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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Jamais deux sans trois. Il y a eu "L'autre moitié du monde" de Laurine Roux, Prix Orange du Livre 2022, très beau roman et "Lettres perdues" de Jim Bishop, roman graphique d'excellente qualité, Prix BD Lecteurs.com. Voici maintenant "Bel Abîme" de Yamen Manai, Prix Orange du Livre en Afrique…véritable coup de foudre.

Il m'est très difficile de trouver les mots en rapport avec cette impression de perfection ressentie tout au long de ces quelques feuilles. Un petit livre par son épaisseur mais tellement grand par ses nombreuses et immenses qualités. Aussitôt reçu, aussitôt ouvert – par curiosité –, aussitôt un oeil jeté sur les premiers mots, les premières phrases, les premières pages jusqu'à la… dernière. Une fois commencée, il me fut, en effet, impossible d'en interrompre la lecture.

J'ai tout aimé :

L'écriture sublime, qui n'empêche pas certaines expressions plus familières, mais parfaitement adaptées "Maître Bakouche ? Vous plaisantez ? Vous pouvez me cogner comme l'ont fait tous les autres, mais je ne vous appellerai pas maître. Vous pouvez vous brosser, je ne le dirai pas, je ne suis pas votre chien."

L'utilisation d'expressions drôles qui cachent habilement des situations plutôt dramatiques "On a quand même gagné la démocratie ? La belle affaire ! Avant, on avait la peste, maintenant on a le choix entre la peste et le choléra. Avant, on avait les quarante voleurs, maintenant on en a quarante mille."

L'économie de mots qui donne à chacun sa juste importance.

Le récit à hauteur d'un adolescent de quinze ans, un adolescent qui ne supporte pas les injustices.
Son histoire d'amour avec Bella, un amour qui le poussera au pire.

Le parti pris du monologue, fait de questions et de réponses. Les personnages sont là, mais on ne les entend pas. Leurs pensées, leurs avis sont juste restitués par ce garçon qui demande, rapporte, explique, donne son propre sentiment.

L'analyse, fine, argumentée, détaillée de la société tunisienne.

Alors, oui, je sais, je ne vous ai rien dit de l'histoire. Je vous laisse la découvrir, bercés par la musique du texte, et avancer à petits pas dans l'âme du personnage principal.

Vous l'avez compris, j'ai été subjuguée par ce roman qui démontre s'il en était besoin qu'en très peu de mots on peut écrire des merveilles. Et "Bel abîme" est en ce sens un récit, certes triste et bouleversant mais merveilleux.

Et je ne peux que reprendre les derniers propos de l'auteur : "Dans ce monde de façades, ce qu'il y a de plus précieux est ce qui coûte le moins. Un livre, une étreinte, et l'amour, l'amour, ne serait-ce que celui d'un chien."

Lien : https://memo-emoi.fr
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La Rage.

{Bel abîme}
Yamen Manai
@editionselyzad

Entre nous , si j'avais 15 ans aujourd'hui, dans ce monde défiguré par la sauvagerie des hommes , je ne sais pas comment je ferais pour étreindre ma colère avant qu'elle ne dévore mes rêves…

La réponse est peut-être dans ce roman.

Le pitch :
Face à des psy et à son avocat , un adolescent tunisien raisonne sa dérive, verbalise sa violence et dénonce les injustices.
Surtout, il raconte l'amour.

C'est un texte court que j'ai lu dans un train entre Bordeaux et Paris, dans un seul souffle.

Je l'ai pris en plein plexus solaire.
Il rayonne.

Un chaos à la fois perturbant, beau et bruyant.
Il raisonne du bruit de la rage qui cogne le coeur des mômes et embrase les rues d'un pays.

Dans ce huis-clos qui libère la misère, l'humanité se fait chienne, amante inconditionnelle.

Ce texte m'a bouleversée , ce bel abîme. Hommage à la révolte .
Littéralement.
Dans sa fulgurance à s'arrimer au beau.
Monstrueusement.
Dans sa saleté balayée par les mots et les livres.

J'en suis ressortie émue, secouée par la poésie qui le drappe de lumière , la boule au ventre, aussi, et l'envie piquante d'hurler « mort aux cons» le coeur gros d'amour.
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Bel Abîme de Yamen Manai aux éditions Elyzad commence par ces quelques phrases : "Maître Bakouche ? Vous plaisantez ? Vous pouvez me cogner, comme l'ont fait tous les autres, mais je ne vous appellerai par maître. Vous pouvez vous brosser, je ne le dirai pas, je ne suis pas votre chien."

Au début, l'on ne connaît rien du narrateur. L'on comprend rapidement que l'homme à qui il s'adresse, et qu'il refuse par ailleurs d'appeler Maître, est, en réalité, son avocat. le récit est construit ainsi : les échanges d'un adolescent avec, tour à tour, son avocat et un psychologue. On se rend compte rapidement qu'il a fait quelque chose de mal, puisqu'il attend son procès, mais on ne sait pas exactement quoi, ni exactement pourquoi. C'est ce que nous offre l'histoire : les faits et les raisons, en passant par une critique saisissante et crue de la Tunisie. Un livre dur et intense qui raconte une histoire d'amitié fusionnelle entre un adolescent et son chien, dans un pays en proie à la violence, contre les animaux mais aussi contre les hommes.

