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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le roman d'un enfant ou les souvenirs de Pierre Loti.
Quelle joie de retrouver la belle écriture de cet auteur ! Une écriture douce, délicate, parfaitement construite et ornée de jolis mots désuets. Un rapprochement que je ferai volontiers avec celle de Marcel Proust. Un parfum d'antan suave et sucré.
Ha, les souvenirs d'enfance, quels précieux témoignages ! Même si ici Pierre Loti se garde bien d'insister sur leur exactitude. Il préfère les nommer « impressions » d'enfance et les auréoler du mot « roman ».

Il n'empêche, il nous embarque avec grand plaisir dans le jardin de son enfance au bord du petit bassin, construit à son intention par son frère. Il partage avec nous coquillages et étoiles de mer ramassés sur l'île (l'île d'Oleron où il allait en vacances) en compagnie de Véronique sa petite amoureuse d'alors. Il sait nous confier sa tristesse quand ce frère, âgé de quatorze ans de plus que lui et médecin militaire, doit partir pour les colonies exercer son métier.
Il nous amuse aussi par la description de son précepteur qui ne sentait pas bon et qui le dégoûtait bien de sa personne et de son enseignement. Et plus tard, ses années-collège seront elles aussi source de souffrance.
« Au milieu d'un flot d'enfants qui parlaient tous à la fois, je pénétrai dans ce lieu de souffrance. Ma première impression fut toute d'étonnement et de dégoût, devant la laideur des murs barbouillés d'encre, et devant les vieux bancs de bois luisants, usés, tailladés à coups de canif, où l'on sentait que tant d'écoliers avaient souffert. »

Il faut dire que Pierre Loti fut un enfant choyé et entouré de personnes d'un certain âge toutes dévouées à son service et son amour, et il le leur rendait bien. Mais d'être ainsi constamment cerné d'adultes, il fut un enfant très solitaire et peu façonné pour les vicissitudes de la vie.
« Trop tenu, trop choyé, avec un certain surchauffage intellectuel, j'avais ainsi des étiolements, des amollissements subits de plante enfermée. Il m'aurait fallu autour de moi des petits camarades de mon âge, des petites brutes écervelées et tapageuses, - et au lieu de cela, je ne jouais parfois qu'avec des petites filles ; - toujours correct, soigné, frisé au fer, ayant des mines de petit marquis du XVIIIe siècle. »
C'est sans doute pour briser ce carcan familial, en plus d'avoir un frère voyageur et un oncle ayant vécu en Afrique et donc attiré par des lieux exotiques, que vers l'âge de quatorze ans, il se décida pour faire carrière dans la marine.
« Mon esprit voyageait partout, dans les forêts pleines de fougères de l'île délicieuse (Tahiti), dans les sables du sombre Sénégal où avait habité l'oncle au musée, et à travers le Grand Océan austral où des dorades passaient. »

Une jolie lecture empreinte de profonde mélancolie à laquelle j'associerais un léger parfum de naphtaline.
« ...et ce livre aurait aussi bien pu porter ce titre : Journal de mes grandes tristesses inexpliquées, et des quelques gamineries d'occasion par lesquelles j'ai tenté de m'en distraire. »
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En 1890, Pierre Loti, dont la plume enchanteresse m'avait déjà conquise avec "Pêcheur d'Islande" et "aziyadé", offrait à son public un roman autobiographique exclusivement centré sur son enfance, comme le titre le laissait supposer. Dans une évocation forte et sensible de sa prime jeunesse puis de son adolescence, l'auteur revient avec simplicité, sincérité et tendresse sur ses vertes années.

C'est bien simple, j'ai cru lire Proust, l'ennui en moins. Comme dans le premier tome d'"A la recherche du temps perdu", le lecteur entre immédiatement dans l'intimité familiale de l'auteur. Les deux oeuvres ont d'ailleurs en commun de s'attarder sur les rapports entre le fils et la mère, entre le fils et la grand-mère, entre le fils et les camarades de jeux. Et si la madeleine de Proust est ici remplacée par les tiroirs de la table à ouvrage de la mère (tiroirs moins comestibles que la madeleine, convenons-en), le traitement du souvenir sensoriel est aussi poétique et efficace chez Loti qu'il le sera quinze ans plus tard chez Proust. Si je vous dis que cinq ans après sa parution, "Le roman d'un enfant" en était déjà à sa quarante-septième édition chez Calmann-Levy, cela peut donner une idée du succès remporté par l'ouvrage.

