faire en sorte d'avoir de nouveau une bouche prête à mastiquer, parler, et embrasser. Ce personnage doit cicatriser et se concentrer d'abord là-dessus, au risque d' heurter la sensibilité de son amoureuse.
De l'autre, l'enfant, lui qui se sent comme un gamin dépendant. Ce personnage est placé à l'horizontale, avec sa chirurgienne qui lui parle et le regarde d'en haut. Chloé devient son dieu temporaire.
D'un autre côté il est le roi, il reçoit allongé, son frère, ses parents, ses autres proches, son ex. Pendant un temps ces visites lui sont vitales, par moment, c'est humain, il veut qu'ils s'en aillent, il veut que tout ceci ne soit qu'un cauchemar.

La bienveillance et l'efficacité des soignants : Pour l'auteur, tous les membres de l'équipe chirurgicale, deviennent pendant quelques mois, des sortes de dieux. Ils sont bienveillants, vous me direz c'est un minimum, ils sont efficaces. Les décisions sont prises en concertation. L'auteur doit retrouver son visage et une nouvelle bouche. Il doit sortir du monde des monstres.

Le choc cinématographique : L'attentat, comment il survient dans cette salle de réunion. Ils sont dans cette salle concentrés sur divers sujets. Ils dessinent. Ils blasphèment. Ils parlent entre eux de Monsieur Houellebecque. Ils font des blagues comme d'habitude. Monsieur Lançon vit cela, il survit à l'irruption meurtrière, il y a cinq ans ce sept janvier. L'irruption meurtrière crée un avant et un après. Monsieur Lançon donne l'impression d'une abstraction. Pourtant l'intrusion tue. L'irruption reste marquée à jamais dans la mémoire de Monsieur Lançon et dans nos mémoires.
Je me souviens, comme pour l'attaque des tours jumelles à New-York, de l'endroit exact où je me trouve au moment où j'apprends cette ruée mortelle expresse. L'irruption est un temps hyper court, un temps violent inadmissible condensé à l'extrême, puissant.

Les conseils artistiques et musicaux : Monsieur Lançon est un esthète, il sait ce qui est beau, il sait partager, au cours du récit il distille ce qu'il aime, ce qu'il aime moins. C'est toujours utile d'avoir les conseils de quelqu'un qui en sait plus que moi sur l'art. Il me donne un substrat de ces connaissances. Cette transmission me fait plaisir. Monsieur Lançon écoute Jean-Sébastien Bach, il se rend au musée, c'est un homme cultivé, une partie de son récit me fait découvrir son intériorité culturelle.
Je sais un mieux comment il fonctionne, comment il pense le monde. Tout cela à distance, c'est une sorte de magie. Grâce à son goût pour l'art, il sympathise avec sa chirurgienne. Ensemble ils partagent leurs opinions et vont apprécier des représentations théâtrales en ville, dans Paris. Ils sont proches grâce à l'art. Par moment, c'est assez étrange, et bien que je ne sois pas journaliste, je m'aperçois que je pense comme lui, que mes points de vue sur l'art en général sont similaires au sien.

La division de son être : Monsieur Lançon se sépare. Son corps celui qui guérit, il s'occupe de retrouver une bouche normale pour manger, boire, parler. Son être professionnel doit se superposer par-dessus, pour qu'il puisse continuer à écrire et être journaliste. Son être social se réveil aussi, il prend plaisir à écouter les personnes qui lui rendent visite, sa compagne actuelle, ses parents, sa famille, son ex. Il prend plaisir à écouter leur récit, cela le raccroche au monde extérieur.

Le retour à l'enfance : Monsieur explique bien que son trauma le précipite vers un état infantile ou la dépendance s'introduit dans tous les gestes de son quotidien. Il endure aussi une inquiétude physiologique et matérielle permanente.
Ce n'est en aucun cas comparable, mais suite à un traumatisme violent, j'ai moi-même ressenti le besoin de retourner dormir auprès de ma mère, une nuit, de trouver ce besoin de protection. Ce besoin de protection réversible. La perte d'un être proche provoque des comportements infantiles, instinctifs, naturels. le trauma suite à un accident corporel très grave provoque une dépendance qu'il lui faut accepter puis dépasser.