Simplement : si vous êtes sensibles à tout ce qui touche à la torture des animaux, prenez vos précautions. Il y a quelques passages, qui, personnellement, m'ont vraiment mise en colère (même si le livre en lui-même dépeint une société injuste et désespérée).
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Yamen Manai à travers un jeune homme de 15 ans, nous montre un visage de Tunis peu enviable, une bien triste réalité. Il faut dire que le père, docteur en civilisation arabo-musulmane, se soucie peu de ses enfants. C'est la mère qui pourvoit aux besoins de la famille. Entre brimades à l'école et les coups du père sous les yeux de la mère qui ne dit rien, il se réfugie alors dans les livres. Jusqu'au jour où il trouve un chiot et décide de s'en occuper. Malgré le désaccord de ses parents, à qui il tiendra tête, il vivra trois merveilleuses années avec Bella. Cette chienne lui apportera tout l'amour et la confiance qui lui avaient manqués jusque-là pour se construire et grandir. Et puis un jour son père lui donne de l'argent pour aller au cinéma. Il ne lui a jamais rien offert. Il ne méfie et finit par accepter et réalise un de ses rêves. Mais à son retour il déchante vite et comprend que son père lui a joué un mauvais tour. Bella n'est plus là. Il part à sa recherche mais c'est déjà trop tard. La colère et la folie s'empare de lui.
Le roman est constitué des conversations avec son avocat commis d'office et le psychiatre chargé d'évaluer son état mental. Il n'a pas sa langue dans sa poche. Avec une sacrée répartie et intelligence, il répond à leurs questions et leur raconte comment il en est venu à tirer sur son père puis sur d'autres personnes, tous coupables. Il parle de la violence qui régit son pays, du manque d'avenir pour les jeunes, de la place des femmes dans la société.
En 110 pages, il raconte son amour pour sa chienne Bella et sa haine pour les hommes politiques notamment. Les agents municipaux sont chargés de tuer à coups de fusils, dans les rues, la nuit, les chiens errants « pour que la rage ne se propage pas dans le peuple ».
Un court roman percutant, qui n'est pas sans rappeler le livre d'Emilienne Malfatto, « Que sur toi se lamente le Tigre », également paru chez Elyzad. Chaque phrase claque. Chaque mot est essentiel. J'ai eu un gros coup de coeur pour ce roman puissant qui m'a totalement chavirée.
Lien : https://joellebooks.fr/2021/..
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Bel abîme renferme un cri de colère, une révolte. C'est un livre se lit d'une traite, en retenant son souffle. Dans un texte court et porté par une langue directe, Yamen Manai nous fait attendre la voix de la jeunesse tunisienne et sa colère.
Un adolescent est entendu par son avocat commis d'office et par un psychologue pour des faits graves qu'il a commis. C'est l'ocasion pour lui de déverser la rage et la haine retenu depuis si longtemps. Il raconte son enfance et l'absence de perspectives offertes par son pays. Au gré de ses entretiens on découvre son histoire et comment la violence imprègne sa vie depuis sa naissance.
A travers l'histoire particulière d'un adolescent tunisien en colère, c'est le portrait de son pays que l'auteur dresse. Il dépeint une société où, malgré la révolution, les adolescents ne trouvent pas leur place. le manque de perspective et de considération les laisse en marge de la société. Emprisonnés dans un état misogyne et autoritaire, ils cherchent des marques d'attentions et des raisons d'espérer. Confrontés à son avocat et son psychologue, le narrateur s'exprime sans filtre, il pointe les désillusion de la révolution. Sans compromis, sa voix est directe et brutale.
En contrepoint de cette violence, il y a l'amour, l'amour pour une chienne. Cette rencontre lui donne un but, une raison de lutter et de se battre. Animal paria des sociétés musulmanes, elle offre au narrateur sa première experience d'amour et de tendresse. Il trouve dans sa relation avec elle une forme de renouveau. La liens qu'il nouent avec sa chienne sont extrêmement touchant et bien décrits. C'est cet amour-là qui cause ensuite sa condamnation et le lecteur ne peut qu'être en empathie avec ce personnage constamment mis de coté et incompris.
La lecture de ce monologue fiévreux prend au ventre et bouleverse. On sent toute la rage et le désespoir du narrateur. L'écriture porte sa colère avec force. J'ai été vraiment touchée par ce court texte percutant. Elyzad est une maison d'éditions qui réserve plein des belles surprises.
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💗 COUP DE COEUR 💗

Un roman vibrant d'émotions et de fureur. Un texte court qui prend aux tripes et me restera longtemps en mémoire.

Dans un monologue captivant, un jeune homme raconte son histoire et le pourquoi de son emprisonnement. Il dévoile au fil des pages, la raison de sa colère et de son crime.

Cet adolescent malmené par la vie, ne connaissant que la violence et la brutalité, gronde en lui une révolte pour toutes ces injustices subies. Il trouve un peu de paix, de lumière et beaucoup d'amour en croisant la route d'une petite chienne, Bella, qu'il aime plus que tout. Mais dans une société où les chiens n'ont pas leur place, Bella est en danger.