Loti exprime son objectif en termes clairs dans son avant-propos :
"Il se fait presque tard dans ma vie, pour que j'entreprenne ce livre : autour de moi, déjà tombe une sorte de nuit ; où trouverai-je à présent des mots assez frais, des mots assez jeunes ?
Je le commencerai demain en mer ; au moins essaierai-je d'y mettre ce qu'il y a eu de meilleur en moi, à une époque où il n'y avait rien de bien mauvais encore.
Je l'arrêterai de bonne heure, afin que l'amour n'y apparaisse qu'à l'état de rêve imprécis."

Et fidèle à son intention, il use de mots frais et simples pour décrire les mille facéties de l'enfance mais aussi pour aborder des thèmes plus graves tels que la solitude, l'absence du frère admiré, la prostration de l'étudiant, les incertitudes quant à l'avenir, les questionnements sur le destin, la crise de foi, la fragilité de la vie et le mystère de la mort.

A travers ces échos du passé se devinent déjà les passions futures de l'auteur pour les horizons lointains, les voyages et l'exotisme auxquels son éducation protégée ne le destinait pas. Tel le papillon sortant de sa chrysalide, le petit Pierre opérera sa métamorphose qu'il décrit lui-même au chapitre XV par cette métaphore que je partage ici car il me semble qu'elle illustre à merveille le style et le contenu :

"Je vais dire le jeu qui nous amusa le plus, Antoinette et moi, pendant ces deux mêmes délicieux étés.
Voici : au début, on était des chenilles ; on se traînait par terre, péniblement, sur le ventre et sur les genoux, cherchant des feuilles pour manger. Puis bientôt on se figurait qu'un invincible sommeil vous engourdissait les sens et on allait se coucher dans quelque recoin sous des branches, la tête recouverte de son tablier blanc : on était devenu des cocons, des chrysalides.
Cet état durait plus ou moins longtemps et nous entrions si bien dans notre rôle d'insecte en métamorphose, qu'une oreille indiscrète eût pu saisir des phrases de ce genre, échangées entre nous sur un ton de conviction complète :
- Penses-tu que tu t'envoleras bientôt ?
- Oh ! je sens que ça ne sera pas long cette fois ; dans mes épaules, déjà… ça se déplie… (Ça, naturellement, c'étaient les ailes.)"


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Quand j'ai acheté ce livre, je ne savais rien de Pierre Loti, mais désormais je le connais bien, surtout pour son écriture et sa vie. Pour commencer, j'aimerais vous conseiller ce livre, à lire absolument, d'une qualité exquise qui ne vous fera pas regretter votre lecture.

Tout d'abord, dès les premières pages, nous sommes envoutés dans l'écriture de Loti, j'ai remarqué que son écriture était très à part, ce n'est ni du contemporain, ni du classique, c'est une écriture imprégné de nostalgie que nous dévoile Pierre Loti. On sent aussi que le thème du livre le touche à ce point, qu'il se sent écrire d'une beauté rare. J'ai donc été stupéfait du trésor qui se cachait derrière ce livre !! Je lirais sans doute d'autres de ces livres.

Les descriptions de l'auteur sont d'une bonté, on peut grâce à ces descriptions réellement imaginer les paysages qu'il nous présente. de plus, ces descriptions sont tellement précises qu'on peut apercevoir le lieu en question comme si on y était. J'admire désormais cet auteur pas très connu.

Le thème de ce roman est bien sur l'enfance de l'auteur, il dit lui même que c'est une de ces oeuvres les plus intimes, donc, en lisant ce livre, nous entrons dans l'âme d'un enfant qui est une aventure superbe. Pierre était un enfant gâté, mais il nous relate seulement ses moments de doutes et de problèmes dans lesquelles ils nous présentent sa réaction. On découvre dans toute la lecture la nostalgie de l'enfance, il aimerais redevenir ce qu'il était.

