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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Si je devais résumer ce livre en un seul mot, je dirais « talentueux » tout simplement !

Voilà ma première immersion dans l'univers de Javier Marías et pourtant, je débute par sa dernière oeuvre, publiée – en français – quelques mois après son décès dans sa ville natale de Madrid, des suites d'une pneumonie.

« Tomás Nevinson » est le second tome d'un diptyque consacré à un agent secret, mi-espagnol, mi-britannique du même nom. Ici, c'est la vie de cet agent du MI5 qui est contée par le principal intéressé. Après avoir pris sa « pension », il est recontacté par son ancien supérieur pour une dernière mission un peu spéciale. Il s'agit de retrouver une femme, membre active de l'IRA qui serait impliquée dans plusieurs attentats de l'ETA mais dont personne n'a jamais su mettre de visage. Pour cela, il devra faire la connaissance de trois jeunes femmes dont l'une d'entre elles serait la terroriste.

Javier Marías, ce n'était pas seulement un écrivain, mais aussi un conteur hors pair. En plus de 700 pages, il parvenait à happer son lecteur dans tout un univers, mêlant des faits réels à de la fiction. Tout semblait tellement cohérent dans ses écrits que le lecteur se perd et se demande où est la frontière avec le réel et finalement, ne raconte-t-il pas un brin de sa propre histoire ?

C'est le genre de livre qu'on souhaite doucement savourer, tournant pianissimo les pages, sans se presser dans un moment hors du temps. Ce n'est pas le livre qu'on s'empresse de lire en deux temps deux mouvements, au risque de passer à côté de beaucoup de choses.

Doté d'un style d'écriture tout à fait singulier, Javier Marías offre un très grand roman dans lequel il multiplie les considérables digressions par la voix de son héros. Malgré qu'elles puissent sembler démesurées, leurs pertinences apparaissent ensuite aux lecteurs. Il est évident que l'auteur maniait parfaitement sa plume, par un travail de recherches conséquents en amont. Son talent tend à s'exprimer notamment par l'utilisation du pronom « je » pour les réflexions de son principal protagoniste qui se mue, ensuite, en « il » pour ses actions.

Le premier tome était paru en 2019 et s'intitulait « Berta Isla » du nom de l'épouse de Tomás Nevinson. Il n'est pas nécessaire de lire les deux tomes dans l'ordre. Mais après avoir découvert « Tomás Nevinson », vous aurez sûrement, tout comme moi, envie de vous plonger dans le second.

Il est triste à penser que l'Espagne a définitivement perdu l'une de ses plumes majeures du XX-XXIème siècle.
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Existe-t-il des circonstances où tuer un autre être humain est la meilleure solution? Quel est le devoir d'un homme face à celui ou celle qui, peut-être, commettra un jour des atrocités? Tomás Nevinson ne se pose pas du tout ces questions de façon théorique: plus ou moins retraité des services secrets anglais, menant une petite vie rangée à Madrid dans la fin des années 90; le voici prié de reprendre du service pour identifier une ancienne membre de l'IRA impliquée dans des attentats de l'ETA. Et, si il ne peut trouver de preuves suffisamment solides pour un procès, de la liquider.
Nous sommes ici très loin de la figure de James Bond, descendant son prochain à tour de bras sans aucun remord, et c'est un roman plus psychologique qu'autre chose, de digression en digression, tandis que Tomás s'insinue dans la vie d'une petite ville espagnole et tente d'identifier sa proie parmi les trois suspectes.
C'est un long cheminement, parfois j'avoue un chouïa trop long pour moi, une réflexion pleine de digressions sur l'Espagne, les Anglais, la culpabilité, écrite et traduite avec beaucoup de talents. Un grand roman, qui nécessite d'être lu dans le calme, et qui fait honneur à son auteur.
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Je n'avais encore rien lu de Javier Marias et ce roman a été une véritable révélation. Si l'intrigue est finalement assez courte, il s'agit de retrouver parmi trois femmes d'une même ville, celle qui pourrait être une dangereuse terroriste de l'ETA ou de l'IRA, compte tenu des liens supposés entre les deux organisation. Tête pensante des attentats très meurtriers qui ont secoué l'Espagne des années 80, et en particulier les attentats de Barcelone et Saragosse en 1987, elle doit être démasquée et livrée à la justice ou disparaître. le cours de l'histoire se déroulant dix ans plus tard, en 1997, l'assassinat du jeune conseiller municipal Miguel Angel Blanco est utilisé également comme élément dramatique.

