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Citations sur Oeuvres Vives (25)

Lorsque j'avais douze, treize ans et que j'empruntais des romans à mon père, je me demandais comment on en écrit un. Interpelle-t-on le lecteur, comme le font parfois les auteurs malicieux? Y met-on des bouts de soi-même et des miettes de son savoir ? En ce temps-là, je composais d'abominables vers, pour dire en gros que la vraie vie est ailleurs. Je tenais aussi des carnets intimes, pour dire en gros que je n'avais pas ma place sur terre. (p.13-14)
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Premières phrases d'Oeuvres vives
Le suicide d’Antoine Sorel n’avait pas fait couler des flots d’encre. Les hommages rendus à cet écrivain peu répandu, qui s’était défenestré du sixième étage de son immeuble, étaient d’une discrétion frisant l’indifférence. La plupart des journaux s’étaient contentés de reproduire la mystérieuse injonction qui figurait à la fin du faire-part inséré dans un grand quotidien. Elle était extraite d’un fameux recueil d’aphorismes dont j’imaginais que le disparu se séparait rarement : « Il ne faut pas s’astreindre à une œuvre. Il faut seulement dire quelque chose qui puisse se murmurer à l’oreille d’un ivrogne ou d’un mourant. »
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Il était pour moi plus qu'un écrivain admiré: un porte-flambeau éclairant ma route. (...)
Les livres de Sorel dénonçaient la mascarade sociale (...) (p.57)
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Je n'aurais pu dire ce qui m'attristait le plus, de lire dans un journal qu'un homme avait attenté à ses jours ou de savoir que la littérature de Sorel ne l'avait pas empêché de se détruire. Je me représentais ses dernières heures, dans son sixième étage sûrement en mauvais état, au milieu des chefs-d'oeuvre de sa bibliothèque qui n'étaient plus des remèdes contre la lassitude de vivre. (p.20)
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Même si je n'étais pas fixé sur la façon dont j'allais me servir de ce premier témoignage, et même si je ne pensais pas que l'existence d'un écrivain se réduit à la somme d'anecdotes récoltées à son propos, Antoine Sorel, après cet après-midi et cette soirée passées à écouter Barbet, m'apparaissait moins désincarné (...) Il n'avait parlé que de ce qui l'avait amené à s'éloigner de ses semblables, sans être un Alceste drapé dans sa morgue et se croyant très au-dessus du commun. Il n'avait parlé que de son sentiment d'être, parmi ses prochains, un cas d'espèce, de ne pas avoir, contrairement à la plupart d'entre eux, une carapace qui l'aurait préservé des crises de conscience, de ne pas connaître cette absence d'émotivité qui l'aurait sauvé de bien des marasmes. Il prenait tous les risques et allait toujours plus loin dans l'exploration des territoires non encore défrichés, de telle manière que son inventévité effrénée le désaxait et l'emportait ver l'outre-monde. (p.54-55)
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Il n'avait que faire des distinctions. Il écrivait des romans qui échappaient aux lois du genre et n'espérait pas être acclamé par tous. Dans -Le Dernier Round-, l'un des protagonistes, un marginal en délicatesse avec des gens bien établis, dit qu'il nage contre le courant, seule façon de ne pas déchoir à ses propres yeux. (p.55)
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Il lisait (...)
la correspondance de Mallarmé où, en 1865, il écrivait à Henri Cazalis que tout avait concouru à son néant : il fuyait la solitude qui n'avive que les forts, il avait besoin de toutes les surexitations, celle de la musique, du bruit, de la vie, des êtres chers à la présence stimulante. Sinon, il se sentait, à vingt-trois ans, un vieillard fini. Antoine disait que, sans avoir le génie de Mallarmé, il serait voué très tôt à la même solitude, qu'il chercherait à la fuir de la même manière, tout en sachant d'avance qu'ellle serait sa plus fidèle compagne, et qu'elle tracerait autour de lui un infranchissable cercle de feu. (p.45)
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Il aurait lancé à une visiteuse incapable de clamer son pékinois jappeur : "Votre clebs, je vais en faire un méchoui s'il ne la boucle pas..."Qu'y avait-il de vrai dans ces racontars ?
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Tous, nous nous montons le bourrichon, dit-il dans un murmure. Sinon, il n'y aurait plus qu'à plier boutique; On se garde bien de trop réfléchir, on se jette à corps perdu dans des entreprises qui légitiment sa présence ici-bas, on se fixe sans cesse de nouveaux buts, semblables à ceux de tout le monde - une famille à fonder, une maison à acquérir, un poste à briguer ou Dieu sait quel autre hochet de la vanité, et on ne fait qu'aller de désabusement en désabusement.
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Elle se rappelait qu’Antoine lui avait souvent posté des cartes reproduisant des œuvres de Rodin – la première carte qu’elle avait reçue représentait Le Baiser, la dernière, la Tête de Camille Claudel. Il avait recopié au verso de la première un poème de René Char : « Beauté, ma toute-droite, par des routes si ladres, / À l’étape des lampes et du courage clos, / Que je me glace et que tu sois ma femme de décembre. / Ma vie future, c’est ton visage quand tu dors », et au verso de la dernière l’extrait d’un autre poème de René Char : « Je n’ai pas peur. J’ai seulement le vertige. Il me faut réduire la distance entre l’ennemi et moi. L’affronter horizontalement. »
(...) Maintenant encore, quand je pense à Antoine, je ne peux oublier que je l’ai aimé avec violence, pas seulement parce qu’il était jeune et que près de lui j’avais le sentiment d’avoir à nouveau vingt ans, mais parce que lui aussi m’a aimée avec violence, la violence de ceux qui ont en horreur les tièdes.
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