Méta, Raphaël, Pauline, Marianne, Assia, Mathias, Émeric, Antoine... Tous avaient des rêves, une façon de voir le monde atypique, des projets plein la tête. Ils voulaient réussir leur vie, sortir du cadre strict de l'existence et s'épanouir dans l'art (littérature, peinture, cinéma, philosophie). Et pourtant, on les retrouve là, sur le carreau, essayant de rebâtir cette vie qu'ils pensent avoir ratée.
On ne sait jamais si l'auteur veut nous faire rire ou nous faire pleurer. On ne sait pas si faut s'amuser de ces personnages enfermés dans leur monde d'artistes, qui perçoivent une réalité différente, décalée. On ne sait pas s'il faut les envier, tous ces jeunes à la culture large, infinie, qui peuvent disserter sur l'art pendant des heures, ou communiquer par énigmes littéraires. Ils sont à la fois fascinants et désespérants, tout comme le monde qui les entoure et qui s'effondre lentement autour d'eux, ne leur laissant plus de possibilités pour réussir.
On retrouve en Méta, et en l'auteur, dont le regard transparait à travers ses personnages, la vision des enseignants désenchantés, fiers d'avoir réussi de grandes études, de s'être familiarisés avec ces grands auteurs hermétiques pour la plupart des gens (
Lautréamont notamment), mais qui se retrouvent à enseigner
Baudelaire dans des lycées de seconde zone de la banlieue parisienne. On retrouve ce contexte difficile de lycéens prêts à se révolter à chaque instant, à faire violence dans leur quartier. On voit l'impact de ces épreuves sur l'esprit de Méta, trop habituée au confort de ses études littéraires et de ses voyages intérieurs, qui finalement, ne se débrouille pas si mal en milieu hostile.
Tous ces personnages sont attachants finalement, avec leurs contradictions. On va d'anecdote en anecdote, à nous de reconstituer le puzzle de leurs identités déchirées, de leurs espoirs déçus, de leurs projets avortés, de leurs idées non entendues.
C'est un roman fascinant, et terriblement intelligent, avec de nombreuses références aussi bien littéraires que cinématographiques, philosophies ou musicales. Il est parfois difficile de s'insérer dans ce récit, mais j'en garde un très bon souvenir : une galerie de personnages qui se bat contre la vie, jusqu'au bout, pour espérer gagner un jour une bataille.