A travers l'histoire des massacres de l'ETA et de l'IRA, Javier Marias nous entraîne, dans une vaste réflexion sur le meurtre « légal », le crime anticipé qui de son seul fait empêcherait des bouleversements planétaires. Ce fut le cas, par exemple, pour Friedrich Reck-Malleczewen, qui vouait une haine viscérale aux nazis et à deux reprises aurait pu éliminer Hitler mais ne le fit pas (il mourra à Auschwitz). L'élimination des responsables terroristes est le travail de l'ombre de ces espions, se substituant à l'oubli des peuples pour traquer les responsables terroristes car, dans cette lutte, la prescription n'existe pas. « Dans la lutte contre le terrorisme il y a des choses qu'on ne doit pas faire. Et si on les fait, on ne doit pas en parler. Et si l'on en parle, il faut démentir ». Ils sont de fait les gardiens de notre tranquillité et de notre bonne conscience.

Le livre est aussi une analyse de la décision au prisme du libre arbitre d'un individu, sous une forme souvent récursive faisant appel au mêmes évènements au travers de tragédies shakespeariennes, en particulier Macbeth, Richard III, ou encore la mort de Thomas Becket. Un humour quelque peu ironique, jouant avec les conventions d'une éducation à Oxford.

Enfin, C'est aussi un roman sur la loyauté à une cause, la défense du Royaume, à un chef dont la complicité et la proximité en font la personne la plus proche de vous car il est le seul à vous connaître vraiment.

La suite de la recherche de l'ancienne terroriste, la recherche de la preuve, la vie aux aguets du moindre signe et son épilogue, je vous laisse les découvrir. Et si vous vous demandiez, comme moi, pourquoi Gérard Philippe sur le bandeau de couverture, il faudra attendre deux bon tiers du livre pour le savoir.

Contre l'oubli, et pour le plaisir d'une belle et riche écriture, suivez les traces de Tomás Nevinson.
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C'est mon premier Javier Marìas, mais aussi son dernier, écrit quelques mois avant son décès. Bien que ce roman fleuve reprenne des personnages de Berta Isla, le fait de ne pas l'avoir lu n'a aucunement entravé ma lecture.
Tomás Nevinson, agent secret anglo-espagnol à la retraite anticipée, est rappelé en 1997 par son ancien supérieur du MI5, afin de retrouver une femme associée aux attentats sanglants de l'ETA, notamment celui du centre commercial Hypercor à Barcelone. Et de la mettre hors d'état de nuire.
Tomás, qui n'a cessé de jongler entre diverses identités lors de ses missions, jusqu'à reconstruire une autre famille en Angleterre, jusqu'à passer pour mort aux yeux de sa femme pendant plusieurs années, ne cesse de tergiverser lors des différentes étapes de cette mission qu'il finit par accepter, malgré son éducation traditionnelle qui l'empêche de faire du mal à une femme.
Ce n'est pas d'une seule suspecte qu'il s'agit, mais de trois femmes, débarquées dans une ville du Nord-ouest, toutes trois sans passé, toutes trois avec de potentielles origines irlandaises et formées par l'IRA.
Les digressions de l'auteur se mêlent aux hésitations de Nevinson, ou Centurión, qui est sa nouvelle identité pour cette mission. Elles m'ont parfois lassée, mais jamais éloignée de l'intrigue et de la richesse des réflexions. le libre arbitre individuel, le sacrifice, l'affection, la culpabilité, la grandeur et la supériorité de l'intérêt général sur les destins individuels entre autres, sont abordés avec brio.
Sans connaître le reste de son oeuvre, je sais déjà que je lirai d'autres romans de Marías. En espérant tout de même que les autres soient un peu moins dégressifs…
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Comme il est merveilleux d'habiter l'univers que Javier Marias nous a laissé. Même ce dernier ouvrage, publié peu avant sa mort malheureuse (septembre 2022), respire complètement l'esprit des romans qu'il avait publiés dans les décennies précédentes. Même le personnage principal et le narrateur, Tomas Nevinson, est le même que dans la plupart de ces histoires. L'espion britannique d'origine espagnole est de retour après une longue période. Il doit retrouver une femme nord-irlandaise qui a été impliquée dans un attentat de l'organisation terroriste basque ETA 10 ans plus tôt, mais qui s'est cachée. Cela semble suggérer un scénario sérieux, mais – comme d'habitude avec Marias – il est assez mince ; il faut jusqu'à la page 200 avant qu'il n'y ait une action. Jusque-là, Marias présente les observations et les réflexions de Nevinson dans des phrases allongées typiques pleines d'associations, de nuances et de détours, avec des réflexions classiques sur l'inscrutabilité des gens, sur l'ambiguïté morale de nos actions, sur la fausse apparence que chacun de nous met en place, le caractère insaisissable du mal, etc. Et ensuite, alors que Nevinson s'occupe des femmes suspectes, cette manière d'écrire très stylisée est maintenue, jusqu'au dénouement compris. On dit parfois du prix Nobel français Patrick Modiano qu'il a toujours écrit le même roman, chaque fois une variation sur le même thème, dans le même style. Marias, qui, à mon avis, méritait aussi sans aucun doute le prix Nobel, fait plus ou moins la même chose. Mais cela n'empêche pas que - bien que ses protagonistes soient souvent cyniques-morbides - tous ces livres garantissent un plaisir de lecture absolu.
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