Terminons notre analyse par l'esprit de l'enfant, au début, il est gâté et enfermé dans sa “prison dorée”, il ne pense qu'à ces parents et à sa religion, mais plus le temps passe, on arrive à lire les rêves de cet enfant très mélancolique, il rêve d'espace et d'Océanie, on découvre l'autre facette de l'enfant qu'on soupçonnait tant. J'ai tout simplement dévoré ce livre !!

J'ai donc beaucoup aimé ce livre, cependant, je n'arrive pas à vraiment l'exprimer tellement l'écriture et l'histoire sont exceptionnels, je peux seulement vous conseiller de lire le livre et de vivre les moments que j'ai vécus pendant cette superbe lecture !! J'allais oublier, c'est bien sur un Coup de coeur !!
Lien : http://litteraire-en-herbe.b..
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Tous les écrits de Pierre Loti (des romans à son journal) méritent d'être lus, mais le roman d'un enfant est probablement mon préferé. Un livre doux amère, ou chacun se retrouvera.
La plume de Loti est unique en son genre, c'est un auteur inclassable qui mériterait d'être remis à l'honneur.
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Le roman d'un enfant / Pierre Loti (1850-1923) Académie française (1891)
de son vrai nom Louis-Marie-Julien Viaud, Pierre Loti fut écrivain et officier de marine. Né à Rochefort il passa son enfance partagé entre la maison familiale du continent et celle de l'île d'Oléron. de famille protestante, il conserva toujours un sens élevé de la morale et de la rigueur : « Au début de l'existence, mon histoire serait simplement celle d'un enfant très choyé, très tenu, très obéissant et toujours convenable dans ses petites manières, auquel rien n'arrivait, dans son étroite sphère ouatée. »
Ses souvenirs d'enfance sont ainsi relatés dans ce récit strictement autobiographique.
« Mes premiers souvenirs sont toujours de plein été lumineux, de midis étincelants. »
Loti est un enfant sensible et impressionnable ; pour lui le cocon familial est essentiel : «… le refuge naturel, l'asile contre toutes les frayeurs de l'inconnu, contre tous les chagrins noirs qui n'avaient pas de cause définie… Il est étrange que mon enfance si tendrement choyée m'ait surtout laissé des images tristes.»
Sa grand-mère perdit son mari à la bataille de Trafalgar en 1805 et un fils dans le naufrage de la frégate La Méduse au large du Sénégal en 1816. Ces deux drames ont longtemps hanté les nuits de l'auteur après que sa grand-mère les lui ai contés.
Son frère marin parti à Tahiti est son idole et le fait déjà rêver d'horizons lointains : « les colonies, qui, en ce temps-là, désignait pour moi l'ensemble des lointains pays chauds, avec leurs palmiers, leurs grandes fleurs, leurs nègres, leurs bêtes, leurs aventures… »
Les petites copines Antoinette, puis Véronique, enchantent ses jours de vacances. Puis Lucette et Jeanne. Et les belles vacances dans le midi chez l'oncle.
À 8 ans il rêve de devenir missionnaire. Il aime écrire mais pour lui tout seul, en secret et tient son journal: « J'y inscrivais, moins les événements de ma petite existence tranquille, que mes impressions incohérentes, mes tristesses des soirs, mes regrets des étés passés et mes rêves des lointains pays… J'avais déjà ce besoin de noter, de fixer des images fugitives, de lutter contre la fragilité des choses et de moi-même, qui m'a fait poursuivre ainsi ce journal jusqu'à ces dernières années…pour essayer de prolonger, au delà de ma propre durée, tout ce que j'ai été, tout ce que j'ai pleuré, tout ce que j'ai aimé. »
Il avoue que son enfance première a vraiment pris fin ce jour où il décida de son avenir : faire l'École Navale pour devenir officier de marine. Il a alors 14 ans et demi.
C'est ici que prend fin son journal d'enfance et le roman d'un enfant songeur qui ne veut pas grandir, plein de doutes et rêvant une vie d'aventures. Une enfance riche de tendresse, d'amitié et de mystère. Un beau texte d'une jolie écriture classique empreinte de nostalgie, de délicatesse et de lyrisme, avec de belles descriptions de paysages. Celle d'un vrai écrivain.
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L'ouvrage de Pierre Loti le Roman d'un enfant permet à l'auteur de livrer ses impressions sur son enfance, de décrire ce qu'il a aimé, ce qu'il a détesté.

