aussi bien écrit que passionnant
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Les forêts ne sont pas les seuls à craindre les tornades. On peut se retrouver couché par ses propres tempêtes, par les neiges de silence, par le travail des mots qu'on n'entend plus mais qui, profond sous l'écorce, forent jusqu'au cœur. Et quand, un calme revenu, on se redresse, ce doit être avec prudence et modestie. La cime détruite, tentons alors de repartir de souche avec le bouleau frère des fées, l'aulne qui veille aux gués de la peur, le frêne bienveillant aux amours incertaines, le chêne blanc surtout, foule d'amis malingres et tenaces des collines d'ici, qui donnent leur espérance à ces terres plus généreuses de cailloux que de blé, et punies d'abandon - capables de forêts, pourtant, comme nous autres de pardon.
Ainsi rejette Le livre des arbres.
Voici la forêt où les arbres perdent enfin leurs noms, où j'abandonne tout savoir, où je suis neuf et simple et nu, la forêt où j'aime aller recueillir à midi, tombant en paroles d'ombre sur mes mains, le dialogue des feuilles et de l'intarissable lumière, à la nuit une leçon de ténèbres sans larmes, sans terreur, la forêt, profonde parce qu'on vit en surface de la vie, mystérieuse parce qu'on en a chassé les dieux, terrible parce qu'elle est un premier degré de l'éternité.
Il reste à prendre le premier layon, à gravir la colline vers le bouquet d'ormeaux, à trouver, dans un vieux vallon, une yeuse un peu magique respectée par les bergers, à s'asseoir, à sourire, à écouter le vent.
"Qu'on ne s'attende pas à trouver ici, intact, l'intercesseur des deux mondes, l'arbre, ni chêne, ni saule, ni mélèze, mais cette volonté d'être chêne, saule ou mélèze qui fait une grande joie verte par toute la terre, et une raison de vivre pour écureuils, et une raison de mourir pour les étés. J'ai rêvé parfois, en écrivant ce livre, qu'à toute connaissance fragmentaire, à toute percée dans la substance du monde, répondît une tentative d'accéder à l'essence. Quelle paix possible sans ce double approfondissement ? Pas de science sans conscience mais surtout pas de science sans contemplation. Quelle monnaie de ferveur saurait payer ce que je crois posséder du monde ?"
Pierre Lieutaghi ou le Langage des Arbres
Pierre
LIEUTAGHI, jeune écrivain retiré à Forcalquier, en Haute Provence, pour être plus proche de
la nature, représente le berger dans la "Nativité 1969" de l'émission. Claude SANTELLI s'entretient avec lui à son domicile, à propos tout d'abord des vertus médicinales des
plantes, dans la
médecine traditionnelle, notamment le gui. Il explique la «doctrine des signatures » de la...