La fuite de l'amour physique : L'auteur souffre trop pour ressentir de l'amour et faire ressentir à celle qu'il aime. Il continue à l'aimer, mais son esprit et son corps sont dédiés en totalité pour un moment assez long, aux nombreuses opérations, puis à sa guérison. Gabriela, sa compagne s'éloigne, l'attend. L'amour physique ne peut plus s'exprimer.

Le retour du désir respectif : C'est heureux, nos corps et nos esprits gardent en mémoire le plaisir qu'ils veulent de nouveau éprouver. Après quelques mois Gabriella et Philippe se retrouvent. Ils renaissent, en quelques sortes. Philippe Lançon refait l'amour, il redevient, grâce à Gabriela, une seule personne.

Ses gardes du corps : Pendant quelques mois l'auteur est protégé, il sympathise avec toute cette bande dévouée à sauver sa vie. Un jour le service achevé, il prend fin, cela crée un vide, rien d'étonnant.

La construction des phrases, le texte en lui-même : J'ai constaté un mélange de deux styles, un réaliste, un métaphorique. Parfois le récit s'amplifie du style poétique. Ce mélange influence ce que j'écris en ce moment. Des phrases longues. Monsieur Lançon passe par plusieurs chemins pour exprimer une idée simple c'est charmant, parfois lourd. Par moment j'ai lâché de texte, pour reprendre mon souffle. J'appréhendais la scène de l'attentat, parce que ces choses violentes, font ressurgir des sentiments innommables au tréfonds de mon petit être. le récit comporte quelques lourdeurs, quelques longueurs. Elles sont vite oubliées parce que la densité des informations et des émotions à faire passer est énorme. Il y a trente pages en trop.

Si vous souhaitez vous fabriquer une onde de choc inoubliable et des sensations nouvelles, vous avez, vous aussi, en vous-même, l'empathie nécessaire pour ressentir, l'empathie c'est une hormone humaine naturelle, je la nomme comme telle librement, c'est un sentiment. Ce témoignage vous apprendra.

Peut-être, les êtres humains aux kalachnikovs, peut-être ceux qui portent ces armes pour tuer, ceux-là, ne possèdent pas ce sentiment d'empathie pour leur prochain. Ils ont supprimés l'amour en eux. Ce n'est plus une de leur composante.
Leur plaisir s'exprime autrement.

Si vous souhaitez vous rapprocher et entrer en partie dans l'âme de Monsieur Lançon, si vous souhaitez guérir avec lui, ce témoignage vous plaira.

Cet attentat est un évènement sur le chemin que trace la haine, il est une des conséquences de ce qui est contraire à l'amour. En parallèle d'un chemin amoureux, vertueux et constructif, un autre chemin voué à la dévastation et à la haine est née. Les deux chemins existent depuis la nuit des temps. Ces deux chemins sont suite d'évènements, ils sont thèse et antithèse, plaisir et déplaisir, parfois ils s'entrechoquent. C'est la synthèse. le déplaisir est frustre. C'est alors un désastre. le déplaisir se régénère toujours. Il profite de l'absence de plaisir. le déplaisir remplace l'amour que l'on éprouve naturellement pour son prochain par des armes et une frustration permanente.
Le déplaisir prend plaisir à détruire, à tuer les autres, il prend plaisir à se tuer lui-même.

J'écoute de la musique en lisant. C'est bon pour ma concentration. J'écris aussi sous musique. Pour la séquence de l'attentat, l'angoisse arrive, l'angoisse est palpable, j'écoute à ce moment la bande originale du film Eyes Wide Shut, de S.Kubrick.
Les deux images se superposent. Il y a paradoxe entre ce qu'exprime cette musique au moment de l'orgie de plaisir, et l'irruption des tueurs qui massacrent les hommes et les femmes sans défense. Pour Monsieur Lançon, ils sont deux jambes et un bruit assourdissant.