Un récit d'une grande force. Entre cri de rage et cri du coeur…C'est beau, juste et très fort. Tout simplement magnifique, remuant et puissant.

A ne pas manquer !

Lien : https://leslecturesdeclaudia..
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La rage d'un adolescent face à une société oppressive, mais tant d'émotion et d'humanité habite le narrateur.

« Je revenais du collège quand j'ai rencontré Bella. Une après-midi de novembre, morose. Un garçon triste, chétif, une tête à claques, la tête baissée, la peur qui habite ses tripes, et parfois, l'envie d'en finir. On n'imagine pas ce que ressent un enfant quand il faut qu'il se fasse encore plus petit qu'il n'est, quand il n'a pas droit à l'erreur, quand chaque faux pas prend un air de fin du monde. Mais en l'entendant, ce jour-là, j'ai redressé le menton. »

Yamen Manai nous conte avec fougue le cruel éveil au monde d'un adolescent révolté par les injustices. Heureusement, il a Bella. Entre eux, un amour inconditionnel et l'expérience du mépris dans cette société qui honnit les faibles jusqu'aux chiens qu'on abat « pour que la rage ne se propage pas dans le peuple ».
Mais la rage est déjà là.

Prix de la Littérature arabe 2022
Prix Orange du Livre en Afrique 2022
Prix du Roman Métis des lycéens 2022
Prix Texto université Sorbonne Nouvelle 2022
Prix de l'Algue d'Or 2022
Prix La Passerelle 2022
Prix Flaubert 2022
Mention spéciale du Prix Ahmed Baba de la Littérature africaine 2022
Mention spéciale du Prix du Roman Métis des Lecteurs 2022
Prix Micheline 2021
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Les charges qui pèsent contre le narrateur sont lourdes. Adolescent révolté par les injustices et la violence de la société, le narrateur s'engage dans une véritable joute verbale avec son avocat, commis d'office.



Dans une société marquée par le sceau de la violence « qui nait dans les sommets et qui déferle et s'abat sans retenue jusqu'aux échelons inférieurs de la hiérarchie sociale », ses propres enfants, il retrace les événements qui l'ont mené à cette situation sans éprouver le moindre regret.

Entre un père distant obnubilé par les apparences ; une mère sous le joug marital, une société dominée par la loi du plus fort et du plus riche et un environnement marqué par la pauvreté, le manque de civisme et la rigidité, le narrateur, trouve son salut auprès de Bella, une chienne abandonnée qu'il a recueillie.



Entre les deux, un lien indéfectible se tisse au grand dam du père…



Aves une amertume certaine et une ironie grinçante, le narrateur prend vivement à parti les responsables de ce malheur, dénonçant à tout les strates, les travers de la société tunisienne.

La plume pleine de justesse, de sensibilité et d'humour réussit à traduire la rage contenue, la douleur de la trahison, le cri de désespoir de cet adolescent révolté et confronté à un monde cruel où même les chiens n'y échappent pas.



Une lecture intense, pleine de fougue, qui résonne encore quelques jours après avoir tourné la dernière page et qui confirme le talent de conteur de Yamen Manai qu'on ne présente plus et que je ne peux que conseiller (à nouveau !)
Lien : https://www.instagram.com/Ne..
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L'histoire : qu'il soit face à Maïtre Bakouche à au Docteur Latrache, à qui il s'adresse, on comprend vite que notre narrateur-héros est en prison. C'est un tout jeune homme, il a 15 ans. Et on va comprendre, à mesure de son récit, ce qu'il fait là et d'où vient la colère qui l'habite.



Mon avis : un très court roman d'une rare intensité. En quelques mots, l'ambiance est posée, on est en Tunisie, on est sur la route, on voit sa chambre. En quelques mots, les portraits brossés, le père, la mère, l'ambiance à l'école, l'ambiance à la maison, la poussière, le frère. En quelques mots aussi, l'intensité est dite, campée, solidement ancrée, et on s'y arrime. Incroyable ! L'écriture est littéraire, plutôt sage, très nette, et véhicule pourtant un mouvement permanent, presque une agitation intérieure contagieuse, une colère radicale qui se dit en quelques mots retenus. C'est magistral ! La rage contre l'injustice, l'amour saccagé, la violence, tout écorche notre héros, humain et vivant, et Bella lui a donné la force de se tenir debout et d'être digne quoi qu'il arrive. Difficile d'en dire plus sans rien révéler. Un livre magnifique !
Lien : http://ploufsurterre.canalbl..
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Le dialogue percutant entre un ado rebelle et son avocat. Toute la douleur d'un enfant mal-aimé, avec le soupçon d'une radicalisation islamiste, dans une société tunisienne en crise, ou la jeunesse rue dans les brancards. La cause du crime est habilement dévoilée seulement en fin de récit, qui se lit d'un trait. On pense un peu à "L'étranger" de Camus, pour la violence, la lumière du pays, l'écriture ramassée, la rage en plus. Un livre fort, qui peut toucher tous les publics !
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