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EAN : 9782746704374
178 pages
Autrement (15/09/2004)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :

L'empire du Milieu a ses raisons que la raison occidentale ne sait pas toujours. En avril 1999, plus de 16 000 citoyens chinois manifestent sous les fenêtres du quartier général du Parti communiste chinois. Ce qu'ils souhaitent ? La reconnaissance de leur existence et de leur option religieuse, qui est aussi une pratique : le Falungong. Emmenés par Li Hongzhi, les adeptes du Falungong, secte spirituelle issue du Qijong (une pratique an... >Voir plus
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Le 25 avril 1999, une dizaine de milliers de membres de la secte Falungong manifestaient en plein coeur de Pékin, sous les murs de Zhongnanhai, le quartier général du Parti communiste chinois. Ils demandaient la reconnaissance officielle de leur secte. Ils avaient organisé, dans le calme et la sérénité, la plus grande manifestation jamais tenue en Chine depuis 1982.
Maria Hsia Chang consacre un long chapitre à la présentation des dogmes de cette secte millénariste et des idées étranges voire franchement délirantes de son fondateur Li Hongzhi. Fondé en 1992, le Falungong (La pratique de la Roue de la Loi) est un pot-pourri syncrétique de taoïsme, de bouddhisme de religion populaire et de superstitions dignes de Matrix et de X-Files. Son chef spirituel - qui fut gardien de parcs en Mandchourie avant d'émigrer aux Etats-Unis début 1998 - n'hésite pas à proclamer l'existence de civilisations extra-terrestres clandestinement introduites sur notre planète. La cosmologie qu'il professe n'est pas moins fumeuse : l'univers que nous connaissons n'est qu'un parmi d'innombrables univers qui constituent un méga-cosmos aux frontières duquel se trouve « un vide absolu où rien n'existe » (p. 77). Ces univers sont reliés entre eux : « … le jour de votre naissance, vous naissez simultanément dans plusieurs dimensions de l'univers. L'ensemble forme avec vous une entité intégrée dont tous les éléments sont liés et connectés mentalement » (p. 78). Si ces idées peuvent sembler farfelues - d'ailleurs plus en France qu'aux Etats-Unis où Maria Hsia Chang s'est installée et où on ne plaisante guère avec la liberté religieuse - les mouvements de gymnastique conseillés aux adeptes de la secte inspirés du qigong, un très ancien système d'exercices respiratoires censés canaliser l'énergie vitale du corps afin d'améliorer la santé, ne sont ni dangereux ni subversifs.
"Confrontés à un groupe religieux relativement inoffensif comme Falungong, la plupart des pays - du moins en Occident - fourniraient à son chef un coin de rue, une caisse en bois en guise d'estrade, et le laisseraient parler" note-t-elle pertinemment (p.153). Or le pouvoir chinois a manifesté, à l'égard de Falungong, une étonnante nervosité. Il n'a eu de cesse de pourchasser ses membres, de les emprisonner, de les rééduquer, d'user de la contrainte voire parfois de la torture pour les forcer à abjurer. On dit que Jiang Zemin en personne, obsédé par la secte, avait fait le tour de Zhongnanhai le 25 avril 1999 pour observer les manifestants derrière les vitres teintés de sa limousine (p. 20). C'est lui qui supervisa la campagne de répression et mis sur pied, le 10 juin, une brigade spéciale. Des milliers de pratiquants furent arrêtés tandis qu'une propagande gouvernementale inondait les médias dénonçant tout à la fois l'irrationalité des dogmes enseignés par Falungong, sa nocivité pour les fidèles qu'il poussait parfois jusqu'à s'immoler par le feu et son caractère séditieux.

L'implacable répression qui s'est abattue sur Falungong témoigne, si besoin en était, de la brutalité du pouvoir chinois. Vingt ans après le printemps de Tienanmen, malgré l'extraordinaire développement économique, malgré l'ouverture du pays, la Chine reste dirigée d'une main de fer par un parti unique qui n'entend pas desserrer son emprise. Mais le plus intéressant dans cette répression est ce qu'elle révèle de ce pouvoir. Comme le montre Jean-Luc Domenach dans une introduction percutante, il a paniqué.
le pouvoir chinois a paniqué parce qu'il s'est souvenu que l'histoire chinoise était ponctuée par le renversement des dynasties impériales par des sectes millénaristes ou des sociétés secrètes, depuis la première révolte des Turbans Jaunes en 184 de notre ère, jusqu'aux soulèvements des Taiping et des Boxers au XXème siècle. Il a paniqué parce qu'il a compris que le ralliement de plusieurs millions de sympathisants, la plupart issus de la classe moyenne, était le symptôme d'un profond malaise au sein de la société chinoise. Il a paniqué parce que le succès de Falungong lui a montré que les laissés-pour-compte du développement économique (les personnes âgées, les chômeurs …), dégoûtés par une corruption omniprésente, aspiraient à une vie plus douce, plus humaine. Il a paniqué parce qu'il a réalisé que malgré sa vocation à tout savoir du social, il ne contrôlait plus cette société qui est en train, qu'il le veuille ou non, de doucement sortir du totalitarisme.
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