Monsieur Lançon me conseille pour d'excellent choix musicaux. Des choix de musique classique. Ainsi je découvre l'Art de la fugue de Jean-Sébastien Bach, interprété par Zhu Xiao Mei, au piano. Puis j'explore l'art du pianiste Italien Maurizio Pollini. du début à la fin de cette lecture savoureuse, mes choix vont vers d'autres musiciens talentueux. En parcourant ses lignes j'aime écouter le piano de Didier Squiban puis le jazz éthiopien de Mulatu Astatke. Mon plaisir se décuple en écoutant un must, la mer de Claude Debussy.
Je vous félicite Monsieur Lançon. A travers la lecture de votre excellent récit. Je me forge une conviction. Je comprends mieux la sorte de croyance à laquelle je suis attachée. Je suis polythéiste. Mes dieux sont incarnés. C'est leur création que j'admire. C'est elle qui ravit mes cinq sens. Je n'admire personne en tant que personne, je ne le veux pas, c'est juste ça. J'admire le travail, j'admire l'activité, j'admire la dévotion à la tâche.
Mes dieux sont le résultat du travail des artistes. Je ne sais si je peux les nommer dieux puisqu'ils sont concrets. Ils me sont nécessaires pour donner sens, il m'aide à continuer à croire. J'apprécie, les gens de lettres, ceux qui écrivent, les musiciens et les peintres, les danseurs et danseuses, les acteurs, les actrices, les humoristes, les sportifs. Tous à leur façon décuplent le monde. Tous par leurs oeuvres laissent des traces ineffaçables sur mon âme. Mon âme, en redemande sans cesse. Une force bienfaitrice se situe au-dessus de tout ça, cette force anime tout ça, elle l'anime d'en haut, cette force, cette énergie, cette volonté, éclot sans cesse. A vous de voir si l'art vous fait cet effet-là. Pour moi c'est le cas. L'art, la création m'absorbe.

Question : A notre époque, le chirurgien devient-il une sorte de dieu ?

Monsieur Lançon, je vous remercie de m'offrir ce récit époustouflant de sincérité. Derrière moi, cette histoire devient un voyage que je n'oublierais jamais.






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Je suis un lecteur honteux, aujourd'hui.
Je n'ai pas réussi à terminer ce livre.

Il s'agit pourtant du témoignage de Philippe Lançon, à la fois victime et survivant de l'attaque de Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015.

Les premiers chapitres ont été éprouvants, pour ce qu'ils racontent. Les suivants l'ont été mais pour une raison différente : je me suis ennuyé, tout en culpabilisant de l'être face à ce témoignage d'un homme blessé, touché au corps et au coeur par un attentat qui lui a enlevé des amis, des collègues, et dans lequel il a failli perdre lui-même la vie.

C'est presque impossible de critiquer un tel livre, surtout pour en dire "du mal". Je n'ai pas envie d'en dire du mal, simplement faire part de mon ressenti après en avoir lu plus d'un tiers. Malgré un début tragiquement prometteur, j'ai fini par comprendre que ce livre n'était pas pour moi, que je ne serais pas emporté par les mots de Philippe Lançon, pourtant probablement salvateurs pour lui.

J'aurais aimé aimer ce livre et en dire autant de bien que certains lecteurs dont j'ai vu des chroniques très élogieuses, même si elles ne cachaient pas la douleur de la lecture. J'ai renoncé, j'en ai honte, mais j'aurais sans doute plus honte encore si j'avais fait semblant d'avoir terminé et aimé ce livre si particulier.
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Philippe Lançon fait partie des survivants de l'attentat de Charlie Hebdo. Gravement blessé au visage et aux bras, il fait le récit de ses longs mois de traitement et de guérison à la Salpêtrière puis aux Invalides (j'ignorais qu'il y avait un hôpital). Il est certes question de soins, de soignants, de patients « le patient doit être patient, et il doit l'être aussi vite que possible » Sous sa plume, l'univers hospitalier devient familier et plus humain car il évoque à plusieurs reprises les prénoms des personnes qui, avec professionnalisme et dévouement, ont pris soin de lui. S'il s'en remet tout particulièrement à sa chirurgienne Chloé, avec laquelle il tisse des liens privilégiés notamment du fait de leur complicité intellectuelle, il l'interroge aussi sur son manque de transparence. « En fait, toutes ces incertitudes et tout ce silence ne font que me mettre dans une situation de stress bien peu propice à la reconstruction, et je m'étonne que vous n'en ayez pas conscience, ou que vous preniez cela, peut-être, pour de simples caprices. Évidemment, ma vie n'est plus en jeu ; mais elle l'est tout de même. Plus il y a de confiance et de sécurité, mieux les choses se passent pour le patient. du moins, il me semble... Je me doute que vous n'avez pas toutes les réponses, mais je pense que vous devriez les écouter [les questions] et prendre un quart d'heure pour me parler clairement. Vous pardonnerez ce mail un peu ferme, mais je suis déçu et énervé ; je crois au rapport de confiance entre le chirurgien et son patient, et en tout cas entre vous et moi. Ni plus, ni moins. »

