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Jean-Marc Mandosio (Préfacier, etc.)
EAN : 9782844853370
160 pages
Allia (25/02/2010)
4/5   1 notes
Résumé :

La Grammaire générale et raisonnée (1660), plus connue sous le nom de "Grammaire de Port-Royal", est le fruit de la collaboration d'un grammairien, Claude Lancelot, et du philosophe Antoine Arnauld. Dès sa parution, ce petit livre fit grand bruit, inspirant de nombreux plagiaires et donnant lieu, pendant plus d'un siècle, à une longue suite de commentaires. Il est reconnu aujourd'hui comme l'un des ouvrages les plus important... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Petite précision : j'ai lu une édition de 1754, trouvée sur Gallica, et qui n'est pas claire (à éviter). Des « Remarques » ont été insérées par un tiers dans le corps du texte d'origine, elles allongent beaucoup le livre. Je ne sais même pas qui en est l'auteur. La citation que j'ai laissée sur Babelio en est tirée, j'ai scrupuleusement retranscris l'orthographe pour montrer que ce mystérieux auteur cherchait à la réformer, à la simplifier, pour la rendre plus adaptée au langage parlé.
En matière de grammaire, il y a les insupportables donneurs de leçons qui passent leurs temps à couper la parole pour signaler les fautes, des fous de la règle, pourrait-on dire. Apparemment le contraire de notre réformateur de 1754 qui voudrait inventer d'autres règles, mais ces gens-là sont en fin de compte de la même espèce, des gens d'opinions. C'est très bien les opinions, je suis ravi d'en connaître toutes sortes, ça permet de se poser des questions. Et puis, elles ont cet autre avantage de mettre en lumière, par contraste, la vérité, ou du moins sa recherche.
Les auteurs de cette grammaire de Port-Royal, M. Arnauld et M. Lancelot, sont des chercheurs de vérité, pas des donneurs de leçon. Ils n'ont pas écrit un manuel, mais un ouvrage quasiment linguistique pour découvrir et expliquer les lois qui régissent spontanément les langues, avec leurs fameuses exceptions et les évolutions d'une langue vivante. Voilà ce qu'en disent précisément MM. de Port-Royal : « Or, c'est une maxime que ceux qui travaillent sur une Langue vivante doivent toujours avoir devant les yeux, que les façons de parler qui sont autorisées par un usage général et non contesté, doivent passer pour bonnes, encore qu'elles soient contraires aux règles et à l'analogie de la Langue ; mais qu'on ne doit pas les alléguer pour faire douter des règles et troubler l'analogie, ni pour autoriser par conséquence d'autres façons de parler que l'usage n'aurait pas autorisées. Autrement, qui ne s'arrêtera qu'aux bizarreries de l'usage, sans observer cette maxime, fera qu'une langue demeurera toujours incertaine, et que n'ayant aucuns principes, elle ne pourra jamais se fixer. »
La fixité d'une langue passe par des règles établies consciemment, comme l'ont fait les écrivains français autour de 1600, sans cela nous aurions autant de peine à déchiffrer leurs livres que ceux écrits en langue d'Oïl quatre siècles auparavant. Si nous entendons encore parfaitement Racine et Pascal aujourd'hui, des élèves de Port-Royal, c'est parce que leurs aînés ont cherché des règles de grammaire. Ils ne les ont pas inventées, ils les ont fixées.
C'est une grammaire générale, beaucoup de comparaisons sont faites avec d'autres langues. Dans la première partie, il est rapidement question de la formation des mots. La parole est définie comme signes de la pensée et l'écriture comme signes de cette parole. Dans la seconde partie il est plus précisément question de ce qu'on appelle aujourd'hui la grammaire avec une analyse des noms, des pronoms, des adjectifs, des genres, du singulier et du plurier, etc. Oui, « plurier », c'est comme ça qu'ils disaient à l'époque, pourquoi dit-on « pluriel » aujourd'hui ? Mystère, auquel ne répond pas ce livre, mais il répond à des tas d'autres questions, sur des détails bien sûr, des éléments de langage qu'on utilise tous les jours sans s'en apercevoir.
Sur la théorie, ce qui m'a le plus interpellé, c'est l'analyse du verbe. Dans une analogie avec la logique il est considéré essentiellement comme « un mot qui signifie l'affirmation ». le verbe être est purement le verbe de l'affirmation, il correspond à la faculté de juger dans la logique. Mais tous les verbes, débarrassés de leurs attributs, servent essentiellement dans la phrase à affirmer. C'est intéressant au point de vue du fonctionnement de l'esprit humain. Pour faire un raccourci, verbaliser ce serait affirmer et donc signifier son jugement. Au commencement était le Verbe…
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
On peut donc entreprendre de coriger l'usage, du moins par degrés, & non pas en le heurtant de front, quoique la raison en ut le droit ; mais la raison même s'en interdit l'exercice trop éclatant, parce qu'en matière d'usage, ce n'est que par des ménagemens qu'on parvient au succès. Il faut plus d'égards que de mépris, pour les préjugés qu'on veut guérir.
Le corps d'une Nation a seul droit sur la langue parlée, & les Écrivains ont droit sur la langue écrite. Le peuple, disait Varron, n'est pas le maître de l'écriture come de la parole.
En effet, les Écrivains ont le droit, ou plutôt sont dans l'obligation de coriger ce qu'ils ont corompu. C'est une vaine ostentation d'érudition qui a gâté l'ortografe : ce sont des savans & non pas des filosofes qui l'ont altérée ; le peuple n'y a u aucune part. L'ortografe des fames, que les savans trouvent si ridicule, est plus raisonable que la leur. Quelques-unes veulent aprendre l'orthografe des savans ; il vaudroit bien mieus que les savans adoptassent cèle des fames, en y corigeant ce qu'une demi éducation y a mis de défectueus, c'est-à-dire, de savant. Pour conoitre qui doit décider d'un usage, il faut voir qui en est l'auteur.
C'est un peuple en corps qui fait une langue ; c'est par le concours d'une infinité de besoins, d'idées, & de causes fisiques & morales, variées & combinées durant une succession de siècles, sans qu'il soit possible de reconoitre l'époque des changemens, des altérations ou des progrès. Souvent le caprice décide, quelquefois c'est la métafisique la plus subtile, qui échape a la réflexion & a la conoissance de ceus mêmes qui en sont les auteurs. Un peuple est donc le maître absolu de la langue parlée, & c'est un empire qu'il exerce sans s'en apercevoir.
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Dans la présentation de Jean-Marc Mandioso (1997) :
Le siècle des Lumières a cependant montré que l'athéisme n'était pas incompatible avec l'usage de la raison. Quant à celui qui s'achève sous nos yeux, il a donné maintes fois la preuve qu'avec ou sans Dieu, les représentants du genre humains ne sont que trop enclins à se laisser berner par le premier sophiste venu; il n'est donc peut-être pas inutile de rappeler que la raison n'a pas disparu du registre des facultés humaines et que, de ce fait, le succès des manipulateurs d'opinion n'est jamais assuré.
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