Sa table de travail couverte de notes sur l'Irlande, principalement, mais de notes aussi sur Paris et sur Montréal, l'autrice s'invente des histoires qui permettent de faire mention de ces bribes d'information.
Puisqu'il est question de l'Irlande, l'autrice se sent obligée de mentionner les patates et le pain noir, les United Irishmen, les 'coffin ships', le Titanic, les 'H-Blocks /
Bobby Sands et les grévistes de la faim / les 'blanketmen' / la grève de la propreté, les liens entre l'IRA et les Basques (!); elle se sent obligée d'expliquer que certains diront 'Derry' quand d'autres diront 'Londonderry', que certains, au sommet des monts Divis et Black, regarderont vers le Comté de Donegal alors que d'autres vont "embrasser de grands morceaux du puzzle impérial britannique". Il lui faut mentionner Yeats, il lui faut mentionner Heaney...
Puisqu'il est question de Paris, il faut rappeler la petitesse des chambres d'hôtel et des appartements, les tarifs et loyers exhorbitants des unes et des autres. Puisqu'il est question de Montréal en 1991, il faut mentionner PE Trudeau, la souveraineté,...
Sur prétexte d'une histoire centrée sur l'Irlande du Nord, l'autrice présente une suite d'épisodes entre un journaliste français qui joue à l'agent de renseignement et une journaliste québécoise 'teindue rousse' - ces épisodes donnent l'occasion de développer des descriptions qui ne font aucunement avancer l'intrigue (certaines s'enfargeant dans les fleurs du tapis, très précisément).
L'autrice aime ajouter des éléments olfactifs à ses descriptions - que ce soit le vent de juillet qui charrie, au nez des clients attablés au bistrot, des odeurs d'égouts et d'essence de voiture, ou François qui sent bon la transpiration, le détergent à lessive et la vanille, François, encore, qui, rentrant au matin après une nuit "blanche", pense à ne pas mélanger son odeur fauve à celle de son hôtesse, ou Anne, cette fois, qui, de petite taille, a donc le nez à la hauteur des aisselles d'hommes.
De nouveaux personnages sont ajoutés sans compter, alors même que la moitié du roman est consommée; le texte est lourd, sur-écrit, parfois confus et inconséquent, s'acharnant sur des descriptions de saleté, de gras, de sang, d'urine, de draps de lit qui n'ont pas été changés depuis plus d'un mois en souvenir de l'ex qui est partie...
À décharge, il est vrai que le premier paragraphe du roman démontre cette inconséquence de l'écriture: de son oeil valide, le prisonnier constate qu'il est "dans la boîte d'une fourgonnette banalisée qui filait doucement sur l'autoroute M2" - le lecteur poursuivra en personne avertie!