Il partage ses joies : les journées passées avec ses parents le dimanche, les amitiés dans le cercle familial. Il évoque aussi ses souffrances.

Ce sont les maladies de certains de ses proches, des disparitions mais aussi l'école synonyme pour lui d'ennui profond.

Quel sera son destin ? Il essaye de retranscrire sa vision du monde d'alors qui était en point d'interrogation. Il y a une forme d'incertitude sur son avenir qui l'habite et en même temps des rêves, des attirances, des goûts plus prononcés.

On découvre qu'il était sensible à la poésie et avait pré ado déjà envie de courir vers des ports exotiques et le soleil. On comprend le rôle de son frère et de sa soeur dans son évolution intérieure.


Jeune il travaillait avec enthousiasme plus facilement la musique et la peinture que les devoirs à la maison de l'école. On voit le côté artiste ressortir, son goût pour l'imagination, les fantaisie de l'enfance. Ses mots simples et son écriture ressuscitent une part de son passé avec brio.

Un beau livre qui fait réfléchir sur le sens de l'écriture, de l'art et dénonce aussi certains dangers quand on cherche à conditionner plus qu'à éduquer la jeunesse.
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C’est amusant d’aborder ce roman à travers une édition destinée aux élèves de collège. Je redécouvre ces questions de français qui me paraissaient si hermétiquement obscures à 12 ou 13 ans. Du reste, je les lis encore avec une certaine angoisse et il y en a certaines auxquelles j’ai bien du mal à répondre 25 ans et des centaines de lectures plus tard !

Le choix des mots annotés est parfois curieux. Il y en a dont j’aurai bien aimé avoir la définition. Que sont les « broderies » d’un officier ? Qu’est-ce qu’un « béguin » en matière de chapeau ? Et d’autres dont la définition est curieuse. L’explication » d’élucubrations » m’a laissée perplexe.

Pierre Loti s’est lancé dans cette aventure à la demande d’Elisabeth de Roumanie. On sent qu’au début l’exercice l’ennuie. Il y met de la mauvaise volonté. Il est moqueur, condescendant envers l’enfant qu’il était « dans sa tranquille nuit initiale ». La mémoire se réduit à une mosaïque d’instants, des flashs.

« Me voici de nouveau entré dans le domaine du rêve qui s’efface, de la fumée qui fuit, de l’insaisissable rien » (34)

Puis peu à peu, l’écrivain prend le dessus, les souvenirs se mettent en place. Il montre une habileté remarquable à poser une atmosphère, une scène et ses acteurs en quelques pages. Le texte distille un charme de plus en plus enveloppant. Je me suis reconnue dans cet environnement propice aux solitudes rêveuses. La lecture coule toute seule, le monde de l’enfance est évoqué avec une justesse rare. Au final, Pierre Loti a composé un joli texte sur la mémoire, un roman infiniment plaisant et une évocation sensible d’un enfant qui n’avait pas envie de grandir et que l'école rebutait, à l'image de Jean Carrière dont je lis également l'autobiographie. Un récit délicat qui mériterait de s'émanciper des éditions scolaires.
Lien : http://versautrechose.fr/blo..
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Voilà un grand écrivain injustement oublié me semble t-il! Contemporain de Proust, il a été obsédé comme lui par le temps qui passe et s'acharne à détruire nos amours. Dans ce "roman" Pierre Loti s'attache à décrire les gens qu'il aime et notamment sa mère. Il ressuscite des moments précieux de son enfance heureuse et déjà angoissée par la fuite des jours. L'écriture est harmonieuse, vivante, un grand style simple et évocateur. Il faut lire ce beau livre ainsi que "Prime jeunesse"... tentatives de tenir à distance "la reine des épouvantements" comme Loti nomme la mort.
Lien : https://montmartre-secret.com
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