Comment décrire ce roman découvert grâce à une opération commerciale sur les livres de poche (2 achetés = 1 troisième offert).
Maryam Madjidi a une écriture singulière, atypique, étonnante et captivante. Dans ce premier court roman elle nous raconte ses souvenirs d'enfance, l'Iran de la révolution, le don forcé de ses jouets au profit des enfants du voisinage au nom du communisme, l'exil en France, l'apprentissage de la double culture, le manque de l'amour de la grand-mère restée en Iran, la dure expérience de l'immigration pour une enfant de 6 ans, l'abandon de la langue maternelle, l'intégration, le refus du passé et d'une part de son identité pour mieux la retrouver.
Tout commence alors qu'elle est encore dans le ventre de sa mère, laquelle est prise dans un mouvement de révolte au sein de l'université, saute par une fenêtre pour échapper à la police et que miraculeusement le bébé de 7 mois qu'elle porte n'est pas blessé. Puis viennent le combat politique et la clandestinité, la peur de la police politique, les arrestations dans l'entourage, l'exil vers la France comme seule fuite possible.
Les chapitres sont très courts. Dans la première partie, première naissance, je les ai perçus comme des clins d'oeil, un regard furtif sur le monde, un éclairage court mais précis sur un moment, un sentiment, une situation.
Il y a trois personnages principaux : l'enfant et ses parents. Leur histoire est majoritairement contée par le regard d'une enfant, puis de la jeune femme et de l'adulte qu'elle est devenue. Dans les moments qui semblent les plus douloureux l'auteure semble prendre de la distance en les désignant par leur fonction dans la famille ("la mère", "le père", "la fille"), avant de revenir à la personnalisation ("Je", "nous"), amenant l'empathie du lecteur.
Le roman oscille entre plusieurs styles. Il se fait fable, récit autobiographique, poème, dialogue, journal. L'écriture est fine, drôle, sensible, poétique, notamment dans l'évocation des fantômes du passé, ombres d'apparence inquiétante mais toujours bienveillantes.
Un Goncourt du premier roman qui appelle d'autres récits et un coup de coeur pour une auteure que j'ai envie de suivre.