Outre la lente guérison de Philippe Lançon, il est question :
• de littérature : cette dernière occupe une grande place dans la vie de l'auteur. Il lit et relit Proust jusqu'au bloc.
• de famille : son frère, leurs parents se relaient à ses côtés. La présence de sa compagne Gabriela lui apporte tantôt du réconfort, tantôt lui pèse.
• d'amitié : c'est l'occasion de renouer le contact et de revoir des personnes perdues de vue depuis longtemps.
• de journalisme : il fait souvent référence à ses collègues et amis de Charlie Hebdo, à ceux de Libération où il publiera des chroniques durant son hospitalisation.
• de forces de l'ordre : sa chambre est gardée en permanence par deux policiers en faction qui changent régulièrement. Quand il a suffisamment de forces pour sortir se promener et/ou passer quelques temps hors de l'hôpital, il est sous protection.

Même si le sujet est grave et qu'il nous touche tant il fait échos à l'onde de choc éprouvée le 7 janvier 2015 et les jours suivant, j'ai aimé la musique des mots, la force de vie qui se dégage chez Philippe Lançon et surtout sa capacité à accueillir son état de rescapé. J'y vois un hymne à la tolérance et ça me donne de l'espoir.
« On n'échappe pas à l'enfer dans lequel on est, on ne le détruit pas. Je ne pouvais pas éliminer la violence qui m'avait été faite, ni celle qui cherchait à en réduire les effets. Ce que je pouvais faire en revanche, c'était apprendre à vivre avec, l'apprivoiser, en recherchant, comme disait Kafka, le plus de douceurs possibles. »
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Dans un attentat il y a la peur et la douleur. Pour Philippe Lançon la douleur n'est pas arrivée tout de suite et il a vécu cet attentat en pleine conscience. Nous suivons ensuite sa reconstruction physique pas à pas, accompagné par sa famille, ses amis, des inconnus qui ne le restent pas. Philippe Lançon reste plus pudique sur sa reconstruction psychologique, plus difficile à évaluer que le résultat des opérations. Mais on se doute que c'est encore plus compliqué quand il faut démarrer une nouvelle vie en ayant en tête la vie d'avant et les évènements qui ont tout fait basculer. Emouvant, parfois nostalgique, jamais désespérant.
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400 pages de reconstruction faciale, de rééducation, de terreur, d'amour, de mort. On pourrait penser que cela serait insupportable à lire, ce n'est pas le cas.
Philippe Lançon est un rescapé de l'attentat du 7 janvier 2005 à Charlie Hebdo. Il a eu la mâchoire arrachée, les bras et le main touchés par les balles.
Si j'ai un peu peiné au début à cause de la violence de la l'attentat, de son regard fixe sur le cerveau de Bernard Maris, j'ai peu à peu suivi Philippe Lançon dans son combat qui n'est jamais présenté comme cela. La dureté de ce qu'il a a vivre est telle qu'il ne se présente pas comme un héros qui aurait traversé des épreuves et en aurait tiré une philosophie de comptoir, non. Il est cassé, brisé mais il va vivre au jour le jour sa reconstruction comme un bon élève, discipliné. Il se cantonne au présent sans passé, sans avenir, il est dans un trou hors du temps et le lecteur que je suis à eu le sentiment d'être dans un bâteau à voile qui descend un fleuve. C'est long, parfois pénible mais on est dans le présent du balancement, l'écriture est hypnotique parfois, on est comme Lançon presque sous sédatif face à sa souffrance.
Philippe Lançon est cultivé, il aime la littérature, Proust, le jazz, Bach et tout cela va l'aider à faire face à ses dizaines d'opérations, des cicatrices qui ne cicatrisent pas (Une greffe du péroné pour reconstruire, la mâchoire, des morceaux de peau qu'on récupère sur la cuisse pour reformer les lèvres, les implants de dents...) . Son frère, ses parents, Marylin sont ancienne épouse, Gabriella sa nouvelle compagne, Chloé sa chirurgienne, Denise sa Kiné, les policiers qui le protège...tous on la place qui leur revient, celle de vrais béquilles pour l'aider à remonter la pente.
A noter que sur 400 pages, il n'y a pas une ligne de pathos et pourtant ce n'est pas « froid ». Bref, malgré où grâce la dureté du propos, c'est livre qui remet les idées en place.
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